Actualité
Troisième-Reich-sur-Seine :
la tradition collaborationniste
française
Sayed Hasan
Mercredi 12 août 2015
Le 13 août 2015, Paris-plages deviendra,
pour 12 heures, Tel-Aviv-sur-Seine. Une
idée brillante, et, n’en doutons pas,
très courageuse de la maire socialiste
de Paris,
Anne Hidalgo. Elle vient à point
nommé pour commémorer le massacre
israélien à Gaza durant l’été 2014, dans
lequel plus de 2200 Palestiniens ont
péri, dont 551 enfants, et alors même
que les cendres du bébé Palestinien Ali
Dawabcheh, brûlé vif par des colons
israéliens, sont encore fumantes. Il est
vrai que cette fois-ci, ce n’était pas
du phosphore blanc, mais de simples
cocktails Molotov, et qu’ils ont causé à
peine deux victimes : il faut décidément
être aveugle pour ne pas voir qu’Israël
est réellement engagé dans une saine
voie de modération de sa politique
palestinienne.
Selon les voix
officielles, il ne s’agit nullement de
blanchir le régime israélien ou de s’en
constituer un relais de propagande, bien
au contraire :
Bruno Julliard, le glorieux
maire-adjoint de Paris,
met ainsi en garde contre « les
amalgames entre la politique de
colonisation brutale du gouvernement
israélien et la ville de Tel-Aviv qui
est une ville progressiste, symbole de
paix et de tolérance. » Car il
s’agirait rien moins que d’une
initiative en faveur de la paix, mettant
en valeur Tel-Aviv non pas en tant que
capitale internationalement reconnue
d’Israël, et donc symbole par excellence
de sa politique, mais bien, selon
les mots d’Anne Hidalgo, en tant que
« ville ouverte à toutes les
minorités, y compris sexuelles »
(certes, les Palestiniens qui ne sont
pas abattus ou incinérés sont expropriés
quotidiennement, mais les homosexuels du
monde entier viennent y célébrer la Gay
Pride, n’est-il pas ?...), et même rien
moins que « la première ville
d’opposition en Israël... détestée à ce
titre en Israël par tous les intolérants
», une affirmation aussi gratuite que
grotesque. Et il serait injuste,
poursuit Mme Hidalgo, de « rendre une
ville ou une population comptable de la
politique de son gouvernement. Ce serait
mépriser la démocratie locale et donc la
démocratie tout court » – ne parlons
pas du fait que la population
israélienne ait soutenu
à plus de 90% la dernière opération
contre Gaza, ou, sur le plan strictement
rationnel, du principe même des
sanctions internationales contre un
pays, prétendument démocratique de
surcroît. Face à de telles
falsifications, une telle impudence, un
tel contorsionnisme et une telle
abjection, les mots manquent et la
nausée soulève le cœur. Et du côté
des élus, on ne peut trouver de semblant
de refuge que dans
la déclaration de Danielle Simonnet,
Conseillère de Paris (Parti de Gauche),
qui a dénoncé « Le cynisme de
l’organisation d’une telle journée [qui]
atteint les sommets de l’indécence
», appelant à son annulation ou à une
modification radicale du programme.
En dehors de la
consternante sphère politique, un
tonnerre de voix s’est élevé en France
pour condamner cet événement, et les
réseaux sociaux se sont tellement
déchaînés que cette journée s’annonce
sous haute tension, et permettra
certainement d’apporter aux Parisiens
une image un peu plus fidèle de la
réalité de la vie en Palestine Occupée
que l’ « ambiance festive » initialement
prévue. Car démocratie oblige,
pas question de modifier un
programme visant à satisfaire les
désidératas d’une infime minorité de la
population, au détriment de l’immense
majorité des Français qui se disent bien
légitimement choqués par une telle
manifestation (plus de 90% selon
un sondage en ligne RMC / BFMTV)).
Tout ayant été dit
par ailleurs quant aux tenants et aux
aboutissants de cette ignominieuse
journée, on peut pour notre part se
demander ceci : la France se
renie-t-elle en faisant arbitrairement
de sa capitale un auxiliaire au service
de la propagande du régime sioniste et
terroriste d’Israël, afin de redorer son
blason ensanglanté et d’y favoriser un
tourisme en berne ? Viole-t-elle ses
traditions en s’inféodant au
tout-puissant lobby sioniste, voire au
lobby gay, deux cliques infinitésimales
qui dictent aujourd’hui leurs
quarante-quatre volontés à la « mère
des armes, des arts et des lois »
d’antan ? Certes non. Deux exemples
éloquents indiquent assez que le
collaborationnisme est profondément
ancré au sein d’une certaine élite
« républicaine » française, et qu’il y
aurait tout à fait lieu de parler,
au-delà du fameux
Syndrome de Stockholm, d’un
véritable « Syndrome de Paris » pour
désigner ce « fin’amor françois »
historique pour les Occupants étrangers.
En 1870, après la
débâcle de Sedan et la chute du Second
Empire, la IIIe République
fut proclamée à Paris, à la grande
frayeur des possédants. Malgré l’état de
guerre et la présence des troupes
prussiennes sur le sol national, l’élite
politique et économique française ne
redoutait pas tant l’ennemi de
l’extérieur que celui de l’intérieur,
appréhendant dans une terreur sacrée une
victoire du peuple français en armes qui
pourrait entrainer un bouleversement des
structures économiques et sociales.
Ainsi l’effort du « Gouvernement de
défense nationale » qui fut constitué
par la confrérie des Jules – Favre,
Simon, Ferry, coiffés par Trochu et
(Adolphe) Thiers – consista-t-il
principalement à saboter toutes les
velléités de résistance populaire et à
rechercher un armistice avec Bismarck au
plus vite et à tout prix. La perte de
l’Alsace et de la Lorraine paraissait
bien négligeable au regard de la
« défense sociale », de la préservation
des privilèges et de l’ordre établi, et
après la trahison de Bazaine et le
simulacre du siège de Paris, elle put
enfin être imposée à la Nation. Il fut
alors temps, enfin, de retourner les
canons français contre le véritable
ennemi, à savoir les faubourgs de Paris,
sous l’œil approbateur de Bismarck.
L’historien Henri Guillemin a
minutieusement démontré cela dans sa
trilogie sur Les Origines de la
Commune (Cette curieuse guerre de
1870, L’Héroïque défense de Paris
et La Capitulation), synthétisée
dans
sa série de conférences éponyme..
En 1940, il en est
plus ou moins allé de même. Les élites
politiques et économiques françaises ont
vu dans l’Allemagne nazie un péril
infiniment moins grand que le danger
socialiste (à cette époque, cette
doctrine n’avait pas encore été dévoyée
et portait des valeurs authentiquement
progressistes) et, plus encore,
ont considéré qu’un « désastre »
militaire pourrait permettre à la France
de renouer avec ses traditions
réactionnaires et d’abroger les
nombreuses hérésies introduites par le
Front Populaire. Ce fut notamment tout
l’effort de Pétain, qui œuvra en ce sens
au moins à partir de 1936. Et autour de
lui, nombreux sont ceux qui firent Le
choix de la défaite, pour reprendre
le mot de l’historienne Annie
Lacroix-Riz. Encore une fois, Henri
Guillemin a établi ces faits dans ses
ouvrages Nationalistes et nationaux
(1870 – 1940) et La vérité sur
l’Affaire Pétain, condensés dans
sa série de conférences correspondante..
Dans un cas comme
dans l’autre, Paris fut occupée par
l’ennemi, la Prusse bismarckienne en
1871, l’Allemagne nazie en 1940. Il est
difficile de parler d’autre chose que de
haute trahison de la part des élites
françaises, bien que la tradition
politique et historiographique continue
à porter la plupart de ses protagonistes
aux nues – à l’exception de Pétain, que
certains voudraient réhabiliter : ils
ont raison dans le sens où Pétain n’a
fait que perpétuer une tradition de
collaborationnisme fermement ancrée dans
la République, mais en prenant pour
cible le régime républicain lui-même et
les Juifs, et non plus le prolétariat
français. Il ne peut en aller autrement,
tant nos élites restent engagées sur
cette ignoble voie.
Mais s’il est
établi que les élites françaises,
corrompues et apatrides, n’ont eu de
cesse de bafouer les intérêts du peuple
et de la Nation au moins depuis la IIIe
République, qu’en est-il du peuple
français ? Comment a-t-il accueilli
l’Occupant étranger en 1871 et en 1940 ?
Henri Guillemin
rapporte que « Les Prussiens sont
entrés à Paris le 1er mars [1871], et
Paris s’est comporté d’une manière très
noble. Il faut se souvenir de ce qui
s’était passé lors de l’entrée des
Alliés – et en particulier des Cosaques
– dans Paris en 1815. On avait assisté à
des scènes hideuses. Lorsqu’ils étaient
entrés dans les quartiers populaires, ça
n’avait pas bougé, mais lorsqu’ils sont
arrivés dans les quartiers riches, sur
les grands Boulevards, ça avait été des
ovations. Les femmes du monde montaient
en croupe sur les chevaux des Cosaques,
qui étaient les ‘libérateurs’, ces
étrangers qui venaient ramener le Roi.
Le 1er mars 1871, on ne voit rien de
semblable, alors que cette fois-ci, les
Allemands rentrent par les beaux
quartiers de Paris – ils entrent par
Neuilly, par le 16e et par le 8e
arrondissements, par les Champs-Elysées.
Tout le monde a fermé les fenêtres,
toutes les boutiques sont fermées : ils
entrent dans un silence de mort. »
Puis, lorsque la mystification de la
pseudo-famine – qui aurait imposé
l’armistice – et la haute trahison des
élites furent révélées au peuple de
Paris, ce fut une explosion générale
d’indignation qui culmina avec la
Commune, dans laquelle les Parisiens de
toutes les couches sociales s’engagèrent
le 26 mars 1871 en votant massivement
pour les « rouges » : ceux-ci avaient
été écrasés aux élections de 1870, mais
triomphaient à présent comme les seuls
défenseurs authentiques de la Patrie.
En 1940, alors que
même un petit pays comme la Hollande,
vaincu et occupé par les Nazis, pouvait
s’enorgueillir de la nomination de
l’Allemand Seyss-Inquart pour le diriger
(la Reine Wilhelmine proclama que «
Le rouge de la honte nous serait monté
au visage si l’envahisseur avait choisi
pour ce poste quelqu’un de notre
nationalité. Cette ignominie du moins
nous aura été épargnée. »»), la
France n’eut pas ce bonheur. Elle fut le
seul pays à s’engager dans la voie de la
reddition la plus déshonorante, de la
collaboration et même du
collaborationnisme forcené avec
l’Occupant par le biais de son plus haut
représentant légal, maréchal de
surcroît, auréolé d’une (fausse) aura de
héros de la Première guerre mondiale. Il
fut suivi par la grande majorité des
Français, qui l’acclamèrent jusqu’au 26
avril 1944, lors de sa dernière visite à
Paris, tandis que De Gaulle resta
longtemps une figure marginale. Seule
une infime minorité de Français
s’engagea dans la lutte contre les
nazis. Deux millions de Français fuirent
Paris avant l’arrivée des Allemands,
mais le million restant coexista
paisiblement avec l'Occupant.
Si Paris est, comme
le disait Louis Veuillot, « le cancer
de la France et le scandale du monde »
du point de vue des « gens de bien » ou
possédants (Veuillot exprimait alors sa
haine pour la Commune), il appartient
aux Parisiens de retourner ce titre
contre leurs élites indignes et vénales
qui bafouent la démocratie et « montent
en croupe » sur les chars sionistes,
ovationnant les massacres de l’Occupant
israélien. Allons-nous suivre la voie de
De Gaulle, de Pétain ou de la majorité
d’attentistes ? Il est du devoir de
chacun de dénoncer autant que possible
cette nouvelle Occupation de Paris par
une entité sinon ennemie, du moins
étrangère, colonisatrice et terroriste,
dont l’infanticide est le sceau le plus
caractéristique. La Résistance
d’aujourd’hui ne s’exprimera certes pas
par les armes ou la violence comme en
1940, mais sinon par la protestation et
la désobéissance civile, du moins par le
retrait. Il faut pour le moins que les
Parisiens, plutôt que de répondre à
l’appel d’Anna Hidalgo-Collabo « à
venir nombreux », boycottent
Paris-plages ce jour-là et répondent par
« un silence de mort » à cet outrage. Et
quant à ceux en qui la flamme de la
Résistance et de la dignité brûle
encore, puissent-ils s’y infiltrer et
perturber autant que possible cet
événement, individuellement ou en
groupes, à toute heure, de tous côtés,
par toute manifestation pacifique, en
faisant entendre la voix du peuple
Français et celle du peuple Palestinien
– cris, slogans (Israël Terroriste !
Hidalgo Collabo ! Gaza, ghetto de
Varsovie, enfants innocents face à la
barbarie ! …),
tracts et photos,, drapeaux,
banderoles, poupées calcinées en mémoire
d’Ali Dawabcheh, des enfants Bakr et des
547 autres enfants ayant péri à Gaza
l’été dernier, etc. Qu’ils fassent
preuve d’inventivité : le peuple
français, et Paris en particulier, en a
toujours eu à revendre. Cela a encore été démontré durant l’été
2014, lorsque des dizaines de milliers
de Parisiens ont défié l'interdiction du
Préfet de Police de Paris (la seule au
monde) pour manifester en solidarité
avec Gaza.
Bien sûr, en cette
pseudo-démocratie-Charlie, un peu de
courage sera également requis, car il
faut s’attendre à être interpellé sans
ménagements par les forces de l’ordre –
voire passé à tabac par les miliciens de
la LDJ, considérée comme terroriste et
interdite en Israël et aux Etats-Unis,
mais ayant pignon sur rue en France ;
quiconque veut rendre quelques coups
pour l’honneur doit s’assurer de n’avoir
pas affaire à des agents de police en
civil, ce qui n’est pas évident – et à
subir jusqu’à 48 heures de garde à vue.
Celles-ci peuvent même être agrémentées
d’inculpations mensongères pour
outrages, violences, etc., qui seront
néanmoins solennellement attestées par
des agents assermenteurs – c’est
l’expérience qui parle : je n’ai pas
fait de prison ni n’ai comparu devant un
juge, car les mensonges étaient trop
gros, mais j’aurais pu ; il faut bien
savoir que nous avons affaire à des gens
sans scrupules et sans honneur, mais pas
à des lumières... Mais Gaza mérite bien
ça, et tel est le prix de la dignité.
J’y serai, et j’espère que nous serons
nombreux à faire entendre notre voix.
Sayed Hasan
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