La maison de Mohammed Bashir est à quelques mètres
de Kfar Darom. Par le passé il était une cible pour
l’expulsion, ou « évacuation demandée » par les
colons -même avant l’intifada. Pendant l’intifada les IDF ont
converti sa maison en avant-poste militaire, à tous égards. Au début,
l’IDF s’est installée dans la maison et a confiné sa famille
dans une seule chambre ; puis, les soldats ont pris la relève.
Des restrictions draconiennes ont été imposées à la famille -
pas d’invités, interdiction de dépasser les limites de la
cour, pas de sortie la nuit, pas d’accès au toit.
Depuis cette même position il y a 18 mois, un
officier IDF a tiré sur Yussuf Bashir, 15 ans à l’époque, qui
escortait à leur voiture des représentants des Nations Unies
autorisés a visiter la famille. Yussuf Bashir a été gravement
blessé, et a nécessité de longs traitements et rééducation.
Le 15 août, les soldats ont repris la maison et
obligé la famille a rester dans une seule chambre, pratiquement
sans interruption, jusque hier matin. Pour Mohammed, 12 ans, qui a
passé plus d’un tiers de sa vie en tant que prisonnier de Kfat
Darom, le jour de libération veut dire pouvoir se promener
librement à travers les chambres de la maison, d’aller à la
salle de bains sans demander la permission à des soldats, de
sortir dans la cour sans avoir peur d’être tué.
« Depuis le 15 août, toute la famille (les
parents et cinq enfants) était retenue dans une chambre, jour et
nuit » a-t-il dit hier. « Nous avons du rester toutes
les nuits dans la même chambre pendant presque cinq ans. Les
soldats sont partis de la maison le 30 août, pour une journée.
Mais ils sont revenus le 31. Nous avons manqué la première
semaine d’école. Pour manger, nous devions négocier avec les
soldats comme s’il s’agissait de Jérusalem. »
« Il y a deux jours » a-t-il continué,
« ils sont partis à 6 heures du matin et nous avons pu
aller à l’école. Mais quand nous sommes revenus, nous avons
trouvé la maison entourée de chars. Et puis on nous a emprisonné
dans la maison à nouveau, et nous n’avons pas dormi cette
nuit-là. Nous n’avons pas quitté la maison avant que les chars
ne s’en aillent, vers midi. »
Omar Sa’ar a laissé sa maison de Khan Yunis tôt
hier matin et s’est dirigé vers les terres de sa famille dans
la région de Muasi, à environ un kilomètre et demi. Il allait
voir ses quatre frères, qu’il n’avait pas vus depuis trois
ans. « Et mon frère arrivait de l’autre direction,
jusqu’à ce que nous nous trouvions au milieu, et nous nous
sommes embrassés », a-t-il dit hier.
Sa’ar travaillait dans les colonies de Gush
Katif. L’IDF ne permettait pas aux travailleurs de quitter la
zone autrement que par la grille par laquelle ils étaient entrés.
Le Muasi et les zones côtières adjacentes sont au delà des
limites pour les palestiniens, mis à part environ 5.000 dont les
cartes d’identité portaient le Muasi comme domicile. Des règles
très strictes gouvernaient leurs entrées et sorties de Khan
Yunis.
« C’était une telle sensation de liberté,
hier, de marcher directement vers la plantation familiale de
goyave que nous ne pouvions pas vendre parce que le point de
passage était fermé » a dit Sa’ar hier.
« Oh, quelle sensation de liberté que
d’embrasser mon frère sur notre terre » a-t-il dit.