Les 7 du Québec
L’échec du sommet Kim Jong-un –
Donald Trump
Robert Bibeau

Mercredi 6 mars 2018
La bromance des
deux comparses de Hanoï
Ils ont fait
déplacé 3000 journalistes et plumitifs
médiatiques pour assister à un spectacle
déchu d’avance et qu’ils souhaitent
pourtant reprendre, pourquoi? La grosse
souris Kim n’avait pas l’intention de
faire le repas du gros chat Donald. Le
chat Donald n’avait pas l’intention de
se contenter de l’ombre de la proie
nord-coréenne. La Corée du Nord voudrait
être admise à part entière dans la
communauté commerciale internationale
(abolition des sanctions onusiennes)
pour ainsi resserrer son étreinte sur la
Corée du Sud, le gros fromage que la
souris Kim convoite; alors que le vilain
Donald voudrait que la Corée du Nord
baisse sa garde et se livre toute
entière au goinfre américain… plantant
ainsi ses crocs à la frontière nord de
la Chine, le véritable enjeu de ces
tractations malsaines.
Chacun se méfiant
de l’autre, aucun n’a souhaité signer le
communiqué final ni faire le repas de
son adversaire. L’américain n’offrira
pas si facilement la Corée du Sud au
Nord-Coréen avide – le Nord-Coréen ne
s’offrira pas en repas à l’américain
cupide, ouvrant ainsi une brèche vers la
Chine, objet de ces marchandages.
Sans tergiverser,
dès son arrivée au sommet de Hanoï,
Donald Trump a fait miroiter
richesse, développement et prospérité à
ce pays «communiste» (sic) rempli de
ressources, et soudainement
fréquentable, s’il acceptait la
domination de l’impérialisme américain
au lieu de demeurer sous l’emprise de
son suzerain chinois, auquel il est
assujetti depuis la Guerre de Corée
(1953).
La naïve Corée
du Sud …?!
De son côté,
inconscient (?) – semble-t-il – l’appât
sud-coréen en a redemandé, croyant
pouvoir avaler la petite économie
nord-coréenne (99e rang
mondial), lui qui trône au 14e
rang mondial : « Le président
sud-coréen, Moon Jae-in,
cheville ouvrière du rapprochement entre
Washington et Pyongyang, a également
voulu voir le bon côté des choses. La
rencontre a permis des «progrès
significatifs», Donald Trump et
Kim Jong un renforçant leur
«confiance» et «compréhension mutuelle».
La Maison Bleue, surnom de la présidence
sud-coréenne, a déclaré que son
administration allait «communiquer et
coopérer étroitement avec les États-Unis
et la Corée du Nord». Dans un
discours prononcé à Séoul, Moon Jae-in
a ajouté qu’il allait consulter
Washington sur la possibilité de
reprendre
le développement de projets Intercoréen,
en matière notamment de tourisme. (1)
Le grand capital
sud-coréen ne semble pas s’apercevoir
que derrière le petit capital étatique
nord-coréen, facilement absorbable comme
l’a démontré l’effritement des pays
«communistes» (sic) de l’Europe de
l’Est, se dissimule l’immense dragon
chinois qui traversant les monts
Taebaek l’avalera le temps venu.
La fable
nucléaire coréenne
La saga coréenne
est fondée sur le canular que la
maitrise de l’arme nucléaire par la
Corée du Nord est la planche de salut de
ce régime nationaliste, ce qui est
erroné. Si la Corée du Nord n’a pas été
envahie par l’empire étatsunien ni en
1953 (alors qu’elle ne disposait pas de
l’arme nucléaire) ni après, c’est à
cause de la proximité du géant chinois
qui a toujours souhaité conserver cet
État tampon à sa frontière nord, quitte
à l’équiper de l’arme nucléaire pour en
faire une proie plus alléchante, et plus
coriace, pour ses concurrents
occidentaux. Voici comment le média à la
solde propage ce mythe de la protection
nucléaire du lilliputien nord-coréen :
« La Corée du
Nord n’a rien fait pour réduire
l’arsenal nucléaire dont elle dispose.
Les propres patrons du renseignement de
Donald Trump jugent que le dirigeant
nord-coréen est déterminé à conserver
l’arme qu’il considère comme la clé de
la survie de son régime. Pyongyang
dénonce de son côté ce qu’elle perçoit
comme les menaces américaines, à savoir
la présence militaire en Corée du Sud et
dans la région en général. » (2)
La variable
fondamentale qui a changé dans
l’économie-politique mondiale et
régionale, ce n’est pas l’élection de
Donald Trump à la Maison-Blanche, ni
l’arrivée de Xi Jinping à la Cité
interdite, ni l’anémique programme
nucléaire nord-coréen, mais la crise
économique qui force les différents
belligérants mondiaux à déplacer leurs
pions pour se mettre en position de
faire face à leurs concurrents à
l’occasion de la dépression économique
qui se prépare. (3)
Nous l’avions
expliqué dans un article «Le
premier sommet KIM – Trump»
(4) la soudaine attention américaine
vis-à-vis la petite Corée du Nord
diabolisée résulte de l’obligation pour
l’empire étatsunien de transférer sa
guerre commerciale, diplomatique,
financière et militaire du Proche-Orient
vers l’Extrême-Orient d’où vient la
menace, non pas la menace du petit
vassal coréen, mais celle de son immense
suzerain, la Chine continentale. Il en
est de même pour la Chine pour qui les
deux Corées ne constituent pas une
menace à son hégémonie régionale, mais
une opportunité de secouer l’emprise
américaine sur l’Asie de l’Est. L’enjeu
économique de cette guerre de titan
entre la Chine et les États-Unis est
facile à comprendre quand on examine les
chiffres de la croissance économique
depuis 2009 : Chine +139%, Inde +96%,
États-Unis +34%, Europe -2% ! (5)
La prochaine
manche
Dans ce
chassé-croisé diplomatique, qui
dissimule la guerre commerciale par
Corée interposée, on peut parier que les
tractations se poursuivront. Parions que
Mike Pompeo va reprendre ses
allers-retours entre Washington et
Pyongyang, secondé par Stephen Biegun,
représentant spécial pour la Corée du
Nord. «Il doit y avoir une raison
pour les discussions», a déclaré
Pompeo dans son avion quittant le
Vietnam pour les Philippines. «La
dynamique risque d’être difficile à
tenir, reprend Marianne Péron-Doise.
La relance du complexe économique
de Kaesong entre les deux Corées, qui
aurait pu s’envisager avec un allègement
des sanctions, va être
compliquée.» (6)
Lors de son
discours prémonitoire du Nouvel An, le
leader nord-coréen avait
sentencieusement évoqué une «nouvelle
voix pour défendre la souveraineté du
pays […] si les États-Unis ne tenaient
pas leur promesse […] et persistaient à
imposer des sanctions contre notre
république». Une ébauche de solution
pourrait venir de la Corée du Sud de
Moon Jae-in. Depuis un an, le
Président n’a jamais manqué de lancer
des initiatives et de jeter des ponts
par-delà la zone démilitarisée. Dans un
grand discours, il a prévu de faire de
nouvelles propositions pour l’avenir de
la péninsule coréenne à l’occasion du
100e anniversaire du
Mouvement pour l’indépendance (sic).
Les amateurs de
« roman d’espionnage » peuvent
s’attendre à de nouveaux rebondissements
dans cette algarade éventée. Le
prolétariat international préoccupé,
mais non interpelé par ces billevesées,
ferait bien de s’informer des réactions
de ses camarades étasuniens, chinois et
coréens sur le front de la lutte de
classe.
NOTES
-
https://www.msn.com/fr-ca/actualites/monde/entre-kim-et-trump-un-échec-au-sommet/ar-BBUdMdJ?ocid=spartandhp
-
https://www.france24.com/fr/20190227-vietnam-donald-trump-sommet-kim-jong-nucleaire
- La crise se
prépare
https://photo.capital.fr/34-signes-qui-montrent-que-la-crise-a-commence-33572#les-indices-d-une-prochaine-crise-economique-et-financiere-579289
- Le premier
sommet KIM – Trump
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs-invites/le-sommet-trump-kim-a-singapour-aura-bien-lieu/
-
https://www.msn.com/fr-ca/actualites/monde/entre-kim-et-trump-un-échec-au-sommet/ar-BBUdMdJ?ocid=spartandhp
-
https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/croissance-depuis-2009-chine-139-inde-96-etats-unis-34-europe-2-809418.html
Reçu de Robert Bibeau pour
publication le 7 mars
2019
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