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Palestine

Sur la destruction de ce qui fait sens en Palestine

Samah Jabr


Samah Jabr

Lundi 21 septembre 2015

Une pomme chaque jour tient à distance l’occupation. Tel semble être le message diffusé par la télévision commerciale de l’Autorité palestinienne (AP). Ici, la pomme n’est pas ce célèbre fruit qui tomba sur la tête d’Isaac Newton le conduisant à découvrir la gravitation, ni l’Apple moderne de Steve Jobs. Ce que nous avons ici, c’est une pomme dans une chanson qui accompagne l’image du Président de l’AP en train de planter un arbre avec ces mots : « Plantons des olives, plantons des citrons, plantons des pommes ; notre résistance légitime n’a pas d’armes ».

La Palestine n’est pas réputée pour ses pommes, mais l’image était évoquée pour créer une rime en arabe. La chaîne de télévision diffuse cette chanson régulièrement, avec l’espoir d’en faire un hymne national palestinien avec de nouvelles significations et valeurs.

Depuis ses débuts, le mouvement national en Palestine a défendu à travers ses chants et sa littérature le droit d’utiliser la résistance armée face à l’occupation militaire israélienne. Les grenades font partie des quelques « logos » que ce mouvement a eu à offrir. En attendant, maintenant la chanson de la « pomme » symbolise un nouveau dogme imposé aux Palestiniens, et la destruction d’un système de sens qui s’est développé au fil des années. Ce nouveau dogme n’a rien à voir avec une résistance non violente, il veut délégitimer la résistance armée. Il veut ouvrir la voie à des mesures répressives contre ceux qui s’opposent à l’occupation malgré l’échec total des officiels de la Palestine à assurer la sécurité des Palestiniens et à protéger leurs intérêts.

Le lendemain de l’incendie criminel par des colons israéliens contre la famille Dawabsheh à Douma, dans le nord de la Cisjordanie, je suis allée marcher dans la forêt de Jérusalem jusqu’à l’endroit où Mohammed Abu Khdeir, âgé de 16 ans, a lui aussi été brûlé vif par des colons l’an dernier. Tout paraissait comme si rien ne s’était passé à cet endroit ; la plaque à sa mémoire avait été démolie et remplacée par une poubelle. Ses assassins n’ont pas encore été condamnés.

Les dirigeants israéliens ont condamné le crime de Douma et ont fait l’effort d’accuser quelques « extrémistes » sans les identifier, voulant dire par là que dans leur grande majorité, les « bons » colons sont totalement innocents, mais de tels crimes ne sont pas nouveaux ; ce sont des actes systématiques de terrorisme perpétrés par les colons sous la protection et avec le soutien des autorités israéliennes. L’occupation s’empare des biens des Palestiniens par la force ; ces agressions criminelles sont destinées à effrayer les villageois palestiniens, pour les inciter à se séparer sans difficulté de leurs terres et de leurs maisons. De tels crimes ne s’arrêteront pas tant qu’il n’aura pas été mis fin à l’occupation.

Les crimes des colons sont en train de s’intensifier avec l’écrasement de la colonne vertébrale de la résistance palestinienne et l’affaiblissement de notre sécurité en Cisjordanie occupée. Les atrocités des colons dans tout le territoire sont monnaie courante, comme les cris d’indignation des Palestiniens, mais les puissants services de sécurité palestiniens en Cisjordanie n’ont jamais arrêté le moindre colon incendiant notre terre ou nos maisons. Au contraire, les agences de sécurité palestiniennes ont été félicitées par les Israéliens pour avoir retrouvé les « citoyens israéliens perdus » en Cisjordanie et pour les avoir remis sous la protection de l’armée. Les récentes arrestations et persécutions, pour des raisons politiques, de centaines de militants de l’opposition, étudiants, universitaires et journalistes, en Cisjordanie, ont miné la ténacité qui caractérise les Palestiniens et ouvert la porte à la confusion et à la vulnérabilité, face aux agressions des colons.

« Ce sont des êtres humains comme nous. Il est de notre responsabilité de les rechercher et de les rendre à leurs familles. Nous tiendrons leurs ravisseurs pour responsables, peu importe qui ils sont ». Ainsi parlait l’Autorité palestinienne ; pas à propos des quatre Palestiniens enlevés par des hommes armés dans le Sinaï, mais des trois Israéliens enlevés dans leur colonie près d’Hébron l’été dernier. Les quatre enlevés à Gaza ne suscitent pas de telles réactions de la part de l’AP ; l’apathie officielle et médiatique est totale. En effet, l’agence palestinienne officielle d’’informations, la Ma’an, a fait sienne la version égyptienne de l’histoire, selon laquelle les quatre Palestiniens qui ont été enlevés après avoir traversé la frontière à Rafah étaient des membres du Hamas qui ont été enlevés par des gens d’ISIS (État islamique) dans le Sinaï.

Cependant, une lettre datée du 15 août qui a fuité du bureau des Renseignements généraux palestiniens (voir ci-dessous), lesquels gèrent la sécurité extérieure et les relations internationales, a été adressée à Majed Faraj, directeur de ce bureau. Elle explique la coordination entre les Renseignements généraux palestiniens et leurs partenaires égyptiens, américains et britanniques pour « l’enlèvement en urgence de ces personnes, quelle que soit la manière, pour obtenir des renseignements sur l’excavation des tunnels et les capacités sous-marines du Hamas ».

Amos Gilad, directeur des Affaires politico-militaires d’Israël, et Robert Stephen Beecroft, ambassadeur des États-Unis en Égypte, devront être informés des résultats de leur interrogatoire, selon cette lettre. Bien qu’il n’y ait eu aucune confirmation officielle palestinienne, ni aucun démenti pour cette fuite, un silence assourdissant se prolonge à propos des quatre jeunes Palestiniens de Gaza, pris par des hommes armés non identifiés dans le Sinaï. De tels incidents sapent la confiance que les Palestiniens ont dans leurs dirigeants, et réciproquement.

Les informations déchirantes sur ces réfugiés arabes qui se noient en Méditerranée font resurgir les souvenirs traumatisants des Palestiniens noyés à Haïfa durant la Nakba de 1948, et elles engendrent la peur chez les réfugiés palestiniens. Comme Ghassan Kanafani le décrit dans son roman, Des Hommes dans le Soleil, quelques Palestiniens, essayant de passer la frontière entre l’Iraq et le Koweït à la recherche d’un travail, s’étaient cachés dans une citerne, et étaient morts parce qu’ils n’avaient pas d’autorisation pour traverser la frontière. « Pourquoi n’ont-ils pas cogné sur la paroi de la citerne ? » demande Kanafani.

La réponse, c’est qu’ils avaient peur d’être abattus par la police des frontières ; ils avaient peur de se voir refuser une intégration dans la société d’accueil pour le restant de leurs vies ; ils avaient peur d’être mis dans des camps de réfugiés. Peut-être avaient-ils cogné, et qu’on les a ignorés. Peut-être qu’ils étaient devenus trop fatigués pour cogner et qu’ils avaient perdu l’espoir que quelqu’un les entende. Ceci est l’histoire d’une vulnérabilité intériorisée ; un roman qui révèle ce que les gens n’osent pas dire. Et les autorités palestiniennes maintenant parlent du droit au retour comme d’un objet de folklore, sans se servir de l’attention internationale actuellement focalisée sur la crise des réfugiés syriens comme d’un levier pour le droit palestinien au retour, et sans tenter de faire revenir les réfugiés palestiniens de Syrie chez eux.

Gaza, au même moment, se noie et suffoque. Qui n’a pas entendu les voix et les cris qui montent de Gaza ? Mais qui se prépare à ouvrir les portes de Gaza ? Une conférence aux Nations-Unies sur le Commerce et Développement a identifié le blocus économique de huit ans de Gaza, de même que les trois guerres au cours de ces six dernières années, et elle en a conclu que Gaza sera « inhabitable » d’ici 2020. Est-ce que Gaza est supposée planter des pommiers jusque-là ?

Les Palestiniens sont confrontés à des projets israéliens visant à la démolition de 13 000 structures servant à la communauté en Cisjordanie, en plus de la prise de contrôle progressive israélienne de Jérusalem occupée, y compris le sanctuaire d’Al-Aqsa. L’équipe qui administre la Cisjordanie, politiquement, militairement et économiquement, entrave toute réaction palestinienne efficace à de telles tactiques israéliennes. Au lieu de réagir, les médias officiels transforment nos situations difficiles en faux triomphes et hypnotisent la population avec des festivités démesurées pour de faux succès, tel le déploiement du drapeau palestinien au quartier général des Nations-Unies à New York.

Il existe un fossé énorme entre les déclarations officielles et la politique en Palestine. Il est vrai que l’Autorité palestinienne a adhéré à la Convention des Nations-Unies contre la torture, mais les organisations des droits de l’homme rapportent de plus en plus les traitements inhumains et les tortures contre les militants détenus en Cisjordanie, par les services de sécurités de l’AP. Les politiciens sont prompts à dénoncer les atrocités israéliennes contre les Palestiniens, mais au même moment, ils neutralisent toute tentative pour prendre leur défense. Ces incohérences et ces politiques incertaines sont caractéristiques de la conduite politique officielle palestinienne ; des outils pour créer la confusion chez les gens et déconstruire leurs systèmes de valeurs.

Ce qui a été accepté depuis de nombreuses années dans le passé est maintenant prétexte à représailles : demander aux gens de manifester à certains moments, et les arrêter d’autres manifestations à d’autres moments ; poursuivre ceux qui collaborent avec Israël et déclarer ensuite que « la coordination sécuritaire avec Israël est sacrée » ; criminaliser les arrangements possibles pour un cessez-le-feu à Gaza, après avoir passé 20 ans en négociations « pour la paix » en Cisjordanie ; faire l’éloge des prisonniers politiques arrêtés par les Israéliens, puis les dévaloriser quand ces mêmes personnes sont arrêtées et humiliées par des Palestiniens ; promouvoir les dirigeants quand ils sont alliés aux autorités, comme Muhammad Dahlan, Salam Fayyad et Yasser Abed Robbo, puis salir leur réputation avec les mêmes instruments qui, précédemment, les avaient promus.

Tout cela conduit à la confusion, à la méfiance, à la vulnérabilité et à la perte de la motivation. Un État, ce n’est pas une question de hisser un drapeau ; ce n’est pas des symboles trompeurs, des clichés vides de sens et une rhétorique usée. Un État, c’est la souveraineté, c’est un sentiment d’appartenance pour tous et la sécurité dans sa patrie. C’est un système authentique et cohérent de significations qui influence l’action. Les systèmes de valeurs ou de sens peuvent évoluer et être transformés avec la raison et un objectif, pas de façon arbitraire par le dogmatisme ou l’endoctrinement ou l’’oppression.

Samah Jabr,
Jérusalémite. Elle est psychiatre et psychothérapeute et exerce en Palestine occupée.

 

 

 

   

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Source : Assawra
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