Opinion
La mondialisation néo-libérale,
qu'est-ce que c'est ?
Robert Bibeau
Mercredi 17 septembre 2014
Critique de la pensée réformiste
néolibérale
Les expressions «néo-libéralisme»,
«mondialisation», «globalisation»,
«monétarisation», «financiarisation» et
«austérité» sont présentées comme
caractéristiques d’un nouveau stade de
développement du mode de production
capitaliste. L’économie politique de la
«mondialisation», de la «globalisation»
et de «l’austérité» a été étudiée et
décrite par Lénine dès 1916. Par contre,
il est justifié d’affirmer que
l’économie politique impérialiste est
entrée dans une nouvelle phase de
développement depuis les années
1968-1973 et la répudiation des accords
de Bretton Woods,
l’abolition de la convertibilité-or du
dollar américain et de d’autres devises,
et l’adoption du régime des changes
monétaires flottants (1).
Toutefois, cette nouvelle phase de
l’impérialisme ne constitue que
l’exacerbation des contradictions déjà
présentes dans le capitalisme classique.
D’après les critiques de la
mondialisation néolibérale, le mode de
production capitaliste commercial
(mercantile), reposant sur le commerce
et la colonisation aurait évolué vers le
capitalisme industriel néocolonial,
marqué par le protectionnisme et
l’édification de barrières tarifaires
afin de protéger les marchés nationaux
de la concurrence étrangère. Ce mode de
production capitaliste – ce système
d’économie politique dirait Marx – a
ensuite évolué vers le «néolibéralisme,
mondialisé, globalisé, monétariste et
financiarisé» que nous connaissons
aujourd’hui. Les caractéristiques de ce
«nouveau» système économique néolibéral
seraient que l’ensemble de l’économie
est aujourd’hui accaparé par le secteur
privé et une poignée de banquiers (les
puissances d’argent, ce talisman) au
détriment de l’État défenseur du bien
public citoyen.
L’État, hier encore juste et équitable –
arbitre impartial entre les forces
sociales contradictoires – aurait été
usurpé et accaparé par une clique de
riches – en collusion – se cooptant,
complotant et pervertissant les
fonctionnaires – stipendiant les
politiciens par des caisses électorales
occultes et des pots-de-vin, et
s’accaparant de tout le pouvoir
politique démocratique bourgeois (sic).
Les médias dans nos sociétés libres et
démocratiques (sic) auraient manqué de
vigilance et parfois même ils auraient
malencontreusement fermé les yeux sur
ces malversations. La mission de
l’opposition électoraliste
altermondialiste, sociale-démocrate et
nationaliste chauvine de la gauche
bourgeoise serait aujourd’hui de
réorienter l’appareil étatique et
gouvernemental dans la direction de son
penchant naturel en faveur de l’équité
et de la justice sociale. Tout ceci
n’est que fumisterie.
Le but ultime de cette opposition
civique et citoyenne larmoyante est de
retourner à l’État providence tant
aimé mais révolu – symbole des
années de bombances où la petite
bourgeoisie exultait (2). La petite
bourgeoisie, courroie de transmission et
«porteuse d’eau» du grand capital,
voudrait ainsi conserver ses privilèges
(ses chaînes dorées) et ne pas subir les
affres du néo-libéralisme mondialisé et
globalisé. Ce système sans-cœur et
prévaricateur qui détruit toutes les
bases de «l’harmonie sociale» que le
petit-bourgeois a eu tant de mal à
crédibiliser aux yeux des ouvriers et de
tous les salariés (3).
« À partir des années 1970, avec la
montée en puissance des pensées de
Milton Friedman et de Friedrich Hayek le
mot
néo-libéralisme prend un autre sens.
À partir de Michel Foucault, le
néolibéralisme est alors présenté
comme une technique de gouvernement, une
politique économique et sociale étendant
l’emprise des mécanismes du marché à
l’ensemble de la vie. Friedman et Hayek
sont désignés en France comme en étant
en grande partie les inspirateurs bien
qu’ils ne se soient jamais réclamés du
néolibéralisme, mais seulement du
keynésien, qui limite voire supprime
l’intervention étatique. Le contexte
économique marqué par la fin du système
de
Bretton Woods relance les
discussions entre écoles économiques et
leur intensité a contribué à populariser
ce terme » (4).
Les idéaux et les principes du
réformisme néo-libéral
Les termes «néolibéralisme
mondialisation globalisation
monétarisation financiarisation»
désignent aujourd’hui un ensemble
d’orientations idéologiques,
économiques et politiques d’inspiration
réformistes et opportunistes qui
partagent plusieurs idées
communes
:
Le courant de pensée néolibéral dénonce
l’aspiration d’une portion des
intellectuels qui s’opposent à «l’austérité»
et espèrent le maintien de «l’État-providence»
en déliquescence. Le courant de pensée
néolibéral dénonce leurs jérémiades pour
un accroissement des interventions
gouvernementales dans l’économie sous
forme de règlementations et d’aide
sociale. Les néolibéraux dénoncent
le maintien de charges fiscales pour les
entreprises privées «déficitaires»
(sic). Ils dénoncent la prise de
contrôle d’entreprises privées par
l’État «socialiste», entreprises qui
devraient, selon les intellectuels
néolibéraux, être rétrocédées au secteur
privé, dès que renflouées et
rentabilisées. Ce à quoi s’opposent les
petits-bourgeois altermondialistes et
pseudo-socialistes, au motif que ces
entreprises étatiques rentables
profiteraient aux contribuables (ce qui
est totalement faux comme le démontre la
hausse constante du prix de
l’électricité produite par la société
d’État Hydro-Québec).
Le courant de pensée néolibéral fait la
promotion de l’économie de libre marché
au nom de la liberté de l’agent
économique producteur et de l’acteur
économique - consommateur et au nom de
«l’efficacité» économique de la libre
entreprise concurrentielle et
monopolistique. Argument des plus
ludiques quand on observe la crise
économique structurelle et systémique
qui n’en finit plus de démontrer
l’inaptitude de la libre entreprise
capitaliste à survivre sans guerre
génocidaire, sans crises financières,
sans famine endémique, sans pandémie
meurtrière et sans cataclysme.
Néolibéraux et gauche bourgeoise
devraient être suffisamment avisés pour
réaliser que le libre marché et la libre
concurrence n’existent pas sous
l’impérialisme monopolistique.
Le courant de pensée néolibéral prône la
dérégulation et la dérèglementation des
marchés qui devraient se réguler par les
forces et les lois naturelles du marché
«libre» et le jeu de la libre
concurrence. Les réformistes rétorquent
que trente années de
dérèglementation-dérégulation ont
entraîné l’intensification de la
corruption, de la collusion, du pillage
des administrations publiques;
l’accentuation de la fraude fiscale;
l’extension de la spéculation boursière;
la dérive monétaire et bancaire; la
destruction des services publics; la
multiplication des empoisonnements
alimentaires; la profusion des accidents
ferroviaires, aériens, routiers,
maritimes et pétroliers; l’extension des
guerres régionales; ainsi que l’anarchie
totale de l’économie. Tout ceci est
véridique, mais il est tout aussi vrai
que ces tendances sont inscrites dans le
code génétique de l’impérialisme et ne
pourront jamais être enrayées.
Les idéologues néolibéraux défendent
les mesures d’austérité et aspirent
à la disparition du secteur public au
bénéfice du secteur privé dans tous les
domaines rentables et profitables. À
l’État il restera les services publics
non rentables. Évidemment, la classe
ouvrière n’acquiesce nullement à ce
salmigondis ubuesque. Le militant
vigilant perçoit rapidement que les
pouvoirs sont indifférents à ses
atermoiements véhéments. Seule une
opposition gréviste très musclée pourra
contrecarrer les décisions arrêtées dans
les offices climatisés.
Les intellectuels néolibéraux exigent
que les secteurs d’activités économiques
de production, de distribution et des
services publics non profitables soient
abandonnés s’ils ne sont pas essentiels
à la reproduction élargie du capital. Ou
alors qu’ils soient mis à la charge de
l’utilisateur-payeur (récupérant ainsi
les salaires consentis aux travailleurs)
libérant ainsi du revenu gouvernemental
pour augmenter les subventions aux
entreprises privées sous prétexte de
«stimuler l’économie», sous prétexte de
créer des emplois (très lourdement
subventionnés, précaires et éphémères),
sous prétexte de rembourser aux
banquiers la dette souveraine contractée
avec la collusion des politiciens et des
majordomes du capital.
D’un commun accord néolibéraux et
politiciens s’entendent pour que les
budgets étatiques soient impérativement
mis au service du grand capital pour sa
reproduction élargie. Ce détournement
des argents des fonds de pension, des
dépôts bancaires, des crédits publics,
dorénavant ne passeront plus par un
processus d’essaimage généralisé (aide
sociale, allocation familiale, garderie
subventionnée, transport en commun,
logement subventionné, soins de santé et
d’éducation dilapidés et services
publics vilipendés), mais
s’engouffreront directement dans les
goussets des monopoles et des
milliardaires. Le chantage des
entreprises forestières et des
alumineries exigeant une nouvelle baisse
des tarifs d’électricité, déjà
sous-facturée, est une manifestation
authentique de cette dictature
impérialiste sur la gouvernance publique
démocratique bourgeoise (5).
Les critiques du «néolibéralisme»
geignent que ce faisceau de mesures
d’austérité et de désengagement des
gouvernements accroit les inégalités
sociales; déstabilise le tissu collectif
citoyen; compromets la paix civique;
pille les ressources naturelles et
déséquilibre l’État dans ses pratiques
juridiques en l’engageant «trop
fortement» du côté des possédants, lui
retirant son verni terni «d’arbitre
impartial» au-dessus des classes
sociales. Cesser de gémir militants de
la gauche bourgeoise en délire et
veuillez-vous raviser. L’État des riches
capitalistes se dépare ainsi de son
masque d’hypocrisie et affiche sa vraie
nature de bâtard du capital.
L’État providence ne fut qu’un
intermède cadeau des néo-colonies
surexploitées que la crise économique
systémique globalisée et mondialisée ne
permet plus de raviver.
Le laisser-faire «dirigiste» néolibéral
Loin de «laisser faire» l’État
capitaliste bourgeois intervient
constamment et de plus en plus
vigoureusement pour organiser et
soutenir la reproduction élargie du
capital. D’abord, pour assurer la
valorisation (plus-value - profits) du
capital qui est la condition de base de
la reproduction du système d’économie
politique impérialiste moderne. La
mondialisation néo-libérale globalisée
caractérisée par l’austérité et la
non-intervention de l’État n’est que
mensonge et duperie qu’accréditent les
organisations de la gauche bourgeoise
par leurs dénonciations du pseudo
désengagement de l’État.
Il n’y a jamais eu de désengagement de
l’État bourgeois. Il y a simplement
des mesures d’austérité et de
réorientation des engagements de l’État
directement en faveur du capital sans
passer par aucun intermédiaire.
Chaque jour l’État se désengage des
services publics et réduit ses dépenses
destinées à la reproduction de la force
de travail et au soutien social,
cependant que chaque jour
l’État-providence pour les
riches
s’engage et transferts les deniers
publics ainsi épargnés en direction des
programmes de soutien destinés aux
capitalistes (au Québec, on dénombre 2
300 programmes de subventions aux
entreprises distribuant quelques
milliards de dollars en subventions aux
entreprises) afin d’assurer la
reproduction élargie du capital dont
l’État est le commandeur universel,
l'état-major de la classe possédante et
dominante et ceci quelle que soit la
fraction de la bourgeoisie qui contrôle
temporairement le pouvoir d’État (6).
LA SEMAINE PROCHAINE : LE COMBAT ENTRE
L’ÉCONOMIE RÉELLE ET L’ÉCONOMIE
VIRTUELLE.
Complément de lecture :
Manifeste du Parti ouvrier mondial
(2014).
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
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