Communiqué
Le cas de Julian Assange constitue une
inquiétante violation de la liberté de
la presse
Intersyndical
Vendredi 29 novembre 2019
Nous publions
ci-dessous
une lettre ouverte
des syndicats de journalistes SNJ,
SNJ-CGT et CFDT-Journalistes à Emmanuel
Macron, « à
propos de la situation de Julian Assange,
le fondateur de WikiLeaks, toujours
détenu au Royaume-Uni. »
(Acrimed)
Le cas de Julian
Assange constitue
une inquiétante violation de la liberté
de la presse
Monsieur le Président,
Les syndicats
français de journalistes (SNJ, SNJ-CGT,
CFDT-Journalistes), membres de la
Fédération internationale des
journalistes (FIJ, 600 000 adhérents
dans le monde), souhaitent attirer votre
attention sur le cas de notre confrère
Julian Assange, dont la santé est
gravement menacée, alors qu’il se trouve
détenu à l’isolement dans une cellule de
la prison de haute sécurité de Belmarch,
au Royaume-Uni.
La France - patrie
des droits de l’Homme - ne peut ignorer
le traitement inhumain subi par ce
journaliste, victime de « torture
psychologique », selon les propos du
rapporteur spécial de l’Onu sur la
torture, Nils Melzer, lors d’une
audition au Parlement européen le 14
novembre dernier. Déjà, la publication
du rapport de M. Melzer, établi après
une visite en mai dernier à la prison
londonienne en présence de deux
médecins, ne laissait aucun doute sur
les risques pour la santé physique et
psychologique de Julian Assange,
fondateur de Wikileaks. Ces conditions
de détention, indignes d’un Etat membre
de l’UE et du Conseil de l’Europe,
violent d’ailleurs la Convention
d’Istanbul.
Lors de cette même
audition, John Shipton, le père du
journaliste australien, a confirmé le « stress
psychologique » que subissait son
fils, dénonçant ce cas « très
préoccupant » pour les libertés dans
l’Union européenne.
A cette situation
dont souffre notre confrère, vient
s’ajouter la question cruciale de la
possible extradition de Julian Assange
du territoire britannique vers les
Etats-Unis, comme réclamée par la
justice américaine. M. Assange sera
déféré en février prochain devant une
cour britannique qui statuera à ce
sujet. Les conséquences d’une
extradition - si telle devait être la
sentence britannique - constitueraient
un risque majeur pour le sort de M. Assange.
La justice outre-atlantique base en
effet son accusation sur le fondement de
la loi sur l’espionnage, qui date d’un
siècle, selon David Green, dirigeant de
l’ONG américaine Civil liberties
director of electronic frontier
foundation. Une telle loi n’a jamais
été utilisée pour cibler les activités
journalistiques, a-t-il témoigné au
Parlement européen de Bruxelles.
Globalement, le
cas de Julian Assange constitue une
inquiétante violation de la liberté de
la presse. Les publications de Wikileaks
en 2010 sur les crimes commis en Irak
par l’armée américaine contre des
journalistes de Reuters et des civils
irakiens, ou encore d’autres révélations
par ce site sur la guerre en
Afghanistan, vont dans le sens de
l’intérêt général des citoyens à
bénéficier d’une bonne information.
Face aux menaces
sur la santé de Julian Assange et aux
risques de le voir condamner à une
détention à perpétuité nous affirmons
haut et fort, avec la FIJ, que « le
journalisme n’est pas un crime ».
Anthony Bellanger,
secrétaire général de la FIJ, a en effet
souligné lors de l’audition au Parlement
européen que « Julian Assange n’a
commis aucun crime ». « Son seul
crime est celui d’avoir dénoncé les
méfaits et les atrocités des autres.
Atrocités commises en Irak et en
Afghanistan. La FIJ poursuit sa lutte
internationale et se met à la
disposition de tous, parlementaires
européens, rapporteurs spéciaux des
Nations unies, militants des droits de
l’Homme et défenseurs de la liberté
d’expression, pour poursuivre cette
lutte essentielle en faveur de la
démocratie ».
Nous vous appelons,
Monsieur le Président, à faire respecter
par toutes les parties impliquées les
garanties inscrites dans les principes
de l’Union européenne, notamment le
respect de l’article 10 de la Convention
européenne, qui stipule : « Toute
personne a droit à la liberté
d’expression. Ce droit comprend la
liberté d’opinion et la liberté de
recevoir ou de communiquer des
informations ou des idées sans qu’il
puisse y avoir ingérence d’autorités
publiques et sans considération de
frontière ».
Il y a urgence,
dans un premier temps, à exiger avec
l’aide des 27 dirigeants européens la
suspension de la torture psychologique
dont M. Assange est victime dans sa
cellule. Une pratique contraire à nos
législations européennes. En
conséquence, nous demandons instamment à
la France d’intervenir afin que notre
confrère soit sorti de l’isolement et
placé d’urgence dans un établissement
hospitalier pour y être soigné.
Il faut ensuite que
la France, la Commission européenne et
les 27 autres pays de l’UE fassent
respecter la liberté d’expression et la
protection des sources des journalistes.
Julian Assange a
dénoncé dans ses publications des crimes
de guerre condamnés par la Convention de
Genève. Aujourd’hui, c’est lui qu’on
voudrait emprisonner, qu’on voudrait
faire taire.
Les Etats-Unis
doivent renoncer à leur demande
d’extradition et mettre un terme aux
poursuites pour espionnage engagées
contre Julian Assange. Nous considérons
que cette affaire constitue l’une des
plus graves atteintes contre la liberté
de la presse, contre les libertés
publiques commises au sein de l’UE. La
FIJ, les syndicats français et leurs
confrères australiens ont lancé une
motion pour saisir de cette grave
affaire le Conseil des droits de l’Homme
de l’ONU ainsi que le Parlement européen
et le Conseil de l’Europe.
M. le Président,
nous en appelons à votre arbitrage
auprès des autorités britanniques et des
Etats-Unis, afin que cessent ces
intolérables manquements à la
démocratie.
Nous vous prions
d’agréer, M. le Président, l’expression
de notre haute considération.
Le SNJ
Le SNJ-CGT
La CFDT-Journalistes
Paris, le 27 Novembre 2019
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