LE CRI DES PEUPLES
« Pression maximale » de Trump sur
l’Iran :
des sanctions cruelles et
criminelles
Tyler Cullis
Samedi 17 octobre 2020 Par Tyler Cullis,
8 octobre 2020
Source :
Responsible Statecraft
Traduction :
lecridespeuples.fr
L’administration
Trump qualifie sa politique envers
l’Iran de « pression maximale ». Par sa
dernière initiative, il serait plus
approprié de la décrire comme une
politique visant à « assiéger et affamer
» le peuple iranien, car la prétendue
volonté de créer un levier en faveur de
négociations globales avec l’Iran a été
remplacée par une poussée à plein régime
pour pulvériser l’économie iranienne et
faire effondrer sa vie sociale et
économique.
Voir
Accord sur le nucléaire : pour imposer
de nouvelles sanctions contre l’Iran,
les États-Unis réécrivent l’histoire
L’administration
Trump a maintenant inclus tout le
secteur financier iranien sous le décret
exécutif 13902, soumettant toutes les
institutions financières iraniennes,
formelles ou non, à un véritable boycott
international. Même avec les sanctions
écrasantes imposées jusqu’à présent à
l’Iran, cette décision aura un impact
dévastateur, visant tout bonnement à
rompre les liens limités qui relient le
peuple iranien au monde extérieur et qui
lui permettent de maintenir un minimum
de vie économique. Déconnectée du
système financier mondial, incapable de
mener les transactions financières
transfrontalières les plus élémentaires
et privée de ses réserves de devises
limitées à l’étranger, l’économie
iranienne sera poussée vers
l’effondrement, survivant, le cas
échéant, grâce à un régime souterrain de
troc et de sociétés écrans. C’est du
moins ce qu’espère le résident de la
Maison Blanche.
L’impact
humanitaire pourrait bien être
important. Le peuple iranien mérite plus
que les médicaments et les denrées
alimentaires les plus élémentaires, mais
même ceux-ci seront rendus difficiles à
trouver en raison de cette politique.
Même si l’administration Trump prétend
qu’elle préservera les exceptions
humanitaires existantes, la majorité des
banques qui restent liées à l’économie
iranienne rompront ces relations,
incertaines de ce que l’avenir leur
réserve, incertaines des avantages
financiers du maintien du commerce avec
l’Iran et craignant d’être sanctionnées
pour avoir traité avec les banques
iraniennes à quelque titre que ce soit,
humanitaire ou autre, et ce malgré la
pandémie de Covid-19.
Voir
Nasrallah : Gaza, le Yémen et l’Iran
sont impitoyablement livrés au
coronavirus, Trump est le pire criminel
de l’Histoire &
Khamenei : la pandémie de covid-19 a
démontré la faillite morale de
l’Occident
Ceux qui pratiquent
les sanctions américaines sont depuis
longtemps conscients des défis
particuliers du commerce de biens
humanitaires avec l’Iran, qui existaient
même lorsque des pans importants de
l’économie iranienne restaient ouverts
aux affaires. Ces défis ne seront pas
seulement exacerbés, mais érigeront une
barrière prohibitive. Personne, de bonne
foi, ne pourrait dire que le commerce
des biens humanitaires avec l’Iran est
sans risque de sanctions. Seule une
poignée de pays comme la Chine ou la
Russie oseront braver l’embargo de
Washington.
Certaines
personnes, comme les membres du think-tank
Fondation pour la Défense des
Démocraties (FDD), le cerveau de la
politique iranienne de l’administration
Trump et un groupe dont les vues
s’alignent généralement sur le Likud
israélien, contesteront tout cela,
affirmant que la nouvelle politique
laisse ouverts des canaux clairs pour le
commerce humanitaire avec l’Iran.
Personne ne peut prendre cet argument au
sérieux. Ceux qui sont à l’origine de
cette décision cherchent depuis
longtemps à écraser l’économie iranienne
—et, par implication, son peuple—
notamment en ciblant explicitement
l’accès de l’Iran aux biens
humanitaires. Cela explique les
sanctions contre la Banque centrale
iranienne et la dernière tentative du
FDD d’ajouter un autre niveau de
sanctions et d’inclure toutes les
banques iraniennes non désignées. Leur
objectif est clair : écraser le peuple
pour provoquer un changement politique.
Dans certains contextes, nous utilisons
un autre mot pour désigner cette
tactique : le terrorisme.
Voir
Le mythe persistant selon lequel
Trump serait anti-impérialiste et
anti-système
Selon plusieurs
rapports, la nouvelle politique de
l’administration Trump est née après les
visites du gouvernement israélien et les
efforts de lobbying du FDD. Rien de
surprenant : le FDD a longtemps fait
œuvre de blanchiment des éléments de
langage et des renseignements israéliens
auprès du gouvernement américain pour
donner l’impression qu’il y avait une
circonscription domestique naturelle
pour la politique préconisée. Mais il
n’y a pas de circonscription
anti-iranienne importante, du moins pas
américaine. C’est pourquoi la politique
est lancée tranquillement au milieu
d’une saison électorale très turbulente.
Elle vise à cacher au peuple américain
la manière dont son gouvernement cible
vicieusement les Iraniens et à préparer
le terrain pour un ultime effort de
guerre. Les partisans de cette politique
savent qu’il n’y aura pas de référendum
à son sujet, et que noyé par la
saturation totale du marché de
l’information par le Président Trump, le
public américain aura même peu de chance
d’en être informé.
On ne peut
qu’espérer que la tempête sera de courte
durée pour les Iraniens, qui ont résisté
victorieusement à 40 ans de
destabilisation américaine. Dans moins
d’un mois, les États-Unis organiseront
des élections présidentielles, et il est
désormais clair que l’ancien
vice-Président Joe Biden est le favori.
La campagne Biden a laissé entendre son
désir de revenir à l’accord nucléaire
iranien et de lever les sanctions
américaines en échange du rétablissement
par l’Iran de ses restrictions
nucléaires. Cela pourrait annoncer un
retour rapide au statu quo qui existait
à la fin de l’administration Obama, dans
lequel l’Iran se réintégrait lentement
dans l’économie mondiale tandis que la
communauté internationale avait des
garanties que le programme nucléaire
iranien était limité.
Voir
Nucléaire iranien: Londres, Paris et
Berlin cèdent au chantage de Trump et
renient leurs engagements &
Khamenei : les négociations sont une
supercherie, l’Europe est notre ennemie
au même titre que les Etats-Unis
Mais un retour à
l’accord nucléaire ne résoudra pas les
pathologies qui sous-tendent la
politique de « siège et de famine » de
l’administration Trump à l’égard de
l’Iran et ne compensera pas non plus ce
qui est devenu une « génération perdue »
en Iran, aux prises avec l’hégémonie
économique américaine. La communauté
politique de Washington ne tardera pas à
pardonner à ceux qui ont plaidé en
faveur de cette politique d’agression
scandaleuse et criminelle, les
réintégrant dans son giron et les
traitant comme des interlocuteurs
honnêtes. La perspective iranienne
continuera d’être ignorée, exclue de
toute considération par la puissante
combinaison d’un embargo qui interdit un
dialogue significatif entre les
Américains et les Iraniens et d’une
attitude de mépris pour la façon dont
nos adversaires voient les choses. De
cette manière, la roue est
contunuellement réinventée et les
enseignements ne sont jamais tirés.
Voir
Nasrallah : Trump veut affamer le Liban
et la Syrie, le Hezbollah brisera le
siège et tuera les assaillants
Mais si les
États-Unis recherchent une politique
sensée envers l’Iran, une politique
lucide sur la République Islamique mais
qui ni ne cherche à détruire le pays ou
à risquer la guerre à chaque tournant,
ils devront tenir dûment compte de la
manière dont ils en sont arrivés à cette
politique, imposant un siège économique
sans précédent dans le monde moderne et
réduisant en lambeaux ce qui reste de
leur moralité.
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