Les 7 du Québec
La mascarade électorale américaine,
édition 2020
Robert Bibeau

Dimanche 18 octobre 2020
Dans tout mode de production, le
pouvoir fondamental réside dans
l’instance économique. La classe
sociale qui possède et contrôle les
moyens de production, de
commercialisation et de communication
possède et contrôle le pouvoir
économique, mais aussi le pouvoir
politique, médiatique, juridique,
diplomatique, militaire, moral et
idéologique. C’est pour avoir oublié, ou
nié, cette vérité que les organisations
de gauche comme de droite qui se sont
prétendue ouvrière et prolétarienne ont
périclité, ont dégénéré, se sont
intégrées à l’appareil d’État bourgeois
ou sont disparues.
Ainsi, sous le mode
de production capitaliste la classe
capitaliste est propriétaire des moyens
de production, de commercialisation et
de communication, sauf de la force de
travail qui appartient à chaque salarié
qui n’a d’autre choix cependant que de
vendre son bien, son temps
d’usage-travail aux capitalistes. De ce
postulat découle que la classe
capitaliste possède et contrôle le
pouvoir social dans les instances
économique, politique, médiatique et
idéologique, sauf, cette parcelle de
pouvoir économique, et donc politique,
médiatique et idéologique attachée à la
propriété de la force de travail. Le
salarié peut en disposer et refuser de
l’aliéner, dans les limites de la
dictature imposée par la classe
hégémonique sur l’ensemble des activités
de la société, même quand cette
dictature prend le nom de « démocratie
électorale et parlementaire ». À celui
qui refuse les règles de cette dictature
du capital sur l’ensemble de la vie
sociale et sur le travail, il ne reste
que la marginalité, la clandestinité ou
le monde interlope.
Ainsi, depuis des
décades, les médias à la solde
dissimulent les déshérités dans les
milieux urbains ; présentent les milieux
mafieux comme un épiphénomène d’altérité
; ne rendent plus compte des grèves
ouvrières et la bureaucratie syndicale,
la cinquième colonne des riches dans le
mouvement ouvrier, fait tout ce qu’elle
peut pour saboter les luttes ouvrières.
Enfin, quand tout cela ne suffit pas, le
législateur, le juge et la police sont
appelés en renfort et le plein poids de
la loi bourgeoise s’abat sur le
prolétariat en lutte et la grève se voit
réglementée, encadrée, contingentée,
euthanasiée, interdite. Ce faisant, le
prolétariat perd le seul pouvoir social
qu’il possède – refuser de travailler,
refuser de produire du surtravail et de
la plus-value –. En lieu et place, la
classe bourgeoise et ses affidés
politiques, l’industrie des ONG
stipendiées et l’oligarchie syndicale
proposent aux prolétaires d’exprimer
leur colère dans des manifestations qui
n’entravent pas la production (ce qui
fut fait avec les Gilets Jaunes),
https://les7duquebec.net/archives/253109
de signer des pétitions « bonbons », et
de voter à intervalle régulier pour l’un
ou l’autre des fantoches que la machine
« démocratique » des riches leur offre
via les mascarades électorales. Plus la
crise est profonde, plus la panoplie des
larbins politiciens est sans fin.
Les conditions de
vie et de travail des prolétaires
s’aggravant, les organisations
politiques traditionnelles, ceux de
l’alternance droite-gauche, qui depuis
longtemps ne constituent plus une
alternative, sont déconsidérées au point
d’avoir à céder la place à une force que
les oligarques en place qualifient de
« populistes » et « d’extrémistes »
comme hier ils les qualifiaient de
« fascistes ». Ce phénomène largement
répandu (Trump aux États-Unis, Le Pen
en France, etc.) est la
manifestation d’une modification de la
domination qu’exerce le grand capital
mondial (2400 milliardaires environ)
dans son alliance de classe
traditionnelle avec la bourgeoisie et la
petite bourgeoisie pléthorique sous le
capitalisme industriel. Alliance de
classe qui structure le système de
gouvernance dit démocratique puisqu’elle
est une condition de son existence sous
cette forme qui a l’avantage de faire
croire que l’État des riches est
l’exécuteur de la volonté populaire.1
Le premier geste
d’insoumission et de protestation que la
classe prolétarienne dominée doit poser
c’est de refuser d’accréditer ce
fétichisme démocratique-électoraliste
étatique, et de refuser de
participer à la gouvernance des pouvoirs
politique et idéologique, et au
formatage médiatique de la pensée
contrôlée, imposée par la classe
hégémonique à l’ensemble de la société.
C’est pour cette
raison que les premières organisations
ouvrières diffusaient leurs propres
journaux, organisaient leurs propres
activités culturelles, possédaient leur
propre maison d’édition et refusaient de
participer aux mascarades électorales
organisées par la bourgeoisie pour
subjuguer l’embryonnaire pouvoir
politique et idéologique de la classe
ouvrière. Incidemment, la crise
économique s’atténuant, quand le
mouvement ouvrier s’étiola sous les
balles de sucre du grand capital, c’est
via les médias du prolétariat, que les
petits bourgeois infiltrèrent et
noyautèrent, que le mouvement ouvrier
fut miné. C’est aussi via les nouveaux
médias émancipé que l’idéologie
révolutionnaire du prolétariat renaîtra.
Les prolétaires
révolutionnaires croient que la bonne
façon d’user de leur pouvoir politique
et idéologique, à l’intérieur de la
société capitaliste sous dictature
« démocratique » bourgeoise, c’est de
refuser de cautionner et de refuser de
participer aux mascarades électorales
bancales, ces parodies de « démocratie
populaire », sauf pour les dénoncer et
en démontrer l’inanité. Par ces
activités de dénonciation et de
décryptage de ces parades électorales,
la classe prolétarienne consolide sa
détermination et refuse toute
collaboration de classe avec quelque
section que ce soit de la classe
bourgeoise (y compris la petite
bourgeoisie, aujourd’hui qualifiée de
classe moyenne), et elle exprime ainsi
son mépris du pouvoir et des
institutions capitalistes et appel à
leur abolition. De toute façon, que la
gauche bourgeoise le veuille ou non,
spontanément la classe prolétarienne
exprime déjà son refus de collaborer à
son aliénation et s’abstient de plus en
plus de voter. Aux États-Unis, au cours
de la campagne électorale de 2016, 46 %
de la population habilitée à voter ne
s’est pas présenter au bureau de
scrutin, au grand dam de la gauche
sectaire, de ce nombre une majorité de
prolétaires. Il en sera de même au cours
de l’élection de 2020.
**********
Dans cet article,
nous décrirons les forces en présence
dans ce conflit interne à la bourgeoisie
que constitue une élection
« démocratique » bourgeoise. En effet,
dans toute élection les enjeux sont ceux
qui confrontent la classe dominante,
l’un de ces enjeux pouvant être de
remettre en question la façon qu’une
section de la classe capitaliste entend
se servir de l’appareil d’État pour
tenter de solutionner ses difficultés ;
l’affrontement entre monétaristes
(banquiers et boursicoteurs) et
fiscalistes (bureaucrates keynésiens)
est récurrent en Amérique. L’enjeu peut
aussi concerner la façon d’embrigader la
classe prolétarienne pour la maintenir
dans le giron de la bourgeoisie
nationaliste chauvine à la défense de la
patrie en danger (America First). Au
cours de l’élection américaine de 2016,
un enjeu portait sur le programme
d’assurance santé pour les ouvriers
instauré par le Parti Démocrate et que
le Parti Républicain promettait d’abolir
afin de se gagner les faveurs des
ouvriers. À l’élection de 2020 il n’est
jamais proposé un programme complet et
gratuit de services de santé et de
sécurité au travail, revendication
évidente pour la classe prolétarienne.
Et quand bien même un groupuscule de la
gauche gauchiste, opportuniste ou
réformiste (Bernie Sanders) présentait
cette revendication, qui le saura, qui
le croira ? Pire, le prolétariat
lui-même se moquerait de ces prétentieux
gauchistes qui ne savent pas qu’un tel
programme social est impossible sous le
mode de production capitaliste en
faillite. Les ouvriers le savent alors
que « L’avant-garde » ne le sait pas.
Dans les quelques pays occidentaux où de
tels programmes ont été implantés au
cours des trente années de prospérité
(1950-1980), ces soi-disant « acquis »
sociaux sont minés et liquidés.
Évidemment, la
gauche vous dira que de toute manière la
classe ouvrière n’existe plus et quand
elle subsiste elle est embourgeoisée et
corrompue et que seule «l’avant-garde»
petite-bourgeoise agitée est
révolutionnaire. Autant le mode de
production capitaliste, dans sa phase
d’expansion impérialiste, a produit une
large couche de petits bourgeois à sa
solde, un foisonnement d’intellectuels
et d’artistes obséquieux, quantité
d’aristocrates syndicaux bien payés,
moult employés d’ONG stipendiés, une
multitude d’engagés au service
(répressif notamment) de la classe
capitaliste et du grand capital mondial;
autant le système capitaliste doit
aujourd’hui se débarrasser de ces
affidés (non producteur de plus-value),
les paupériser et les renvoyer parmi les
prolétaires de la misère pendant cette
phase de déclin qui s’est accentué au
cours de la récession de 2008 et s’est
accéléré avec la pandémie de 2020. Les
classes ouvrière et prolétarienne ne
sont pas disparues des États-Unis même
si leurs effectifs ont diminué ou ont
été recomposés par l’apport de petits
bourgeois déclassifiés. On dénombre 1,5
milliard de prolétaires sur Terre et
leur nombre est croissant en Chine, en
Inde et en Afrique. Malgré ce nombre
gigantesque, le prolétariat
international ne devrait pas vendre son
âme sur l’autel des mascarades
électorales.
Quels sont les
motifs d’une élection et sur quels
principes se basent la démocratie
absolutiste bourgeoise dans la plus
grande puissance économique et militaire
du XXe siècle, mais qui ne
l’est déjà plus au XXIe
siècle…ce qui explique la pugnacité du
combat électoral entre les camps
Républicain et Démocrate.
Nous analysons le
projet stratégique et le
programme tactique des
différentes classes dans ce contexte
électoraliste ubuesque. Nous démontrons
la mystification à l’œuvre dans une
telle mascarade électorale et le rôle
des médias à la solde. Nous présentons
les enjeux pour les différentes classes
sociales et pour les factions dominantes
et concurrentes, maîtresses du jeu
électoral dans lequel la classe
prolétarienne n’a qu’un rôle
d’observateur et de faire valoir, et
pour lequel elle éprouve de moins en
moins d’intérêt.
Incidemment, pour
les prolétaires révolutionnaires ça
n’existe pas l’économie, la politique,
la culture, la morale et l’idéologie de
«l’Amérique». Ce qui existe c’est
l’économie capitaliste développée et
dirigée par et pour le grand capital
international (phalange américaine) à
l’encontre de la classe prolétarienne
(section américaine) qui est subjuguée
et aliénée d’abord par le capital
national américain, et ensuite par le
grand capital mondial, tout comme le
capital américain exploite et spolie
les autres sections nationales du
prolétariat international. Sous le mode
de production capitaliste, à son stade
impérialiste, le capital est mondial et
le prolétariat est international. Les
reliquats d’allégeance nationale sont
l’apanage des petits bourgeois
paupérisés et bientôt prolétarisés et de
la moyenne bourgeoisie déqualifiée en
cours d’élimination accélérée sous le
confinement meurtrier.
La suite la semaine
prochaine
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