palestinenet.org
20 janvier 2006
Hajja Bahya al-Ali, du village de 'Anin, à l'ouest de la ville
de Jénine, est en révolte contre toutes les mesures
oppressives de l'occupation. Elle est déterminée à affronter
tous les jours les dangers pour arriver à ses terres ou plutôt
ce qui en reste. "Je veux que les soldats me voient en
train de cueillir les olives, toute seule, après qu'ils aient
interdit aux membres de ma famille de participer, sous prétexte
que notre terre, que nous possédons depuis des dizaines d'années,
se trouve dans une zone militaire, près du mur de la séparation,
dont des centaines de dunums ont été annexées pour sa
construction."
Umm Ahmad, la soixantaine, se lève tôt les samedis, pour
"faire la prière de l'aube. Je profite de la cessation de
travail des Juifs pour aller cueillir le maximum que je peux. Je
commence ma journée en invoquant Dieu qu'il nous débarrasse
des Israéliens criminels qui ont fait de notre vie un enfer,
par leur oppression et leur injustice qui a dépassé toutes les
lignes. Bien que nous n'ayions pas rendu les armes, malgré la
poursuite de notre résistance, et notre attachement à notre
terre, nous ne possédons, dans ce monde où tous complotent et
approuvent le crime sioniste, que la voie de la lutte et de
l'invocation de Dieu, lui demandant de nous donner plus de
force, de foi et de patience."
Après sa prière et ses invocations, Umm Ahmad se dirige vers
sa terre, se préparant à une nouvelle bataille avec les
soldats de l'occupation.
Umm Ahmad se fraye un passage le long du chemin, jusqu'à
arriver à sa terre. Elle se trouve devant les soldats de
l'occupation qui se tiennent là tous les jours. Mais malgré
leur présence, elle n'a pas peur et ne recule pas. Elle va d'un
pied ferme, pendant qu'ils crient : arrête-toi, interdit de
s'approcher de la zone. Elle regarde le soldat et lui dit :
"Ta loi n'a pas cours pour nous, c'est notre terre, et
aucune force ne peut m'interdire d'y aller, même si vous m'arrêtez".
Hajja Umm Ahmad est debout devant une dizaine de soldats, armés
de haut en bas. Elle les affronte, avec un air moqueur :
"Ni votre force, ni vos armes ne nous font
peur". Elle ajoute, s'adressant à moi : "Dès
le début de la saison de la cueillette des olives, j'affronte
les mêmes mesures, des soldats qui essaient de me faire peur,
mais j'ai réussi à surmonter cette force et cette peur, j'ai réussi
à entrer dans mes terres." Cette fois-ci, l'officier sort
des papiers et dit : "Il y a une décision interdisant
d'entrer dans cette zone, car elle est militaire, et tu dois exécuter
la décision". Elle se met alors à crier : "Sur ma dépouille,
vous finirez par me l'interdire, car c'est ma
terre, ne vous suffit-il pas que vous avez volé une centaine de
dunums, arraché des dizaines d'arbres, que voulez-vous de nous
? Vous imposez la fermeture, l'encerclement, vous interdisez à
nos enfants de travailler, vous confisquez notre terre, la seule
source de notre vie, et vous contrôlez ce que nous reste
d'espoir pour vivre sur cette terre. Cette terre est à nous,
les oliviers nous appartiennent et je ne vous permets pas de
m'interdire d'aller les cueillir, quoi que vous fassiez".
A ce moment, Umm Ahmad est au comble de la colère et de la
haine contre ces Israéliens meurtriers. Elle se remémore les
instants douloureux lorsqu'ils ont encerclé la terre "et
nous ont chassés, bien que ayions en main tous les documents
qui prouvent la légalité et la légitimité de notre propritété,
mais comme à leur habitude, ils volent, pillent, falsifient,
ils s'emparent du droit palestinien, ils ont clôturé des
centaines de dunums, dont des terres de 'Anin, qui se trouvent
près de la ligne verte, qui sépare la Cisjordanie et notre
terre occupée en 1948. Malgré le refus de la population et
leur résistance, l'occupation a mis des mesures qui ont abouti
à la confiscation des terres sur lesquelles il y a le mur
aujourd'hui, et ce qui nous reste a été considéré comme zone
militaire fermée parce qu'il se trouve près du mur. Tous les
jours, nous sommes poursuivis, ils tirent sur nous. Sur tout le
corps, j'ai des traces de blessures dues aux affrontements avec
les occupants, ou parce qu'ils nous poursuivent, et lorsque nous
nous sommes opposés aux arrachages des arbres."
"Que veulent-ils de nous? " crie Hajja Umm Ahmad,
alors qu'elle se trouve encore près des soldats. "Ne
suffit-il pas les arbres qu'ils ont arrachés, les massacres
qu'ils ont commis sur les centaines d'oliviers, témoins de la
palestinité et de l'histoire de cette terre ? Ils ont profité
du déploiement massif de l'armée, plusieurs jours de suite,
pour arracher les oliviers, et j'étais une des premières à
les affronter."
Les villageois de 'Anin racontent que Umm Ahmad a continué
à les affronter quotidiennement, en disant : "je ne ferai
aucune concession sur ma terre, jusqu'à mon dernier souffle, et
je me battrai pour que mes enfants et petits-enfants puissent
continuer à vivre".
Au milieu de l'étonnement et de la colère des soldats, Umm
Ahmad s'est dirigée vers sa terre, ne tenant pas compte des
cris des soldats qui ont empêché notre photographe de prendre
des photos de ces instants importants. Umm Ahmad a commencé la
cueillette. Chaque fois que des soldats s'approchent
d'elle pour l'arrêter et détruire les fruits cueillis, elle se
déplace vers un autre arbre, et cela dure des heures, entre les
cris des soldats, la détermination de Umm Ahmad. A la fin, elle
réussit à rassembler ce qu'elle a cueilli dans un sac qu'elle
avait caché sous ses vêtements. Lorsque les soldats ont essayé
de le confisquer, elle a pris le sac d'une main et un long bâton
de l'autre, et s'est mise à crier : "Ce sac est
à moi, et je ne reviendrai pas chez moi sans ce sac, je
frapperai quiconque s'approche de moi". Des mots qui
excitaient les soldats, qui criaient encore plus fort : cela est
interdit.
Mais Hajja Umm Ahmad balançait son bâton, à gauche et à
droite, tout en marchant, jusqu'à quitter la zone. Elle sourit
de joie et se retourna pour leur dire : "la bataille n'est
pas finie, je reviendrai, avec deux et trois sacs. Vos armes,
votre force, vos soldats peuvent confisquer la terre, mais ils
ne peuvent vaincre mon bâton, ma volonté, et ma foi. C'est le
bâton de la vérité, pour faire face à l'oppresseur, à son
arrogance et ses crimes. Et là, dans mon sac, ce sont des
fruits auxquels ma famille a droit, pour qu'elle jouisse des
biens que Dieu lui a donnés, et ce ne sont pas les criminels
qui vont nous les interdire".
Traduit par Centre d'Information
sur la Résistance en Palestine