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Amnesty International
La campagne menée par Israël pour se soustraire à
l'obligation de répondre des crimes de guerre commis à Gaza doit
être rejetée
Mercredi 6 avril 2011
Les appels récents du gouvernement israélien en faveur de
l’annulation du rapport 2009 de la Mission d’établissement des
faits de l’Organisation des Nations unies sur le conflit à Gaza
ne sont qu’une tentative cynique pour éviter d’avoir à répondre
de crimes de guerre et refuser aux victimes israéliennes et
palestiniennes du conflit de 2008-2009 le droit à la justice et
aux réparations auxquelles elles ont droit, a déclaré Amnesty
International le 4 avril.
Les déclarations de dirigeants politiques israéliens affirmant,
après la publication d’une libre opinion du juge Richard
Goldstone parue le 1er avril 2011 dans le Washington Post , que
l’attitude d’Israël au cours des 22 jours qu’a duré le conflit à
Gaza et dans le sud d’Israël avait été justifiée se fondent sur
une interprétation délibérément fausse des propos du juge
Goldstone. La communauté internationale doit fermement rejeter
ces tentatives pour échapper à l’obligation d’avoir à répondre
de certains actes et prendre position pour une justice
internationale, comme elle l’a fait pour la Libye, le Soudan et
dans d’autres situations où des crimes de guerre et même des
crimes contre l’humanité ont été commis.
La Mission d’établissement des faits des Nations unies sur le
conflit à Gaza, composée du juge Goldstone et de trois éminents
juristes, a examiné les violations du droit international
humanitaire et du droit international relatif aux droits humains
commises par toutes les parties au cours du conflit
de 2008-2009. Son rapport de septembre 2009 faisait écho aux
conclusions d’Amnesty International, d’autres organisations de
défense des droits de l’homme et d’observateurs indépendants et
appelait les autorités israéliennes et palestiniennes à mener
des enquêtes crédibles et indépendantes sur les allégations de
crimes de guerre et de possibles crimes contre l’humanité dans
les six mois sous peine de voir le Conseil de sécurité des
Nations unies renvoyer la situation à Gaza devant la Cour pénale
internationale.
Les recommandations du rapport concernant un recours potentiel
aux mécanismes de justice internationale n’ont toujours pas été
appliquées plus de 18 mois plus tard, en dépit du fait que les
autorités israéliennes et l’administration de facto du Hamas ont
toutes deux failli à leur obligation de mener des enquêtes
approfondies, indépendantes, impartiales et effectives dans des
délais raisonnables, comme elles avaient été sommées de le faire
par l’Assemblée générale des Nations unies.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le ministre
des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, le ministre de la
Défense Ehud Barak et un certain nombre d’autres responsables
politiques israéliens se sont emparés de la nouvelle déclaration
faite par le juge Goldstone, selon laquelle l’armée israélienne
n’avait pas intentionnellement visé des civils au cours du
conflit et avait mené plusieurs enquêtes, pour demander
l’annulation du rapport de la Mission d’établissement des faits
– ou, comme l’a dit le Premier ministre Netanyahu, le « jeter
dans les poubelles de l’histoire ». Le département d’État
américain a soutenu cette position, un porte-parole a déclaré
que le gouvernement américain n’avait pas vu de preuve que le
gouvernement israélien avait commis des crimes de guerre au
cours du conflit.
Comme l’a déclaré clairement un porte-parole du Conseil des
droits de l’homme le 6 avril, les propos exprimés dans une libre
opinion ne constituent pas une base légale suffisante pour
infirmer un rapport de l’ONU qui a fait l’objet d’un débat et a
été avalisé à la fois par le Conseil des droits de l’homme et
l’Assemblée générale. Il en va de même des appels intéressés de
dirigeants politiques israéliens, dont certains étaient membres
du cabinet de guerre israélien qui décidait de la politique à
tenir au moment de l’Opération « Plomb durci », conflit de
22 jours au cours duquel quelque 1 400 Palestiniens, parmi
lesquels 300 enfants, ont été tués par les forces israéliennes.
Interrompre le processus engagé en vue d’une solution de justice
internationale supprimerait aussi toute possibilité de justice
ou de réparations pour les victimes israéliennes du conflit qui
ont subi les tirs de centaines de roquettes et d’obus de mortier
tirés sans discrimination sur le sud d’Israël par la branche
militaire du Hamas et d’autres groupes armés palestiniens à
Gaza.
Amnesty International a suivi avec une attention critique les
enquêtes de l’armée israélienne sur les actions menées au cours
de l’Opération « Plomb durci » et a condamné également l’échec
continu des autorités du Hamas à enquêter sur les allégations de
violations des droits humains commises par des groupes armés
palestiniens pendant le conflit et la poursuite de tirs aveugles
de roquettes sur le sud d’Israël.
Les deux parties, israélienne et palestinienne, ayant failli à
leur obligation de mener des enquêtes appropriées indépendantes,
répondre de leurs actes et rendre justice aux victimes, Amnesty
International a fait appel à un large éventail d’acteurs
internationaux pour qu’ils mobilisent désormais les mécanismes
de justice internationale pour atteindre ces objectifs et mettre
fin à l’impunité.
Amnesty International a notamment appelé l’Assemblée générale
des Nations unies à examiner le rapport de la Mission
d’établissement des faits lors de sa 66ème session qui débutera
en septembre 2011 et à soumettre ce rapport au Conseil de
sécurité des Nations unies en recommandant à ce dernier
d’envisager de référer la situation au Procureur de la Cour
pénale internationale (CPI). Cette recommandation avait été
incluse dans une résolution adoptée par le Conseil des droits de
l’homme le 25 mars 2011.
Amnesty International a également exhorté le procureur de la CPI
à demander à la Chambre préliminaire de déterminer si la CPI
était compétente pour enquêter sur des crimes de guerre commis
lors du conflit à Gaza, conformément à une déclaration acceptant
la compétence de la CPI soumise par l'Autorité palestinienne en
janvier 2009. Enfin, nous avons de manière constante appelé les
autorités nationales d’autres États à exercer leur la compétence
universelle pour les crimes de guerre commis pendant le conflit
de Gaza en 2008-2009, de la même manière que nous appelons les
États à exercer leur compétence universelle pour les crimes de
guerre commis dans d’autres conflits lorsque les autorités
nationales n’ont pas la volonté ou la capacité de le faire.
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