En direct de Gaza
Deux ans après, nous n’oublierons
pas
Ziad Medoukh
Vendredi 8 juillet 2016
7 Juillet 2014, 7 juillet 2016! Deux ans
déjà, deux ans se sont écoulés depuis le
début de la nouvelle agression
israélienne contre la bande de Gaza en
juillet-août 2014-la troisième en cinq
ans-. C’est comme si c’était hier, un
événement terrible en Palestine, un
véritable carnage à Gaza, des crimes et
des massacres israéliens contre des
civils et des innocents.
Cette nouvelle attaque avait pour
objectif de briser la volonté d’une
population résistante, d'une population
courageuse qui a résolu de défier le
blocus, mais qui a surtout décidé de
rester attachée à sa terre, en dépit de
toutes les difficultés et des mesures
atroces d’une occupation aveugle.
Je ne vais pas revenir dans cet article
sur les événements tragiques de cette
dernière offensive contre la
population civile de Gaza, une offensive
menée par une puissance militaire contre
des enfants, des femmes, des personnes
âgées, et des innocents , dans un
territoire enfermé, isolé et soumis
à un blocus inhumain, offensive qui a
duré plus de 50 jours.
Je ne vais rappeler les pertes humaines
de ce nouveau pilonnage - plus de 2200
morts, parmi eux, 600 enfants, et 11000
blessés, civils et enfants en majorité-,
sans oublier la destruction massive de
l'infrastructure civile de la bande de
Gaza.
Je ne vais rappeler ce drame, parce que
le monde entier le connaît, mais je veux
seulement dire à ce monde que rien n’a
changé dans notre région oubliée, deux
ans après ce nouveau massacre contre
nos civils.
Ces jours-ci, les
Palestiniens en général, les habitants
de Gaza en particulier et avec eux, tous
les solidaires internationaux,
commémorent le deuxième anniversaire de
l’agression israélienne de l’été 2014 .
Difficile
d’oublier- et il sera difficile
d’oublier, même après des années et des
années-, difficile de sortir de nos
mémoires ces images bouleversantes de 50
jours de bombes, de missiles et
d'attaques sanglantes.
Il est impossible
pour nous Palestiniens de Gaza d’oublier
la guerre, les morts et les blessés, les
maisons et les écoles détruites, les
massacres, et les crimes commis par
cette armée d’occupation, contre nos
femmes et nos enfants, contre nos biens
et nos structures, contre notre volonté
et notre résistance, contre notre avenir
et notre existence.
Comment pourrait-on
effacer les événements dramatiques de
cette guerre israélienne contre la
population civile de Gaza ? Lequel
d’entre nous pourrait oublier les pertes
humaines, la destruction massive de nos
infrastructure civiles ? Y-a-il un seul
palestinien de Gaza qui n’ait pas été
touché directement ou indirectement par
les attaques sanglantes d’une armée
d’occupation qui visait avant tout les
civils ?
Deux ans après :
aucun projet de reconstruction privé ou
public n’a commencé dans les rues de
Gaza qui témoignent de la barbarie subie
pendant ces 50 jours. Partout, ce ne
sont que ruines des maisons, des
immeubles, des mosquées, des écoles, des
stades, des usines ou des bâtiments
détruits et visés par les bombardements
israéliens.
Deux ans après :
les attaques et les agressions se
poursuivent jour et nuit provoquant la
mort de civils et des dégâts importants.
Et cela se poursuivra tant que ces
crimes resteront impunis, et tant que
cette état d’apartheid et d’occupation
ne sera pas jugé pour les crimes de
guerre commis contre les enfants de
Gaza.
Deux ans après :
rien n’a changé pour les sans-abris,
plus de 5.000 habitants vivent toujours
sous des tentes, dans des caravanes
inhabitables, ou à côté des ruines de
leurs maisons détruites dans des
conditions très difficiles, beaucoup
d’habitations n’ont pas été réparées, à
cause du maintien du blocus et de
l’interdiction d’entrée, par ordre
militaire israélien, des matériaux de
construction.
Deux ans après :
beaucoup d’événements se sont passés en
Palestine, notamment le déclenchement
d’un soulèvement populaire en
Cisjordanie, dans la région, avec
l’accord entre la Turquie et Israël , et
dans le monde, avec la conférence de
paix en France, mais pour la population
civile de cette région abandonnée : rien
n’a changé.
Deux ans
après : Gaza est toujours sous blocus,
Gaza subit les bombardements et les
raids israéliens, Gaza est plus que
jamais une prison à ciel ouvert. Et
l’armée de l’occupation poursuit sa
politique agressive à l’encontre des
Palestiniens.
Deux ans après
cette nouvelle offensive, la situation
stagne, rien ne bouge. Pour plus de 1,9
millions habitants toujours
enfermés, cette situation reste très
grave à tous les niveaux, surtout sur le
plan humanitaire, malgré, partout dans
le monde, la mobilisation internationale
contre les crimes israéliens et malgré
les promesses de reconstruction rapide.
Deux ans après,
aucune enquête officielle a été faite
pour juger les criminels de guerre
israéliens, et aucune commission s’est
rendue sur place pour constater
l’ampleur de cette horreur absolue.
Deux ans après,
suite à leur résistance remarquable
contre les armes de l'aviation, de la
marine et la force terrestre
israéliennes, rien ne semble différent
pour les Palestiniens de Gaza, toujours
à la recherche d'une solution politique
et pas seulement humanitaire. Les
passages et les frontières avec
l'extérieur sont souvent fermés par
ordre militaire israélien et les
produits alimentaires et autres qui
entrent à Gaza sont rares. Les autorités
israéliennes ouvrent le seul passage
commercial qui relie la bande de
Gaza à l’extérieur deux ou trois fois
par semaine pour permettre l'entrée de
300 camions et de quelques convois
humanitaires. Parmi ces camions, 5
à 6 seulement contiennent
des matériaux de construction, souvent
destinés aux projets internationaux. Ce
passage se ferme sous n’importe quel
prétexte, par décision israélienne, sans
prendre en considération les besoins
énormes de la population civile.
Chaque foyer à Gaza
n’a droit qu’à 8 heures
d’électricité par jour, car la seule
centrale électrique, qui a été détruite
en juillet 2014, ne fonctionne pas,
par manque de fioul et de carburant. Les
conséquences sont dramatiques pour les
hôpitaux, les centres médicaux, et les
institutions éducatives.
L’armée israélienne
viole presque tous les jours l’accord du
cessez le feu et ne respecte pas la
trêve. Souvent, les chars mènent des
incursions dans la bande de Gaza. Les
soldats contrôlent toujours les
zones tampons sur les zones frontalières
et tirent sur les paysans. La marine
empêche l’extension de la zone de pêche
et tire sur les pêcheurs palestiniens et
leurs bateaux. Malgré la retenue des
factions de Gaza, l’armée d'occupation
poursuit ses provocations.
Les Palestiniens de
Gaza craignent la reprise des attaques
israéliennes à n’importe quel moment et
sous n’importe quel prétexte, car la
communauté internationale officielle qui
a gardé un silence complice durant
l’offensive israélienne de l’été
dernier, n'exerce pas de pressions sur
le gouvernement israélien afin qu'il
lève le blocus imposé à la population
depuis plus de 9 ans.
Les habitants de
Gaza, épuisés à la fin de cette
nouvelle agression, ont peur pour leurs
enfants et leur avenir. Ils espèrent le
début rapide des projets de
reconstruction, notamment après les
promesses internationales.
L’aspect le plus
grave de toute cette situation
difficile, aspect qui marque l’esprit de
la majorité des habitants, est l’absence
de perspectives pour ces gens qui ne
voient aucun changement. C’est un
sentiment horrible qui va influencer
l’avenir de cette génération, surtout
des jeunes.
Les Palestiniens de
Gaza attendent et attendent. Il n’ont
pas d’autre choix que d’attendre. Ils
attendent une ouverture, ils attendent
la levée de ce blocus inhumain, imposé
depuis plus de 9 ans, ils attendent une
réelle réaction internationale qui mette
fin à l’impunité de cet occupant. Ils
attendent avec un courage à toute
épreuve, une sérénité exemplaire et une
volonté remarquable. Ils attendent avec
un message simple est claire : nous
n’oublierons pas.
En attendant, à
Gaza, la vie continue, ses habitants
confiants et déterminés s’adaptent
et montrent une patience extraordinaire,
ils tiennent bon, persistent,
patientent, résistent, restent à côté de
leurs maisons détruites, mais surtout,
ils continuent d’espérer, espérer
un changement radical, une solution
politique. Ils espèrent en un lendemain
meilleur, un lendemain de liberté, de
paix, mais, avant tout et surtout, un
lendemain de justice.
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