15 juin 2007
Alors qu’une violence politique sans précédent s’est installée
dans la bande de Gaza, les forces de sécurité du Hamas et du Fatah
ainsi que les groupes armés continuent de faire preuve d’un mépris
flagrant pour les principes fondamentaux du droit international et
de commettre de graves atteintes aux droits humains.
Les attaques aveugles et
les combats acharnés dans des quartiers d’habitation bloquent
chez eux les civils, déjà en proie à d’énormes difficultés du
fait des sanctions internationales imposées depuis un an et des
barrages continus de l’armée israélienne. Les deux parties ont
tué des captifs et enlevé des dizaines de membres de groupes
rivaux qu’ils gardent en otages en vue de les échanger contre des
amis ou des proches détenus par leurs rivaux. Tuer des combattants
captifs et prendre des otages constituent des crimes de guerre.
Les forces de sécurité
loyales au parti du Fatah du président de l’Autorité
palestinienne Mahmoud Abbas et celles, rivales, loyales au parti du
Hamas du Premier ministre Ismail Haniyeh ont manifestement failli à
leur responsabilité en ne faisant pas respecter et appliquer la loi
et en ne protégeant pas la population. Agissant de concert avec les
groupes armés qui leur servent de milices, elles se sont au
contraire engagées de façon constante dans des affrontements armés,
tuant et blessant des civils non impliqués dans les heurts en toute
impunité.
Maintenant que le Hamas a
pris le contrôle des installations des forces de sécurité du
Fatah à Gaza et rejeté la décision du président Abbas de
dissoudre le gouvernement de coalition et d’imposer l’état
d’urgence dans les territoires palestiniens occupés, on craint de
plus en plus que les combats ne s’étendent à la Cisjordanie. Ces
derniers jours, des hommes armés du Fatah ont enlevé des membres
du Hamas, qu’ils gardent en otages, et ont saccagé des bureaux du
Hamas à Naplouse, Ramallah et ailleurs en Cisjordanie, faisant
craindre de nouvelles exactions si les combats s’intensifiaient.
Les Palestiniens appelant
à mettre un terme aux violences risquent leur vie. Le 13 juin, dans
la ville de Gaza et à Khan Younès, des hommes armés ont tiré sur
des manifestants non armés qui réclamaient la fin des
affrontements armés. Un manifestant a été tué et plusieurs
autres blessés.
Le même jour, deux
employés palestiniens de l’Office de secours et de travaux des
Nations unies (UNRWA), principal organisme d’aide humanitaire dans
la bande de Gaza, ont été tués et deux autres ont été blessés
par des tirs au cours d’affrontements armés entre le Fatah et le
Hamas. L’UNRWA a par ailleurs signalé que des combats s’étaient
déroulés dans l’enceinte de deux de ses sites.
Des hommes armés des
deux camps mènent des attaques dans et autour des hôpitaux, visant
directement les bâtiments ou lançant des attaques depuis ces mêmes
bâtiments. Le 12 juin, l’hôpital Shifa de la ville de Gaza,
principal hôpital de la bande de Gaza, a été attaqué à l’arme
lourde, subissant des tirs de lance-roquette et de mortier.
D’autres hôpitaux, de Rafah dans le sud à Beit Hanoun au nord,
ont été pris pour cible, ainsi que plusieurs ambulances, mettant
la vie des patients et du personnel en danger, empêchant les équipes
médicales de travailler et privant les malades et les blessés de
l’accès aux soins.
Les combats ont empêché
les Nations unies de livrer l’aide alimentaire et médicale
d’urgence. De telles attaques constituent une violation flagrante
du droit international, qui interdit de prendre pour cible des
civils et de mener des attaques aveugles ; le droit international
accorde en outre une protection spéciale aux installations médicales
et humanitaires, qui ne doivent jamais être prises pour cible ni
utilisées pour mener des attaques ou autres actions compromettant
leur neutralité.
Des établissements
d’enseignement ont également été endommagés au cours des
combats et attaques menées sans discrimination et la vie dans la
bande de Gaza est littéralement paralysée dans tous les domaines.
Amnesty International
appelle les dirigeants du Fatah et du Hamas à prendre immédiatement
des mesures pour s’assurer que leurs forces et les groupes armés
agissant en leur nom cessent de mettre en danger les civils et de
bafouer le droit international à travers un usage irréfléchi,
disproportionné et aveugle de la force à Gaza et pour empêcher
que les exactions ne s’étendent à la Cisjordanie.
L’organisation leur demande notamment :
*
de reprendre le contrôle des forces de sécurité, de veiller à ce
qu’elles appliquent la loi et respectent les droits humains,
notamment les normes internationales relatives à l’utilisation de
la force et au traitement des prisonniers, et de faire en sorte que
les membres des forces de sécurité qui bafouent les droits humains
ou manquent à leurs devoirs soient amenés à rendre compte de
leurs actes ;
*
de mettre un terme à l’impunité en instaurant des mécanismes
efficaces permettant de traduire en justice les responsables présumés
d’atteintes aux droits humains, quelle que soit leur affiliation
politique ;
*
de donner instruction à leurs forces de sécurité pour que les
groupes armés auteurs d’atteintes aux droits humains ou de crimes
soient appréhendés et traduits en justice, conformément aux
normes du droit international relatif aux droits humains et cela,
quelle que soit leur affiliation politique :
*
d’instaurer un mécanisme visant à assurer un contrôle indépendant,
impartial et non partisan des forces de sécurité, de veiller à ce
que tous les homicides, enlèvements et autres attaques de civils
fassent l’objet d’enquêtes et que leurs auteurs présumés
soient traduits en justice.
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