Les 7 du Québec
Le «productivisme»,
une condition de la
révolution prolétarienne
Robert Bibeau

Mercredi 17 juillet 2019 L’ennemi de
classe
L’ennemi de la
classe prolétarienne n’est pas la
bourgeoisie capitaliste. L’ennemi, c’est
le capital en tant que moteur du mode de
production capitaliste, dont la
bourgeoisie est le valet docile et
impuissant. L’ennemi de la bourgeoisie
ce n’est pas le prolétariat. L’ennemi de
la bourgeoisie c’est le capital en tant
que moteur du mode de production
capitaliste dont le prolétariat est
l’instrument docile de valorisation.
Ces deux classes se
complètent dans leurs tâches au service
du capital. Pour l’une la tâche consiste
à administrer et à investir ce capital;
pour l’autre, la tâche consiste à
valoriser le capital par le travail
salarié. L’ensemble de ce processus de
production a pour vocation d’assurer la
reproduction de l’espèce humaine sur le
biotope terrestre.
L’ensemble de ce
processus – que Marx appelait : «le
mode de production capitaliste»
est aujourd’hui appelé «productivisme»
par la petite-bourgeoisie verte
écologiste. Les limites métaphysiques de
la pensée bourgeoise portent les bobos à
prendre l’incidence pour le moteur du
processus reproductif.
Qu’est-ce que le
« Productivisme »?
Voici comment la
petite-bourgeoisie écologiste aigrie
présente le prolétariat et le
productivisme industriel: « De plus,
avec la révolution industrielle et son
confort, le prolétaire a adopté la
morale bourgeoise et ses attentes: comme
dans la pub, ce véritable évangile des
temps modernes, le prolétaire en veut
toujours plus. Le prolétaire n’est donc
pas un révolutionnaire, mais un bon
collaborateur de la société
industrielle. C’est d’ailleurs ainsi que
les patrons les appellent: des
collaborateurs. » « Et de quoi
les prolétaires sont-ils les collabos?
Du «productivisme» industriel et de sa
hiérarchie, c’est-à-dire de la
hiérarchie du travail industriel,
hiérarchie qui renforce les hiérarchies
basées sur la richesse et le pouvoir.
Les prolétaires sont donc tout sauf des
révolutionnaires, car en pratique ils ne
sont ni plus ni moins que les soldats
d’élite du mode de vie industriel.
Enfin, même en supposant que le
prolétaire, poussé par la crise et la
déprécation de ses conditions de vie, se
mette à devenir révolutionnaire au lieu
de partir en chantant, faire une guerre
dont il ne veut pas, les divisions de la
gauche ne pourront que faire échouer
cette révolution».
Quand Marx et
Engels parlent du prolétariat, ils en
parlent de la manière suivante :
le prolétariat est révolutionnaire ou
il n’est rien. Quand Marx et Engels
vont se rendre compte que le prolétariat
n’est pas à la hauteur de leur
espérance, ils vont imaginer l’idée du
prolétariat anglais embourgeoisé, devenu
une aristocratie ouvrière.
Pourtant Marx
n’était pas «productiviste»,
puisqu’il a écrit : « La machine
possède le merveilleux pouvoir d’abréger
le travail et de le rendre plus
productif : nous la voyons qui affame et
surmène les travailleurs. Par l’effet de
quelque étrange maléfice du destin, les
nouvelles sources de richesse se
transforment en sources de détresse. Les
victoires de la technique semblent être
obtenues au prix de la déchéance totale.
À mesure que l’humanité se rend maître
de la nature, l’homme semble devenir
esclave de ses semblables (…) Pour doter
de vie et d’intelligence les forces
matérielles et ravaler la vie humaine à
une force matérielle. Ce
contraste de l’industrie et de la
science modernes d’une part, de la
misère et de la dissolution modernes
d’autre part, cet antagonisme entre les
forces productives et les rapports
sociaux de notre époque, c’est un fait
d’une évidence écrasante que personne
n’oserait nier. » (1)
L’aristocratie
ouvrière productiviste ?
La duperie du
concept farfelu d’«aristocratie
ouvrière» fera du tort à la classe
prolétaire qui ne peut pourtant se
transformer en «aristocratie». Marx,
par cet anathème, s’éloignait du
matérialisme dialectique et se laissait
aller au découragement petit-bourgeois.
En 1860, Marx aurait dû savoir
que la classe ouvrière ne pouvait mener
la révolution prolétarienne à son terme
au moment même où le capitalisme était
en pleine expansion impérialiste
triomphante. Marx était un grand
économiste, mais un piètre tacticien
prolétarien. Un mode de production ne
peut être renversé tant qu’il n’a pas
atteint la plénitude de son
développement matériel. Lénine et
les bolchéviques en feront la preuve.
De nos jours, en
termes de développement du mode de
production, des forces productives et
des rapports sociaux de production, le
capitalisme a atteint son zénith, et il
ne peut que se buter à ses propres
limites… à ses contradictions internes
et insolubles, à son «productivisme»
nihiliste.
L’intellectuel que
nous avons cité donne libre cours à son
mépris de la classe ouvrière qu’il
affuble des tares de sa classe
petite-bourgeoise. Non, le prolétariat
n’envie pas le capitaliste ni les
personnages riches et célèbres. Oui, en
effet, le prolétaire par son travail sur
la chaine de production est aliéné et il
assure par son labeur quotidien la
valorisation du capital et donc la
pérennité de son esclavage salarié.
C’est qu’il y est poussé par la pulsion
inconsciente de se perpétuer en tant
qu’esclave salarié – la tâche que lui a
confié le capital. Son émancipation sera
le résultat de la révolution et non son
prérequis.
Le productivisme
est un mythe – un concept métaphysique –
une absurdité. Ce qui existe réellement,
c’est la course à la productivité,
c’est-à-dire cette loi impérative de
l’économie politique capitaliste qui
exige que le travailleur produise le
maximum de marchandises dans le minimum
de temps et d’effort afin que le cout de
reproduction de sa force de travail
nécessaire soit réduit et que le
temps de surtravail – de plus-value
– soit maximisé. L’application
impérative de cette loi économique
capitaliste a pour conséquence la
maximalisation de la production que les
révolutionnaires universitaires
appellent le «productivisme»
c’est-à-dire, dans leur esprit, la
production pour la production sans
nécessité de profitabilité, ce qui est
un non-sens.
De fait, le
productivisme est la conséquence
inévitable de l’application des lois
immuables du mode de production, sur
lesquels ni le prolétariat ni la
bourgeoisie n’ont la moindre emprise. La
course à la productivité effrénée
conduit à ses limites : la surproduction
– productiviste.
La mission des
écologistes
En période de
surproduction des marchandises, comme
nous le vivons actuellement, les
capitalistes exigent que l’on mette fin
au «productivisme», à la
production incontrôlée de biens et de
services invendus, qui mine leurs
profits et ils sont prêts à lancer une
guerre nucléaire mondiale pour détruire
les surplus de marchandises invendues et
pour mettre fin au «productivisme» (mais
pas à la productivité) ce qui explique
que les médias des riches propagent ces
idées saugrenues via la
petite-bourgeoisie écologiste.
La classe
prolétarienne deviendra révolutionnaire
dès qu’elle se butera au mur du
«productivisme» et de la nécessité
d’être éradiquée en tant que classe
sociale comme condition de survie du
système de production capitaliste.
Alors, ce sera la Révolution ou la mort
sociale.

Note
- Extrait d’une
allocution prononcée par Karl Marx,
le 14 avril 1856, à, l’occasion du
quatrième anniversaire de l’organe
chartiste People’s Paper, qui en
reproduisit le texte.
Reçu de Robert Bibeau pour
publication
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