Syrie
Syrie : de Vienne 1 à Vienne 2, un
champ de mines ?
Mouna Alno-Nakhal
Vendredi 20 novembre 2015
VIENNE I, 30 OCTOBRE 2015
Le
« Communiqué conjoint agréé par les
ministres de la réunion internationale
de Vienne sur la Syrie » du 30 octobre
2015, est publié sur le site France
Diplomatie (en anglais) [1].
Cependant, sous ce « même titre » vous
trouverez (en français) les propos de M.
Fabius à la presse ; un résumé d’où il
ressort un point attendu et un autre
plutôt surprenant de la part de
quelqu’un qui était si satisfait du
« bon boulot » de Jabhat al-Nosra [le
Front al-Nosra] [2] :
« Nous
avons discuté pendant huit heures. Il y
a évidemment des points de désaccord :
le principal est le rôle futur de Bachar
al-Assad. Pour nous les choses sont
claires, il est le principal responsable
du désastre syrien et, donc, il n’est
pas question qu’il soit le futur de la
Syrie… nous avons beaucoup insisté à la
fois sur la nécessité, pour arriver à la
paix, que Bachar al-Assad ne fasse pas
partie de l’avenir de la Syrie, et nous
avons beaucoup insisté sur la lutte
contre le terrorisme - contre Daech,
contre Jabhat al-Nosra -, une lutte qui
doit être amplifiée… »
[3].
Voici la
traduction du communiqué en question :
Le 30
Octobre 2015, les « participants »
représentant la Chine, l'Egypte, l'UE,
la France, l'Allemagne, l'Iran, l'Irak,
l’Italie, la Jordanie, le Liban, Oman,
le Qatar, la Russie, l'Arabie Saoudite,
la Turquie, les Émirats arabes unis, le
Royaume-Uni, l'Organisation des Nations
Unies et les États-Unis, se sont réunis
à Vienne pour discuter de la grave
situation en Syrie et comment mettre un
terme à la violence le plus tôt
possible.Les
participants ont eu une discussion
franche et constructive, couvrant les
problèmes majeurs. Bien que des
différences importantes subsistent entre
les participants, ils sont arrivés à une
compréhension mutuelle sur les points
suivants :
1. L'unité
de la Syrie, l'indépendance, l'intégrité
territoriale et le caractère laïc de la
Syrie sont fondamentaux.
2. Les
institutions de l'État resteront
intactes.
3. Les
droits de tous les Syriens,
indépendamment de l'origine ethnique ou
de la confession religieuse, doivent
être protégés.
4. Il est
impératif d'accélérer tous les efforts
diplomatiques pour mettre fin à la
guerre.
5. L'accès
humanitaire sera assuré sur tout le
territoire de la Syrie, et les
participants accroîtront le soutien aux
personnes déplacées, aux réfugiés, et à
leurs pays d'accueil.
6. Da'esh,
et d'autres groupes terroristes, tels
que désignés par le Conseil de sécurité
des Nations unies, et de plus, tel que
convenu par les participants, doivent
être vaincus.
7.
Conformément au Communiqué de Genève de
2012 et à la Résolution 2118 du Conseil
de sécurité des Nations Unies, les
participants ont invité l'ONU à réunir
des représentants du Gouvernement syrien
et de l'opposition syrienne pour un
processus politique menant à des
élections crédibles, inclusives, en vue
d’une gouvernance non-sectaire, suivi
d'une nouvelle Constitution et
d’élections. Ces élections doivent être
menées sous la supervision de l'ONU à la
satisfaction de la gouvernance et des
plus hauts standards internationaux de
transparence et de comptabilisation des
résultats, libres et équitables, avec
participation de tous les Syriens, y
compris la diaspora.
8. Ce
processus politique sera sous direction
syrienne et appartient aux Syriens, le
peuple syrien devra décider de l'avenir
de la Syrie.
9.
Parallèlement à ce processus politique,
les participants de concert avec les
Nations Unies exploreront les modalités
et la mise en œuvre d’un cessez-le-feu
sur tout le territoire à partir d’une
date précise. Dans les prochains jours,
les participants travailleront à réduire
les domaines de désaccord qui
subsistent, et à construire sur des
terrains d'entente. Les Ministres se
réuniront de nouveau dans deux semaines
pour poursuivre ces discussions.
D’emblée et
sans entrer dans les détails de ce qui a
précédé la tenue de cette réunion dite
de « Vienne 1 », voici un court extrait
d’une intervention télévisée de M.
Ghaleb Kandil [4], Directeur du
site New Orient News, qui résume, à son
avis, le but essentiel de cette
initiative de la diplomatie russe :
« Si nous
devions tenir compte des principes de la
morale et de la diplomatie, les États
qui se sont fourvoyés dans le soutien du
terrorisme, et qui continuent de le
faire, méritent d’être jugés par un
tribunal international similaire à celui
qui a jugé le nazisme. Mais il se trouve
qu’aujourd’hui ces États participent à
un processus politique, voulu par M.
Poutine, pour les dégager de cette voie.
C’est pourquoi, il ne faut pas nous
attendre à des solutions définitives à
chaque étape de ce processus qui risque
de se prolonger et qui évoluera en
fonction de l’équilibre des forces sur
le terrain. Tel est le plan russe dans
un combat qui décidera de l’avenir du
monde ».
Ce premier
communiqué de Vienne a été jugé
globalement positif par les Syriens,
bien qu’il ne se fonde que sur le
Communiqué de Genève de 2012 en faveur
d’un gouvernement transitoire [5]
et sur la Résolution 2118 de 2013 [6],
sans rappeler les résolutions
contraignantes du Conseil de sécurité
2170, 2178 de 2014 et la résolution 2199
de 2015, condamnant les organisations
terroristes et ceux qui les soutiennent
ou les encouragent de n’importe quelle
façon que ce soit, y compris en se
contentant d’acheter les produits de
leurs larcins.
Une
résolution 2118, dont le Général
libanais, Amin Hoteit, avait clairement
perçu les pièges, puisqu’au lendemain de
son adoption il écrivait :
« La
résolution 2118 « insistant sur le fait
que la seule solution à la crise
syrienne est un processus politique sans
exclusive, dirigé par les Syriens, fondé
sur le Communiqué de Genève du 30 juin
2012… », lequel a convenu des lignes
directrices et des principes pour une
transition politique par, entre autres,
la mise en place d’un organe de
gouvernement transitoire qui pourra
comprendre des membres de l’actuel
gouvernement et de l’opposition « ainsi
que d’autres groupes »… ; il faudra être
particulièrement prudent sur deux
points. Le premier est de faire en sorte
que le bloc occidental ne puisse pas
choisir les membres de cet organe à sa
convenance, mais qu’il soit
effectivement composé de véritables
représentants du peuple syrien. Le
deuxième, est de veiller à ce qu’il ne
présente pas cet organe comme le
remplaçant de l’autorité légitime
actuellement au pouvoir en Syrie. Ceci,
parce que certains États pourraient
persister dans leurs tentatives visant à
faire admettre, dans ses rangs, des
représentants de l’un quelconque des
groupes prétendument révolutionnaires
syriens… sous prétexte qu’ils sont
« militairement victorieux » dans
certaines zones, dites libérées, du
territoire syrien…[7].
En dépit de ces
risques qui demeurent, le fait que
Vienne 1 confirme le maintien du
caractère laïc de l’État syrien est une
victoire pour la Syrie et pour les
diverses composantes ethniques et
religieuses de la région, menacées
d’être impitoyablement arrachées à leur
terre comme en Irak, et aussi pour la
diversité culturelle sans laquelle nul
n’échappera à l’obscurantisme du
cocktail explosif Daech-wahhabites-Frères
Musulmans ; un partenaire qui a
l’avantage d’être « libéral
économiquement », comme l’a expliqué
l’ancien juge antiterroriste Marc
Trévidic [8].
À ce stade,
une remarque s’impose. Concernant la
clause 1 du communiqué, nous avons
traduit le mot « secular » par le terme
« laïc », avant de disposer du texte
français de la deuxième réunion élargie,
dite de Vienne 2, où le traducteur à
opté pour le terme
« non-confessionnel ». Nous maintenons
le terme laïc. Aux Syriens d’en décider
en cas de modification de leur
Constitution.
Ceci dit, il
était évident que les conclusions de
Vienne 1 étaient loin de satisfaire les
objectifs des frères ennemis saoudiens
et qataris ayant dépensé tant de
milliards pour nourrir la déferlante
terroriste censée briser la volonté et
les alliances syriennes ; le premier
pour asseoir son hégémonie sur le monde
musulman et la région face à la montée
imperturbable des Iraniens ; le second
pour s’assurer le monopole gazier au
détriment des Russes et des Iraniens en
acheminant ses gazoducs via le
territoire syrien… la guerre pour le gaz
étant un sujet déjà traité dans toutes
ses dimensions.
De même, il
était évident que la Turquie tout autant
qu’Israël n’étaient pas particulièrement
ravis du premier point garantissant
l’unité et l’intégrité territoriale de
la Syrie, chacun voulant grignoter une
part du territoire syrien : la Turquie à
la frontière Nord [9] et Israël
au Golan [10], sous prétexte d’y
établir de prétendues « zones de
sécurité » là où ils ont largement
contribué à semer le chaos, oubliant que
leurs ambitions dépassaient la marge
consentie par le chef d’orchestre
états-unien.
ENTRE
VIENNE 1 ET VIENNE 2
Beaucoup de
bruits ont couru dans la presse arabe
sur un probable torpillage de la réunion
de Vienne 2 fixée au 14 novembre.
M. Hussein
Amir
Abdollahian,
vice-ministre iranien
des Affaires
étrangères, a déclaré sur Al-Mayadeen TV
[autour du 10 ou 11 novembre ?] que
l’Iran pourrait ne pas y participer si
Washington continuait à mener des
consultations unilatérales avec certains
pays participants à l’exclusion
d’autres, sans plus de précisions.
Par la suite, nombre d’articles de
presse ont rapporté que le « quatuor »
Washington-Qatar-Turquie-France
s’arrangeait, en coulisses, pour
contourner les résultats de l’initiative
russe en jouant sur la liste des groupes
de l’opposition syrienne qui
participeraient au dialogue inter-syrien
et sur la liste des « groupes armés non
étatiques » à classer sur la liste
internationale des organisations
terroristes, accusant
Moscou de vouloir y inclure tous les
mouvements rebelles armés dits « modérés
» et non seulement Daech et le Front al-Nosra
[ce dernier n’étant pas mentionné dans
le communiqué de Vienne 1], en plus
d’avoir élaboré un texte en huit points
qui « n'exclut pas que Bachar al Assad
soit candidat à l'élection
présidentielle, bien que son départ soit
considéré par les pays occidentaux et
arabes comme une condition de la paix" [11].
Quant à l’Arabie saoudite, les
manœuvres de son ministre des Affaires
étrangères furent moins discrètes,
menaçant qui voulait l’entendre d’un
coup de force militaire en Syrie, de
davantage de soutien aux « groupes armés
de l’opposition » et de pire encore, si
tous les participants ne cédaient pas à
son dogme haineux de destitution du
président Bachar al-Assad préalablement
à toute négociation.
Autant de rumeurs et de menaces
ayant amené, le 12 novembre, la porte
parole du Ministère russe des Affaires
étrangères, Mme
Maria Zakharova, à
rappeler les règles du jeu :
« Nous accordons une grande
importance au développement du potentiel
constructif du Groupe de soutien à la
Syrie, qui se réunira à Vienne le 14
novembre au niveau ministériel. En nous
basant sur la ligne fondamentale de la
Russie sur le processus de paix en
Syrie, nous avons l'intention de
poursuivre un travail actif pour
parvenir à une compréhension commune
claire concernant l'appartenance de tel
ou tel groupe de combattants syriens aux
organisations terroristes, ainsi que
pour promouvoir le processus de paix sur
la base du Communiqué de Genève du 30
juin 2012 et de la déclaration finale de
la réunion de Genève du 30 octobre 2015.
Malheureusement, le fonctionnement
de ce mécanisme d'accompagnement
diplomatique du processus de paix en
Syrie, que Moscou juge efficace depuis
son lancement il y a deux semaines,
subit déjà des tentatives de déformer
son objectif fondamental. On a
l'impression que tout le monde n'a pas
compris correctement la vocation de ce
format. De notre point de vue, il permet
précisément et de manière franche (ce
qui est important) de dialoguer et
surtout d'avancer vers le rapprochement
des positions.
À la veille de la réunion
ministérielle, les États-Unis ont très
hâtivement suggéré d'organiser le
travail de trois groupes – sur
l'opposition, la lutte antiterroriste et
les aspects humanitaires. Je souligne
qu'il n'y a eu aucune consultation
préalable avec la partie russe quant à
la date et le lieu des réunions. Nous
percevons clairement une aspiration à
travailler de manière unilatérale et
séparer les pays du groupe de Vienne en
"meneurs" et "suiveurs". Nous ne pouvons
pas accepter de telles règles du jeu ».
[12]
Mais le 13
novembre, l’horreur a frappé Paris. Le
monde entier a chaleureusement témoigné
de sa solidarité avec le peuple
français, y compris le Président syrien,
malgré le silence quasi-universel sur
les attentats quotidiens contre le
peuple syrien. Et nombre de
personnalités politiques, de la majorité
et de l’opposition françaises, ont
déclaré publiquement qu’il fallait
« parler » à Bachar al-Assad, l’ennemi
numéro 1 étant le terrorisme ; quoique
certains nous disaient clairement :
« nous réglerons son sort plus tard » en
espérant obtenir par le jeu diplomatique
ce qu’ils n’ont pu obtenir par la
terreur, le feu et le sang.
Voici un extrait de
l’intervention de M. Allain Juppé le
lendemain des attentats meurtriers
du 13 novembre au journal de 20 H
d’Antenne 2 :
« J'étais sur la
ligne du gouvernement, ni Daech ni
Bachar. Aujourd'hui (...) il y a des
hiérarchies, il y a des priorités, il
faut écraser Daech (…) Ensuite, nous
verrons comment organiser la
réconciliation des Syriens en changeant
les équipes de Damas, mais priorité à
écraser Daech, ce qui veut dire que nous
devons clarifier nos buts de guerre avec
les Américains, avec nos partenaires
arabes, mais aussi avec les Turcs et
avec les Russes, il faut s'y mettre
tous… » [13].
Bachar al-Assad
est ici remplacé par les « équipes de
Damas » ! Comprendre qu’il n’est pas
question pour « le meilleur d’entre
tous » de ne pas continuer à jouer des
relations des dirigeants français avec
les truands néoconservateurs de tous
bords et les géniteurs nourriciers des
criminels ensauvagés, qui viennent
d’éteindre les lumières de Paris, après
avoir éteint tant de vies, nous
condamnant à la double peine : vivre la
douleur de la France tout en vivant
celle de la Syrie.
En tout cas,
concernant ses « partenaires arabes »
avec lesquels il doit encore
« clarifier nos buts de guerre », il en
va de l’honneur de la Syrie et des
Syriens de ne pas en faire partie ; car,
en effet, « on ne peut devenir
respectable juste parce qu’on a de
l’argent et du pétrole », comme lui a
soufflé son collègue du parti des
Républicains, M. Thierry Mariani [14].
VIENNE 2,
14 NOVEMBRE 2015
Le texte de
cette deuxième réunion est consultable
(en français) sur le site France
diplomatie [15]. Une
comparaison de la liste des participants
révèle la présence de la Ligue arabe,
apparemment absente de la réunion de
Vienne 1, ce qui mérite de rappeler que
la Syrie n’en faisant plus partie de par
les magouilles des Qataris et des
Saoudiens, avec la complicité de son
Secrétaire général égyptien, Nabil el-Arabi,
le sort de la Syrie par ce groupe
d’États présenté comme «Le Groupe de
soutien international à la Syrie », ou
ISSG, se discute en l’absence de la
Syrie, un État légitime, un Gouvernement
légitime, un Président légitime, un
Membre de l’ONU.
Pour
rappel, le 11 novembre, le ministre
russe des Affaires étrangères, Sergueï
Lavrov, avait déclaré :
« L'objectif principal de [Vienne I2]
serait la détermination de la liste des
groupes d'opposition en Syrie qui
peuvent négocier le règlement politique
de la situation ainsi que la
clarification de la notion
d' « opposition modérée » et
l'élaboration d'une autre liste commune,
celle des organisations terroristes.Il est
évident qu'il est désormais impossible
d'avancer sur cette question sans la
clarifier. Il est également impossible
d'avancer sur une autre direction,
figurant dans la déclaration du 30
octobre, celle du lancement du processus
politique sous l'égide de l'ONU entre
les représentants de l'opposition et du
gouvernement.
Si au lieu
d'un travail concret sur ces deux
questions (la liste des organisations
terroristes et les négociations entre le
gouvernement et l'opposition) quelqu'un
avance des idées abstraites, « allons
renverser le régime et tous les
problèmes se régleront d'eux-mêmes », il
n'y a aura pas bien entendu aucun succès
lors de cette rencontre »[16].
Or, les
principales additions par rapport à
Vienne 1 sont :
-
Un calendrier : les
participants se sont entendus pour
réunir des représentants du
gouvernement syrien et de
l’opposition pour des négociations
formelles avec l’objectif du 1er
janvier. Ils ont affirmé leur
soutien à un cessez-le-feu et à un
processus mené par les Syriens en
vue de rédiger une nouvelle
Constitution d’ici six mois, et
d’organiser des élections libres et
équitables conformément à cette
constitution d’ici dix-huit mois, le
tout sous les auspices de l’ONU.
-
L’ISSG a réaffirmé qu’il
importait de se conformer à toutes
les résolutions pertinentes du
Conseil de sécurité des Nations
Unies, notamment la résolution 2199
sur l’arrêt du commerce illégal de
pétrole, d’antiquités et d’otages,
dont bénéficient les terroristes.
[Ce qui implique de se conformer aux
résolutions 2170 et 2178, mais
jusqu’ici aucune condamnation des
États qui soutiennent
incontestablement les terroristes.
Au contraire ce même jour se tenait
le G20 en Turquie chez M. Erdogan…
Comme quoi tout est affaire de
définition du terrorisme que la
Syrie réclame depuis les années
quatre-vingt, pour avoir eu à
souffrir d’attentats terroristes non
moins horribles que l’attentat du 13
novembre à Paris…N.d.A].
-
L’ISSG s’est déclaré préoccupé
par le sort des réfugiés et des
personnes intérieurement déplacées
et a souligné la nécessité de mettre
en place les conditions de leur
retour en toute sécurité.[Excellente
nouvelle pour ceux qui souhaitent ce
retour, à condition que ce ne soit
pas la porte grande ouverte à toutes
les intrusions et manœuvres de
certaines ONG semeuses de troubles
et de mensonges… [N.d.A].
-
En ce qui concerne la lutte
contre le terrorisme et conformément
à la clause 6 du Communiqué de
Vienne, l’ISSG a rappelé que Daech,
le Front Al-Nosra et d’autres
groupes terroristes, tels que
désignés par le Conseil de Sécurité
des Nations Unies, et par ailleurs
comme il a été convenu par les
participants et avalisé par le
Conseil de Sécurité des Nations
Unies, doivent être vaincus. [Le
Front al-Nosra a-t-il été ajouté
grâce à l’insistance de M. Fabius
ou, malheureusement, grâce à la
terrible tragédie qui a frappé la
France ? N.d.A].
-
Le Royaume hachémite de
Jordanie a accepté d’aider à
élaborer, au sein des représentants
de la communauté militaire et du
renseignement, une qualification
commune des groupes et des individus
permettant éventuellement de les
désigner comme terroristes, avec
l’objectif d’y parvenir pour le
début du processus politique sous
les auspices des Nations Unies.
Sur ce
dernier point, l’on pourrait se demander
s’il s’agit d’un « miracle »,
comme l’a dit publiquement le ministre
syrien des Affaires étrangères, M. Walid
al-Mouallem, lorsque MM. Poutine et
Lavrov l’ont informé de leur projet de
lutte internationale contre le
terrorisme englobant les États
régionaux, ou d’un tour de magie. Quant à la
« communauté du renseignement et de ses
initiatives communes », mis à part le
fait établi que les services du
renseignement de plusieurs pays
occidentaux ont largement participé à la
guerre souterraine contre la Syrie au
sein des cellules secrètes
multinationales en Turquie et en
Jordanie [MOK], il faut espérer
que le gouvernement français tiendra
désormais compte des avertissements des
« anciens », tels MM. Yves Bonnet et
Alain Chouet ou M. Bernard Squarcini,
lequel vient de faire savoir :
« Il y a
deux ans déjà, les services syriens
m’avaient effectivement proposé une
liste des Français combattant en Syrie.
J’en avais parlé à mon ancien service
qui en a rendu compte à Manuel Valls. La
condition des Syriens était que la
France accepte de coopérer avec leurs
services de renseignements. On m’a
opposé un refus pour des raisons
idéologiques » [17].
Des raisons
« idéologiques » ? Peut-être. C’est en
tout cas une idéologie qui a contribué à
aveugler une très grande partie de nos
concitoyens qui ne supportent aucune
contradiction, même de la part de leurs
amis syriens en qui ils avaient
confiance jusque là, et a contribué à
nourrir la guerre souterraine dont le
décompte des tués s’est arrêté à environ
250 000 depuis quelques semaines, sans
que l’on comprenne pourquoi, puisque la
liste macabre ne cesse de s’allonger.
CRITIQUES
DE VIENNE 2
Pour certes
analystes régionaux, le communiqué de
Genève 2 est bel et bien enterré, ainsi
que les « mascarades » savantes de M. de
Mistura pour un « Taëf » à la libanaise
qui aurait consacré des zizanies
sectaires sur fond de confessionnalisme.
Les États-Unis n’auraient pas les moyens
d’entrer en guerre contre la Russie,
couvriraient ses actions et seraient
dans l’obligation de couvrir et de
rassurer leurs alliés, d’où les
dernières déclarations intempestives d’Obama
et de John Kerry…
Pour
d’autres, malgré le souhait des
participants d’intensifier la lutte
contre le terrorisme, aucune décision
n’a été prise en ce sens, et le
communiqué de Vienne 2 démontrerait
l’absence d'une réelle volonté de mettre
fin à la guerre internationale qui se
déroule sur le territoire syrien,
certaines parties essayant de la
« geler » tant que les conflits
géopolitiques entre les États-Unis et la
Russie n’auront pas été réglés. À
l’appui de ces analyses, plusieurs
lacunes et contradictions :
-
L’imposition d’un calendrier
et d’un cessez-le-feu, avant de
définir le terrorisme ou
d’identifier les groupes terroristes
« autres » que Daech et Jabhat al-Nosra,
pose la question de savoir ce qui se
passerait s’il était rompu par ces
autres organisations comme Ahrar
al-Cham, Jaïch al-Islam… notoirement
soutenues par des Pays du Golfe et
la Turquie. Dira-t-on qu’il s’agit
des Forces de l’opposition armée de
la Coalition d’Istanbul [CNS] connue
sous le Sigle ASL ou des « Forces
démocratiques de Syrie » ; une
nouvelle armée créée dernièrement
par les USA en soutien à la
résistance syrienne en lutte contre
Daech ? Qui aura à intervenir pour
les contrer ? Que risquent vraiment
les États qui les soutiennent ?
-
Partant de là et étant donné
que Genève 2 a été à l’origine de
l’idée d’un gouvernement transitoire
présenté de telle sorte que chaque
partie puisse l’interpréter à sa
guise, avec pour le Bloc occidental
et ses alliés régionaux la ferme
volonté de destituer le président Bachar al-Assad et d’amener les
Frères Musulmans et/ou leurs agents
au pouvoir, que signifie le
paragraphe 5 : « Les cinq Membres
permanents du Conseil de sécurité
des Nations Unies se sont engagés à
soutenir une résolution du CSNU
visant à autoriser une mission de
surveillance du cessez-le-feu
avalisée par les Nations Unies dans
les parties du pays où les membres
de la mission de surveillance ne
seraient pas exposés à la menace
d’attaques terroristes ainsi qu’à
appuyer le processus de transition
politique, conformément au
Communiqué de Genève » ? Et pourquoi
parler tantôt de processus
politique, tantôt de processus de
transition politique, alors que dans
le communiqué de Vienne 1 il n’est
question que de processus
politique ?
-
Quant aux bons auspices de
l’ONU à tous les niveaux, le
Président syrien a déjà répondu à la
question :
« … une observation internationale
ne signifie pas les organisations des
Nations Unis qui n’ont franchement
aucune crédibilité, car elles sont sous
le contrôle des Américains et de
l’Occident en général. Donc, lorsque
nous parlons d’observation
internationale, de participation ou de
coopération, cela veut dire certains
États qui ont étaient impartiaux durant
la crise, n’ont pas soutenu le
terrorisme, et n’ont pas essayé de
politiser leurs positions vis-à-vis des
événements en Syrie… »
[18].
-
Et enfin, l’absence de toute
référence concernant les sorties et
les frappes aériennes illégales dans
l’espace syrien, qu’il s’agisse des
USA ou de leurs alliés, dont la
France ; la Russie étant légalement
intervenue à la demande du
gouvernement légitime syrien.
ET
MAINTENANT OÙ ON VA ?
Depuis
l’attentat du 13 novembre, pratiquement
tous les médias rapportent que la France
et la Russie intensifient leurs frappes
en Syrie, d’où un sentiment d’amertume
chez les Syriens et surtout beaucoup
d’interrogations malgré la confiance
qu’ils accordent à la parole de la
bienvenue Russie, confiance renforcée
depuis que le président Poutine a
déclaré devant le monde entier que sa
guerre en Syrie était préventive, la
sécurité nationale de la Russie étant
liée à la sécurité nationale de la
Syrie. Comment et pourquoi coopère-t-il
avec la France qu’ils considèrent comme
le fer de lance d’une sale guerre qui
n’en finit plus ?
Les médias
parlent aussi de renversement
d’alliances, tandis que M. Sergueï
Lavrov, cité par des agences russes, a
déclaré aujourd’hui [19] :
« Nous sommes prêts
à une coopération pratique avec les pays
de la coalition et à travailler avec eux
pour en définir les modalités, qui, bien
sûr, respecteraient la souveraineté de
la Syrie et les prérogatives du
gouvernement syrien ».
Alors que Manuel Valls
déclarait ce même jour sur France Inter
[20] :
« Le pouvoir, en
Arabie saoudite comme au Qatar, lutte
contre Daech, ça c’est incontestable. Et
moi je n’ai pas de raison de douter
aujourd’hui de l’engagement de ces deux
gouvernements… Reste la question de
l’ensemble de ces financements… mais
dans le Proche et le Moyen-Orient les
choses sont toujours très compliquées et
vous savez les liens qui existent entre
le régime de « Bachar » et Daech. Vous
savez aussi les liens qui existent entre
le régime de « Bachar » et l’Iran. Vous
savez… il y a la confrontation entre le
monde sunnite et le monde chiite. Il
faut avoir en permanence en tête ces
questions. Mais pour nous, l’essentiel,
chacun l’a bien compris, c’est la lutte
contre le terrorisme et contre Daech. Et
donc, nous [ne] pourrons accepter aucun
élément qui participe du financement de
ce terrorisme contre nous ».
Honnêtement, on
croirait entendre le bulletin d’Al-Jazeera
TV, sans oublier que si l’Arabie
saoudite et le Qatar ne se soucient que
de Daech c’est bien parce qu’il a
échappé au contrôle de tous ses
géniteurs, y compris les États-Unis.
D’où cette unanimité de lutte contre
Daech, avec un gros trou de mémoire dans
lequel tombent les autres groupes
terroristes, moins la Turquie. Par
conséquent, il n’est pas étonnant que le
Bloc occidental et ses alliés aient
accusé la Russie de ne s’en prendre qu’à
l’opposition modérée « armée » plutôt
qu’à Daech, dès tout le début de son
intervention en Syrie.
Reste à savoir si la
« coopération pratique » entre la Russie
et la France dans l’espace aérien
syrien, n’est pas une coordination
obligée pour éviter que les avions
militaires ne se télescopent, comme dans
le cas des États-Unis.
Reste à savoir si la
France a vraiment décidé de combattre le
terrorisme ou si elle pense pouvoir le
contrôler en continuant à bombarder la
ville de Raqqa, alors que ses amis du
Golfe sont les vrais inspirateurs de ces
terroristes français qui ont tué des
Français.
Une dernière
question brûlante ; qui en France se
souviendrait de la troupe « Gulanar » de
la ville de Raqqa ? Qui se souviendrait
qu’en 1986, Paris lui a offert sa
médaille d’or en la préférant à
soixante-seize autres troupes de danse
populaire ?
Mouna Alno-Nakhal
18/11/2015
Notes :
[1]
Communiqué conjoint agréé par les
ministres lors de la réunion
internationale de Vienne sur la Syrie
(30 octobre 2015) (en anglais)
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/la-france-et-la-syrie/actualites-2015/article/communique-conjoint-agree-par-les-ministres-lors-de-la-reunion-internationale
[2]
Syrie : les fanfaronnades et les
contre-vérités de Fabius…
http://www.comite-valmy.org/spip.php?article4542
[3] Syrie -
Propos à la presse de Laurent Fabius
(Vienne, 30 octobre 2015)
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/la-france-et-la-syrie/actualites-2015/article/syrie-propos-a-la-presse-de-laurent-fabius-vienne-30-10-15
[4] Le
dialogue du jour avec M. Ghaleb Kandil
sur OTV (Liban)
https://www.youtube.com/watch?v=gBhpCwyyJhA&feature=youtu.be
[5]
Communiqué final de la Réunion du Groupe
d'Action pour la Syrie, à Genève le 30
juin 2012.
http://discours.vie-publique.fr/notices/122001263.html
[6] résolution 2118 (2013)
http://cdi.lyon3.free.fr/cdi.lyon3/Actualite_files/Re%CC%81solution%202118.pdf
[7] Syrie / ONU : La résolution 2118
passée au crible de la réalité…
http://www.mondialisation.ca/syrie-onu-la-resolution-2118-passee-au-crible-de-la-realite/5352346
[8]
Vidéo : Attentats Paris - Des
intervenants déballent et les médias
filtrent peu !
https://www.youtube.com/watch?v=hS1dULqmFmc
[9]
Washington n'a pas répondu aux
conditions d'Erdogan
http://www.i24news.tv/fr/actu/international/moyen-orient/51530-141119-washington-n-a-pas-repondu-aux-conditions-d-erdogan
[10]
Netanyahu profite du chaos syrien pour
lancer un ballon d’essai sur le Golan
http://geopolis.francetvinfo.fr/netanyahu-profite-du-chaos-syrien-pour-lancer-un-ballon-dessai-sur-le-golan-85971
[11]
Diplomatie
russe
à
Reuters:
"vous
êtes
vraiment
journalistes?"
http://fr.sputniknews.com/international/20151112/1019465497/deontologie-journalisme-reuters-zakharova-ministere-russe-defense-syrie-vienne.html
[12]
Conférence de presse de la porte-parole
du Ministère russe des Affaires
étrangères Maria Zakharova, Moscou, 12
novembre 2015
http://www.mid.ru/fr_FR/posledniye_dobavlnenniye/-/asset_publisher/MCZ7HQuMdqBY/content/id/1938088
[13] Vidéo :
Alain Juppé / Antenne 2
http://www.francetvinfo.fr/faits-divers/terrorisme/attaques-du-13-novembre-a-paris/attentats-a-paris-pour-alain-juppe-il-n-y-a-qu-une-seule-riposte-resister-et-se-battre_1175805.html
[14]
Entretien avec Thierry Mariani
http://www.bvoltaire.fr/thierrymariani/on-ne-peut-pas-devenir-respectable-juste-parce-quon-a-de-largent-et-de-petrole,219113
[15]
Déclaration du groupe de soutien
international à la Syrie (Vienne, 14
novembre 2015)
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/syrie/la-france-et-la-syrie/actualites-2015/article/declaration-du-groupe-de-soutien-international-a-la-syrie-vienne-14-11-15
[16] Syrie:
Moscou
dément
la
désinformation
des
médias
sur
"le texte russe"
http://fr.sputniknews.com/international/20151111/1019439385/syrie-texte-document-russe-desindormation-assad-opposition-elections-defense.html#ixzz3rn73scQd
[17] Manuel
Valls a-t-il refusé la liste des
djihadistes français proposée par la
Syrie ?
https://francais.rt.com/france/10682-manuel-valls-refus-liste-djihadistes-squarcini
http://www.valeursactuelles.com/politique/video-yves-de-kerdrel-nous-avons-affaire-a-des-barbares-57361
[18] Le
président al-Assad au Magazine français
“Valeurs Actuelles” : La politique
actuelle de la France n’est pas
indépendante de celle des Etats-Unis
http://sana.sy/fr/?p=49409
[19]
Coalition anti-Daech : la Russie prête à
coopérer, sous conditions
http://www.ouest-france.fr/monde/syrie/coalition-anti-daech-la-russie-prete-cooperer-sous-conditions-3852402
[20] Valls :
"L'Arabie Saoudite et le Qatar luttent
contre Daesh"
http://tempsreel.nouvelobs.com/en-direct/a-chaud/12368-attaquesparis-pouvoir-arabie-saoudite-comme-qatar-lutte.html
Le
dossier Syrie
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
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