Communiqué - Amnesty International
Israël. Non au déplacement
forcé des Bédouins jahalins
Mercredi 8 février
2012
Le ministre de la Défense israélien
Ehoud Barak doit annuler le projet
militaire qui prévoit de déplacer de
force environ 2 300 Bédouins vivant en
Cisjordanie pour les réinstaller sur des
terrains situés à côté de la décharge
municipale de Jérusalem, a déclaré
Amnesty International le 8 février 2012
dans un nouveau document de campagne.
Dans ce document, intitulé Stop the
Transfer: Israel about to expel Bedouin
from homes to expand settlements,
l’organisation appelle l’armée
israélienne à ordonner l’arrêt immédiat
de la démolition des 20 villages
concernés par ce projet.
Elle juge insuffisantes les promesses
orales des responsables militaires
israéliens, qui se sont engagés la
semaine dernière à ne pas appliquer les
ordres de démolition à Khan al Ahmar,
l’un des villages bédouins qui doit être
déplacé dans le district de Jérusalem,
en Cisjordanie occupée.
« Ce projet militaire israélien menace
de destruction les habitations et les
moyens de subsistance de milliers de
Bédouins, qui font partie des
populations les plus vulnérables de
Cisjordanie.
Beaucoup d’entre eux ont le statut de
réfugiés, et certains ont été déplacés à
de multiples reprises depuis 1948 », a
déclaré Ann Harrison, directrice
adjointe par intérim du programme
Moyen-Orient et Afrique du Nord
d'Amnesty International.
« Les autorités doivent garantir aux
habitants de ces 20 villages le droit à
un logement convenable, de même qu’à
tous les Palestiniens de Cisjordanie
occupée.
Cela implique de les protéger contre les
expulsions forcées et de mener de
véritables consultations auprès de
toutes les populations concernées. »
En juillet 2011, des responsables de
l’administration civile israélienne ont
informé les Nations unies d’un projet
visant à expulser 2 300 habitants de 20
villages bédouins pour les réinstaller
dans le district de Jérusalem, à environ
300 mètres de la décharge municipale de
la ville.
Ces Bédouins sont actuellement installés
près de la colonie illégale de Maale
Adumim, pour la plupart sur des terrains
visés par l’extension de la colonie.
L’armée israélienne considère que la
plupart des constructions de ces
villages – situés dans la zone C de la
Cisjordanie, où l’aménagement du
territoire reste sous l’autorité
d’Israël – ont été bâties illégalement,
sans les autorisations nécessaires.
Cependant, il est quasiment impossible
pour un Palestinien d’obtenir un permis
de construire en zone C.
La plupart des constructions de ces
villages font l’objet d’un arrêté de
démolition, notamment des maisons, des
cuisines, des toilettes extérieures, des
bâtiments destinés au bétail, et deux
écoles primaires.
Aucun représentant des Bédouins n’a été
consulté par les autorités militaires
israéliennes à propos du projet de
déplacement.
Certains ont expliqué à Amnesty
International qu’ils étaient opposés ce
projet car ils ne pourraient pas
conserver leur mode de vie traditionnel
s’ils étaient transférés dans une zone
restreinte près de la décharge.
À la fin des années 1990, Israël avait
déjà réinstallé de force des familles
bédouines dans cette zone, avec des
maisons situées pour certaines à
seulement 150 mètres de la décharge.
Les Bédouins qui y vivent ont raconté à
Amnesty International que ce site
n’était pas adapté à leur mode de vie,
qu’ils avaient dû vendre leur bétail
faute de pâturages, et qu’une grande
partie d’entre eux étaient sans-emploi.
Certains sont retournés sur leur ancien
lieu de résidence.
D’après le ministère israélien de la
Protection de l’environnement, la
décharge reçoit jusqu’à 1 100 tonnes de
déchets par jour, principalement en
provenance de Jérusalem.
Toujours selon ce ministère, cette
décharge provoque une pollution de
l’air, du sol et peut-être de l’eau,
n’est pas correctement clôturée, et
présente un « risque d’explosions et
d’incendies » en l’absence de traitement
du méthane issu de la décomposition des
déchets.
Même s’il est prévu de fermer cette
décharge dans le courant de l’année,
aucun plan de réhabilitation du site n’a
été adopté, ce qui signifie que les
problèmes environnementaux risquent de
perdurer pendant des années.
Les autorités israéliennes ont insisté
sur le fait que les Bédouins
bénéficieraient du raccordement aux
réseaux d’eau et d’électricité sur le
site de réinstallation.
En revanche, elles n’ont pas expliqué
pourquoi Israël était en mesure de
fournir ces services aux colonies
illégales et aux avant-postes non
reconnus installés par des colons en
Cisjordanie, mais pas aux populations
bédouines qui y vivent de longue date.
Les 20 villages bédouins ont créé un «
comité de protection » pour coordonner
leurs réactions au projet de
déplacement.
Conformément à leur droit au retour, qui
est un droit internationalement reconnu,
les Bédouins souhaiteraient en premier
lieu retourner sur leurs terres dans le
désert du Néguev, en Israël, d’où ils
ont été déplacés par les autorités
israéliennes dans les années 1950.
Leur second choix serait la
reconnaissance par les autorités
israéliennes de leur droit de rester
dans leurs villages actuels, assortie
d’un raccordement aux réseaux d’eau et
d’électricité et au réseau routier,
ainsi que de la levée des restrictions
arbitraires à leur liberté de
déplacement.
En raison de ces restrictions, de
nombreux Bédouins ne peuvent plus faire
paître leurs chèvres et leurs moutons et
sont donc obligés d’acheter du fourrage,
ce qui les contraint à vendre leur
bétail.
En dernier choix, les Bédouins seraient
prêts à négocier une éventuelle nouvelle
réinstallation, à condition que
l’administration civile les traite
d’égal à égal dans la négociation.
Le général de division Eitan Dangot,
coordonnateur des activités
gouvernementales dans les territoires,
s’est rendu à Khan al Ahmar la semaine
dernière, et aurait promis aux habitants
que leurs maisons et leur école ne
seraient pas démolies, et qu’ils ne
seraient pas transférés sur le site
situé à côté de la décharge.
Il a parlé d’une réinstallation sur un
autre site en Cisjordanie occupée.
Pour Amnesty International, c’est
insuffisant.
« Les autorités militaires israéliennes
enjolivent leurs projets en les
décrivant comme un moyen d’apporter aux
Bédouins des services de base comme
l’eau et l’électricité, mais en réalité
la réinstallation forcée de ces
populations ne ferait que perpétuer des
années d’expropriations et de
discrimination et pourrait constituer un
crime de guerre », a dénoncé Ann
Harrison.
« Ces populations attendent davantage
que des promesses informelles.
Le ministère de la Défense israélien
doit annoncer officiellement
l’annulation de cette politique. »
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