Les 7 du Québec
Le mode de production capitaliste
est condamné à péricliter
Robert Bibeau

Mercredi 7 septembre 2016
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Les fondements
du mode de production capitaliste
Le mode de
production capitaliste (MPC) repose sur
la valorisation (reproduction élargie)
du capital et sur son expropriation.
Pour ce faire, le capital aliène le
travail – se l’approprie. Il exproprie
les fruits du travail qu’il transforme
en marchandise commercialisable –
transformant ainsi le travail humain en
marchandise afin d’en extirper la
plus-value que le capital
s’approprie. De fait, c’est cette
transformation du travail humain en
marchandise qui permet au capital de
transformer toute réalisation humaine en
marchandise ce qui inclut la production
de marchandises intellectuelles tels les
inventions, les brevets, les œuvres
d’art, etc. Le capital fait du
travail vivant, fait du travailleur, une
extension de la machine – des moyens
mécaniques de production, mais aussi,
aujourd’hui, des moyens informatiques,
numériques, cybernétiques de production.
L’argent, sous ses multiples formes, que
d’aucuns stigmatisent et accusent de
tous les maux, n’est qu’un intermédiaire
qui opérationnalise ce processus en le
rendant pus fluide.
Pour ce qui a trait
à la mécanisation de la production,
Marx a bien décrit le processus en
action sous le capitalisme triomphant de
l’Angleterre du XIXe siècle,
au cours de sa phase impérialiste
moderne ascendante. Cependant, Marx ne
pouvait décrire le même phénomène
relativement au travail intellectuel,
scientifique, cybernétique puisque ces
développements étaient peu avancés à son
époque.
Aujourd’hui, ceux
qui étudient le phénomène de
numérisation et de robotisation des
moyens de production ont bien perçu
l’ampleur du phénomène numérique,
informatique, technologique,
scientifique qui ne contredit en rien la
dialectique générale opposant les moyens
techniques de production, ou capital
mort, au travail salarié, ou capital
vivant, dans le cadre des rapports de
production capitalistes (1). Via les
moyens cybernétiques de production, le
travail intellectuel rejoint le travail
manuel qui ensemble fusionne dans
l’aliénation du travail salarié sous la
dictature oppressive du capital,
lui-même soumis aux lois impératives de
sa reproduction élargie que les
marxistes appellent l’accumulation du
capital.
Intégration-expansion et
intensification-approfondissement
Allons plus loin,
si le mode de production capitaliste ne
s’effondre pas immédiatement, alors même
qu’il est traversé de multiples
contradictions qui obèrent son
développement, cela est dû à deux
phénomènes concomitants :
Premièrement,
le mode de production capitaliste
intègre et absorbe, pourrait-on
dire, les dernières terres, les derniers
peuples, les derniers grands groupes
paysans agraires vivant quasi sous le
féodalisme que l’on appelle
« néocolonialisme ». Des populations que
le capital n’avait pas encore totalement
intégrées à son processus de
reproduction élargie ; des contrées
marginalisées, excentrées, ou le
capital, pourtant présent, se contentant
de collecter la rente ; de spolier les
ressources en les transformant
minimalement localement ; d’exploiter
une portion de la population, laissant
la majorité, tels des clients en
jachère, sous le joug des anciennes
classes dominantes, en marge de
l’industrialisation. Ce sont la Chine,
l’Inde, l’Asie du Sud-Est et
l’Afrique… Ce processus d’intégration
rapide de ces régions au mode de
production hégémonique donne lieu à
l’apparition des puissances capitalistes
« émergentes » et bouleverse les
rapports de forces au sein de
l’impérialisme mondialisé. Cet apport de
nouvelles forces de travail productives
permet au mode de production de
poursuivre sa valorisation et sa
reproduction élargie du capital et cela
fonctionnera aussi longtemps que ce
processus d’expansion géographique
ne sera pas complété. Pour ce faire, le
mode de production capitaliste doit
achever la destruction des anciens
rapports sociaux de production
précapitalistes (néocolonialistes),
d’où ces multiples guerres aux confins
de la Terre qui forcent la migration de
millions d’hommes et de femmes
prolétaires qui transfèrent leur
misère d’un continent à un autre,
jusqu’en Occident, où ces
transformations économiques et sociales
ont eu lieu bien avant. Nous n’assistons
en cela qu’a la mise à niveau du
tiers-mode « néocolonial » et
« émergent » et à l’apparition de
nouvelles puissances dans le monde
impérialiste. Il s’agit ici d’un
processus économique d’expansion
géographique et démographique
de l’exploitation de la force de travail
mondial visant la reproduction élargie
du capital international (c’est ce que
l’on appelle l’impérialisme moderne,
ascendant dans les pays « émergents »,
alors qu’il est déclinant dans les pays
d’Occident).
Deuxièmement,
le développement des moyens
scientifiques, numériques,
informatiques, cybernétiques de
production permet une intensification
de l’exploitation de la force de
travail pour assurer la valorisation et
donc la reproduction élargie du capital
international.
La contradiction
fondamentale qui paralyse le
développement
Ce second processus
est contradictoire avec le premier. En
effet, l’expansion géographique
accroit le nombre de prolétaires aliénés
et augmente la quantité de force de
travail exploité et ainsi fait
augmentée la valeur totale de cette
force de travail (le salaire
nécessaire global est en hausse d’où une
baisse relative du surtravail et du taux
de plus-value) ce qui réduit le taux
d’exploitation moyen du travail salarié.
Le second processus – l’intensification
de l’exploitation de la force de
travail par la mécanisation –
robotisation – numérisation – innovation
réduit la quantité de force de travail
vivant nécessaire à la production et
surtout réduit sa valeur relative (par
unité de marchandise produite même si le
salaire des servants des machines
robotisées augmente). Ce processus
appelé « hausse de productivité du
travail » va dans le sens d’une
augmentation du taux d’exploitation de
la force de travail salarié
et d’une hausse du taux de plus-value.
Ce processus intéresse particulièrement
le capital productif (industriel), alors
que le capital rentier, roturier, s’en
désintéresse, s’efforçant plutôt de
capter la plus-value sous forme de rente
spéculative. Ici précisément, le
contrôle que les banquiers exercent sur
l’argent (le capital monétarisé, le
capital financier) leur permet de
s’emparer d’une partie de la valeur
créée dans la sphère de la production
industrielle. Il s’ensuit une dichotomie
entre le clan des capitalistes
industriels et commerciaux et le clan
des capitalistes financiers, banquiers
et boursiers. Il faut bien comprendre
cette mécanique dialectique. D’un point
de vue matérialiste, ce ne sont pas les
acteurs économiques – industriels,
banquiers, spéculateurs boursiers,
commerçants, administrateurs, personnels
politiques, qui composent leur rôle dans
la sphère de reproduction et de
circulation du capital. Ces différents
rôles, ou tâches sont inhérents –
consubstantiels – au processus de
reproduction du capital. Si l’un ou
l’autre de ces acteurs économiques ne
jouent pas son rôle prédéterminé, la
main invisible du marché le fera
phagocyter par ses concurrents. Voilà
pourquoi, les solutions réformistes
visant à modifier la mécanique de
fonctionnement du capitalisme ne peuvent
fonctionner. Elles sont pures illusions,
une façon d’occuper la petite
bourgeoisie paupérisée, victimes
vindicatives, comme le prolétariat de
surcroit, du déclin de ce mode de
production moribond.
Bien entendu, le
phénomène d’expansion géographique
aura une fin, et le phénomène
d’intensification de
l’exploitation aura aussi une fin.
Du moment que toutes les populations du
globe auront été soumises au salariat l’expansion
s’essoufflera. À l’instant où plus
aucune force de travail vivante ne sera
requise pour produire et reproduire le
capital – quand des robots produiront
les robots, l’objectif de la
cybernétique – c’en sera fini de
l’intensification de l’exploitation du
travail salarié. Toutefois, nous pensons
qu’il y aura toujours une certaine
quantité de force de travail vivante
intégrée dans la marchandise – y compris
dans la marchandise que l’on appelle les
« robots producteurs de robots », ne
serait-ce que la force de travail
intellectuel des concepteurs et des
programmeurs des robots producteurs de
robots. Par contre, le cout de
production de cette force de travail
hautement spécialisée sera amplifié.
Pour résumer,
moins de main-d’œuvre salariée plus
couteuse (à former) produit plus de
marchandises moins couteuses à produire
(contenant moins de valeur, moins de
force de travail vivante), engendrant un
chômage important, ce qui par ricochet
réduit la valeur moyenne de la
marchandise main-d’œuvre non spécialisée
et provoque des conflits sociaux
récurrents alors que le taux de profit
moyen va en diminuant.
Donc, la quantité
de travail salarié vivant requise pour
produire les marchandises est en baisse
drastique (par unité produite). Une
large part du prolétariat est déjà
superflu, voire nuisible, des bouches
inutiles à nourrir et à reproduire, un
fardeau social qui grève la reproduction
élargit du capital. Et ces affamés
qui traversent les continents à la
recherche de travail salarié apportent
avec eux des mœurs et des coutumes dans
lesquelles la bourgeoisie occidentale ne
se reconnait pas et qu’elle voudrait
éradiquer en lançant les prolétaires
occidentalisés guerroyer contre les
prolétaires orientalisés.
Ultimement, les lois mécaniques du
capitalisme forceront la classe
capitaliste mondialisée à se débarrasser
de ce bois mort, de ce fardeau social,
de ces prolétaires surnuméraires.
Le modèle chinois de
développement capitaliste en phase
impérialiste
Un exemple simple
et contemporain suffira à illustrer
cette dialectique paradoxale. En Chine
capitaliste, 350 millions de paysans ont
déjà été prolétarisés (pour une
population active totale de 775 millions
d’individus). Leur niveau de
productivité augmentant (environ 6,6 %
annuellement) ceci fait de la Chine
la première puissance industrielle au
monde (pas encore la première économie
mondiale, mais ça viendra). Mais
voilà qu’il reste environ 350 millions
de paysans chinois à prolétariser. Ils
se déplacent en masse vers les mégapoles
urbaines à la recherche d’emplois.
C’est-à-dire, que ces millions de
paysans cherchent à vendre l’unique
marchandise qu’il possède, leur force de
travail, contre un salaire nécessaire,
sachant qu’ils abandonneront aux
propriétaires de l’usine (étatique
bourgeoise ou privé bourgeois) leur
surtravail, la plus-value qui sera
réalisée seulement quand la marchandise
sera commercialisée et vendue
(transformée en monnaie, ce qu’espère le
banquier chinois). Mais la Chine a bien
peu d’emploi industriel rémunérateur à
offrir à ces millions de paysans
nouvellement urbanisés (13 millions
d’emplois ont été créés en 2015, surtout
dans les services tertiaires de
proximité), car la concurrence
marchande des autres puissances
impérialistes mondialisées force le
capital chinois internationalisé à
robotiser sa production pour réduire le
prix de ses marchandises, soutenir le
niveau d’exploitation de la force de
travail et maintenir le taux de
plus-value général, sinon le capital
migrera hors de Chine attestant en cela
que la Chine capitaliste est bien
intégrée au monde impérialiste
globalisée.
Fin 2016 la Chine
aura acheté plus de la moitié des robots
mécanisés, numérisés, produits dans le
monde entier. Cela amène la Chine à
saquer des millions de prolétaires déjà
embauchés (2). Pire, les consommateurs
des pays avancés n’ont pas l’argent
requis pour acheter la totalité des
marchandises industrielles produites par
la Chine et sa production double tous
les sept ans. De plus, les capitalistes
commerciaux occidentaux paient les
capitalistes chinois en crédit-dettes,
en dollars de pacotilles, et demain – au
moment du grand krach boursier – cette
monnaie de singe disparaitra en fumée
ainsi que les fortunes boursières des
milliardaires du monde entier, y compris
celles des milliardaires chinois
totalement intégrés à l’économie
impérialiste globalisée. Le mode de
production capitaliste d’État en Chine
ou aux États-Unis ne peut pas résoudre
de telles contradictions, quelle que
soit la clique de potentats qui dirige
le Parti « Communiste » chinois ou la
Maison-Blanche. Les krachs boursiers
internationaux répétés sont les
manifestations de cette contradiction
qui oppose le capital industriel
productif mondial (comprenant le capital
vivant salarié) et le capital financier
international spéculatif et
parasitaire (3).
Deux forces
convergentes minent le mode de
production capitaliste
Ce double processus
d’expansion et
d’intensification de l’exploitation
du prolétariat par le capital mondial
est le fruit de deux forces
convergentes ; d’une part, le capital
occidental délocalise ses unités de
production vers les pays de la
périphérie afin de réduire la portion du
salaire nécessaire ; et, d’autre part,
le capital national se consolide
dans les pays « émergents » qui
s’intègrent au capital mondial. Le
développement impérialiste, inégal et
combiné, se répartit ainsi
différemment géographiquement, mais sa
mécanique générale de reproduction
élargie demeure la même et se bute aux
mêmes paradoxes. Ces bourgeoisies
indigènes des puissances « émergentes »,
en accédant au pouvoir économique,
réalisent la nécessité de consolider
leur pouvoir politique national. Au
cours du XXe siècle, ces
bourgeoisies nationalistes
(tiers-mondistes) sont même parvenues à
mobiliser la paysannerie, le prolétariat
national et la gauche bourgeoise en
faveur de leur émancipation de classe,
édifiant leur pouvoir capitaliste
national sur le sang des peuples
autochtones, ce que la gauche bourgeoise
appela les « luttes de libération
nationale pour le droit à
l’autodétermination des peuples ».
Les guerres civiles et leurs carnages,
qui ravagent l’Afrique notamment, à
chaque élection bourgeoise téléguidée,
ne sont rien d’autre que les
manifestations de ces disputes entre
clans bourgeois nationaux commandités
par une puissance impérialiste ou par
une autre. Rien à voir avec
l’émancipation de la classe ouvrière et
du prolétariat.
Ce rapport
dichotomique entre le processus
d’expansion des régions d’exploitation
du capital productif mondial – et le
processus d’intensification de
l’exploitation du capital dans
chacune des régions entraine la
paralysie des forces productives –
annihile les efforts de valorisation du
capital productif et plonge le capital
mondial dans une suite de crises
systémiques dont les Krachs boursiers,
les crises de la dette, l’inflation
monétaire, la déflation, la récession et
la dépression économique sont des
manifestations qui rongent le cœur de la
mondialisation dite « néolibérale ». Du
jour où le capital productif ne peut
plus se valoriser pour se reproduire –
le mode de production capitaliste est
condamné. C’est ce que nous
appelons la décadence du mode de
production capitaliste, dont les
manifestations sont multiples et
interpellent les médias, les ONG, les
syndicats et les petits bourgeois de
gauche, abandonnés et paupérisés, qui
s’émeuvent de leurs chèques de paye
nouvellement amputés par l’austérité. La
classe ouvrière connait depuis longtemps
cette dégradation de ses conditions de
vie et de travail. La classe ouvrière
vit sous l’austérité depuis nombre
d’années et y résiste depuis longtemps,
mais ce ne sera pas suffisant.
La dialectique
matérialiste contre le « complotisme »
Attention,
contrairement aux théoriciens du complot
mondial, contrairement aux
altermondialistes et autres réformistes
de tout acabit, qui imaginent un comité
central international et un Bureau
politique bancal – regroupant des
milliardaires malfaisants – planifiant
consciemment une guerre thermonucléaire
pour faire disparaitre quelques
milliards de prolétaires solidaires,
nous pensons que ces milliardaires,
regroupés en alliances impérialistes
mondiales concurrentes (OTAN, Alliance
de Shanghai, BRICS) – eux-mêmes en
concurrence inter capitaliste au sein de
chacune de leurs alliances – seront
poussés inexorablement à provoquer une
guerre thermonucléaire planétaire comme
ils le furent lors de la Première et de
la Seconde Guerre mondiale. L’assassinat
d’un Archiduc ne constituera qu’un fait
divers dans cette galère, tout comme
l’incendie du Reichstag ou
l’effondrement du World Trade Center. Le
mode de production paralysé appellera
des malfrats au pouvoir pour représenter
le patronat, et fera la partie belle à
quelques psychopathes au service du
capital internationalisé, que les médias
bourgeois dégénérés présenteront comme
une solution aux difficultés d’un monde
enflammé. Cette soi-disant “solution”
apocalyptique n’en sera pas une – pas
davantage que la Première et la Seconde
Guerre mondiale n’ont entravé la marche
funèbre du capitalisme sénile.
La guerre ou la
révolution ?
C’est tout ceci qui
nous fait dire que la classe
prolétarienne internationale est coincée
et réellement en danger. Ou bien le
prolétariat se mettra en marche,
massivement, en tant que classe sociale
consciente, et renversera le capital,
son État bourgeois, cette superstructure
obsolète, incapable d’assurer le
développement des moyens de production,
d’échanges et de communication ; – ou
bien le prolétariat se verra retranché
des milliards de bras pour que ce mode
de production décadent reprenne son
processus de reproduction ascendant dans
les conditions du siècle précédent.
L’expérience passée nous laisse croire
que la guerre thermonucléaire sera
nécessaire pour déclencher le réflexe
salutaire des prolétaires. Le mode de
production capitaliste est condamné à
péricliter mais pour s’effondrer le
prolétariat devra le renverser.
Camarades,
protégez-nous de « l’avant-garde », nos
ennemis on s’en charge !
Prolétaires du monde entier,
unissez-vous !
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