|
il manifesto
Ces blessures mystérieuses que
personne n’expliquait
Annalena Di Giovanni - il manifesto
Il
manifesto, jeudi 12 octobre 2006.
Général Abou
Houli a 43 ans et a été brancardier pendant des années à Deir
Al Balah, au volant des ambulances pendant les incursions
militaires. Mais le matin de ce 19 juillet, alors qu’il porte
secours aux victimes d’une explosion dans le dédale des ruelles
étroites de Mughazi Camp, survient quelque
chose : un engin tombe du ciel, probablement lancé par un
drone israélien. Il plane devant lui avec un léger sifflement,
il ne fait aucun bruit même quand il touche terre. Tout d’un
coup la détonation : Anwar se retrouve par terre, une jambe
coupée à la hauteur du tibia, le corps lacéré par des coupures
microscopiques et par une poudre qui semble rester sous la peau,
en le brûlant. Pendant le transport à l’hôpital, la poudre
lui ronge la peau, coagule les vaisseaux sanguins, nécrose les
tissus, comme si elle les « vieillissait ». Les médecins
se retrouvent impuissants face à la nécrose rapide et ne peuvent
qu’amputer, sans trouver d’éclats qui expliquent les coupures
et les brûlures.
Anwar Abou
Houli est un des rares survivants palestiniens disponibles pour être
interviewés. Son cas n’est pas isolé : le même jour on a
enregistré à l’hôpital de Deir Al Balah cinq autres cas, et
à Gaza City, le 26 juillet, on comptait 19 mutilés sur 50 blessés
et 27 morts : un rapport entre victimes et invalides
quasiment égal. Des pourcentages et des symptômes sans précédents :
en
août, l’alarme disant qu’on était en train de tester à Gaza
une arme totalement nouvelle arrive à la presse
internationale ; il manifesto aussi la
traite largement. Mais l’électricité dans la Bande de Gaza va
et vient, compromettant les contacts avec l’extérieur, les
autopsies sont impossibles, le blocus aux frontières empêche
d’envoyer des prélèvements à analyser.
Aujourd’hui
les « nouvelles armes » expérimentées sur les
Palestiniens pendant l’opération militaire israélienne
« Pluie d’été » pourrait avoir un nom. Le noyau
d’enquêtes réalisées par Rainews24, qui
s’est rendu à Gaza, a identifié, dans un projet étasunien de
bombes à diamètre réduit associées au Dime,
le Dense inert metal explosive,
l’explication plausible des mystérieuses blessures rencontrées.
Le Dime serait une typologie de munitions
dites à létalité concentrée, un produit des exigences de la
« guerre au terrorisme ».Les premiers prototypes
devaient être disponibles entre juin et juillet exactement. Il
est probable que Gaza ait fourni le meilleur scénario pour une
expérimentation sur le champ de bataille, pendant des semaines de
relative inattention médiatique à cause des bombardements du
Liban.
Des analyses
scientifiques indépendantes commanditées aux laboratoires de
l’université de Parme par Rainews24 sur des
fragments et des poussières fournies par les médecins de Gaza
ont confirmé la présence de carbofibre et de tungstène, les
deux éléments caractéristiques du Dime.
L’ancien major général de l’aviation israélienne (et
directeur du programme israélien pour le développement des
armes) Itzhak Ben Israël, a déclaré à la Rai : « quelque
chose d’assez petit et précis pour ne toucher que l’objectif
identifié, sans autres victimes involontaires, à des milliers de
mètres de distance, changerait la guerre comme nous voulons ».
Sur le quotidien Haaretz, hier, le journaliste
Meron Rappaport a déclanché l’alarme, immédiatement renvoyée
à l’expéditeur par le porte parole de l’armée israélienne
qui a démenti l’utilisation d’armes Dime,
ajoutant cependant que « pour des raisons évidentes, Tsahal
n’entre pas dans les détails en ce qui concerne ses propres
armements et l’utilisation qu’elle en fait ».
Annalena Di
Giovanni
- Le film de
l’enquête de Rainews24 est disponible
depuis aujourd’hui (12 octobre, NDT) sur
le site de Rainews24, www.rainews24.rai.it
- Des photos
sont disponiles ici (attention images dures) www.rainews24.rai.it/ran24
Source :
il manifesto www.ilmanifesto.it
Traduit
de l’italien par Marie-Ange Patrizio
(Palestine13)
|