Opinion
La crise économique de l'impérialisme
d'après la théorie marxiste
(3e partie de trois)
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 24 décembre 2014
La semaine
dernière, nous avons publié la seconde
partie de cette trilogie présentant
l’analyse marxiste de la crise
économique systémique de l’impérialisme.
Nous avons présenté les concepts de
capitalisme et d’impérialisme et examiné
quelques équations qui définissent le
capitalisme monopoliste d’État d’après
la théorie marxiste de l’économie
politique. Cette semaine nous examinons
les questions de la dette souveraine, du
crédit à la consommation et de
l’industrie militaire, trois aspects de
l’économie politique impérialiste qui
n’avaient pas atteint un développement
aussi important du temps de Marx.
La première partie
de l’article est ici :
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/la-crise-economique-de-limperialisme-dapres-la-theorie-marxiste/
La seconde partie
de l’article est ici »
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/la-crise-economique-de-limperialisme-dapres-marx-2/
La
dette
souveraine et l’endettement des ménages
Dans les pays
capitalistes, on observe un endettement
public et privé endémique. En
2008, aux États-Unis, les ménages
devaient 145 % de leur revenu annuel
moyen. La dette était de 85 % du revenu
annuel d’un ménage français (et elle
augmente sans cesse). Elle était de 165
% pour les ménages canadiens, bien
au-delà du seuil critique de 150 %,
soi-disant sanctionné par les banquiers.
Il en est de même dans presque tous les
pays industrialisés. Il est aisé de
deviner que cet endettement croissant
connaîtra bientôt une fin catastrophique
comme en 2007 lors de la crise des «
subprimes » et de l’effondrement des
prêts hypothécaires adossés à des
montages de « produits financiers
dérivés » sulfureux. Depuis, rien n’a
changé dans la gouvernance de la haute
finance internationale et les
malversations et les trucages
spéculatifs se poursuivent sans relâche,
car il est impossible de modifier les
lois inéluctables de l’économie
politique capitaliste. Le moteur du
fonctionnement de l’économie politique
capitaliste est la reproduction élargie
du capital et donc l’accumulation de
capitaux – la valorisation des profits –
et quiconque s’opposera à cette loi
incontournable sera écarté
inexorablement.
La dette souveraine
de tous les États capitalistes provient
d’une différence substantielle entre les
recettes (taxes et impôts) et les
dépenses. Pas besoin d’être économiste
réputé pour l'affirmer. La véritable
question est de savoir pourquoi ce
déséquilibre croissant perdure depuis si
longtemps ? Est-ce le poste « Dépense »
qui augmente trop vite ou le poste «
Revenu » qui n’augmente pas suffisamment
?
La loi de la productivité décroissante
Afin de répondre à
cette question du déséquilibre fiscal
prolongé, un détour s’impose via la
loi de la productivité décroissante.
Le principe en est simple, plus la
productivité du travail s’accroit moins
elle risque de s’accroitre davantage.
Nous nous servirons de l’exemple de la
France pour démontrer ce principe du
rendement décroissant (4).
En France, entre
1960 et 2012 la productivité du travail
salarié est passée de hausses annuelles
moyennes de 5 % entre 1960 et 1974, à
des hausses moyennes d’à peine 0,1 % par
année entre 2007 et 2012 alors que la
mécanisation était pourtant plus
poussée.
À long terme, on assiste en
France à un ralentissement par paliers
de la productivité du travail salarié.
La coupure la plus drastique apparut
avec la récession de 1974-1975, qui
démontra l’épuisement des gains de
productivité très élevés.
Les capitalistes
réussirent alors cette prouesse, en
France comme dans la plupart des pays
capitalistes avancés, d’abaisser ou de
maintenir la part des salaires à un
niveau très bas. Autrement dit, les
capitalistes sont parvenus à garantir
une rentabilité du capital élevée,
malgré des gains de productivité en
perte de vitesse. Faute de gain de
plus-value relative (mécanisation), le
capital arracha des gains de plus-value
absolue, accroissant d’autant
l’exploitation de la force de travail
(temps de travail en hausse,
augmentation des cadences et
intensification du travail salarié).
Par contre, la
crise économique de 2007 a fait chuter
la productivité du travail et – dans
la mesure où les salaires n’ont
pas été freinés dans la même proportion
– la crise a fait chuter la
profitabilité des entreprises
multinationales. En France, pour la
période 2007 – 2012, les salaires ont
cru de 0,8 % par année alors que la
productivité n’a augmenté que de 0,1 %
annuellement, tandis que le temps de
travail n’a augmenté que de 0,1 % ce qui
a contribué à dégrader la rentabilité du
capital en générale de -0,9 % par année
sur la période. Veuillez noter que les
hausses des salaires de 0,8 % par année
n’ont pas réussi à couvrir l’inflation
si bien que ces hausses de salaire
correspondent tout de même à une baisse
du pouvoir d’achat des salariés et à la
paupérisation de la classe ouvrière.
Voici un marché qui s’amenuise ce qui
prépare les conditions de la crise de
surproduction sur laquelle nous
reviendrons.
Les politiques
gouvernementales d’austérité, en France,
en Europe et en Amérique, visent à
réduire les dépenses publiques afin de
suivre la baisse des revenus étatiques
et contenir ainsi la dette
gouvernementale (souveraine) afin de
restaurer les taux de profits mis à mal
par la crise de surproduction. Il est là
le mal français, le mal étatsunien, le
mal canadien et le mal espagnol,
portugais et grec, etc. C’est la
participation de ces pays, de ces
prolétariats, à la grande communauté
impérialiste mondiale en déclin qui
explique la misère grandissante des
populations ouvrières et non pas leur
appartenance au sous-ensemble qu’est la
zone euro et la zone dollar. Le
Royaume-Uni et le Japon n’appartiennent
ni à l’un ni à l’autre, ces pays
possèdent leur propre monnaie souveraine
et pourtant les économies britannique et
japonaise suivent le courant descendant
de l’économie mondiale croupissante.
Les faibles hausses
de productivité du travail salarié,
couplé aux réductions des taux de
profit, couplées à l’inflation rampante
et dissimulée, associée à la
quasi-stagnation des salaires
ont fait chuter les revenus des États de
moins en moins providentiels et de plus
en plus policiers.
« État policier » et « État
providence »
«
L’État policier » est la
forme de gouvernance qu’adopte
l’impérialisme déclinant quand il
souhaite réprimer sauvagement le
mouvement ouvrier « déchaîné » et
endiguer la résistance populaire. «
L’État providence » est la
forme de gouvernance qu’adopte la classe
capitaliste monopoliste et son État de
droit quand la conjoncture économique
est temporairement favorable, que les
profits s’engrangent et se valorisent et
que le prolétariat est sous contrôle de
l’appareil syndical et populiste de
collaboration de classes (ONG et
associations populaires, partis
sociaux-démocrates électoralistes, et
bobos de la go-gauche sous contrôle).
Quoi qu’il en soit c’est toujours le
même État bourgeois sous hégémonie de la
classe capitaliste monopoliste
dominante.
Les dépenses gouvernementales
Abordons maintenant
la question des
dépenses gouvernementales. Elles
sont composées de deux rubriques. La
première rubrique concerne les
dépenses de soutien à la reproduction du
capital. La seconde rubrique
concerne les
dépenses assurant la reproduction de la
force de travail, ce que nous avons
appelé précédemment le salaire social.
La classe ouvrière et la main-d’œuvre
salariée qualifiée se multipliant dans
les pays développés et parmi les pays «
émergents » accédant à
l’industrialisation capitaliste, cette
rubrique des dépenses gouvernementales a
explosé au cours des cinquante dernières
années. Si bien que le salaire social –
la portion des revenus et des services
des ménages qui provient de l’État
avoisine maintenant 50 % dans plusieurs
pays capitalistes avancés. Les ONG
bourgeoises, secondées par les
groupuscules gauchistes, en sont venues
à croire que «
l’État providence » existait
vraiment et qu’il constituait un État de
droit céleste (sic) pour les pauvres,
les itinérants et les lumpens
prolétaires et ils ont placardé leurs
revendications réformistes exigeant un
revenu minimum garanti de 30 000 $ (CND)
pour chaque foyer canadien, au-delà du
salaire moyen des salariés défavorisés,
au-delà du salaire minimum dans la
plupart des provinces canadiennes.
L’État des riches indifférent à ces
balbutiements laisse ces énergumènes
s’agiter et dévoyer le mouvement de
résistance populaire qui se heurte ainsi
à la classe ouvrière qui sait bien que
si un tel revenu était accordé aux
indigents ils le paieraient de leurs
taxes et de leurs impôts majorés. C’est
à ce genre de cul-de-sac militant que
mènent les revendications réformistes et
opportunistes.
Revenons à
l’analyse de la comptabilité
gouvernementale. Au début, l’État
bourgeois a comblé ses déficits en
haussant drastiquement les taxes et les
impôts à la charge des salariés, leur
faisant ainsi payer en « solidarité »
les services qu’ils recevaient. De nos
jours, le salarié canadien moyen
retourne 70 % de son salaire aux
différents paliers de gouvernement
(municipal, scolaire, provincial et
fédéral). Une enquête fiscale dans une
multitude de pays capitalistes avancés
révèle le même niveau de contribution si
bien que la classe laborieuse contribue
à même son salaire pour 60 % à 70 % des
revenus de l’État capitaliste.
Les entreprises ne contribuent
plus que pour 40 % à 30 % du total des
revenus de l’État. Il est impossible
pour les États bourgeois de modifier
cette péréquation sans provoquer la
faillite des PME (petites et moyennes
entreprises) et sans entrainer la
délocalisation des entreprises
multinationales, ce que les divers
traités de libre échange international
facilitent grandement (9).
Face à cette
impasse déficitaire, les États
capitalistes ont eu recours à deux
artifices. Le
premier fut de
faire tourner la planche à billets
créant une inflation galopante, la
dévaluation de leur monnaie, et
une baisse de la consommation des masses
laborieuses
dont le pouvoir d’achat
s’effritait au fur et à mesure que la
valeur de leur monnaie périclitait.
Le second artifice
mis en place par les Banques centrales
fut de
réduire les taux d’intérêts sur les
prêts permettant à chaque foyer et à
chaque gouvernement d’emprunter
massivement sur leur hypothétique revenu
anticipé. Cette deuxième solution, sans
espoir et sans vision, tire à sa fin.
L’endettement des ménages est
aujourd’hui catastrophique et celui des
États encore plus dramatique.
Par ailleurs, comme
la crise économique de l’impérialisme
est mondialisée il devient de plus en
plus difficile pour les anciens pays
capitalistes industrialisés d’exporter
leurs déficits et d’importer la
plus-value des pays émergents où les
multinationales impérialistes n’achètent
plus les marchandises dispendieuses de
leurs filiales établies
dans leurs pays d’origine,
préférant y exporter leurs pacotilles
fabriquées à vil prix dans des pays au
prolétariat soumis. D’autant plus que
les entreprises multinationales qui
produisent d’un côté et de l’autre du
Pacifique et de l’Atlantique sont les
mêmes consortiums impérialistes qui ne
cherchent qu’à « tondre les coupons »,
qui délocalisent leur production, et à
expatrier leurs profits dans les paradis
fiscaux les plus hermétiques. Moult
économistes s’étonnent de l’ingéniosité
des requins de la finance et des
capitaines d’industrie dans
l’élaboration de leurs montages
financiers alambiqués visant à effacer
la trace des transferts de bénéfices et
de capitaux d’une multinationale vers
ses filiales internationales et vice
versa (12).
Ces déplacements
constants de marchandises de pays à bas
salaires vers des pays aux salaires plus
élevés, pour consommer, nécessitent des
accords douaniers de libre-échange qui
sont négociés entre les grandes
alliances économico-politico-militaires
(Asie-Pacifique, UE, ALENA, Accords
Transatlantique, ALBA, etc.)
Contrairement à ce que pensent les
économistes « déterministes » et la
gauche bourgeoise « économiste », ce ne
sont pas les accords internationaux qui
entrainent la délocalisation, puis
l’import/export des marchandises. Ce
sont bien les délocalisations
industrielles et le développement
différencié, inégal et combiné, des
économies capitalistes mondialisées et
intégrées qui amènent la négociation des
traités et le dumping des marchandises
d’un marché vers un autre, d’une
économie de matières premières vers une
économie industrialisée et vers une
économie tertiarisée (économie de
services). Nonobstant ceci les marchés
internationaux rétrécissant constamment,
et un conflit mondial se préparent pour
le partage des marchés entre les grands
conglomérats financiers et les
industriels internationaux.
La guerre comme prolongation de
l’économie et de la politique
D’après la théorie
marxiste, la guerre est la poursuite des
activités politiques et diplomatiques
par d’autres moyens. La guerre est la
continuation de la politique entre les
États, entre les gouvernements et donc
entre les classes sociales. Selon
l’idéologie marxiste, la politique, la
diplomatie et la guerre sont les fruits
des contradictions économiques qui
secouent un mode de production. Le mode
de production capitaliste, à son stade
impérialiste, détermine la politique, la
diplomatie et la stratégie militaire
d’un État, et d’une alliance
impérialiste d’États. Selon ces
principes, il est donc requis d’analyser
et de comprendre le développement
économique, la crise économique
sévissant dans un pays, ou dans une
alliance de pays impérialistes, pour
comprendre la politique militaire de ces
États et leurs manigances.
Voici l’opinion de
deux généraux d’état-major de l’Armée
populaire de Chine à propos de la guerre
et de l’armement militaire contemporain
: « La guerre n’est plus «
l’usage de la force armée pour obliger
un ennemi à se plier à sa propre volonté
», mais l’utilisation de «
tous les moyens, dont la force armée ou
non armée, militaire ou non militaire et
des moyens létaux ou non létaux pour
obliger l’ennemi à se soumettre à vos
propres intérêts » (13).
Les dépenses militaires, l’industrie
militaire
Les dépenses
militaires gouvernementales visent-elles
à relancer l’économie capitaliste en
déroute ? Les dépenses militaires
visent-elles à absorber les surplus de
production et à relancer le processus
d’accumulation capitaliste ? Le secteur
de l’industrie militaire est-il
différent dans son développement
des autres secteurs industriel de
l’économie capitaliste ? L’industrie
militaire constitue-t-elle un modèle
différent d’étatisation de l’économie
nationale et de relance du processus de
valorisation de la plus-value
puisqu’elle entrainera, éventuellement,
la destruction massive de moyens de
production et de produits de
consommation ?
Ces hypothèses nous
paraissent farfelues. Chaque fois qu’une
usine ferme, qu’une mine est abandonnée,
qu’un champ est retourné à la jachère,
qu’un atelier est lockouté, qu’un
chantier est clôturé, que des
marchandises soient détruites, brûlées
ou délaissées, il y a destruction de
moyens de production et de marchandises.
Il n’est pas requis de construire des
tanks, des drones et des porte-avions
pour détruire des moyens de production
et des marchandises. D’ailleurs, deux
généraux chinois indiquent dans un
volume publié récemment qu’il est
terminé le temps des armes exclusives de
tueries massives. Pour les généraux
chinois « un seul krach boursier
provoqué par l’homme, une seule invasion
par un virus informatique (ou le virus
Ebola NDLR), une simple rumeur ou un
simple scandale provoquant une
fluctuation du taux de change d’un pays
ennemi […], toutes ces actions
peuvent être rangées dans la catégorie
des armements de conception nouvelle.
[…] Nous croyons qu’un beau matin les
hommes découvriront avec surprise que
des objets aimables et pacifiques ont
acquis des propriétés offensives et
meurtrières » (14).
Présentement, les
taux d’utilisation des moyens de
production tournent autour de 70 % dans
les économies industrielles avancées. La
Chine produit vingt millions de voitures
par année (1er producteur
mondial et premier marché mondial depuis
2013). Les capitalistes chinois ne
parviennent pas à écouler 20 % de cette
production. Ces surplus de voitures sont
détruits après deux ans de dormance dans
les champs et sur les docs. Les
capitalistes chinois ne peuvent réduire
drastiquement leur production de peur
que leurs concurrents japonais et
occidentaux n’envahissent leurs marchés.
Voilà un bel exemple de l’anarchie du
développement économique capitaliste non
planifié dans un pays pseudo-socialiste
soi-disant planifié (15).
Que ce soit en
Chine pseudo-socialiste ou aux
États-Unis d’Amérique, l’industrie de
l’armement est une dépense totalement
improductive (non génératrice de
plus-value) qui loin de solutionné la
crise économique de l’impérialisme
l’aggrave fortement en réalisant des
ponctions importantes à même la
plus-value générale produite par le
capital industriel. L’État bourgeois, le
seul client de l’industrie de l’armement
conventionnel, doit financer ces
dépenses en haussant les taxes ce qui
constitue une ponction sur les capacités
de consommation – le pouvoir d’achat –
des travailleurs. Tout ceci réduit
d’autant le marché national de
consommation de produits finis.
Ou alors l’État bourgeois finance
ces dépenses militaires parasitaires par
des emprunts souverains ce qui réduit le
crédit disponible, renchérit le coût de
l’argent (hausse des taux d’intérêt) et
réduit en définitive la demande pour les
autres marchandises en concurrence sur
les marchés locaux et internationaux.
Bref, l’industrie
militaire est développée par les États
impérialistes non pas pour relancer leur
économie nationale à la dérive, mais
dans le but de contribuer aux alliances
militaires imposées. Alliances ayant
pour mission de prolonger, par des
moyens militaires, les politiques
économiques et commerciales mises de
l’avant par les alliances impérialistes
agressives vis-à-vis leurs concurrents,
petits ou grands, le plus souvent
récalcitrants.
Il n’est pas approprié pour les
ouvriers d’appuyer telle ou telle
puissance impérialiste agressive ou
conciliante (temporairement) puisque tôt
ou tard ce sera lui le salarié, son
fils, sa fille qui serviront de chair à
canon d’un côté ou de l’autre de
l’affrontement
militaire impérialiste étriquée.
L’industrie de guerre américaine
Entre 1939 et 1944,
le PIB des États-Unis a cru de 154 %
alors que les profits globaux se sont
accrus
de 290 %. Ceci serait le
fruit de la croissance économique
générée par la Seconde Guerre mondiale.
Faut-il en déduire que la guerre est une
activité productive et de croissance
pour une économie impérialiste expansive
? Non évidemment ! S’il en était ainsi,
tous les pays impérialistes seraient en
guerre perpétuelle les uns contre les
autres. Le gonflement artificiel du PIB
des États-Unis pendant la Seconde Guerre
mondiale s’est fait sur le dos des
masses ouvrières pressurées, y compris
les femmes que l’on a alors « libérées »
de leur foyer afin de leur permettre de
jouir du travail insalubre en usine en
tant qu’esclaves salariés mal payés. Les
profits accrus ont reposé sur le gel des
salaires pour l’ensemble de la classe
ouvrière, sur le rationnement des biens
de consommation courants, sur
l’endettement de pays alliés (URSS,
France, Grande-Bretagne, Belgique,
etc.), sur les emprunts de guerre par la
suite remboursés via les réparations de
guerre allemande, italienne et
japonaise. Bref, ce n’est pas la guerre
qui a fait produire la plus-value et les
profits. La guerre fut le prétexte par
lequel la classe ouvrière masculine et
féminine du monde entier fut pressurée
jusqu’au sang autant sur les champs de
bataille de l’Est que de l’Ouest et sur
le Pacifique, que dans les ateliers, les
chantiers, les champs, les forêts et les
mines du monde entier. La guerre ne fut
pas la source, mais bien le prétexte
pour la surexploitation et l’industrie
de l’armement fut l’instrument de la
surproduction. Dès 1946, la
récession s’est réinstallée aux É.-U.
jusqu’à la guerre de Corée (1951-1953),
qui fut elle aussi suivie d’une période
de récession.
En 2013, les
États-Unis assumaient 45 % des dépenses
militaires totales mondiales et pourtant
ce pays était le plus mal pris du
capitalisme mondial. C’est en partie
parce que les États-Unis sont astreints
à fournir cet effort gigantesque en
termes de dépenses militaires
improductives et parasitaires que cet
État est en si mauvais état économique.
Les États-Unis doivent maintenir leurs
dépenses militaires, car leur
productivité industrielle stagne, et la
composition organique de leur capital
industriel s’élève et que leur taux de
profit réel périclite (hormis le profit
spéculatif boursier appelé à s’envoler
en fumée). Pendant ce temps, leurs
concurrents et leurs alliés leur
tiennent la dragée haute, houspille et
grappille leurs marchés nationaux et
internationaux, leurs sources
d’approvisionnement en énergie, en
matières premières et en main-d’œuvre
sous-payée.
Entre 1980 et 1990,
la dette étatsunienne est passée de 25 %
à 50 % de leur PIB. Elle a plus que
doublé depuis. Entre 2000 et 2008, les
dépenses militaires américaines sont
passées de 400 à 700 milliards de
dollars ce qui n’a nullement empêché le
krach boursier de 2008. Tout ceci
atteste bien que l’industrie militaire
ne constitue pas un marché différent des
marchés concurrents. Il appert que le
marché et l’industrie militaire se
comportent exactement comme tous les
autres marchés capitalistes avec cette
seule exception que l’industrie
militaire est le produit du capitalisme
monopoliste d’État. Quelles sont les
conséquences de cette évidence ?
L’industrie militaire et de la guerre
n’a pas vocation à relancer l’économie
autrement que dans son secteur
spécifique. Quand rien ne va plus,
l’industrie militaire et de la guerre a
vocation de faire compléter les
transactions amorcées et souvent bloquer
dans les domaines diplomatiques,
politiques, commerciaux et financiers.
La guerre c’est l’économie politique
développée par des moyens drastiques. La
guerre vise à partager les zones de
ressources, d’énergie et de matières
premières, les marchés lucratifs et les
secteurs d’exploitation du travail
salarié. Ce faisant l’industrie
militaire et guerrière participe à sa
manière à l’ensemble de l’économie
politique impérialiste. Tous les
principes marxistes décrivant l’économie
politique capitaliste s’appliquent à ce
secteur économique comme à tous les
autres.
Les conglomérats
financiers impérialistes ont attribué
aux États-Unis la mission de contrôler
militairement ce monde en panade –
secoué par la crise mondiale – où les
différentes bourgeoisies «nationales»
sont mises à mal par les forces
ouvrières en chamade. Heureusement, pour
tous ces chacals, le mouvement ouvrier
est désorganisé, infiltré, désorienté,
découragé par ces années gâchées à voir
dégénérer tous les partis de gauche sur
lesquels ils auraient aimé compter
maintenant que le grand changement
révolutionnaire est devant nous.
Le mode de
production capitaliste doit être
renversé, détruit et remplacé par un
nouveau mode de production et la classe
ouvrière est responsable de mener
l’humanité à son apogée.
Pour un complément
d’analyse en économie politique :
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
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