Opinion
La go-gauche ne fait plus recette dans
les guinguettes
Robert Bibeau

© Robert
Bibeau
Mercredi 13 janvier 2016
http://www.les7duquebec.com/...
Elles sont
désespérées la gauche caviar et la
go-gauche cassoulet après une série de
défaites électorales sous différentes
démocraties bourgeoises au Nord comme au
Sud. C’est qu’elles espéraient faire
recette du malheur des délaissés, des
salariés paupérisés, des travailleurs
saqués-chômeurs non comptabilisés dans
les statistiques des gouvernements
déjantés. Depuis 2008 que la nouvelle
crise s’épand, le magma social aurait dû
normalement fournir un terreau fertile
où la go-gauche, en mal de prébendes,
devait bénéficier de l’alternance.
Comment expliquer qu’au milieu de la
tourmente économico-politique les
désœuvrés, les paumés, les chômeurs, les
travailleurs, tournent le dos à la
go-gauche pour n’aller nulle part
(électoralement parlant s’entend) ?
Comment reconstruire et mystifier à
gauche se questionne-t-il ? (1)
En effet, si une
portion des travailleurs s’éprend de la
droite fanatique, la grande majorité des
ouvriers ne vont plus voter. Les
prolétaires se désintéressent des
papotages électoralistes et de la
politique des riches, et gaspillent leur
temps à chercher sans trouver des moyens
de survivre à la crise systémique du
capitalisme.
Pourtant, deux voix
discordantes s’élèvent dans la
tourmente. La première propose de
radicaliser le discours de la go-gauche
jusqu’à faire germer chez les pestiférés
de la désespérance l’espoir de réformer
le capitalisme. La seconde voix propose
de « rénover » les billevesées
mensongères pour faire croire au
réchauffé qu’ils déblatèrent. Les
pontifes de la go-gauche devraient
savoir que ces recettes ont été tentées
et qu’elles n’ont rien donné. Les mêmes
insignifiances vont donner les mêmes
conséquences. Ainsi, Owen Jones,
que les médias à la solde présentent
comme le conseiller de Jeremy
Corbyn, l’homme de la go-gauche au
sein du Labour britannique, affirme : « En
2008, une partie de la gauche pensait
que la situation entrainerait
automatiquement un effondrement du
capitalisme, ce qui revitaliserait la
gauche. Vu dans une perspective
historique, c’était naïf. La crise
économique des années 1930, a finalement
mené au fascisme. La crise économique
des années 1970 a mené au
néolibéralisme. La gauche ne profite pas
automatiquement d’une crise économique
(…) Il ajoute, Milton Friedman, un de
leurs leadeurs, disait : « Seule une
crise amène un réel changement. Et si
cette crise se produit, ce qui se passe
dépend des idées qui existent déjà. » Et
ce qui semblait d’abord « politiquement
impossible » devient subitement
« politiquement inévitable ». Et c’est
bien ce qui s’est passé après la crise
de 1973. La droite était prête avec ses
idées qui, après la crise, ont su
conquérir le monde » (2).
Est-il vrai, comme
l’affirment Milton Friedman et
Owen Jones que les idées dirigent le
monde, l’économie, et la société ?
Évidemment non ! S’il en était ainsi,
les idées de la droite bourgeoise, qui
ont géré le pouvoir depuis la crise de
1973, à la fois via des partis de
« gauche » et via des partis de
« droite », auraient réglé les problèmes
de l’économie politique et le monde
n’aurait jamais connu la crise
économique de 2008. L’économie mène le
monde et le mouvement précède la
conscience…et les idées de la go-gauche,
comme celles de la droite sont à
l’arrière du cortège, fermant la marche
funèbre.
Ce que confirme
monsieur Jones qui déclare : « après
la crise de 2008, la gauche n’avait pas
immédiatement une réponse à avancer (…)
Le message de la gauche, c’était :
« Stop à l’austérité, stop aux
privatisations, stop à ceci, stop à
cela », sans qu’elle ait une alternative
cohérente ou une vision différente pour
une autre sorte de société ».
Est-il vrai que la
go-gauche n’avait aucune alternative
cohérente pour une autre sorte de
société ? Absolument vrai ! Ce que
reprennent les propos de Peter
Mertens : « En 1945, le mouvement
ouvrier britannique a obtenu beaucoup.
Un système national de santé a été
instauré, les secteurs-clés ont été
nationalisés, un ambitieux plan de
logement social a été établi. Plus tard
cependant, la bureaucratie au sein de
ces institutions a été de plus en plus
critiquée. Ce reproche légitime a été
utilisé par les néolibéraux, non pas
pour améliorer le système social, mais
pour le démanteler et le vendre. La
réponse de la gauche ne peut pas être :
retour aux années 1960, retour au passé
(…) Le dernier gouvernement de gauche
que l’on ait connu, c’est le
gouvernement de Clement Attlee, de 1945
à 1951. Ce gouvernement a mené de
grandes réformes sociales, il a instauré
l’État-providence avec les soins de
santé nationaux, les droits des
travailleurs… Mais, de cette manière, la
gauche est présentée comme un courant
qui veut inverser le cours des aiguilles
de l’horloge pour remonter vers une
sorte de passé idyllique. La gauche a
toujours été le courant qui regardait
vers l’avant et qui modernisait pour
donner forme à la société du futur »
(3). Dans le précédent paragraphe,
vous retrouvez un condensé des sophismes
que présentent les thuriféraires de la
go-gauche pour obtenir leur
accréditation auprès des grands patrons
afin qu’on leur redonne le pouvoir
étatique tant convoité, ce que le
prolétariat semble leur refuser.
Analysons les trois sophismes de ce
salmigondis.
-
Ce ne sont pas les
gouvernements de la gauche
bourgeoise qui ont donné en cadeau
les avantages sociaux. Ce sont les
travailleurs qui ont guerroyé
durement pour vendre chèrement leur
force de travail salarié. Étant
donné qu’à cette époque les hausses
de productivité du travail étaient
importantes, à tout le moins
suffisantes pour augmenter à la fois
les taux de profits et la valeur de
la marchandise « force de travail »,
la bourgeoisie a consenti à des
hausses de salaire dont l’État
bourgeois a exproprié une partie
(taxes et impôts) afin d’assurer les
services publics nécessaires à la
reproduction de la main-d’œuvre,
mise en scène que la go-gauche
bourgeoise a appelé l’État
providence aujourd’hui révolu
étant donné l’anémie des hausses de
productivité du travail salarié.
-
Il est vrai que des secteurs-clés de
l’économie ont été « nationalisés »,
à la demande du grand capital et
pour son profit. Ces
« nationalisations » visaient
strictement à s’assurer que l’État
capitaliste y investit les capitaux
requis pour remettre en état ces
services clés de l’économie
capitaliste. Ces
« nationalisations » n’ont jamais
été un pas pour la construction du
socialisme. Il était bourgeoisement
normal qu’une fois remises sur pied
ces entreprises soient retournées,
valorisées, à leurs propriétaires
« affamés ». Ce qui fut fait à
compter des années 1970, les
néolibéraux, et la go-gauche
« démocratique » n’ont pas imaginé
ces rétrocessions, ils en ont assuré
l’exécution et n’ont servi que de
faire valoir dans toute cette
histoire.
-
La classe prolétarienne n’a jamais
demandé que l’on abolisse les
services publics ni les avantages
sociaux qu’elle avait difficilement
obtenus. Ce sont les intellectuels
petits-bourgeois, de gauche comme de
droite, qui se sont fait les
portes-voix des patrons et qui ont
dénigré la « bureaucratie – Top
Down » et les services publics
léthargiques afin de justifier les
politiques d’austérité présentement
imposées. Il faut être
particulièrement tordu pour dénigrer
les mouvements ouvriers de
résistance aux politiques
d’austérité et au démantèlement des
services publics nécessaires à la
reproduction de la force de travail.
En effet, tous les ouvriers savent
que si l’État abolit les services
publics ils devront assumer par
eux-mêmes les frais d’éducation, de
soins de santé, de garderie, de
médicaments et de retraite. Si de
résister à ces attaques du capital
s’apparente au retour au passé des
années soixante, alors oui, les
prolétaires sont en faveur que l’on
préserve les concessions obtenues
dans ce passé pas si éloigné.
Il faut admettre
avec les socialistes Mertens et Jones
que la gauche caviar et la go-gauche
cassoulet n’ont aucune « alternative
cohérente ou une vision différente pour
une autre sorte de société » à
proposer, raison pour laquelle elle
végète dans les sondages et cela n’est
pas dû à son « incapacité à
communiquer », au contraire, ses
intentions réformistes visant à
réchapper la vieille société de
production capitaliste moribonde sont si
évidente que la go-gauche ne trompe plus
personne – raison de leur défaite
électorale à la chaine.
D’ici là, la classe
ouvrière comprendra un jour que la
guerre de classe pour sauvegarder les
« acquis » cédés par la bourgeoisie
« providence » est une bataille
d’arrière-garde perdue d’avance et que
« Lutter contre l’austérité, c’est pas
assez » (4).
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