Un groupe international sur les droits humains a
averti que la solution de deux états pour mettre fin au conflit
israélo-palestinien qui dure depuis 57 ans, est devenu
pratiquement impossible à cause des expropriations continuelles
par Israël de propriétés palestiniennes et de son refus de
donner aux Palestiniens le droit de récupérer leurs maisons
d’origine et leurs terres.
C’est une des principales conclusions de
« Ruling Palestine : A history of the legally
sanctioned Jewish-Israeli seizure of land and housing in Palestine »,
dans un rapport publié par le Centre sur le Droit au Logement et
les Expulsions (COHRE) basé à Genève et BADIL, le Centre de
Ressources pour le Logement Palestinien et les Droits des Réfugiés.
Ce rapport révèle en détail comment les
dirigeants sionistes et plus tard les gouvernements israéliens
successifs ont manipulé les lois ottomanes et britanniques les
plus importantes ainsi que le système légal israélien afin
d’exproprier les Palestiniens de leurs terres et de leurs propriétés.
Le rapport documente clairement comment Israël a construit un
cadre légal interne qui cherche à légitimer ce qui est
clairement une politique de la terre et d’habitat
discriminatoire.
Si les confiscations de terres continuent et si ce
qu’Israël considère comme étant une « barrière de sécurité »
est achevé comme prévu, les terres palestiniennes à l’intérieur
de la Cisjordanie occupée et de la Bande de Gaza se réduiront à
moins de 8% du territoire à l’époque du mandat britannique.
Lors de l’établissement de l’état d’Israël
en 1948, la population juive possédait moins de 10% de la terre.
Aujourd’hui, ces chiffres sont presque inversés, Israël ayant
un contrôle militaire sur tout le territoire de la Palestine de
l’époque du Mandat et possédant, utilisant ou contrôlant près
de 90% des terres que ce soit en Israël ou dans les territoires
occupés.
Le directeur de COHRE, Scott Leckie dit : « Notre
recherche révèle que la loi israélienne, loin de fournir une
protection impartiale et un traitement égal à toutes les
personnes concernées, a été capitale pour l’expropriation des
terres des Palestiniens et de leur propriétés depuis que l’état
d’Israël é été proclamé unilatéralement en 1948. Les lois
israéliennes permettent de revendiquer légalement les terres et
propriétés des « absents » (un euphémisme israélien
qui désigne les réfugiés palestiniens déplacés de force)
elles ont permis la confiscation de terres palestiniennes et leur
transfert sur une grande échelle sous contrôle israélien. »
« Pendant la période 1948-49, l’établissement
de l’état d’Israël a été suivi par plus de 30 opérations
militaires différentes par les forces juives-israéliennes, opérations
qui ont a conduit à la fuite ou l’expulsion de plus de 800.000
Palestiniens et à la destruction de 531 villes et villages
palestiniens. Ce vol calculé de terres palestiniennes par des
moyens légaux et par des agressions militaires ainsi que les démolitions
largement répandues de maisons et l’imposition de lois proches
de l’apartheid par Israël, sont difficiles à considérer
autrement qu’étant une forme cruelle de nettoyage ethnique »
a dit Leckie.
Aujourd’hui plus de 5 millions de réfugiés
palestiniens continuent à être empêchés de retourner dans
leurs foyers et de récupérer leurs terres et leurs propriétés.
Malgré le fait que des millions de réfugiés de par le monde
aient pu revenir dans leurs foyers d’origine ces dernières années,
comme c’est le cas en Bosnie-Herzégovine, Afghanistan, Afrique
du Sud, Mozambique et au Kosovo, Israël reste fermement opposé
aux revendications des réfugiés palestiniens pour que leurs
droits à la terre, au logement et à la restitution de leurs
propriétés soient reconnus.
« Paradoxalement, si Israël était prêt à
rendre les terres confisquées aux réfugiés, un processus
comparativement simple en contraste avec d’autres programmes de
restitution ailleurs, pourrait prendre place. La majeure partie de
ces terres reste sous le contrôle public de l’état d’Israël
et n’a pas été transférée à des propriétaires privés. Des
grandes surfaces de terres confisquées depuis 1948 restent vides
et pratiquement toutes les familles palestiniennes conservent
leurs titres de propriété d’origine ainsi que des registres
prouvant leurs droits de propriétaire » dit Leckie.
[Le rapport]« Ruling Palestine »
montre que dès 1949, Israël avait saisi quelque 20.500 km2 de
terres dans la Palestine du Mandat en utilisant des lois conçues
pour légitimer la « nationalisation » progressive de
la terre et de la propriété. Les Palestiniens étaient
collectivement ou individuellement propriétaires de ces terres à
90% (près de 18.850 km2) dont environ 85% (quelque 16.000 km2)
avaient appartenu aux villages palestiniens dépeuplés suite aux
événements.
« Malgré le fait que les
USA soutiennent couramment les droits des réfugiés dans le monde
pour qu’ils récupèrent leurs terres, maisons et propriétés,
ils refusent de reconnaître que les réfugiés palestiniens aient
la possibilité de goûter aux droits légitimes de propriété.
L’hypocrisie de l’attitude des USA qui nient explicitement les
droits de propriété aux réfugiés palestiniens est flagrante et
injustifiable si les termes de droits humains et de règles de
droit doivent avoir une application universelle » a
ajouté Leckie.
L’étude montre comment Israël a utilisé la
loi « prévention d’infiltration » (offenses et
juridiction) de 1954 pour expulser les « réfugiés de
l’intérieur » (des Palestiniens déclarés absents de
leur villages au moment de la création de l’état d’Israël,
mais qui sont restés en Israël). Ces « absents » ont
en effet été définis comme ‘infiltrés’ et, lorsqu’ils
ont été pris, ont été exclus non seulement de leurs villages
mais aussi de leur propre pays. Plus récemment, les confiscations
de terres palestiniennes qui se sont produites entre septembre
2000 et mai 2003 sont estimées à plus de 848 km2. Actuellement,
le 1.2 million de Palestiniens ayant une citoyenneté israélienne
(appelés aussi des ‘arabes israéliens’) et qui constituent
un cinquième de la population d’Israël, possède moins de 3%
des terres.
Le rapport révèle aussi que le gouvernement israélien
a décrété des lois sur la terre et la propriété en
Cisjordanie et dans la Bande de Gaza, lois qui lui permettent de
prendre le contrôle de 4.700 km2 de terres en plus dans ces régions.
La construction par Israël d’un mur de sécurité (prévu pour
encercler toute la Cisjordanie) a sévèrement affecté les villes
comme Qalqilya, Tulkarem, Jénine et les villages avoisinants. Une
fois terminé, les terres confisquées à cause de la construction
du mur réduiront la surface de la Cisjordanie de 15%.
« Ces dernières années,
Israël a de nouveau utilisé ses lois internes renforcées par la
puissance militaire afin d’expulser illégalement de grandes
surfaces de terres palestiniennes et de propriétés restantes. En
faisant cela, Israël a violé de nombreux principes
internationaux. Malgré une condamnation presque universelle de la
communauté internationale, Israël continue a accomplir des
pratiques et des politiques de terres, logements et propriétés
discriminatoires rendant pratiquement impossible toute paix juste
et durable future » a dit Leckie.
Le rapport démontre que, même si un accord final
pouvait être négocié, un état palestinien viable ne serait pas
faisable étant donné l’insuffisance de terres disponibles et
d’infrastructures ainsi que l’absence de contiguïté
territoriale. Ces problèmes sont compliqués par l’ omniprésence
perturbatrice de centaines de colonies juives situées de façon
stratégique surtout en Cisjordanie, le bastion territorial dans Jérusalem
Est et le découpage de la Cisjordanie en des enclaves Nord/Sud
non connectées.
Selon le Plan E-1 controversé, l’énorme
colonie de Ma’ale Adumim doit être agrandie et intégrée dans
la Jérusalem Métropolitaine. Cela va sceller l’isolation et le
contrôle de Jérusalem Est par Israël et enfoncer un coin au cœur
de la Palestine en créant un corridor israélien ininterrompu de
Tel Aviv jusqu’à la Mer Morte.
Leckie prévient : « Cette
nouvelle étude conclut que le peu qui reste du foyer palestinien
est en train de disparaître devant nos yeux. C’est comme si
Israël était en train d’effacer délibérément la Palestine
de la carte ».
« COHRE et BADIL travaillent avec un groupe
d’Israéliens qui ont commencé la difficile tâche de reconnaître
l’histoire des abus sur les droits de la terre par Israël et de
la dépossession palestinienne qui en résulte. Comme avec la fin
de tous les conflits immuables, la paix durable entre les Israéliens
et les Palestiniens ne sera possible que lorsque des Israéliens
ordinaires reconnaîtront leurs torts passés, qu’ils prendront
à bras-le-corps le processus de réconciliation et surmonteront
leur peur vis-à-vis de leurs voisins historiques. Nous attendons
avec impatience le jour où les deux côtés bougeront au-delà de
l’impasse actuelle du « nous contre eux » vers un
futur mutuel et équitable où les droits de deux peuples seront
pleinement respectés » a dit Leckie.
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