Opinion
Le cycle économique inflationniste
Robert Bibeau
Vendredi 11 juillet 2014
L’inflation pour «bozo les culottes»
Pour nous consommateur béotien l’inflation
ça signifie que la hausse des prix gruge
– affaiblit – diminue notre pourvoir
d’achat étant donné que nos revenus
(notre salaire grosso-modo) n’augmentent
pas – du moins jusqu’à la prochaine
négociation de convention collective,
pour les quelques pourcentages
d’employés syndiqués, et pour les autres
nous attendons l’augmentation de
quelques centimes du salaire minimum de
famine.
Le cycle économique
La semaine dernière nous avons examiné
la mécanique apparente du processus
d’apparition et de multiplication des
capitalistes qui tentent de se partager
une masse de plus-value de moins en
moins importante (baisse tendancielle du
taux de profit moyen) (1). Étudions
maintenant cette mécanique de
l’intérieur – dans le processus de
reproduction de l’argent-capital.
Répétons-le: dans un monde capitaliste
idéal, comme l’atteste l’École des
économistes autrichiens, la masse
monétaire devrait refléter concrètement
les richesses réelles produites (biens =
marchandises et services). La masse
monétaire devrait être limitée et ne
devrait pas être gonflée
artificiellement, selon ces experts.
Cependant, le mode de production
capitaliste réclame toujours plus
d’argent, qu’il espère transformer en
Capital productif (vous aurez compris
qu’Argent et Capital ne sont pas
synonymes). Cela, afin de l’investir
productivement (fabrication de
marchandises vendables et monnayables et
pleines de plus-value) et faire faire à
cet argent, transformé en Capital, un
nouveau cycle économique profitable (c
-» C’). C’est ce circuit, sans fin, que
l’on nomme la «valorisation du capital
productif». C'est l’essence et le
fondement de tout le système
capitaliste, que certains marxistes
appellent «l’accumulation du capital».
Le système capitaliste ne cherche pas
tant à accumuler – thésauriser – amasser
– le capital qu’à le reproduire en plus
grande quantité, bref à le valoriser par
un nouveau cycle de reproduction élargie
– à l’infini.
Si ce processus de
valorisation-reproduction élargi
fonctionnait comme au début du
capitalisme, il n’y aurait aucune crise
systémique et pour les capitalistes la
terre serait un paradis – peu leur
importe que des milliards d’êtres
humains meurent de faim. Si les
capitalistes pleurent et geignent à
propos des crises successives du
capitalisme c’est que cette mécanique de
reproduction élargie s’enlise suite à la
baisse tendancielle du taux moyen de
profit.
Nous le répétons, l’accumulation du
capital ne s’est pas enrayée et de plus
en plus de milliardaires accumulent des
fortunes de plus en plus phénoménales
(85 milliardaires ont un patrimoine
équivalent à celui de 3,5 milliards
d’êtres humains. Il y aurait aujourd’hui
11 millions de multimillionnaires sur
Terre). L’accumulation va bon train.
C’est la reproduction élargie –
démultipliée – valorisée – le capital
s’engraissant, se fortifiant de
plus-value, qui périclite et entraîne
l’édifice systémique du capitalisme dans
sa chute inexorable.
Étant donné que le circuit que nous
venons d’expliciter est bloqué – engorgé
de marchandises invendues, pour cause de
surproduction (compte tenu que les
salariés ont de moins en moins de revenu
pour acheter et que la valeur monétaire
de leur salaire s’amenuise sous les
coups de l’inflation) – alors
les banques émettent tout de même
de l’argent (monnaie, mais aussi cartes
de crédits, marges de crédits,
hypothèques, prêts personnels, etc.)
Le problème bancaire-monétaire survient
quand ils impriment ou émettent beaucoup
plus qu’il n’en faut de cet argent de
pacotille inflationniste – (de la
monnaie non adossée à des marchandises
ou à des biens immobiliers).
Le résultat c’est l’inflation, la
stagflation, la récession et la
dépression. C’est la crise, non pas de
l’accumulation, mais de la non
reproduction élargie – la crise de la
non revalorisation du capital.
La crise dans laquelle nous pataugeons
depuis 2008 vient en partie de ce
processus de fabrication frauduleuse
d’argent qui ne parvient pas à se
transformer en capital productif –
bloquée dans un no man's land économique
improductif et parasitaire (bancaire,
boursier, paradis fiscal). Le capital
financier paralyse le capital industriel
et ce phénomène est inévitable, il est
inscrit dans les gènes du capitalisme
depuis sa naissance.
La dette souveraine des États bourgeois
surgit exactement du même processus,
mais à une échelle incommensurablement
plus grande. Seule l’échelle des
emprunts et de la fabrication d’argent
de pacotille, non
profitable, diffère. Au lieu d’être
un salarié-ouvrier qui s’endette de
quelques milliers de dollars, c’est
l’État bourgeois qui s’endette de
milliards de dollars.
L'objectif est de refiler cet
argent emprunté aux requins du capital
financier dans le but de les renflouer.
L’étape suivante sera évidemment de
réduire les dépenses des services et des
transferts aux particuliers car
comme nous le disions déjà, rien ne se
perd, rien ne se crée, tout se
transforme. L’argent donné aux
banquiers, financiers, industriels n’est
plus disponible pour payer les services
et les transferts à la population qui
devra se serrer la ceinture d’austérité
pour assumer le prochain cycle de
reproduction du capital
inflationniste-improductif-parasitaire.
Depuis le début des années 2000, la part
des revenus autonomes dans les revenus
totaux de l’État québécois, c’est-à-dire
les revenus qui ne proviennent pas des
transferts fédéraux – en l’occurrence
les taxes et les impôts – est passée de
86,3% à 77,5%. Alors que la part des
impôts et des taxes payés par les
particuliers (salariés en majorité)
constituait plus de 62 % des revenus de
l’État québécois en 2012, la portion des
corporations capitalistes ne constituait
que 6 % des revenus de l’État des riches
(2).
Les banques nous mentent
Examinons le tableau des actifs des six
plus grandes banques de France, afin de
comprendre ce qui se prépare. La figure
ci-dessous montre bien où se situe l'un
des problèmes irrédentistes et
insolubles du capitalisme monopoliste.
Prenons la
Société Générale. Son bilan était de
1200 milliards d’euros en 2012 et ses
«fonds propres» (l’argent qu’elle a
physiquement dans ses coffres) sont de
27 milliards d’euros, soit environ 45
fois moins que ce qu’elle déclare dans
son bilan. Si vous étiez une banque
(avec droit d’émettre de l’argent – du
crédit) en gagnant 1200 euros par mois
vous pourriez dire que d’un point de vue
comptable et financier vous auriez en
caisse 54 000 euros disponibles chaque
mois, que vous pourriez engager jusqu’au
jour où tous vos créanciers viendraient
frapper à votre porte, en même temps,
pour être tous remboursés.
Alors là, évidemment, avec 12 000
euros, vous ne pourrez jamais rembourser
54 000 euros.
Cette opération bancaire-boursière de
duplicité et de duplication des petits
pains monétaires est tout à fait légale
en droit bourgeois, si vous êtes une
banque évidemment.
Quant à vous citoyen lambda, vous
n’avez aucun droit d’émettre de l’argent
de Monopoly et tout ce dont vous
disposez c’est de vos 12 000 euros de
revenu régulier et la marge de crédit
ajustée qui vous a été consentie à coût
élevé (en intérêt). Tout homme n’est pas
égal à son voisin en droit démocratique.
Un banquier, par son poids, fait pencher
la pesée tandis que l’ouvrier ne fait
pas vibrer le pèse poids.
Et si par inadvertance des épargnants
retiraient rapidement ce qu’ils ont
déposé à la banque, qu’adviendrait-il?
L’économie de polichinelle
s’effondrerait-elle?
Pas du tout! C’est que l’État et
sa loi des riches, faites pour les
riches, aurait ordre de renflouer les
banques après avoir bloqué pendant
plusieurs journées l’accès des guichets
aux salariés
dépouillés, les privant de
l’accès à leur carnet (Chypre, Grèce,
Argentine, même combat).
Bien sûr, ce truc fonctionne une fois,
ou quelques fois (chaque banque passe
à la caisse de la bonne samaritaine
gouvernementale)
mais
au bout d’un moment la rengaine est
connue et ce n’est plus possible.
Ce sont des pays entiers qui basculent
dans la misère. La Grèce, Chypre, les
États-Unis, le Brésil, le Portugal et
l’Espagne en sont arrivés là, même si
vous ne le savez pas.
Il est ridicule de voir Barack Obama se
comporter comme un empereur romain
richissime et omnipotent avec sa flotte
de guerre en décrépitude et donner des
ordres aux pays endettés. On le voit
menacer la Russie, fomenter la guerre au
Soudan, après avoir agressé la Serbie,
l’Irak, l’Afghanistan, la Géorgie, le
Pakistan, le Yémen, la Libye, la Syrie
et aujourd’hui l’Ukraine alors que son
pays est en faillite technique et les
banques américaines sur le point de
déposer leur bilan…
Mais dans quel monde vivez-vous, amis
petits-bourgeois à prêchi-prêcha la
conciliation de classe et la fraternité
humaine alors que l’incendie détruit le
Reichstag et que les tours jumelles
s’effondrent dans un fracas effroyable?
C’est ce que les ouvriers du monde
entier doivent réaliser et affirmer. Les
impérialistes étatsuniens et leur
alliance agressive (OTAN) n’ont aucun
autre choix que d’affronter leurs
concurrents de l’alliance Russe – CEI –
Chine où périr et devenir les
compradores de cette alliance montante,
qui demain sera l’alliance défaillante.
L’alliance Russe – CEI – Chine n’a
d’autre choix que de guerroyer
pour préserver ses territoires de
rapine, ses terres citadines, ses
espaces de spoliation de la plus-value
ouvrière ou redevenir les sous-fifres
des impérialistes étatsuniens et
européens.
La classe ouvrière dans tout ceci ne
peut espérer que de servir encore une
fois de chair à canon, nucléaire à cette
occasion, dans ce remake d’holocauste
manigancé par des criminels de guerre.
Résister ou périr
voilà l’alternative.
À SUIVRE…
VIENT DE PARAÎTRE
MANIFESTE DU PARTI OUVRIER
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
(1)
http://www.iris-recherche.qc.ca/wp-content/uploads/2013/03/note_fiscalite2013-03.pdf
(2)
Source : Que faire ? Vol 1. No 1. Paris.
http://www.orgcomfr.com/QUE_FAIRE_01.pdf
(3)
http://www.robertbibeau.ca/VolumeDeclin.html
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