Proche-Orient . Sur fond de détérioration accélérée
de la situation économique, les incursions israéliennes se
poursuivent tuant des civils chaque jour. Abbas veut activer le
dialogue national.
L’affaire n’a pas fait grand bruit. Tout juste
une « brève » sur quelques radios. Pas un mot aux
journaux télévisés. Il ne s’agit pas d’un attentat perpétré
par un kamikaze dans une ville israélienne. Non, c’est beaucoup
plus banal et aucun gouvernement ne s’en est ému, comme s’il
y avait deux sortes de morts civils. Lundi matin, Eitef Zalat,
quarante-cinq ans, se trouvait dans sa maison, à Toulkarem, en
Cisjordanie. L’armée israélienne d’occupation était en opération
et encerclait une maison voisine. Les soldats ont ouvert le feu.
« Ma mère a été touchée à la tête et hospitalisée »,
a déclaré Ansam, la fille de la victime, elle-même blessée, de
même que sa sœur. Son décès a été constaté par des médecins.
« Nous savons qu’une femme a été tuée et une autre
blessée par ces tirs. Nous sommes vraiment désolés lorsque des
innocents sont touchés, et nous menons une enquête sur cet
incident », a dit une porte-parole de l’armée israélienne,
alors que pratiquement aucune enquête de ce type n’a abouti à
une quelconque inculpation.
Aucune enquête sur les morts
En revanche, il n’y aura aucune enquête sur la
mort à petit feu du peuple palestinien dont les conditions de vie
se détériorent chaque jour davantage depuis que les États-Unis
et l’Union européenne (UE) ont suspendu leur aide financière.
Les 165 000 fonctionnaires n’ont pas reçu leur salaire
d’avril. Israël a suspendu le transfert mensuel des taxes il
assure la collecte pour l’Autorité palestinienne. Ces quelque
44 millions d’euros par mois sont une partie importante du
budget palestinien. Les fonds récoltés par des pays arabes et
musulmans qui souhaitent venir en aide aux Palestiniens, soit
environ 56 millions d’euros, sont pour l’instant bloqués sur
un compte de la Ligue arabe, en Égypte.
Jacques Chirac a bien proposé vendredi, en
recevant le président de l’Autorité palestinienne (AP),
Mahmoud Abbas, un mécanisme impliquant la Banque mondiale qui
permettrait la reprise de l’aide financière aux Palestiniens,
suspendue par l’UE. Mais il ne doit présenter ses propositions
dans la perspective d’une réunion du « quartet » (États-Unis,
UE, Russie et ONU) que le 9 mai. Une proposition conditionnée
donc par l’approbation de cette structure déjà divisée quant
à son rôle après l’arrivée du Hamas à la tête du
gouvernement et qui a amené James Wolfensohn, l’émissaire du
« quartet » pour le Proche-Orient, à présenter sa démission.
Un dialogue palestinien le 2 mai
Mahmoud Abbas a adressé officiellement samedi des
invitations à un dialogue national palestinien le 2 mai « pour
discuter de la situation actuelle (dans les territoires
palestiniens), renforcer l’unité et faire face au blocus (économique)
imposé à notre peuple ». Ce dialogue doit durer jusqu’au
4 mai. Les invitations ont été lancées « aux membres du
comité exécutif de l’OLP, au premier ministre et aux
ministres, à la présidence du Conseil législatif, à des représentants
des groupes et des factions (armées) ainsi que des représentants
d’hommes d’affaires, de chefs d’université, de présidents
de municipalité, de rédacteurs en chef de journaux locaux et à
un nombre de personnalités indépendantes et de représentants
d’organisations populaires ». On peut entrevoir le sens de
la proposition du président palestinien dans cette précision
qu’il donne lui-même sur le contenu des discussions :
« La réactivation du rôle de l’Organisation de libération
de la Palestine (OLP) », présidée par le même Abbas, seul
mouvement considéré comme « représentant légitime du
peuple palestinien » et signataire des accords avec Israël.
Pierre Barbancey