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Ismail Haniya à « Haaretz » : le Hamas s’opposera au transfert 
des services de sécurité à Abou Mazen

Amira Hass



Haaretz, 1er février 2006

www.haaretz.co.il/hasite/pages/ShArt.jhtml?itemNo=677430

Version anglaise : www.haaretz.com/hasen/spages/677195.html

Dans sa première interview depuis la victoire du Hamas aux élections, le numéro 1 de la liste déclare qu’il se peut que soient nommés dans le gouvernement du Hamas des experts palestiniens résidant à l’étranger

Le mouvement du Hamas s’opposera à une tentative visant à faire passer les forces de sécurité palestiniennes de l’autorité du gouvernement à celle du Président. Ainsi s’est exprimé, hier mardi, dans une interview à « Haaretz », Ismail Haniya, tête de la liste du Hamas, qui a insisté sur le fait que cette opposition se fera dans « le dialogue et la compréhension ». Samedi, Mahmoud Abbas (Abou Mazen), Président de l’Autorité, avait notifié aux commandants des services de sécurité qu’ils dépendaient directement de lui – en tant que « commandant suprême des forces de sécurité » –  et du bureau de la présidence. Au Hamas, on considère cette situation comme temporaire, jusqu’à l’établissement d’un gouvernement à leur tête. Ismail Haniya a expliqué au cours de l’interview que Mahmoud Abbas avait abandonné sa fonction de Premier Ministre, il y a environ deux ans et demi, à la suite de désaccords avec Yasser Arafat à propos du commandement des services de sécurité. « Nous ne pensons pas que Abbas reviendra sur sa position qui voulait que les services de sécurité soient placés sous l’autorité du gouvernement et du Ministre de l’Intérieur. S’il devait le faire, nous lui rappellerions la position qui était la sienne quand il était Premier Ministre, mais le tout dans le dialogue, avec un esprit de logique et de compréhension », dit Ismail Haniya.

L’interview d’Ismail Haniya s’est déroulée hier, dans le court moment que lui avaient fixé son fils, ses accompagnateurs et ses amis, entre la visite du représentant jordanien à Gaza et la prière du midi. Dans la cour non dallée de sa maison, dans le camp de réfugiés de A-Shati, les visiteurs continuaient d’arriver pour le féliciter de la victoire du Hamas aux élections. Les chaises en plastique où s’assoient les invités se couvrent régulièrement de sable alors ses assistants veillent à les secouer. Dans la ruelle où habite Ismail Haniya, comme dans les rues voisines, on ne voit pas d’hommes armés, pas d’armes, en dehors de celles figurant sur les grandes affiches du Hamas. « Nous sommes des militants politiques », dit Ismail Haniya, « et nous vivons parmi les gens de notre peuple. Nous n’avons pas peur et nos relations avec notre peuple sont des relations de confiance ».

Ismail Haniya a dit à « Haaretz » qu’il se peut que dans le gouvernement du Hamas soient nommés des Palestiniens résidant à l’étranger. « Des gens experts dans leur domaine et des hommes d’affaires qui habitent à l’extérieur ont pris contact avec nous pour nous faire savoir qu’ils étaient disposés à apporter leur aide », a-t-il dit. Les débats internes au Hamas se poursuivent à propos de la formation du gouvernement. Quand ils s’achèveront, les représentants du groupe vainqueur rencontreront Mahmoud Abbas et les chefs de factions. Ismail Haniya prévoit « plusieurs jours » pour ce processus.

Les agents des différents services ne perdront pas leur traitement

Ismail Haniya – comme d’autres à s’être exprimés au nom du Hamas – assure que les membres des services de sécurité, y compris ceux identifiés avec le Fatah, ne perdront pas leur traitement avec le changement de pouvoir. « Ce qui nous importe, c’est le fonctionnement des services de sécurité et non les gens eux-mêmes. Nous sommes intéressés à ce que les services de sécurité agissent dans une perspective palestinienne et non pas à ce qu’ils interviennent dans les affaires des gens et la vie quotidienne des citoyens. Nous projetons de lancer une réforme de ces services mais personne ne perdra son traitement ni son poste. Celui qui remplit une fonction restera à son poste et tout ce qui sera dommageable, nous nous en occuperons de la manière que nous avons dite (avec logique et compréhension – Note d’A. Hass). Peut-être le succès du Hamas a-t-il irrité certains membres du Fatah », a dit Ismail Haniya à propos des manifestations de protestation des gens des services de sécurité à l’égard de la victoire du Hamas. « Nous ne sommes pas arrivés au pouvoir avec des chars et des armes, mais par la voie démocratique ».

Ismail Haniya n’a pas répondu à la question de savoir quelles seront les premières dispositions concrètes que prendra un gouvernement Hamas, mais il a souligné que cela concernerait « les affaires intérieures, car de nombreux problèmes exigent une solution : la pauvreté, le chômage, le bouclage, la sécurité intérieure ». A la question de savoir ce qu’ils feront effectivement contre le bouclage, par exemple, il a préféré répondre par des formules générales : « Notre peuple n’a pas peur du bouclage, mais nous placerons tous nos efforts au niveau intérieur et arabe, afin de soulager les souffrances du peuple ».

- Néanmoins, plus concrètement, qu’est-ce qu’il est en votre pouvoir de faire ?

« Nous avons la volonté d’organiser une conférence nationale large afin d’établir des programmes détaillés et de mobiliser les fonds nécessaires ».

- Quelle influence aura un arrêt de l’aide financière à une Autorité Palestinienne placée sous votre direction ?

« La cessation de cette aide compliquera la situation et pourrait aussi conduire à une instabilité dans la région. Nous ne laisserons pas notre peuple mourir de faim. Nous avons des alternatives. Une gestion adéquate des fonds permettra de répondre à nos besoins ».

- Ce ne sera pas une catastrophe, de votre point de vue ?

« Non, nous avons des alternatives. Il y a des forces dans le monde arabe et musulman, des hommes d’affaires et des partis qui ont pris contact avec nous pour dire qu’ils étaient prêts à apporter leur soutien ».

- Autrement dit, si l’arrêt de l’aide est destiné à faire pression sur vous afin que vous changiez, par exemple, votre position sur la question de la non reconnaissance de l’Etat d’Israël…

« On ne réussira pas à faire pression sur nous. Nous voulons les droits du peuple palestinien et ne sommes pas intéressés par un chaos dans la région ».

- Qui prend les décisions au Hamas ? Vous ou les Frères Musulmans ?

« Le Hamas est un mouvement palestinien et c’est lui qui décide, par le biais de ses institutions ».

- Vous avez promis à votre peuple d’agir dans la transparence. N’y a-t-il pas contradiction entre cette promesse et le fait que votre organisation, avec ses institutions élues, est secrète ?

« Nous sommes une organisation secrète à cause de l’occupation, mais sur le plan politique, nous agissons ouvertement. Tous nos contacts sont connus et il n’y a là rien de secret ».

- Que veut le peuple ? La moukawma (résistance armée – note d’A. Hass) ?

« Le peuple veut améliorer sa situation, il veut un Etat indépendant, il veut ses droits ».

- Et comment réaliserez-vous ces objectifs ?

« Avec toutes les options existantes. Nous mobiliserons un soutien panarabe, international ».

- Ça a l’air tout simple.

« Nous sommes très optimistes. L’occupation a quitté Gaza et ils parlent aujourd’hui d’un départ d’une grande partie de la Cisjordanie. Ce sont des pas vers la concrétisation des droits du peuple palestinien ».

- Gaza est plus que jamais coupé de la Cisjordanie. La Cisjordanie est divisée en unités séparées, coupées, les colonies s’étendent, la situation diplomatique d’Israël dans le monde est meilleure que jamais. Où est l’amélioration ?

« Nous ne sommes pas impuissants. Le peuple veut connaître un soulagement. Nous resterons attachés aux droits de notre peuple et au lien entre la Cisjordanie et Gaza ».

- Quelles démarches s’offrent à vous pour réussir là où d’autres ont échoué ?

« Nous avons dit que nous ne nous soumettrions pas à cette situation. Nous avons fait l’Intifada qui a duré cinq ans, vers l’obtention de nos droits ».

- Mais la situation a empiré.

« Ce n’est pas vrai. Et même si c’est vrai, la situation en Israël est difficile aussi : au niveau économique, au niveau de la crise au Likoud avec le départ de Sharon du parti, l’insécurité. Tout ça, grâce à la résistance du peuple palestinien et au coût de l’occupation ».

- En fait, les Etats du monde acceptent les blocs de colonies, et acceptent la position israélienne selon laquelle les territoires C – 60% du territoire de la Cisjordanie – sont un territoire « disputé » par les deux parties, donc pas un territoire occupé.

« Depuis quand les Israéliens reconnaissent-ils nos droits ? Depuis quand reconnaissent-ils que la Cisjordanie est un territoire occupé ? Nous savons qu’il y a occupation, qu’il y a un mur de séparation et nous n’acceptons pas cette situation ».

- Autrement dit, vous ferez partir l’occupation de la Cisjordanie avec des Qassams ?

« Je ne parle pas de Qassams, mais des droits des Palestiniens. Si l’accalmie nous fait obtenir nos droits, nous serons d’accord ».

- Depuis la victoire, une plaisanterie circule dans les rues de l’Autorité à propos des brigades de Mohamed Dahlan – l’ancien chef des services de sécurité qui a essuyé un revers à Gaza et qui est actuellement représentant du Fatah au nouveau Conseil législatif : les brigades ont lancé un missile vers Israël et le chef du gouvernement, Ismail Haniya, condamne l’opération. Cette plaisanterie suggère la possibilité que le Hamas fasse arrêter ceux qui agiraient en violation de sa politique, mais Ismail Haniya insiste : « cela restera une plaisanterie ».

- Arrêterez-vous des gens et des groupes s’ils lancent des opérations armées contre Israël ?

« Nos relations avec tous les gens de notre peuple seront faites de dialogue et de compréhension ».

(Traduction de l'hébreu : Michel Ghys)


 Source : Michel Ghys


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