Opinion
Déflation, le dernier tourment avant
la grande dépression
Robert Bibeau

© Robert
Bibeau
Mercredi 27 avril 2016
http://www.les7duquebec.com/...
Depuis
des années nous attestons que s’il y a
crise économique systémique globalisée
ce n’est pas faute, pour les États
bourgeois, de tenter de réguler le mode
de production capitaliste pour
l’empêcher de culbuter. Toutes les
marionnettes politiques s’y emploient,
mais sans résultats. C’est que ce mode
de production est dépassé et ne peut
être réformé. Les lois inéluctables qui
le régissent le mènent droit au
précipice. Récemment, nous avons eu vent
d’un exposé fort éloquent que je vous
conseille fortement. Le texte et la
vidéo sont disponibles à cette adresse :
« Comment
la déflation va tuer l’économie » (1).
L’analyste dubitatif, s’interroge « Comment
la déflation va tuer l’économie ? ».
Étrange question n’est-ce pas ? Comment
peut-on « tuer » l’économie d’un pays ?
Un pays dont l’économie aurait trépassé
serait décapité. Ne nous formalisons pas
de cette métaphore et examinons les
données fournies par le spécialiste.
L’auteur écrit « Le FMI et
maintenant l’OCDE viennent de réviser à
la baisse leurs prévisions de croissance
pour 2016, sur fond de krach
financier rampant. Avec au tableau
une inflation qui continue
inexorablement de décélérer à l’échelle
mondiale, et des anticipations à long
terme qui décrochent en dépit des
solutions monétaires extrêmes mises en
œuvre depuis 8 ans pour endiguer le
mouvement. Si l’on ajoute à cela une
nouvelle montée d’angoisse sur les
créances douteuses qui minent certains
bilans bancaires, une question surgit
inévitablement. Et si la déflation*,
jusqu’ici différée ne venait tuer nos
derniers espoirs de reprise ? La
décélération de l’activité
(économique) ne va-t-elle pas emporter
nos dernières lignes de défense, au
moment où les États et les banques
centrales auraient épuisé leurs
munitions ? »
Nous
reviendrons sur ces concepts de
« dernières lignes de défense, et de
munitions des banques centrales »
(sic). Poursuivons notre investigation
et voyons ce que postule l’analyste : « Imaginer
que nous sommes installés dans un
nouveau régime permanent de taux zéro (taux
directeur des banques centrales, NDLR),
auxquels les banques centrales ne font
que s’adapter. C’était d’ailleurs déjà
l’argument de Ben Bernanke en 2005.
L’épargne est structurellement en excès
alors que les taux (d’intérêts,
NDLR) baissent ainsi que
l’inflation. Cette baisse
structurelle des taux nominaux a pour
effet mécanique d’augmenter la valeur
des titres à revenu fixe, mais aussi
celle de l’immobilier et des actions
corporatives (voici
dévoilé le mystère des fièvres
boursières cycliques et catastrophiques.
NDLR). Et cette inflation des
actifs absorbe la liquidité (la
monnaie. NDLR) émise par les banques
centrales (ce qui explique qu’il y
ait surplus monétaire, mais peu
d’inflation des prix. NDLR).
L’explosion des bilans des banques
centrales (de la dette.
NDLR) serait ainsi un ajustement
nécessaire pour assurer la liquidité des
marchés (liquidité des marchés
signifie la circulation de l’argent – ce
faux capital – dévalorisé alors que
les banques centrales s’endettent
afin de soutenir leur monnaie dévaluée.
NDLR). Tout cela installerait un
nouveau paysage de taux durablement à
zéro et sans inflation. Qui n’aurait pas
de conséquence sur la qualité de
l’investissement, puisque les détenteurs
de capitaux continuent à exiger une
rentabilité économique et financière
élevée aux entreprises (ce qui est
pure fumisterie puisque l’activité
économique fléchissant le rendement réel
ne peut qu’être décevant. Les bulles
boursières absorbent momentanément les
surplus de liquidités monétaires avant
le krach boursier inévitable. NDLR).
Dans ce nouveau régime, il y aurait deux
rendements clés. Celui de la dette et de
l’épargne sans risque égal à zéro (sans
risque prétend-il alors que les monnaies
dévaluent et que la récession s’étend
mondialement. NDLR). »
Le
scribe présente ce scénario utopiste en
faisant mine de ne pas savoir que les
détenteurs de capitaux volatiles exigent
des rendements élevés qu’ils ne peuvent
obtenir dans un contexte de récession –
baisse de la production – mondialisée où
le capital ne trouve plus à se valoriser
(ne trouve plus à produire une abondante
plus-value) d’où présentement, le
capital s’intoxique de monnaie utopique.
C’est la pyramide de Ponzi
des banques centrales en cavales et de
la monnaie en panade.
Le
scénariste économiste nous réserve
quelques surprises, poursuivons la
lecture de ses pronostics « Un taux
de rendement du capital productif
nettement positif (ce qui est en partie
normal compte tenu du risque) et ne
s’indexant pas à la baisse sur le
premier. Un fort levier positif
permanent en somme. La question à
laquelle je ne sais répondre, car ce
cas de figure n’est écrit dans aucun
manuel, c’est : ce régime peut-il
être stable ? Mon intuition forte, c’est
qu’il ne l’est pas. Car un levier
positif excessif permanent est
terriblement distorsif (sic).
C’est une machine à enrichir certains,
ultra minoritaire, ceux qui peuvent
s’endetter pour acheter des titres
d’entreprise (1826 milliardaires,
quelques centaines de milliers de
millionnaires et quelques centaines de
corporations multinationales que les
bobos conspuent impuissants, et dont ils
réclament futilement que l’État
bourgeois les taxes et les exproprient…
NDLR). Et ce biais de
répartition est précisément ce qui mine
les débouchés (marchés). On ne voit pas
ce qui ferait que le jeu s’arrêterait à
zéro. Bref, même si j’essaie de me dire
qu’il s’agit d’une nouvelle normalité,
avouons qu’elle est difficile à penser
comme un régime stable. »
Le
spécialiste, n’ayant jamais lu un manuel
d’économie politique matérialiste,
s’avance et proclame son ignorance, ce
qui décontenance. Depuis un siècle nous
savons que la hausse de la composition
organique du capital (Cc/Cv) réduit le
taux de profit moyen, et affecte
directement la valorisation du capital,
son accumulation et, en définitive la
reproduction élargie du capital.
L’ensemble de l’économie capitaliste
tient dans la loi de la valeur monsieur
l’économiste. Le chant du cygne de
l’économie politique capitaliste a
commencé, mais il n’est pas terminé. En
d’autres termes, générer des dividendes
– des profits – avec de la monnaie
crédit alors que les taux d’intérêt sont
à zéro et que la production des
marchandises et des services est
en baisse ne peut fonctionner à moins
d’admettre que tout cela explosera dans
une super bulle spéculative à venir (un
vendredi noir vous-vous souvenez ?), ce
que le scribe appelle « les dernières
lignes de défense et de munitions des
banques centrales terriblement
distorsif. » Effectivement, il a
raison le larron !
Le
thuriféraire poursuit : « L’impression
est bien que la politique monétaire est
embarquée dans une fuite en avant, face
à un monstre financier qui est devenu « too
big to fail », et qu’il faut à tout prix
le protéger d’une déflation des
prix d’actif. Les taux zéro et le
Quantitative Easing (QE) semblent bien
la réponse à cette vulnérabilité
systémique de la finance qu’un processus
d’adaptation à un nouvel équilibre de
l’économie réelle. Et dans cet
environnement de taux zéro, il semble
bien que la quête de rendements amène
les intermédiaires à s’exposer à des
risques croissants. Et ce dans un
contexte de plus en plus instable qui
dégrade leur bilan. Bref, il est bien
difficile de se départir de l’idée que
nous sommes sur le fil du rasoir,
notamment si la croissance mondiale
devait caler. »
Elle
est pourtant déjà « calée » la
croissance mondiale comme le rapporte le
FMI, la Banque mondiale et l’OCDE. Seule
la performance des corporations
multinationales dans quelques pays comme
la Chine, l’Inde et l’Allemagne
parviennent à laisser croire que
l’économie mondiale n’est pas encore en
récession globale, en marche vers la
Grande Dépression.
Et
l’expert de spéculer : « On peut bien
sûr toujours imaginer quelque issue
positive à court terme. Celle notamment
ou les investisseurs sortiraient peu à
peu du segment obligataire, pour se
replier vers les actions, dont on a dit
maintes fois qu’elles étaient loin
d’avoir éclusé le potentiel de
hausse que permettrait en théorie un
régime permanent de taux zéro. Bref, une
nouvelle vache à lait pourrait encore
quelque temps différer la grande
culbute. Mais là encore, on ne peut
s’empêcher de penser que c’est reculer
pour mieux sauter dans un nouvel épisode
de débat déflation. »
L’économiste devrait savoir que dans
plusieurs secteurs comme celui des
technologies numériques les cotes
boursières ont « éclusé » bien au-delà
de leur potentiel de hausse et que cette
vache à lait est une utopie déjà tarie
dont il ne faut plus rien attendre,
sinon le déclin. Le larbin est
malin, il sait d’instinct que sans
production – sans travail productif -,
pas de valorisation du capital, et sans
valorisation du capital pas de
dividendes à distribuer si ce n’est de
la monnaie plombée, comme celles
qu’encaissent depuis des années les
spéculateurs boursiers et les
milliardaires mafieux, pour des actifs
« titrisés » sulfureux, qui ne demandent
qu’à imploser, voguant d’un krach
boursier au dernier. La machine
économique manufacturière et financière
capitaliste marche presqu’à vide et pour
l’heure les quelque 400 plus grandes
corporations multinationales qui
contrôlent 60 % de l’économie mondiale
évitent de détruire leurs concurrents
(elles tentent des OPA cependant), les
lois de l’économie politique capitaliste
les amenant, tôt ou tard, à se
confronter directement pour le contrôle
hégémonique du processus de reproduction
élargie du capital. C’est alors que le
mythe du « too big to fail »
se transformera en désastre – déflation
et Grande dépression des « too big
to survive ».
La
classe prolétaire n’a rien à braire de
ces guerres grégaires entre
multinationales précaires, si ce n’est
de prendre acte de ce conflit de classe
interimpérialiste qui affaiblit notre
ennemi irréductible et qui prépare les
conditions objectives (et subjectives)
de l’insurrection populaire que le
prolétariat devra transformer en
révolution prolétarienne ou périr.
Référence :
http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/comment-la-deflation-va-tuer-l-economie-554664.html
En
complément, lire : MANIFESTE DU PARTI
OUVRIER (2014)
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
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