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Aïman Taha et les soucis des captifs
palestiniens
Centre Palestinien d'Information
Gaza – CPI
Aïman est un vrai homme dans un temps difficile et insaisissable,
d’une famille croyante et résistante. Son père est un des
fondateurs du mouvement de la résistance islamique (Hamas). Les
rues et les ruelles du camp de réfugiés palestiniens d’Al-Baridj
connaissent bien Aïman. Plusieurs fois, il a été à interné
par les forces de l’occupation israélienne. Pourtant, de la
direction des mosquées, des étudiants, des conseils populaires,
du groupe islamique en passant par différentes activités
culturelles et médiatiques, le moudjahid Aïman Mohammed Saleh
Taha a assumé plusieurs postes de responsabilité au sein du
mouvement du Hamas. En décembre 1992, il a fait partie des 415 résistants
palestiniens déportés par Israël vers la région de Mardj
Al-Zohour, au sud du Liban. Et après treize ans d'emprisonnement
et d’explosion, il vient enfin d’être libéré, le matin du 7
juillet 2006.
Naissance et arrestation
En 1970, Aïman Taha Salit Taha est né dans le camp de réfugiés
palestiniens d’Al-Baridj, au milieu de la bande de Gaza. Il y a
terminé son école primaire et son collège. Et son baccalauréat,
il l’a fait à l’école Khaled ben Al-Waleed, dans le camp
d’Al-Nassirat. En 1990, il a rejoint l’Université Islamique ;
pourtant, il n’a pu suivre les cours qu’au courant de l’année
scolaire 1994-1995, à cause des arrestations répétées aussi
bien à l’époque de l’occupation qu’à celle de l’Autorité
palestinienne.
En 1993, il a été relâché pour ensuite regagner l’Université
Islamique et y est devenu membre du conseil des étudiants et
responsable du conseil social. A ce moment-là, Sami Abou Zahri,
l’actuel porte-parole du mouvement, était le président de ce
conseil. L’année d’après, Aïman est devenu le président du
conseil des étudiants jusqu’à son arrestation par le service
palestinien de sécurité préventive en l’an 2000.
Au début de l’Intifada d’Al-Aqsa, il a été libéré.
Ensuite, il a fait partie de la direction du Groupe Islamique. Il
a aussi travaillé avec le défunt, le docteur Abdou Al-Aziz
Al-Rantissi au bureau d’information du mouvement du Hamas, ainsi
qu’avec le défunt Ismaël Abou Chanab au bureau politique du
mouvement jusqu’à sa dernière arrestation en mars 2003.
Le
détenu libéré, cadre du mouvement de la résistance islamique
du Hamas, a parlé à l’envoyé de notre Centre Palestinien
d'Information (CPI) de l’histoire de son arrestation et des
conditions dans lesquelles vivent les détenus palestiniens dans
les prisons et les centres de détention israéliens.
Son arrestation
Au printemps de l’année 2003, la nuit du dimanche 3 mars plus
exactement, des forces de l’occupation ont investi la maison de
la famille d’Aïman Taha, dans le camp d’Al-Baridj, au milieu
de la bande de Gaza. Une force spéciale sioniste a profité de
l’atout de la surprise pour exploser la porte et investir la
maison. « Mon père a eu des blessures, pendant que j’étais
moi-même sur le toit de la maison », a-t-il raconté.
Aïman est, ce soir-là, revenu chez lui vers 23h30. Et à la
maison, son ami le martyr Abdallah Aqil l’a informé qu’il y
avait des patrouilles militaires sionistes dans le carrefour d’Al-Chohadaa
et devant la colonie de Kfar Daroum. « Je lui ai demandé de
m’avertir, s’il y a des mouvements pour que je quitterais la
maison. D’habitude, lorsqu’il y avait un tel signe, je
quittais la maison, ainsi que mon père et mes frères. Nous étions
persuadés que les forces sionistes envahissaient à tout moment
notre maison, mon frère le défunt Yasser – que la clémence
d’Allah soit sur son âme – étant recherché farouchement par
ces forces, ainsi que mon frère Hassan, et mon père Mohammed
Taha étant un des fondateurs du mouvement du Hamas ».
Des chiens policiers
Afin de mettre la main sur Aïman, non seulement des forces
terrestres ont encerclé la maison, mais aussi des avions
survolaient le ciel de la zone. Ils ont explosé la porte de la
maison pour y pénétrer. Et, bien qu’il ne fût armé, il a reçu
une balle dans la main droite pour rester en train de saigner une
vingtaine de minutes. « Et puis, ils ont lâché des chiens
policiers sauvages et entraînés. En les voyant se précipiter
sur moi, j’ai essayé de protéger la main blessée, craignant
qu’elle ne soit dévorée. Mais, les chiens ont mordu la main
gauche de façon affreuse. Puis, l’officier de l’unité est
monté et a commencé à m’adresser la parole en m’ordonnant
de me déshabiller, de m’allonger par terre et de laisser tomber
mon arme. Lorsque je l’avais informé que je n’étais pas armé,
il m’a demandé de lever les mains. Tout cela s’est passé
avant qu’ils ne soient montés sur le toit. Et lorsqu’il m’a
redit de lever les mains, je lui ai répondu que je ne le pouvais
: la main droite était blessée et la main gauche était prise
par les chiens. Il a dit qu’il parlerait aux chiens pour
qu’ils s’éloignent de moi et que je devais m’allonger
rapidement par terre et éloigner les mains de mon corps sans
faire aucun autre moyen, sinon il tirerait. Et comme dans un
incroyable film dramatique, dès que je m’étais mis par terre,
un chien est monté sur ma poitrine et a mis son visage face au
mien. Un autre s’est mis sur mes genoux, la tête sur le vendre
; une scène de fixation pratiquée dans la lutte. Puis une force
de l’armée est entrée et m’a déchiré les vêtements ».
L’enquête et le chemin des
douleurs
Depuis les premières secondes de l’arrestation, malgré sa
blessure, les officiers sionistes ont commencé leur
interrogation. Ainsi, Aïman a mis le premier pas dans le chemin
des douleurs et de la souffrance via lequel passent tout captif
palestinien.
« Dès qu’ils avaient déchiré mes vêtements dans la maison,
nous a-t-il racontés, ils ont commencé leur opération
d’interrogation. Ils m’ont demandé à qui était cette arme.
Je leur ai répondu que je ne savais pas qu’il y avait une arme
dans la maison. Ils m’ont alors dit qu’ils l’avaient trouvée
dans ma maison et dans ma chambre exactement. Je leur ai dit que
cela n’était pas véridique ».
Dans cette arrestation inhumaine, son père le cheikh Mohammed
Taha a été atteint à la tête par une balle. Et ses frères ont
été arrêtés. Les Sionistes ont sorti toute la famille pour
saccager sauvagement la maison. Ils voulaient pratiquer avec lui
toutes les pressions permettant d’en tirer toutes informations
concernant son lien avec la direction du Hamas. Etant blessé, ils
l’ont pris vers l’hôpital de Sorka, mais « de la première
seconde, ils m’ont interrogé, dans l’ambulance, et même dans
la salle d’opération où le médecin traitant m’a informé
qu’il me mettrait un fil métallique à l’intérieur de la
main ».
Une boucherie
Durant trois semaines a continué l’interrogation après sa
sortie de l’hôpital. Les enquêteurs jouaient sur la fatigue
sans lui laisser aucun répit. Il est passé par l’hôpital de
la prison d’Al-Ramla, blessure oblige. Mais ce lieu n’a d’hôpital
que le nom. Les médecins ont à la hâte implantée dans la main
blessée d’Aïman deux clous métalliques. La main est infectée
et a perdu 90% de sa capacité de mouvement.
Puis, il a été transféré vers la prison désertique de Nafha
pour y rester un an ; puis vers le passage de Beit Hanoun pour être
condamné à quarante mois de prison. Ces mois, il les a passés
entre la prison de Nafha, d’Ahwali Kwadar, de Hadarime, de Bire
Al-Sabaa et d’Al-Ramla en passant par plusieurs isolements,
notamment durant la grève de la faim.
Le chef d’accusation
A la prison de Nafha, les forces de l’occupation israélienne
l’ont accusé qu’il était le président du conseil des étudiants
de l’Université Islamique, un membre du Groupe Islamique et de
la possession d’une arme appartenant à mon frère le défunt
membre d’Al-Qassam le chef ingénieur Yasser Taha.
Voulant user de son droit, purgeant deux tiers de ses quarante
mois de prison, il a sollicité le tribunal de Chlich en espérant
baisser la période restante de sa condamnation. Pourtant, sa
sollicitation a été refusée : « un chef négatif des captifs
dans les prisons. Il porte des idéologies influençant l’extérieur.
Il représente un danger pour l’état d’Israël » !
Négligence médicale préméditée
Le captif libéré Aïman Taha dit que les autorités sionistes
continuent leur politique de négligence médicale à l’encontre
des captifs palestiniens dans leurs prisons. Même les hôpitaux
de ces prisons manquent de tout, notamment d’un vrai soin. Et à
cause de cette négligence, nombreux sont ceux qui y ont laissé
la vie. Mohammed Abou Hadwan, par exemple, a passé neuf ans dans
l’hôpital d’Al-Ramla sans recevoir le soin nécessaire, ce
qui lui a coûté la vie. Dans la prison d’Al-Damoune, il y a
quelques semaines de cela, un autre captif vient de tomber en
martyre par la négligence médicale israélienne sans fin. Le de
cas de Mohammed Abou Hadwan est le plus difficile à imaginer. Ce
sexagénaire est tombé en martyre en étant enchaîné sur son
lit d’agonie !
Des dizaines de captifs souffrent de graves maladies et leur
nombre ne cesse d’augmenter.
Espérance sans fin
Ils ne perdent pas le moral. Ils sont plus forts que leurs
blessures, que tout ce terrorisme sioniste qui ne cessent de se
renforcer. Leur espoir en leur Seigneur est toujours fort ; leurs
yeux se pointent vers leur peuple et leur nation pour qu’ils
viennent à leur aide et les fassent sortir de l’enfer de
l’enfermement, dit Aïman. Il se trouve indigner de ces mesures
abusives prises par les autorités pénitentiaires israéliennes
à l’encontre des Palestiniens pris au piège dans leurs prisons
: réduction des heures de récréation, des visites… Mais
augmentation des amendes et toutes les pressions physiques et
psychiques : inspection surprise, torture à nu…
Toujours de mauvaises nouvelles
C’était dans la prison qu’Aïman a reçu la nouvelle de la
tombée en martyre de son frère Yasser, de sa femme et de sa
fillette. Il regardait les informations télévisées qui
montraient une famille palestinienne qui perdait la vie par le
terrorisme sioniste. C’était plus tard qu’il a pris
connaissance que la voiture bombardée portait son frère et sa
petite famille.
Messages des captifs
Après plus de trois ans de prison, les autorités sionistes ont
enfin laissé partir Aïman Taha. Il a quasiment vu toutes les
prisons sionistes, bien que sa période d’internement n’était
pas si longue que cela.
« En quittant chaque prison, les captifs me donnaient des
messages. Le premier est destiné à la nation arabo-islamique.
Ils lui demandent de mettre tous leurs efforts pour libérer les
captifs, sans conditions, de s’intéresser à leurs affaires.
Ils appellent aussi le gouvernement palestinien à soutenir la
cause des captifs, matériellement et moralement », dit-il.
Il ajoute : « Le deuxième message est adressé au gouvernement
élu. Ils lui disent que tous les captifs leur prêtent serment et
les appellent à rester attacher aux principes palestiniens
intouchables dont ne pas reconnaître Israël. Et le troisième
message est adressé au peuple palestinien, l’appelant à
soutenir le gouvernement ».
« Enfin, le dernier message est pour les factions de l’action
nationale. Ils leur demandent de serrer le rang national ».
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