Editorial
«Tuez, mais loin d’ici !»
R. Mahmoudi
Mardi 3 juin 2014
La foudroyante découverte du parcours
terroriste du tueur du Musée juif de
Bruxelles est venue à point nommé pour
faire avancer le débat sur les périls
que constitue – non seulement pour
l'Europe, mais pour tous les pays de la
région, dont l'Algérie – le retour des
djihadistes partis combattre en Syrie.
Des rapports en cascade foisonnent,
depuis quelques semaines, de mises en
garde et d’alertes contre le phénomène
d’autoradicalisation des jeunes issus
des banlieues. Tous les gouvernements
ont, de concert, réagi en annonçant de
nouvelles mesures de lutte contre les
réseaux de recrutement et de soutien aux
groupes terroristes étrangers. Ils
reconnaissent tous indirectement le
laxisme des autorités dans la chasse aux
djihadistes potentiels et, plus
directement, la défaillance de leur
système d’insertion sociale. Mais nous
n’avons entendu aucun mea culpa,
aucune déclaration avouant une
complicité indirecte de ces mêmes
gouvernements qui n’ont pas cessé,
depuis plus de trois ans, d’appeler
ouvertement à armer la «rébellion» en
Syrie et de l’assurer de son soutien
moral et diplomatique. Comment
expliquer, aujourd’hui, les jérémiades
d’un Fabius ou d’un Brown, alors que, il
y a seulement une semaine, ils ont été à
l’origine d’une résolution au Conseil de
sécurité des Nations unies, demandant à
présenter la Syrie devant la Cour pénale
internationale pour «crimes contre
l’humanité» ? Comment ces meneurs de la
diplomatie occidentale encouragent-il
des djihadistes, partis d’Europe ou
d’ailleurs, à tuer, à commettre des
massacres les plus atroces dans un pays
comme la Syrie, et trouvent effroyable
et hautement préoccupant que ces mêmes
criminels commettent des attentats ou
sèment la terreur dans leur pays ? Il
est aussi curieux de constater que, dans
le débat actuel, les éditorialistes et
autres commentateurs des médias
dominants, en France et dans d’autres
pays d’Europe, ne posent jamais ces
questions. De deux choses l’une : soit
Paris, Londres et Washington arment les
islamistes pour ternir l’image de
l’islam en tuant sans foi ni loi – mais
le plus loin possible de l’Europe et des
Etats-Unis –, et qu’ils subissent un
retour de flamme ; soit ils ont intégré
ces crimes contre la communauté juive en
Occident pour accentuer la haine
anti-musulmane. Dans le premier cas
comme dans le second, les dirigeants
occidentaux sont autant coupables que
les auteurs de ces crimes eux-mêmes.
Seront-ils jugés un jour ? Dans un autre
siècle peut-être.
R. M.
Les dernières mises à jour
|