Les 7 du Québec
Le Forum social mondial de Montréal –
2016 – un bilan
Robert Bibeau

Mercredi 17 août 2016
http://www.les7duquebec.com/...
Un
autre monde est nécessaire, est-il
possible ?
Le 12e
Forum social mondial s’est tenu du 9 au
14 aout 2016 à Montréal (Canada).
Encore une fois le FSM a réuni des
militants sociaux engagés, des employés
d’ONG stipendiés, des syndicalistes bien
payés, des collectifs contre la guerre
illuminés, des universitaires, et des
intellectuels de renom, de fait, il n’y
manquait que la classe ouvrière
révolutionnaire, nous y reviendrons.
Ce 12e Forum a connu une
grande affluence grâce à une couverture
médiatique importante. Cette
participation masque pourtant un
essoufflement des capacités de
mobilisation parmi la petite bourgeoise
paupérisée, les étudiants endettés, les
jeunes désœuvrés, les chômeurs affamés,
les retraités délaissés et les lumpen
sacrifiés. C’est que cette Cour
des miracles des causes perdues
les plus diverses ne fait plus recette
parmi ceux qui voudraient réformer
cette société dont ils ne comprennent
pas le fonctionnement, mais contre
laquelle ils ont quantité de griefs.
Ils
étaient plusieurs milliers de promoteurs
des causes les plus diverses à se
retrouver pour s’émuler, se coordonner,
échanger et s’illusionner sur
l’efficacité présumée de leurs activités
militantes. Ce n’est pas la bonne
volonté qui faisait défaut, mais plutôt
la clarté des propos, et surtout il
manquait la classe sociale qui fera un
jour jaillir de ses mains un nouveau
mode de production et un Nouveau Monde
dont la plupart des participants n’ont
aucune idée. Enfin, ce genre de
rassemblement permet au service de
police de rafraichir leurs fichiers
d’activistes.
Si un
autre monde est nécessaire, comme le
proclame le slogan de l’événement, il
est assuré que ce n’est pas au milieu de
cette foire d’empoigne qu’il va émerger,
même si certains groupes
altermondialistes, écosocialistes et
syndicalistes, prétendent que
l’opposition aux paradis fiscaux, à la
spéculation boursière, aux pouvoirs
financiers, à la destruction de
l’environnement, à la liquidation des
services publics, à la pauvreté, à
l’iniquité sociale, et en faveur d’un
salaire minimum garanti ont beaucoup
progresser pendant ces fraternités…
Permettez-nous d’en douter. Il est peu
probable que l’un ou l’autre des États
policiers qui nous oppriment se laissera
impressionner par le cahier des
doléances rassemblées au cours de ce
Forum médiatisé.
Dis-moi
qui te paie et je te dirai qui tu es
C’est
l’État bourgeois qui finance la
quasi-totalité de ces manifestations,
assemblées et forums de contestation.
Que ce soit via les Fondations largement
subventionnées comme la Rockefeller
Fondation, la Ford Fondation, la Tide
Fondation et consorts (1), que ce soit
via les syndicats d’affaires lourdement
financés par l’État (2), via les ONG
stipendiées, via les facultés
universitaires, les associations
populaires, et les partis politiques
réformistes ou de la gauche
opportuniste, tous subventionnés. Quel
que soit le canal par lequel le capital
s’insinue il le fait pour conserver le
contrôle sur la critique réformiste,
pour que même dans l’adversité les
militants se tournent vers lui – l’État
– pour lui quémander plus de justice
sociale, moins de sacrifices, afin que
chacun intériorise le principe que
l’État est tout puissant et que le
révolté doit y verser tous ses espoirs,
même si jamais exaucés. Voilà pourquoi
la participation décline dans ces
mouroirs du désespoir contestataires.
L’État-major du capitalisme ne peut
magnifier la révolte anticapitaliste, on
s’entend.
Tout
ceci n’est pas le fruit d’un « complot »
fomenté par une loge maçonnique (sic),
mais une fonction idoine de l’État de
droit et de ses appendices. C’est leur
mission de récupérer – digérer – ou
expulser – tout corps étranger qui
pourrait perturber le bon fonctionnement
de la société. Voyez comment les partis
de gauche, issus des différentes vagues
révolutionnaires (1871, 1917, 1936,
1968) ont été assimilés comme appendices
de l’État bourgeois. Ces partis de la
gauche bourgeoise électoraliste n’ayant
plus aucune crédibilité parmi les
classes sociales endeuillées, une
nouvelle tactique d’intégrisme politique
a été adoptée. Elle s’adresse désormais
à la « société civile », aux sommités
fabriquées par les médias à la solde et
aux agents indépendants flottants à la
surface du corps social en mouvement.
La
critique doit s’exprimer, mais ne rien
changer… ou si peu !
Tous
les malheurs que ces gens ont
stigmatisés à travers ces journées de
palabres sont des conséquences
directes de la crise économique
systémique du mode de production
capitaliste. Crise économique sur
laquelle les oligarques boursiers, les
ploutocrates financiers, les énarques
étatiques, les thuriféraires politiques,
les opportunistes gauchistes n’ont de
prise, ni aucune capacité d’inverser les
tendances boursières et monétaires.
C’est ce constat d’impuissance que les
experts et les « sommités fabriquées »
sont chargés de mystifier comme nous
l’avons observé dans nombre d’ateliers.
À la fin, les participants quittaient
l’assemblée confondus avec le sentiment
d’une grande impuissance devant cette
mascarade de politiciens lilliputiens.
Dans
quelques ateliers, un certain nombre
d’experts économistes, des « N’a
qu’à » comme les désignes nos camarades
Français, proclamaient que : L’État
« n’a qu’à » nationaliser les
banques ; L’État « n’a qu’à » légiférer
contre les paradis fiscaux ; l’État
« n’a qu’à » règlementer l’activité
boursière et bancaire ; L’État « n’a
qu’à » interdire ou sanctionner la
pollution ; L’État « n’a qu’à » taxer
les riches, etc. Chaque
participant savait très bien que rien de
cela n’a jamais été fait, et que rien de
cela ne sera jamais fait. L’État
bourgeois ne mord pas la main qui le
nourrit. Le serpent ne se mange pas la
queue. On pourrait en dire autant des
organisateurs de ces foires de la
contestation qui ne mordront jamais la
main de l’État qui les stipendie. Bref,
l’État bourgeois socialement omnipotent
subventionne sa propre contestation
pourvu que celle-ci ne remette pas en
cause celui-là.
Il y a
longtemps que l’État bourgeois « démocratique »
– un des thèmes récurrents au courant de
cette kermesse de la « société
civile-citoyenne » – (sic) a appris
qu’il vaut mieux permettre à la critique
de s’exprimer afin de mieux l’endiguer,
puis l’exciser. Le présentateur
arnaqueur comprend qu’il lui faut dire
et redire à la populace en colère que le
père Fouettard étatique est responsable
de ses malheurs et que l’État-justice
est son dernier recours « providentiel ».
Allez bonnes gens, laissez votre
portefeuille ou votre carte de crédit à
la caisse et entrez consommer, et si
vous n’avez pas d’emploi – et donc aucun
pouvoir d’achat – veuillez quitter sans
rien demander, la friperie et le
comptoir alimentaire sont à côté.
Tout
repose sur l’économie… mais il faut le
nier
Si des
milliers de frustrés se sont quand même
mobilisés pour assister à ce tohubohu
des révoltés, c’est que l’amertume est
immense parmi toutes les classes
sociales en souffrance, y compris chez
les capitalistes financiers, parmi la
bourgeoisie commerciale et des services,
parmi les industriels et les politiciens
opportunistes, sans compter la petite
bourgeoisie pléthorique sous le
capitalisme des services, de même
pour la classe ouvrière et les
prolétaires révolutionnaires. Chaque
classe sociale souhaite tirer les
marrons du feu et s’enfuir dans ses
bottes de sept lieues. Mais ce ne sera
pas possible. Le mode de production
capitaliste ne peut être réformé, il ne
peut que s’effondrer. Il faudra le
renverser mais c ne sera pas l’œuvre des
petits-bourgeois.
De
telles tombolas populaires ont leurs
utilités et les prolétaires
révolutionnaires ne doivent pas les
bouder. Tous ces gens doivent allez, et
iront de toute façon, jusqu’au bout de
leurs illusions et ils supplieront
l’État bourgeois d’éloigner les
tourments de leur firmament, jusqu’au
jour où, repu de leur frustration, ils
arriveront à la conclusion que c’est la
classe prolétarienne révolutionnaire –
justement celle si peu représentée et
jamais mentionnée dans ces activités –
qui détient la clé de cette nouvelle
société émancipée qu’ils ont tant
souhaité, et que seul le prolétariat
saura construire de ses mains, mais pas
avant d’avoir renversé l’État de la
société des opprimés et des aliénés pour
s’émanciper.
Il
nous faut aller parmi la multitude
essaimer la bonne nouvelle, une solution
est à portée, c’est de renverser l’État
embourgeoisé, mais de grâce camarades,
protégez-nous des « avant-gardes » de la
gauche bourgeoise en débandade, nos
ennemis, on s’en charge.

(1)
http://www.les7duquebec.com/actualites-des-7/forum-social-mondial-de-montreal-2016/
(2)
http://www.les7duquebec.com/actualites-des-7/argent-des-syndicats-lintegralite-du-rapport-perruchot/
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