Madaniya
Vers une révision des priorités
saoudiennes en matière de désignation de
l’ennemi principal : L’Iran ou Da’ech ?
René Naba
Samedi 15 août 2015
« Le fanatisme est la seule
forme de volonté qui puisse être
insufflée aux faibles et aux timides »
Nietzsche.
Paris – L’attentat contre la mosquée
du QG des forces spéciales à Abha, le 6
Août 2015, paraît devoir conduire
l’Arabie saoudite à reconsidérer ses
priorités dans la désignation de son
ennemi principal en ce que cette
opération revendiquée par Da’ech s’est
produite dans un périmètre hautement
sécurisé, –la mosquée des forces
spéciales et non une mosquée chiite
faiblement protégée-, de surcroît dans
un secteur qui représente la profondeur
stratégique sunnite du royaume, la
province d’Al Assir, dans le sud du
pays- et non une province de mixité
démographique.
Cet attentat, qui a fait 15 morts,
représente l’une des attaques les plus
meurtrières ayant visé les forces de
sécurité depuis la vague d’attentats
d’Al Qaida ayant frappé le royaume entre
2003 et 2006. Revers majeur pour le
prince héritier Mohamad Ben Nayef, en
charge de la sécurité interne du Royaume
et adoubé à ce titre par les Américains,
il devrait donner une plus grande marge
de manœuvre au gouverneur effectif de
l’Arabie, le propre fils du Roi, Mohamad
Ben Salmane.
La nouvelle guerre du Yémen lancée,
en Mars 2015, par l’Arabie saoudite,
avec son cortège de mobilisation
sectaire, a entraîné une stigmatisation
plus marquée des chiites dont se
réclament les miliciens houthistes
yéménites. Le Royaume saoudien a été
toutefois, dans la foulée, la cible de
quatre attentats revendiqués par Da’ech,
dont trois attentats meurtriers contre
des lieux de culte, faisant au total de
42 morts.
Outre l’attentat d’Abha, un attentat
suicide à la voiture piégée a eu lieu à
Ryad, le 16 juillet, en pleine fête du
Fitr qui marque la fin du jeune du
ramadan, blessant deux policiers à un
point de contrôle de la capitale. Deux
mois auparavant, en Mai, la province
orientale de l’Arabie saoudite a été
secouée par deux attentats contre des
mosquées chiites ayant fait 25 morts.
L’attentat de Koudeih, le 22 mai 2015, a
fait 21 morts et 81 blessés. La
responsabilité de cet attentat a été
revendiquée par Da’ech au nom des
«Soldats du califat dans la province du
Najd. Le Royaume a par ailleurs déjoué
un attentat contre l’ambassade des États
Unis à Ryad, interceptant un camion
chargé de 80 kg d’explosif, en
provenance de Bahreïn.
Dans les années 2004-2005, l’Arabie
saoudite avait été secouée par une vague
d’attentats commis par Al-Qaïda, la
matrice de Da’ech, contre des intérêts
étrangers. Ces derniers mois, plusieurs
incidents ont été recensés contre des
policiers saoudiens et des étrangers,
qui sont avec les «hérétiques chiites»,
les ennemis déclarés des djihadistes
sunnites. Dans une opération de
diversion, s’explique dans ce contexte
l’incarcération du chef spirituel de la
communauté chiite saoudienne, Cheikh
Nimr Al-Nimr, arrêté en novembre 2014 et
condamné à mort.
L’accord nucléaire iranien et la
nouvelle guerre saoudienne contre le
Yémen, déclenchée quatre mois plus tôt
précisément pour en entraver la
conclusion, a bouleversé la donne, au
point d’être considérée désormais par
les cercles dirigeants saoudiens comme
une conjonction cauchemardesque.
A l’arrière plan d’une politique
d’austérité rendue nécessaire par les
coûts des guerres de Syrie et du Yémen,
de la chute du prix de pétrole, et du
coût des programmes d’armement
exorbitants, -autant d’éléments
générateurs de mécontentement interne-,
la nervosité est grande à Ryad: Un
publiciste saoudien Zouheir Katabi (62
ans) a fait les frais de cette
fermentation intellectuelle sur fond de
grenouillage subversif.
Pour avoir préconisé l’instauration
d’une «monarchie constitutionnelle» et
la dissolution de la police religieuse
ainsi que la cessation de la répression
politique et religieuse, -des propos
jugés apparemment subversifs par le
pouvoir-, ce journaliste respecté de la
profession a été traduit en justice.
La flambée de violence interne tend à
justifier le bien fondé de la mise en
garde du président Barack Obama adressée
aux pétromonarchies lors de leur
rencontre de Camp David, au printemps
2015, pointant le fait que «le plus
grand danger qui mime le pétromonarchies
est le front intérieur» avec une
jeunesse désœuvrée et maintenue à
l’écart de la vie publique nationale, de
toute participation à la vie politique.
Elle tend de surcroît à démentir la
guerre psychologique menée depuis trente
ans par la famille royale saoudienne
visant à diaboliser l’Iran et les
Chiites. A mettre à nu la démagogie
wahhabite.
60 % de la jeunesse
saoudienne sympathisante de Da’ech.
La conjonction est si cauchemardesque
qu’un notable saoudien a tiré la
sonnette d’alarme, révélant sur la
chaîne de télévision saoudienne «Al
Arabiya» que 60 pour cent des jeunes
saoudiens sont des sympathisants de
Da’ech. L’homme, Khalil Al Khalil,
ancien membre du Conseil consultatif, un
expert dans le domaine du terrorisme,
n’a fait l’objet d’aucune mesure
disciplinaire.
Une mansuétude qui ne doit rien au
hasard dans un pays hermétique à
l’extrême. Sans doute en raison du fait
que Khalil Al Khalil a avancé des
chiffres au dessous de la réalité en ce
que le nombre de sympathisants pro
Da’ech au sein de la jeunesse saoudienne
se situerait autour de 92 pour cent
selon un sondage réalisé sur les réseaux
sociaux. Une véritable bombe à
retardement pour ll’Arabie saoudite.
Les contrats
d’armement des pétro monarchies : des
contrats d’assurance déguisés.
Du Golfe, une zone hyper protégée
mais nullement hermétique.
Depuis l’avènement de la République
islamique à Téhéran, l’Iran était
désigné comme l’ennemi principal des
Saoudiens et des Sunnites. Un credo qui
justifiait tous les abus sur le plan
interne et tous les excès sur le plan
externe, avec l’appui immuable du bloc
atlantiste.
L’Iran a d’ailleurs constitué une
véritables mine d’or pour le complexe
militaro industriel américain, à en
juger par les contrats mirifiques qui se
sont succédé entre les pétromonarchies
du Golfe et les firmes américaines, dont
les derniers en date se chiffrent à 130
milliards de dollars. Les emplettes
portent aussi bien sur un bouclier
anti-missiles que John Kerry a vendu aux
gérontocrates du Golfe, -sur le modèle
du dôme d’acier israélien, mais en moins
perfectionné- que sur des
chasseurs-bombardiers F15, des missiles
Hellfire (Lockheed Martin) et des
véhicules blindés Humvee-(AM General).
Pour se prémunir à la fois contre le
danger iranien que l’État Islamique.
SOS International, dont un des
dirigeants n’est autre que Paul
Wolfowitz, ancien sous secrétaire d’état
à la défense sous Georges Bush Jr, et un
des artisans de l’invasion de l’Irak, en
2003, a emporté un appel d’offres
prévoyant la mise à disposition de
l’armée américaine de plusieurs
centaines de bodyguard, de traducteurs
confirmés, de convoyeurs,
majoritairement recrutés au sein de la
grande réserve de retraités militaires
américains, en vue de protéger les deux
nouveaux camps établis par les
États-Unis en Irak, pour la formation de
la nouvelle armée irakienne, le camp de
Samaya et le Camp de Taji. Un contrat de
400 millions de dollars. 3.500 soldats
américains sont revenus en Irak à la
faveur de la nouvelle guerre déclenchée
contre Da’ech, l’été 2014, et 6.300
retraités de l’US Army s’apprêtent à
reprendre du service «contractuel» pour
le compte de SOS international. Ce bilan
ne tient compte ni de la commande Rafale
faite par le Qatar à la France, ni de la
transaction saoudienne de l’ordre de 16
milliards de dollars pour la fourniture
par la France de réacteurs EPR pour le
nucléaire civil saoudien.
Le précédent gros contrat, de l’ordre
de 123 milliards de dollars, avait été
conclu en 2010 entre l’Amérique et
quatre pays du Golfe (Arabie saoudite,
Koweït, Abou Dhabi, Qatar), précisément
en vue de renforcer leur capacité
défensive «face à l’Iran». Soixante
milliards de dollars pour la vente à
l’Arabie saoudite de 87 chasseurs
bombardiers «F-15», de 70 hélicoptères
de combat «Apache» et de 72 hélicoptères
«Black Hawk», 36 hélicoptères Little
Bird AH-6, ainsi que des bombes, des
missiles, y compris la bombe guidée par
GPS, JDAM, produite par Boeing et le
missile guidé par laser Hellfire. Trente
milliards de dollars complémentaires
seront affectés à la fourniture de
bâtiments de guerre et d’un système de
défense balistique, complémentaire au
réseau de missiles de type Patriot et au
reconditionnement des anciens appareils
de l’armée de l’air et de la marine.
Bases militaires,
barrages électroniques et compagnies
militaires privées: le Golfe, une zone
hyper protégée mais nullement
hermétique.
De surcroît, des barrages
électroniques ont été édifiés aux
frontières de l’Arabie Saoudite et des
Émirats Arabes Unis pour décourager
toute invasion ou infiltration. Le
barrage électronique saoudien a été
édifié avec le concours des Français,
celui d’Abou Dhabi, avec le concours de
la firme israélienne AGT (Asia Global
Technologies), dont le contrat de trois
milliards de dollars concerne aussi bien
la protection des frontières que la
protection de quinze sites pétroliers de
l’émirat, ainsi que la fourniture de
Drones, les avions de reconnaissance
sans pilote, de fabrication israélienne.
Faiblement peuplées, entourées de
puissants voisins tels l’Iran et l’Irak,
de création récente et inexpérimentées,
les pétromonarchies ont longtemps confié
leur protection à des pays amis
aguerris, ou, à défaut, à des compagnies
militaires privées, les mercenaires des
temps modernes, et, les fabuleux
contrats d’armement étaient généralement
perçus comme des polices d’assurance
déguisées, en raison des mirifiques
rétro commissions qu’ils généraient.
La protection de l’espace aérien
saoudien a été longtemps confiée aux
aviateurs pakistanais, le territoire
national du Sultanat d’Oman aux bédouins
de la légion arabe jordanienne, les
mercenaires occidentaux se chargeant du
reste, avec une répartition des rôles
entre les Anglais, surtout présents dans
leur ancienne zone d’influence,
notamment les émirats pétroliers du
Golfe, et les Américains ayant la haute
main sur l’Arabie Saoudite et le reste
du Moyen-Orient.
La protection du Cheikh Zayed Ben
Sultan Al-Nahyane, Émir d’Abou Dhabi et
président de la Fédération des Émirats
du Golfe, ainsi que l’encadrement des
troupes omanaises dans la répression de
la guérilla marxiste du Dhofar, dans les
années 1965-1970, ont relevé de la
responsabilité de «Watchguard», une des
deux compagnies de mercenaires
britanniques, dont le siège est à
Guernesey. Fondée en 1967 par David
Sterling, un ancien des commandos de
l’air britanniques (Special Air
Services), elle passe pour être un
instrument d’influence de la diplomatie
britannique. Outre Blackwater, qui s’est
fâcheusement illustrée en Irak, les
États-Unis comptent, eux, deux grandes
sociétés privées militaires: Vinnell
Corp, dont le siège est à Fairfax, en
Virginie, et BDM international. Toutes
deux filiales de la multinationale
Carlyle, elles apparaissent comme les
bras armés privilégiés de la politique
américaine en Arabie et dans le Golfe.
Vinnel corp, dont la mission saoudienne
a fait l’objet d’un attentat à Khobbar
en 1995, a la haute main sur la
formation de la Garde nationale
saoudienne, tandis que BDM gère la
formation du personnel de l’armée de
l’air, de la marine et des forces
terrestres saoudiennes
Face à l’Iran, la constellation des
pétromonarchies du Golfe s’est ainsi
transformée en une véritable base
flottante américaine au point que se
pose la question de la viabilité
stratégique et de la pertinence
politique des gros contrats d’armement
jamais conclu dans l’histoire, en temps
de paix, entre les États Unis et les
pays de la zone. Le contrat de 2010
comme celui de 2015 outrepassent les
capacités d’absorption des bénéficiaires
de même que les capacités d’assimilation
de cet armement par ses servants locaux.
Preuve de l’inanité de ces contrats,
la transaction de 2010 portant sur des
chasseurs bombardiers F.15 n’a pas
empêché le Royaume saoudien de recourir
à des pilotes mercenaires américains,
français et pakistanais – 7.500 dollars
la sortie aérienne- pour pilonner les
positions de leurs contestataires
houthistes au Yémen.
Si l’on excepte sa piètre
démonstration militaire au Yémen, en
2015, l’Arabie saoudite n’a en fait
jamais mené de guerre directe contre
aucun de ses adversaires potentiels,
encore moins contre Israël, l’ennemi
officiel du monde arabe, dont elle est
le principal opposant sur le plan
théorique, se bornant à financer des
guerres obliques de déstabilisation
toujours contre les pays arabes ou
musulmans.
La zone pétro monarchique est
couverte d’un réseau de bases
aéronavales anglo-saxonnes et françaises
le plus dense du monde, dont le
déploiement pourrait à lui seul
dissuader tout éventuel assaillant
éventuel, rendant superflu de tels
contrats. Elle abrite à Doha (Qatar), le
poste de commandement opérationnel du
Cent Com (le commandement central
américain) dont la compétence s’étend
sur l’axe de crise de l’Islam qui va de
l’Afghanistan au Maroc; A Manama
(Bahreïn), le quartier général d’ancrage
de la V me flotte américaine dont la
zone opérationnelle couvre le Golfe
arabo-persique et l’Océan indien.
Si le 10 me de cette somme avait été
consacré par les pétromonarchies du
Golfe à la libération de la Palestine,
et non à polluer la planète du
djihadisme takfiriste, non seulement la
Palestine aurait été libérée depuis
belle lurette de même que la
sécurisation de l’espace nationale arabe
assurée, mais le Monde arabe aurait
forcé le respect du Monde en accédant au
seuil critique, condition indispensable
pour accéder au rang d’acteur majeur de
la scène internationale et non de
supplétifs de stratégies atlantistes.
Le croquemitaine
n’est peut pas celui que l’on croit
A l’Iran s’est superposée depuis la
créature saoudo américaine, Da’ech. Ses
prises de guerre sur l’ennemi notamment
le matériel de guerre pris à l’armée
irakienne conduit au renouvellement des
stocks. Le jackpot est ainsi assuré pour
l’industrie américaine d’armement avec
l’appauvrissement consécutif des pays
arabes et l’accentuation de leur
dépendance.
Par un subterfuge que les
politologues américains désignent du
vocable de «Politics of Fears, l’Iran
sert depuis trente ans de prétexte pour
éponger le surplus de pétrodollars
arabes en alimentant le complexe
militaro-industriel américain, et
Israël, un prétexte pour maintenir la
dépendance technologique arabe.
Alors que le Monde arabe accuse un
retard manifeste tant au niveau de la
recherche scientifique que du
développement des nouvelles technologies
et que le chômage atteint des
proportions rarement égalées ailleurs
dans le monde, quatre pétromonarchies
auront débloqué la colossale somme de
253 milliards de dollars en cinq ans
(123 milliards en 2010+130 milliards en
2014-2015), pour résorber le chômage….
des Etats-Unis.
Force est pourtant de constater que
l’unique intervention militaire
iranienne contre les pétromonarchies
s’est produite à l’époque où l’Iran se
situait dans la mouvance occidentale
dans la décennie 1970 sans que la
protection américaine n’ait été d’un
grand secours aux protégés arabes qui se
sont vus amputer ce jour là de trois
îlots appartenant à l’Émirat d’Abou
Dhabi: (la grande et la petite Thomb et
l’île d’Abou Moussa. Il est vrai que le
Chah d’Iran Mohamad Reza Pahlevi faisait
office à l’époque de gendarme du Golfe
pour le compte des Américains et que les
princes arabes ne pouvaient
qu’obtempérer, sur injonction
américaine, au super gendarme régional
qui leur avait été assigné.
Disparité de
traitement entre Arabes et Israéliens
En contrechamps, Israël a bénéficié
de cinquante et un milliards de dollars
de subventions militaires depuis 1949,
la majeure partie depuis 1974, plus
qu‘aucun autre pays de la période
postérieure à la II me Guerre mondiale,
selon une étude du spécialiste des
affaires militaires Gabriel Kolko, parue
dans la revue «Counter punch» en date du
30 mars 2007.
A cette somme, il convient d’ajouter
11,2 milliards de dollars de prêts pour
des équipements militaires ainsi que 31
milliards de dollars de subventions
économiques, sans compter la promesse de
George Bush Jr, au terme de son mandat,
de fournitures de l’ordre de trente
milliards de dollars, dont des missiles
à guidage laser, des bombes à
fragmentation, des bombes à implosion,
un dôme d’acier de protection anti
balistique, en vue de préserver la
suprématie militaire israélienne au
Moyen Orient.
A l’apogée de sa puissance, au plus
fort de son alliance avec l’Iran,
l’Amérique n’a jamais réussi à faire
restituer à leur propriétaire arabe
légitime ces trois îlots. En phase de
puissance relative, saura-elle au moins
protéger durablement ces relais
régionaux, au moment où ses déboires en
Afghanistan, en Irak et en Syrie la
place sur la défensive, alors que,
parallèlement, l’Iran, fort de sa
maîtrise de la technologie nucléaire et
des succès militaires des ses alliés
régionaux, le Hezbollah (Liban), Moqtada
Sadr (Irak) se pose en parfait contre
exemple de la servitude monarchique,
avec un rayonnement se projetant bien
au-delà des zones à fortes minorités
chiites arabes dans les régions
pétrolifères d’Arabie Saoudite, de
Bahreïn, du Koweït, d’Irak, et dans la
zone limitrophe d’Israël dans le sud du
Liban pour s’étendre à l’ensemble de la
sphère arabo musulmane?
Le Monde arabe a engagé près de deux
mille milliards de dollars au titre des
dépenses militaires depuis le dernier
tiers du XX me siècle, soit environ 50
milliards de dollars par an en moyenne,
sans avoir pu se doter ni d’une capacité
de projection de puissance, ni d’une
capacité de dissuasion nucléaire, encore
moins de la capacité spatiale du
renseignement, autant d’attributs de la
puissance moderne qui lui font
cruellement défaut à l’ère de la société
de l’information et de son application
militaire, l’info guerre.
Une telle disparité de traitement
entre Israéliens et Arabes au regard des
Américains, l’un s’équipant à titre
gracieux, les autres contraints de payer
l’intégralité des commandes rubis sur
ongle, en dépit de la contribution
financière et humaine des pays arabes
aux équipées américaines tant en
Afghanistan qu’au Nicaragua contre le
bloc soviétique, de même que leur
comportement erratique à l’égard de
leurs alliés naturels (l’Union
soviétique et l’Iran) ainsi que
l’autodestruction systématique des pays
arabes sous couvert de djihadisme
takfiristes expliquent le discrédit du
Monde arabe sur la scène internationale
et une part de son collapsus
stratégique.
La rencontre Ali
Mamlouk-Mohamad Ben Salmane: une
rencontre «miraculeuse» par suite de
bons offices de la Russie.
Face à la prolifération de Da’ech
dans les pétromonarchies, quatre pays
amis du Royaume,-l’Égypte, le Sultanat
d’Oman, le Koweït et Abou Dhabi son
allié dans la bataille du sud Yémen-,
ont pressé l’Arabie saoudite de renouer
le dialogue avec sa bête noire, la
Syrie. Un premier contact a ainsi lieu
entre le Prince Mohamad Ben Salmane,
l’homme fort du clan wahhabite, avec le
chef des services de renseignements
syriens, le général Ali Mamlouk, le 19
juin 2015, au lendemain de l’attentat
contre une mosquée chiite au Koweït, une
principauté déjà érigée en «Émirat
islamique sunnite».
Qualifiée de «miraculeuse» mais
virile, la rencontre syro saoudienne a
eu lieu par suite de «bons offices» de
la Russie , un pays dont l’influence a
été longtemps quasi inexistante dans la
zone pétro-monarchique, mais qui
constitue néanmoins un indice d’une
évolution préfigurant de nouvelles
démarcations diplomatiques.
Certes l’Arabie saoudite a cherché à
minimiser la portée de cette rencontre
sans doute tant pour ne pas démoraliser
ses alliés engagés sur le terrain, -ses
alliés étatiques (Turquie, Qatar) et
para étatiques, (les groupements
djihadistes Da’ech et Jabhat An Nosra)-,
que pour se donner le temps de justifier
ce rétropédalage en maintenant sa
posture maximaliste en prévision
d’éventuels marchandages.
L’Arabie saoudite, le plus grand
déstabilisateur régional, connaît à son
tour les affres de la déstabilisation…
par ses propres pupilles. Le
croquemitaine iranien paraît ainsi céder
le pas à «l’ennemi intérieur», autrement
plus dangereux en ce qu’il se pose en
concurrent direct de l’idéologie
wahhabite, assises de la dynastie
saoudienne.
Sauf à se projeter dans une impasse
fatale, la famille royale saoudienne
devra, volens nolens, reconsidérer ses
priorités dans la désignation de son
ennemi principal.
Après trente ans de mobilisation
intensive anti chiite, la dynastie
wahhabite pourrait bien se rendre compte
que le croquemitaine n’est pas celui que
l’on croit. Sans doute un peu tard et à
ses dépens. Ah quelles seront
douloureuses les révisions déchirantes.
Références :
92 % des jeunes saoudiens adhérent à
l’idéologie de Da’ech
: http://www.raialyoum.com/?p=297684
Reçu de
René Naba pour publication
Le sommaire de René Naba
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