Les 7 du Québec
La troisième guerre mondiale est
commencée !
Robert Bibeau

Mercredi décembre 2018
De la guerre
commerciale à la guerre judiciaire,
politique et diplomatique
Fini la guerre
commerciale par procuration, la guerre
financière et boursière par prise de
contrôle hostile, et la guerre militaire
par tiers instrumentalisés (Afghanistan,
Soudan, Mali, Nigéria, Cameroun, Irak,
Lybie, Syrie, Yémen, Daesh, Al Qaida,
etc.). Les deux grandes puissances
du XXIe siècle se sont
trouvées sur les marchés irrigués par « les
nouvelles Routes de la soie »
(1) sur lesquelles la presse occidentale
fait l’impasse, mais qui néanmoins se
développent en direction des régions
sous tensions dont l’Afrique notamment.
Ne soyez pas surpris d’apprendre que la
France, le Royaume-Uni, l’Italie
et les États-Unis ont été chassés
d’Afrique et que ces puissances
néocoloniales déchues ripostent en
multipliant les interventions
humanitaires (sic) et soi-disant
«antiterroristes», du « Déjà vu »
au Moyen-Orient à feu et à sang et dont
les USA et les puissances de l’OTAN ont
été écartés récemment par la puissante
Russie. (2)
Ce sont les
États-Unis qui les premiers ont initié
la présente escalade comme à chaque
étape de cette guerre larvée commencée
il y a nombre d’années et qui s’est
envenimée depuis l’élection de
Donald Trump à la
Maison-Blanche. Donald Trump
le polichinelle prévisible assigné par
le grand capital américain à la mission
de renégocier le partage des marchés sur
la planète mondialisée, ainsi que nous
l’annoncions dans notre ouvrage de 2017
«La
démocratie en Amérique ».
(3)
Dernièrement, le
Département d’État américain a
frappé un grand coup en ordonnant aux
douanes canadiennes d’arrêter
illégalement madame Meng Wanzhou
directrice financière de la
multinationale chinoise Huawei,
un geste de guerre peu banal et d’un
retentissement bien plus percutant pour
le monde des affaires que le
démembrement d’un «journaliste» –
porte-serviettes des pétromonarchies du
Golfe persique –. (4)
Trump,
toujours aussi prévisible, impulsif et
indiscret, s’est empressé de dévoiler le
pot aux roses en suggérant : «qu’il
pourrait intervenir dans l’affaire
Meng Wanzhou si cela pouvait mener à
la conclusion d’un accord commercial
avec la Chine» (…) «Le secrétaire
d’État Mike Pompeo a aussitôt
insisté sur le fait que la demande
d’extradition de Mme Meng n’était pas un
levier politique dans les négociations
commerciales avec la Chine.» (5)
Trop tard, le chat sorti du sac courrait
déjà vers Ottawa et Pékin.
Les politiciens
canadiens, toujours aussi serviles, ont
tenté d’accuser la partie chinoise pour
leurs propres malversations: «Ils
(les Chinois) essaient de nous donner
une leçon et je ne pense pas que l’on
devrait le tolérer renchéri Robert
Bothwell, historien à l’Université de
Toronto. Malheureusement, il faut
réduire nos liens avec la Chine.
M.Bothwell admet que s’éloigner de la
Chine a évidemment des implications
économiques. À l’instar des
consommateurs aux États-Unis et ailleurs
dans le monde, les Canadiens dépendent
désormais des importations bon marché en
provenance de Chine. » (6)
À contrario,
l’économiste américain Jeffrey D.
Sachs, directeur du Center
for Sustainable Development de la
Columbia University déclare: «Les
États-Unis, et non la Chine, constituent
la véritable menace à la légalité
internationale» (7), indice
révélateur que le grand capital
nord-américain est divisé sur la manière
la plus efficace d’affronter la Chine
dans sa conquête hégémonique des marchés
mondiaux.
La confrontation
autour de Huawei survient à un
moment très tendu. Les États-Unis
ont imposé des droits de douane de 250
milliards de dollars sur les
exportations chinoises en réaction à la
volonté de Pékin de défier la domination
technologique américaine. Les
États-Unis ont accusé la Chine
d’utiliser des tactiques de prédation,
notamment par le vol virtuel et en
contraignant les pays étrangers à
renoncer à la propriété intellectuelle
de leur technologie à titre de prix
d’admission sur le marché chinois. Pékin
a riposté avec ses propres tarifs sur
110 milliards de dollars de marchandises
américaines.
Par ailleurs, le
motif allégué de l’arrestation est
totalement illégal au regard du droit
international. En effet, la Chinoise
Mme Meng est accusée d’avoir violé
les lois américaines contre l’Iran. Cependant,
considérez son arrestation dans le
contexte du grand nombre de sociétés,
américaines et non américaines, qui ont
violé les sanctions américaines contre
l’Iran et d’autres pays. En 2011, par
exemple, JP Morgan Chase
a payé 88,3 millions de dollars d’amende
pour violation des sanctions américaines
à l’encontre de Cuba, de l’Iran et
du Soudan. Pourtant, le PDG
Jamie Dimon n’a pas été
enlevé d’un avion et emmené en
détention. Le professeur Jeffrey
Sachs ajoute :
«JP Morgan Chase
était loin d’être le seul à violer les
sanctions américaines. Depuis 2010, les
principales institutions financières
suivantes ont payé des amendes pour de
telles violations: Banque du Brésil,
Banque d’Amérique, Banque de Guam,
Banque de Moscou, Banque de
Tokyo-Mitsubishi, Barclays, BNP Paribas,
Banque Clearstream, Commerzbank,
Compass, Crédit Agricole , Deutsche
Bank, HSBC, ING, Intesa Sanpaolo, Banque
Nationale d’Abou Dhabi, Banque Nationale
du Pakistan, PayPal, RBS (ABN-Amro,
Société Générale, Banque
Toronto-Dominion, Trans Pacific National
Bank (maintenant connue sous le nom de
Beacon Business Bank) , Standard
Chartered et Wells Fargo.» (8)
De façon tout à
fait évidente, l’action des États-Unis
contre Huawei semble faire partie
de la tentative plus générale de
l’administration Trump de saper
l’économie chinoise en imposant des
droits de douane, en fermant les marchés
occidentaux aux exportations chinoises
de haute technologie et en bloquant les
achats chinois de sociétés
technologiques américaines, canadiennes
et européennes. On peut dire, sans
exagération, que cela fait partie d’une
guerre économique et commerciale contre
la Chine.
Le professeur
Sachs conclu : «Lorsque les
règles du commerce mondial entravent les
tactiques de gangster de M. Trump, les
règles doivent disparaitre, et le
secrétaire d’État américain Mike
Pompeo a avoué la même chose la
semaine dernière à Bruxelles: « Notre
administration sort légitimement ou
renégocie des traités, accords
commerciaux et conventions obsolètes ou
néfastes pour les intérêts de nos alliés
(sic)». Pourtant, avant de mettre
fin à ces accords, l’administration les
détruit par des actions agressives et
unilatérales. (9)
De retour de Chine,
le professeur Michel Chossudovsky
va encore plus loin et affirme que : «L’actuelle
crise entre la Chine et le Canada (et
son marionnettiste de Washington) a été
préparée de longue main. Les chefs des
services de renseignements des Five Eyes
(Five Blue Eyes), ce regroupement
d’espions anglo-saxons sous l’égide de
la CIA, se sont rencontrés à Ottawa en
juillet 2018 et en Nouvelle-Écosse avec
le premier ministre Trudeau pour
planifier la stratégie visant à éliminer
l’entreprise de technologie chinoise
Huawei de la compétition pour la
nouvelle génération d’équipements de
communication.» (10)
Leçons que nous
offrent cette saga
Ce que le
prolétariat révolutionnaire doit retenir
de cette saga interimpérialiste c’est
que sous l’économie capitaliste
mondialisée la guerre multiforme entre
puissances impérialistes (concurrentes
ou alliées) est permanente et qu’elle
trouve toujours son origine dans
l’économie des rapports marchands (le
champ où le capital se réalise) ; puis
elle s’étend sous différentes formes à
l’instance politique, judiciaire et
diplomatique, pour enfin se conclure sur
le plan militaire. Plus la conjoncture
économique et sociale est catastrophique
(comme en ce moment), plus les tensions
entre puissances sont exacerbées pour le
contrôle des marchés et plus les dangers
de guerre militaire sont élevés. Le
prolétariat ne doit jamais prendre parti
pour une « patrie » ou
pour une autre, ni pour une alliance de
puissances contre une autre. Dans un cas
comme dans l’autre c’est lui qui
fournira la chair à canon et n’en tirera
rien de bon comme l’histoire nous
l’enseigne. Il est fort peu probable que
la révolution prolétarienne conjure la
guerre impérialiste en cours, mais il
est fort probable que la guerre
commerciale en cours, et qui risque de
dégénérer en guerre thermonucléaire,
provoquera la première révolution
prolétarienne sur cette Terre de misère.

NOTES
-
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs-invites/nouvelles-routes-de-la-soie-lintegration-de-laxe-eurasie-afrique/
- Adieu le
projet « secret » (sic) du «Grand
Moyen-Orient» rédigé par le
Pentagone à l’intention des
complotistes émérites :
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs-invites/les-usa-annoncent-leur-retrait-de-syrie-le-contexte/
et
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs-2-2/les-etats-unis-annoncent-leur-retrait-du-levant-toutes-les-parties-doivent-revoir-leur-strategie/
- Robert
Bibeau. (2017) La
démocratie aux États-Unis.
L’Harmattan. Paris.
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/la-democratie-aux-etats-unis-les-mascarades-electorales/
-
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/arabie-saoudite-jamal-khashoggi-non-un-parangon-de-la-liberte-de-la-presse-mais-un-pur-produit-de-la-matrice-wahhabite-takfiriste/
-
https://www.msn.com/fr-ca/actualites/quebec-canada/huawei-la-réaction-de-pékin-soulève-des-craintes/ar-BBQYu12?ocid=spartandhp
et
https://www.theglobeandmail.com/opinion/article-the-us-not-china-is-the-real-threat-to-international-rule-of-law/
-
https://www.theglobeandmail.com/opinion/article-the-us-not-china-is-the-real-threat-to-international-rule-of-law/
https://www.msn.com/fr-ca/actualites/quebec-canada/huawei-la-réaction-de-pékin-soulève-des-craintes/ar-BBQYu12?ocid=spartandhp
-
https://www.theglobeandmail.com/opinion/article-the-us-not-china-is-the-real-threat-to-international-rule-of-law/
- Les États-Unis
semblent vouloir cibler Huawei,
notamment à cause de son succès dans
la commercialisation des
technologies de pointe 5G à
l’échelle mondiale. Les États-Unis
affirment que la société pose un
risque de sécurité spécifique en
raison de capacités de surveillance
cachées dans son matériel et ses
logiciels.
https://www.theglobeandmail.com/opinion/article-the-us-not-china-is-the-real-threat-to-international-rule-of-law/
- «Une récente
diatribecontre Huawei
dans le Financial Times
est révélatrice à cet égard. Après
avoir concédé que « vous ne
pouvez pas avoir de preuve concrète
d’ingérence dans les TIC, à moins
d’avoir la chance de trouver
l’aiguille dans la botte de foin« ,
l’auteur affirme simplement que « vous
ne prenez pas le risque de mettre
votre sécurité entre adversaire
potentiel. » En d’autres termes:
Bien que nous ne puissions pas
vraiment indiquer un comportement
inapproprié de la part de Huawei,
nous devrions néanmoins inscrire la
société sur une liste noire.
- Michel
Chossudovsky
https://www.mondialisation.ca/les-dessous-de-la-crise-chine-canada/5629695
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