«Alors qu'on nous apprend à concevoir le pays comme étant
confronté à des menaces hors de contrôle, nous réalisons
aujourd'hui que les mots "sécurité nationale" ont
souvent masqué le choix calculé de l'action militaire en vue
d'atteindre des objectifs politiques.
Nous ne voulons plus être
associés à de tels choix.
Nous refusons d'encore les
rendre possibles en fournissant docilement des soldats à l'appareil
militaire qui applique ces choix.
Nous refusons dorénavant d'être
mobilisés, d'éduquer des enfants à être mobilisés, de soutenir
des conjoints, des frères, des pères mobilisés, permettant aux
responsables du pays d'avoir recours à l'armée plutôt que de
chercher d'autres solutions.»
Ces paroles, pétries de détermination,
nous viennent d'un État en guerre: Israël. Elles n'en ont que plus
de poids. Et peuvent se révéler d'autant plus lourdes de conséquences
pour celles et ceux qui les mettent en pratique, les membres et les
proches de l'organisation Nouveau Profil (Profil
Hadash).
Les deux premières années d'activité de New Profile
(NP) ont essentiellement consisté en une information et une
sensibilisation continuelle des Israéliens sur les racines et les
conséquences d'une culture enrégimentée, corsetée par une
admiration du pouvoir et de la prouesse physique, élevant sur un
pavois le juif mâle formé au combat et accordant peu de valeur à
la vie des citoyens arabes.
Depuis le début de la nouvelle
Intifada, le mouvement a partiellement modifié ses priorités.
Rela
Mazali, de NP: «Alors que jusque-là nous
axions notre travail sur la société juive d'Israël, nous efforçant
d'y promouvoir un changement profond dans le sens de la «civil-isation»
et d'une réduction du militarisme, avec l'intifada nous avons éprouvé
la nécessité urgente de contrer le racisme israélien envers les
Palestiniens (en Israël même et dans les Territoires), de résister
à leur oppression flagrante. Un racisme et une oppression qui tout
à la fois alimentent le militarisme israélien et sont nourris par
lui.»
La dureté sans pareille des opérations
militaires et policières de l'État hébreu à partir de la fin
septembre 2000 a souvent été mise en parallèle, du moins dans les
médias «qui comptent», avec la montée d'un désarroi et d'une
incompréhension inédits dans la population israélienne. On nous a
dit et répété que les protestations des Palestiniens, spécialement
celles des citoyens arabes d'Israël au début octobre 2000, ont
laissé le champ libre aux seuls «faucons» partisans de la répression.
Tétanisés voire ébranlés dans leurs convictions, les défenseurs
de la paix et les mouvements de la gauche israélienne ont été réduits
à l'impuissance, lorsqu'ils ne cautionnaient pas le discours de la
nécessaire reprise en mains.
L'attitude de New Profile dès les
premières heures de l'Intifada bouscule sérieusement ce type de
représentation.
La circulaire d'information du
mouvement diffusée en janvier 2001 comporte un relevé très éclairant
quoique partiel des initiatives qu'il a entreprises ou auxquelles il
a participé entre la fin septembre 2000 et janvier 2001:
la
liste de diffusion internet de NP (en anglais) s'est transformée eu
une source d'information alternative de premier ordre sur la guerre
en cours, fournissant à un nombre d'abonnés en forte augmentation
des analyses, des positions et des faits passés sous silence ou à
peine évoqués dans les médias établis (pour s'y inscrire,
envoyer un message vide à NewProfile-subscribe@topica.com);
pendant
les manifestations de citoyens palestiniens d'Israël, NP a fait
pression directement sur le Ministre de la Sécurité Intérieure,
Shlomo Ben Ami, exigeant son intervention immédiate pour arrêter
les tirs policiers;
à
la suite du meurtre de Palestiniens d'Israël, et pour rompre
l'atmosphère de peur et d'hostilité entretenue par le gouvernement
et les médias entre Juifs et Palestiniens, des femmes membres de NP
ont rendu une visite de condoléances au domicile de Wissam Yazgad,
tué par la police à Nazareth (
lire
le compte-rendu de l'une des participantes
). D'autres visites de ce type ont eu lieu depuis, notamment à Umm
el Fahm et à Jat;
dans
la foulée de cette visite, NP a organisé une rencontre entre
femmes juives et palestiniennes à Ar'ara, pour discuter d'actions
communes. Elles décidèrent d'organiser une grande manifestation à
Wadi Ara, dont la préparation est devenue l'un des ferments de la
Coalition des Femmes pour une Paix Juste;
la
manifestation de Wadi Ara rencontra un impressionnant succès...
mais ne bénéficia que de peu d'attention de la part des médias
israéliens;
NP
a mis sur pied une manifestation devant la prison Hasharon contre la
détention de dizaines de jeunes Palestiniens et ses membres ont
pris part à un rassemblement au point de contrôle de A-Ram,
appelant à une intervention internationale dans les Territoires
occupés;
en
prolongement de l'activité de la Coalition des Femmes, le mouvement
a co-organisé la conférence et la manifestation de Jérusalem le
29 décembre 2000;
à
côté des actions de protestation, il a aussi commencé à
travailler conjointement avec les femmes de Wadi Ara dans la récolte
de dons et de soutien pour les Palestiniens assiégés;
NP
a élaboré un texte sur la responsabilité et les différents
visages de la militarisation de la société israélienne dans les
processus à l'œuvre à travers l'intifada. Ce document sert de
base pour sérier les priorités du mouvement à l'heure actuelle;
s'ajoutent
à cela des séances d'études (par exemple sur les liens entre
mouvements de libération nationale et mouvements de libération de
la femme);
et
évidemment un travail intense de soutien aux objecteurs de
conscience.
Nous nous attardons un peu ici sur ce
dernier aspect.
Le
parcours du non combattant
Malgré l'image souvent véhiculée
d'une population israélienne unie tel un seul homme (par conviction
ou par crainte) derrière ses «forces de défense», une large
opposition aux rôles assignés à l'armée se manifeste dans le
pays. Des milliers de jeunes femmes et hommes se soustraient chaque
année au service militaire ou à l'incorporation dans des unités
combattantes. Environ 25% des appelés sont exemptés pour raisons médicales
ou jugés «impropres» au service. Il est de notoriété publique
qu'un grand nombre d'entre eux ont en fait choisi de ne pas
rejoindre les rangs de l'armée, ne pouvant se reconnaître dans les
implications et le sens du service militaire de nos jours en Israël.
Une exemption pour cause de mauvaise
condition physique ou de santé précaire leur apparaît alors comme
la seule issue. En effet la loi israélienne ne prévoit pas de
droit à l'objection de conscience pour les hommes et le conditionne
sévèrement pour les femmes.
Tout jeune israélien ou israélienne
exprimant ouvertement l'intention d'agir en accord avec sa
conscience et s'abstenir d'intégrer l'armée est astreint à
comparaître devant un organe militaire nommé «Comité de la
Conscience» (sic), une institution censée représenter le Ministre
de la Défense et accorder en son nom les exemptions que lui seul
est habilité à autoriser. En pratique, ce comité, uniquement
composé d'officiers, n'octroie presque jamais de dispense et fait
surtout office d'alibi officiel face aux accusations de
discrimination portées contre le Ministre. Le comité a lui-même
admis récemment qu'il agit d'abord et avant tout en fonction des «besoins
de main d'œuvre des FDI (Forces de Défense d'Israël)».
NP a mis sur pied un fonds de soutien
destiné autant à financer l'appui juridique des objecteurs que
celui des femmes victimes d'une manière ou d'une autre de la
militarisation (celles par exemple qui ont subi un harcèlement
sexuel à l'armée).
Toute somme, si modeste soit-elle, peut être
envoyée :
par
chèque (avec la mention «legal aid fund») à la trésorière de
NP, ANNELIEN KISCH, 25/a Shivtei Yisrael street , Ramat Hasharon,
47252 Israel. Pour plus d'infos : kisch-e@zahav.net.il
sur
le compte en Belgique du MIR-IRG : 001-1114771-26, mention «Nouveau
Profil Israël»
New Profile
PO Box 48005
Tel Aviv 61480
Site internet : www.newprofile.org
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