Parti Communiste libanais
La nouvelle guerre: La
responsabilité et la solution
Marie Debs
12 mai 2008
La situation au Liban est très dangereuse, puisque les combats
entre la "majorité" et "l'opposition" s'étendent à toutes les
régions qui avaient déjà vécu la guerre civile, entre 1975 et
1990.
Le gouvernement de Fouad Sanioura a commis une erreur grave,
plutôt mortelle, en prenant à la hâte des décisions concernant
la Résistance et le Hezbollah, dont la plus importante est
l'arrêt du réseau téléphonique qui fut concédé à la résistance
pour des raisons stratégiques. Pourquoi ces décisions
furent-elle fatale? Parce qu'elles ont fait suite à des
nouvelles parues en Israël sur l'échec d'une opération contre la
Banlieue sud de Beyrouth qui aurait dû avoir lieu le 25 avril et
dont le but était l'assassinat de Hassan Nasrallah et de son
état-major... Opération passant justement par l'Aéroport
international de Beyrouth.
Il est à penser que ce sont les Etats-Unis qui ordonnèrent de
telles mesures, même si c'est Walid Joumblat qui mit le feu à la
poudre en menant une campagne outrancière contre le réseau de
communications du Hezbollah et en demandant, en plus, le départ
d'un officier de l'armée ami de ce parti, par suite de la
présence d'une caméra dirigée vers la piste 17 de l'AIB...
En effet, comme je l'avais signalé alors, la venue de David
Walsh, conseiller de Condoleeza Rice, avait exacerbé les
tensions déjà existantes. De même, il ne faut pas oublier ni les
agissements de certains gouvernements européens, dont celui de
Berlusconi, qui demandent un changement radical dans le rôle de
la Finul renforcée et son déploiement sur les frontières avec la
Syrie, ni les changements opérés sur le terrain par la Finul
dans certains secteurs du Liban sud (je vous avais parlé de cela
aussi).
D'ailleurs, aujourd'hui, et pendant que les ministres arabes des
affaires étrangères étaient réunis, le même David Walsh est venu
en hâte au Caire où il a rencontré Amro Moussa pour demander une
décision musclée contre le Hezbollah et la Syrie concernant les
événements sanglants du Liban. Il faut dire que Washington
voudrait faire payer au Liban, au Hezbollah surtout, la cuisant
défaite de l'été 2006; et comme Israël n'est pas prêt à
recommencer, la consigne est de faire en sorte que ses amis
libanais et arbes (les Saoudiens, Egyptiens, Jordaniens et
autres) puissent faire en sorte de mettre ce parti hors d'état
de nuire. C'est ainsi que nous comprenons l'assassinat de Imad
Moghnieh, l'opération du 25 avril et toutes les violations qui
se font quotidiennement contre notre territoire, en plus des
campagnes virulentes menées par Saad Hariri et Walid Joumblat
contre Damas, Téhéran et le Hezbollah.
Bien entendu, l'opposition est aussi fautive, parce que la
réaction de Hassan Nasrallah, si elle est compréhensible quant à
sa volonté de défendre ses armes, a abouti à ce de quoi nous
avions peur depuis la fin de l'agression israélienne en 2006, à
savoir : une guerre sunnite-chiite, ou ce que j'avais appelé, il
y a deux ans, l'irakisation du Liban, surtout que les
fondamentalistes sunnites, dont Al Qaëda et autres factions du
genre, sont désormais bien présents au Liban (cf. ce qui s'est
passé à Nahr elBared avec le Fath alIslam).
Les combats font tache d'huile; et, même s'ils s'arrêtent, les
esprits sont survoltés et l'engrenage est déjà mis en route. La
guerre civile ou une de ses formules a commencé, même si les
opposants à Sanioura disent que c'est une guerre de la
Résistance contre le projet étasunien dans la région.
La seule issue possible, qui doit être rapide, est un retour au
dialogue, mais nous pensons qu'un dialogue interconfessionnel ne
va pas aboutir ou, s'il aboutit, ne fera pas long feu.
Il faut ouvrir le dialogue à toutes les forces politiques, dont
les forces non confessionnelles, et à tous les représentants de
la société civile (dont, surtout, les syndicats). Les bases de
ce dialogue seront:
1. L'élection d'un nouveau président de la République.
2. La formation, au même moment, d'un gouvernement de transition
dont la tâche sera:
- La formation de la Haute commission pour la suppression du
confessionnalisme, selon le contenu de l'Accord de Taëf.
- L'instauration d'une nouvelle loi électorale non
confessionnelle.
- La restauration du Conseil économique et social afin d'étudier
les mesures nécessaires pour faire sortir le Liban de la crise
dans laquelle il se trouve.
- La mise au point d'une vision claire sur les relations syro
libanaises.
Ce gouvernement aura six mois pour réaliser la mission qui lui
échoit.
Nous pensons que ces points constitueront le minimum possible.
Sinon, le Liban va sombrer, une fois de plus, dans le chaos.
Il est nécessaire que les forces politiques de la gauche
européenne, que le PCF surtout, fassent campagne dans ce sens.
© Lebanese Communist Party - 2006
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