Opinion
Organisation mondiale de la santé : Cuba
donne l’exemple dans la lutte contre le
virus Ebola en Afrique
Salim Lamrani
Photo:
Opera Mundi
Mardi 23 septembre 2014
Opera Mundi
http://operamundi.uol.com.br/...
Cuba a décidé d’envoyer un contingent de
165 médecins et autres personnels de
santé au Sierra Leone, ravagé par le
virus Ebola. L’Organisation mondiale de
la santé salue ce geste sans précédent.
Selon les
Nations unies, l’épidémie d’Ebola de
type zaïre, fièvre hémorragique qui
frappe actuellement une partie de
l’Afrique de l’Ouest, en particulier le
Sierra Leone, constitue la plus grave
crise sanitaire de ces derniers temps.
En l’espace de quelques semaines, le
virus s’est propagé à grande vitesse et
l’épidémie semble hors de contrôle. Il
s’agit de la crise d’Ebola « la plus
longue, la plus sévère et la plus
complexe » jamais observée depuis la
découverte de la maladie en 1976.
Hautement contagieux, le virus se
transmet par le contact direct avec le
sang et les fluides corporels. Près de
5 000 cas ont été relevés et plus de
2 400 personnes ont perdu la vie.
L’Organisation mondiale de la santé a
lancé un appel urgent à la communauté
internationale afin de venir en aide aux
populations africaines abandonnées à
leur sort[1].
Cuba a
immédiatement répondu à la demande des
Nations unies et de l’Organisation
mondiale de la santé. La Havane a
annoncé qu’il dépêcherait à partir du
mois d’octobre 2014 165 professionnels
de la santé au Sierra Léone, pays le
plus touché par l’épidémie avec la
Guinée et le Liberia. La mission durera
au minimum six mois et sera composée
d’éléments aguerris ayant tous déjà
réalisé des missions humanitaires en
Afrique. Il s’agit du plus important
contingent médical dépêché à ce jour
dans la zone affectée.[2]
Margaret
Chan, directrice de l’Organisation
mondiale de la santé, a salué le geste
de Cuba : « Ce dont nous avons le plus
besoin, c’est de personnel médical. Le
plus important pour éviter la
transmission de l’Ebola est de disposer
des personnes adéquates, des
spécialistes adéquats, entrainés
correctement », pour faire face à ce
type de crise humanitaire. L’OMS
rappelle que « Cuba est mondialement
connue pour sa capacité à former
d’excellents médecins et infirmières.
Elle est également célèbre pour sa
générosité et sa solidarité avec les
pays sur le chemin du progrès[3] ».
Chan a
exhorté le reste du monde, en
particulier les pays développés, à
suivre la voie tracée par Cuba et à
exprimer la même solidarité vis-à-vis de
l’Afrique : « Cuba est un exemple […].
Il s’agit du contingent le plus
important de médecins, d’infirmiers et
de spécialistes du contrôle de maladies
infectieuses et épidémiologiques […].
J’espère que l’annonce faite aujourd’hui
par le gouvernement cubain incitera
d’autres pays à annoncer leur aide[4] ».
Dans un communiqué, Ban Ki Moon,
secrétaire général des Nations unies, a
également félicité Cuba pour son
action : « Le secrétaire général salue
chaleureusement l’annonce du
gouvernement de Cuba[5] ».
Science,
la plus importante revue médicale au
monde, a salué à son tour l’exemple
offert par Cuba : « Il s’agit de la plus
importante contribution médicale humaine
envoyée à ce jour pour contrôler
l’épidémie. Cela aura un impact
significatif au Sierra Leone[6] ».
Jusqu’à l’annonce cubaine, la présence
médicale internationale en Afrique de
l’Ouest s’élevait à 170 professionnels
selon l’OMS[7].
Ainsi, à elle seule, Cuba fournit une
aide équivalente à celle de toutes les
nations du monde réunies.
Roberto
Morales Ojeda, Ministre cubain de la
Santé, a fait part des raisons qui ont
motivé la décision du gouvernement de La
Havane :
« Le gouvernement cubain, comme cela a
été le cas durant les 55 années de
Révolution, a décidé de participer à cet
effort mondial sous la coordination de
l’OMS pour faire face à cette situation
dramatique.
Depuis le début,
Cuba a décidé de maintenir ses brigades
médicales en Afrique, indépendamment de
l’existence de l’épidémie d’Ebola, et
plus particulièrement au Sierra Leone et
en Guinée Conakry, avec l’accord
préalable de ses membres, expression de
l’esprit de solidarité et de l’humanisme
caractéristique de notre peuple et de
notre gouvernement[8] ».
Cuba a toujours
fait de la solidarité internationale un
pilier fondamental de sa politique
étrangère. Ainsi, dès 1960, avant même
le développement de son service médical
et alors qu’elle venait de perdre 3 000
médecins (qui ont choisi d’émigrer vers
les Etats-Unis suite au triomphe de la
Révolution en 1959) sur les 6 000
présents dans l’île, Cuba avait offert
son aide au Chili suite au tremblement
de terre qui avait ravagé le pays. En
1963, le gouvernement de La Havane a
envoyé sa première brigade médicale
composée de 55 professionnels en Algérie
pour aider la jeune nation indépendante
à faire face à une grave crise
sanitaire. Depuis cette date, Cuba a
étendu sa solidarité au reste du monde,
en particulier à l’Amérique latine,
l’Afrique et l’Asie. En 1998, suite aux
ouragans George et Mitch qui ont ravagé
la Caraïbe et l’Amérique centrale, Fidel
Castro a mis en place le Programme
intégral de santé destiné à répondre aux
situations d’urgence. Grâce à ce
programme, 25 288 professionnels cubains
de la santé ont œuvré bénévolement dans
32 pays[9].
Par ailleurs, Cuba
a formé plusieurs générations de
médecins à travers le monde. Au total,
l’île a formé 38 920 professionnels de
la santé de 121 pays d’Amérique latine,
d’Afrique et d’Asie, notamment à travers
de l’Ecole latino-américaine de médecine
(ELAM) fondée en 1999. En plus des
médecins formés à l’ELAM à Cuba (près de
10 000 diplômés par an), La Havane
contribue à la formation de 29 580
étudiants en médecine dans 10 pays à
travers le monde[10].
L’Opération
Miracle, lancée en 2004 par Cuba et le
Venezuela, qui consiste à traiter les
populations du Tiers-monde atteintes de
cataractes et autres maladies oculaires,
est emblématique de la politique
solidaire de La Havane. Depuis cette
date, près de 3 millions de personnes de
35 pays ont pu retrouver la vue, dont
près de 40 000 en Afrique[11].
Suite à l’ouragan
Katrina qui a ravagé la ville de la
Nouvelle-Orléans en septembre 2005, Cuba
a mis en place le « Contingent
international de médecins spécialisés
dans les missions de désastres et de
grandes épidémies Henry Reeve », composé
de 10 000 médecins. L’île, malgré le
conflit historique avec les Etats-Unis,
a proposé son aide à Washington, qui l’a
rejetée. A partir de ce contingent, Cuba
a créé 39 brigades médicales
internationales qui ont œuvré dans 23
pays[12].
En Afrique, depuis 1963, près de 77 000
médecins et autres collaborateurs de la
santé cubains ont offert leurs services
dans 39 pays sur 50. Actuellement, plus
de 4 000 professionnels de la santé,
dont plus de la moitié de médecins,
travaillent dans 32 pays d’Afrique.
Au total, près de
51 000 professionnels de la santé, dont
25 500 médecins, parmi lesquelles se
trouvent 65% de femmes, travaillent dans
66 pays du monde. Depuis le triomphe de
la Révolution, Cuba a réalisé près de
600 000 missions dans 158 pays, avec la
participation au total de 326 000
professionnels de la santé. Depuis 1959,
les médecins ont réalisé plus d’1,2
milliards de consultations médicales,
2,3 millions d’accouchements, 8 millions
d’interventions chirurgicales et ont
vacciné plus de 12 millions de femmes
enceintes et d’enfants[13].
Cuba a érigé la
solidarité avec les peuples en détresse
en principe de base de sa politique
étrangère. Ainsi, malgré les difficultés
inhérentes à tout pays du Tiers-monde,
Cuba a envoyé six tonnes de médicaments
à Gaza[14].C’est
un exemple parmi tant d’autres.
Fidel
Castro en a expliqué les raisons :
« C’est un principe sacré de la
Révolution. C’est ce que nous appelons
l’internationalisme, parce que nous
considérons que tous les peuples sont
frères et avant la Patrie se trouve
l’humanité[15] ».
La Havane démontre au monde que, malgré
des ressources limitées, malgré des
sanctions économiques étasuniennes qui
étouffent le pays, sans pour autant
délaisser sa propre population (avec un
médecin pour 137 habitants, Cuba est la
nation la mieux dotée au monde), il est
possible de faire de la solidarité un
vecteur essentiel de rapprochement et
d’amitié entre les peuples[16].
Docteur ès Etudes
Ibériques et Latino-américaines de
l’Université Paris IV-Sorbonne, Salim
Lamrani est Maître de conférences à
l’Université de La Réunion, et
journaliste, spécialiste des relations
entre Cuba et les Etats-Unis.
Son nouvel ouvrage
s’intitule Cuba. Les médias face au
défi de l’impartialité, Paris,
Editions Estrella, 2013 et comporte une
préface d’Eduardo Galeano.
http://www.amazon.fr/Cuba-m%C3%A9dias-face-d%C3%A9fi-limpartialit%C3%A9/dp/2953128433/ref=sr_1_1?s=books&ie=UTF8&qid=1376731937&sr=1-1
Contact :
lamranisalim@yahoo.fr ;
Salim.Lamrani@univ-reunion.fr
Page Facebook :
https://www.facebook.com/SalimLamraniOfficiel
[7]
Cuba Debate,
« Apoyo de Cuba a la lucha
contra el ébola responde a la
solidaridad de su Revolución »,
13 septembre 2014,
op. cit.
[14]
Agence France
Presse,
“Cuba envía 6 toneladas de
medicamentos a Gaza y está
dispuesta a recibir heridos”, 11
septembre 2014.
[15]
Cuba Debate,
« Cuba ha colaborado en Salud
con 120 países del mundo », 22
mai 2014.
[16]
Salim Lamrani, Cuba. Les
médias face au défi de
l’impartialité, Paris,
Editions Estrella, 2013, p. 41.
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