[alors qu¹Ariel Sharon est toujours entre la vie et la mort, il est
déjà clair pour à peu près tout le monde que, quelle que soit l¹issue
de son intervention chirurgicale, il ne reviendra probablement plus
au pouvoir. Le premier effet visible de cet accident est le
bouleversement du paysage
politique israélien, qui sera évidemment déterminant pour les
relations futures avec les Palestiniens et pour le processus de
paix. Les analystes politiques d¹Ha¹aretz élaborent ici scénarios
et prédictions. Nous aurons bien entendu l¹occasion de revenir sur
le bilan d¹Ariel Sharon. Et nous souhaitons que ces interrogations
sur l¹avenir politique sans Sharon ne soient pas interprétées
comme un manque de respect pour sa personne]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/666777.html
1/ Yossi Verter
Désormais, plus rien n¹est sûr. Tout ce qui paraissait vrai
jusque hier est aujourd¹hui largement remis en question. Si, avant
mercredi dernier, Ariel Sharon et son parti Kadima étaient considérés
comme les grands vainqueurs potentiels des élections, la journée
de jeudi marque le retour de la compétition électorale.
Kadima demeurera probablement intact, et ses membres ne retourneront
pas à leurs partis d¹origine, mais le soutien populaire et la
force dont il a bénéficié ont été gravement frappés. Quel est
le degré de gravité ? Les sondages qui paraîtront jeudi soir et
vendredi en fourniront un début d¹indication, même si elle ne
sera que partielle, car ces sondages auront été effectués alors
que tout le monde est dans un état de choc et que l¹émotion est
intense.
Les trois forces politiques principales du pays sont confrontées
chacune à un défi : Kadima devra prouver qu¹il n¹est pas le
parti d¹un seul homme ; Amir Peretz, le président du Parti
travailliste, devra convaincre de nouveau que son parti compte dans
le paysage politique, peut-être en accueillant quelques-unes de ses
brebis égarées ; Benjamin Netanyahou, dirigeant du Likoud, devra
faire de même. Dans tous les cas de figure, une période d¹incertitude
absolue, quasiment sans précédent en Israël, s¹est ouverte ce
jeudi.
2/ Aluf Benn
Suite à la détérioration de l¹état de santé de Sharon, les
grands gagnants sur le plan politique sont les numéros 1 et 2 du
Likoud, Benjamin Netanyahou et Silvan Shalom. Netanyahou revient sur
la ligne de départ avec une bonne chance de redevenir Premier
ministre, malgré le fait qu¹il avait été relégué au rang de
dirigeant d¹un parti de droite marginalisé.
Shalom, qui est parvenu à convaincre les ministres du Likoud de ne
pas quitter le gouvernement, restera ministre des Affaires étrangères
et conservera un rôle déterminant au sein du Likoud.
Dans cette situation nouvelle, l¹un des grands perdants sera le
ministre de la Défense Shaul Mofaz, qui a quitté de Likoud à la
dernière minute pour rejoindre Kadima. Il n¹est pas certain qu¹il
se batte pour accéder à la direction de Kadima, ni quelles
seraient ses chances s¹il décidait de le faire.
Les autres nouveaux venus dans le jeu politique sont dans la même
situation. Avi Dichter, l¹ancien patron du Shin Bet, et le
professeur Uriel Reichmann ont rejoint Kadima parrainés par Sharon.
Ils se poseront probablement la question de savoir s¹ils resteront
à Kadima, au cas où ils auraient à se battre pour une place sur
la liste du parti candidate à la Knesset.
Il est probable que Shimon Peres subira des pressions pour retourner
au Parti travailliste, maintenant qu¹il n¹est plus lié par sa déclaration
de soutien à Sharon en tant que candidat le plus approprié au
poste de Premier ministre.
L¹ancien Premier ministre travailliste Ehud Barak, pour sa part,
sera tenté de faire son come-back politique et de postuler au poste
de ministre de la Défense d¹Amir Peretz, au cas où celui-ci accéderait
au pouvoir.
Daniel Ben Simon
J¹espère, et je crains en même temps, que si l¹état du Premier
ministre Ariel Sharon ne s¹améliore pas dans les deux prochaines
semaines, il sera oublié et que son parti tournera la page.
Kadima sera tellement occupé à se chercher un nouveau président
qu¹il en oubliera l¹ancien. C¹est la faiblesse de la politique
intérieure israélienne, mais aussi sa force : elle est plus forte
que n¹importe lequel de ses leaders.
La situation actuelle place trois nouveaux acteurs au-devant de la
scène politique. Avec le travailliste Amir Peretz et Benjamin
Netanyahou du Likoud, le Premier ministre par intérim, Ehud Olmert,
rejoint lui aussi le devant de la scène. Ses idées en matière d¹économie
et de société sont proches de celles de Netanyahou, mais ses
positions en politique extérieure le rapprochent davantage de
Peretz. Il va s¹agir d¹une fascinante bataille à trois, où trois
"jeunes" quinquagénaires israéliens, dont deux
"princes" et un nouveau venu, vont s¹affronter pour la
direction du pays.
Akiva Eldar
Le parti Kadima va subir son grand test lors du choix du successeur
de Sharon. S¹il s¹unit autour d¹un seul dirigeant (probablement
Olmert) et parvient à créer les mécanismes permettant de choisir
ses candidats à la Knesset, ce que Sharon n¹avait pas réussi à
faire, il bénéficiera d¹un large soutien dans l¹opinion.
Cela sera le résultat d¹une certaine loyauté à l¹égard de la
nouvelle voie choisie par Sharon, et cela même si le Premier
ministre fait ses adieux à la scène politique, car il apparaît
que le fait de mettre fin à l¹occupation sans l¹aide d¹un
partenaire palestinien séduit l¹électorat israélien du centre,
de la gauche et de la droite modérée.
Le défi auquel devra faire face Kadima sera de se trouver un
leadership capable de "vendre" cela, et de convaincre l¹opinion
que Sharon n¹est pas le seul capable de partager la terre sans
diviser le peuple.
La disparition de Sharon donnerait à certaines personnalités
anciennement travaillistes une chance de retourner à leur parti d¹origine
et de travailler solidairement avec Amir Peretz, afin de constituer
une alternative crédible à Kadima et au Likoud.
Shimon Peres a dit en quittant le Parti travailliste que seul Sharon
pouvait faire avancer le processus de paix. Il n¹a pas parlé de
Kadima, ni d¹Ehud Olmert, ni même de la ministre de la Justice
Tsipi Livni. La situation nouvelle fournirait également une excuse
à Peretz pour offrir à Ehud Barak une position importante au sein
de son futur gouvernement, éventualité qui semble aujourd¹hui
plus crédible qu¹auparavant.
Quant au Likoud, je ne m¹attends pas à voir un retour massif des
électeurs traditionnels du Likoud aujourd¹hui séduits par Kadima
vers leur parti d¹origine, car la plupart d¹entre eux l¹ont quitté
à cause de Netanyahou et des "rebelles" (opposés au désengagement
de Gaza, ndt). Ces électeurs ont cherché refuge dans un parti qui
propose une approche plus pragmatique.
Ainsi, Netanyahou doit trouver un moyen de choisir des personnalités
politiques et des positions qui donneraient une nouvelle image du
Likoud, où celui-ci pourrait offrir au pays une certaine stabilité,
même avec lui à sa tête.
Le Shinoui pourrait se révéler être l¹un des grands gagnants de
la nouvelle donne, au cas où un Kadima sans Sharon ne réussirait
pas à se positionner en véritable parti centriste.
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