Syrie
La nouvelle stratégie d’Obama : Achever les dirigeants d’Al-Nosra et
préserver ses combattants
Yahia Dabouk
Dimanche 13 novembre 2016
Ce 10
novembre, des hauts fonctionnaires du
gouvernement des États-Unis auraient
informé le Whashington Post que
l’administration Obama ne pouvait plus
se permettre de « traiter avec le
Diable », pour continuer à exercer une
pression militaire sur le Président
syrien Bachar al-Assad.
En bref,
Obama aurait ordonné au Pentagone de
trouver et de tuer les dirigeants du
groupe Al-Nosra sévissant en Syrie, en
déployant plus de drones et en usant de
tous les moyens possibles des Services
du renseignement. Un revirement né du
souci de voir certaines régions de Syrie
se transformer en bases d’opérations
terroristes lancées par Al-Qaïda contre
les pays du Sud de l’Europe… [*].
Noble
souci qui ignore superbement la pression
des sanctions inhumaines qui pèsent sur
une population restée piégée, bon gré
mal gré, entre les crocs de ces monstres
instrumentalisés par Obama et ses
alliés, lesquels font toujours mine de
pleurer sur la prétendue « opposition
armée modérée » assiégée dans Alep-Est,
ne réclament des couloirs humanitaires
que pour sauver les terroristes qui la
composent et nulle part ailleurs, ne se
prononcent que pour ternir une armée qui
défend héroïquement la patrie ; se
souciant comme d’une guigne des civils
qui tombent quotidiennement partout dans
le pays, des enfants privés de paix et
d’école, des parents qui enterrent leurs
enfants et petits-enfants, des
destructions qui n’ont épargné ni le
vivant ni l’inerte, des soi-disant
bavures aériennes de ladite Coalition
internationale que personne ne
condamnera, des malheurs qui ont atteint
un tel degré d’atrocité qu’il est
difficile d’imaginer ce que cette
administration pourrait encore inventer
pour se disculper tout en poursuivant
ses objectifs premiers ; objectifs, a
priori, contrariés par l’élection de M.
Trump, 45ème Président des
États-Unis.
Mais
nombre d’observateurs régionaux ne sont
pas dupes de cette dernière manœuvre
annoncée au lendemain de cette élection.
Nous avons choisi de traduire
l’explication avancée par M. Yahia
Dabouk, rédacteur du quotidien libanais
Al-Akhbar, qui résume le sentiment
général des sceptiques de bonne foi
[NdT].
Obama s’est
réveillé tout à coup pour constater
qu’« Al-Qaïda en Syrie » est une
organisation terroriste et ordonner au
Pentagone de traquer et de tuer ses
dirigeants sur le territoire syrien.
Des ordres
clairs, précis et sans équivoque selon
un haut responsable de son
administration : « Le président (Obama)
ne veut pas que ce groupe (Al-Nosra)
hérite de la Syrie. Ce n’est pas une
opposition viable, car c’est
l’organisation Al-Qaïda ».
C’est là une
évolution qui pourrait être considérée
comme spectaculaire de la part de
l’administration Obama à moins de trois
mois de la fin de son mandat. Mais il
est plus probable qu’il s’agit d’une
décision cherchant à anticiper la
stratégie du futur président Donald
Trump, laquelle pourrait consister à
livrer, en quelque sorte, l’arène
syrienne à la partie russe, alors que la
victoire de Clinton aurait laissé plus
de temps pour continuer à appliquer le
même mode opératoire sans changement
significatif.
Cet ordre de
liquidation des dirigeants d’Al-Nosra ne
peut être envisagé comme un repli de la
part d’Obama, mais comme une alternative
qui conserverait Al-Qaïda en tant que
moyen de pression essentiel, actif et
fiable, pour amener le Président syrien
à une reddition volontaire.
En effet, les
éléments du Front al-Nosra privés de
leurs chefs se précipiteront forcément
vers d’autres groupes terroristes non
catalogués « Al-Qaïda », qu’il sera
difficile à Donald Trump, une fois
officiellement investi dans ses
fonctions, de cibler directement ou par
procuration accordée à la partie russe.
Autrement
dit, au lieu de répondre à l’exigence
russe de séparer les terroristes
d’Al-Nosra des prétendus opposants armés
modérés, Obama cherche à rallier les
premiers aux seconds sous le vocable :
« opposition modérée ».
Une solution
créative de la part d’une administration
réduite à ne pouvoir compter que sur des
mercenaires terroristes armés faute de
pouvoir intervenir directement, laquelle
solution lui permettrait, d’ici deux
mois, de prétendre avoir liquidé
Al-Nosra tout en ayant gardé des forces
inféodées sur le terrain, si entretemps
elle réussissait à les épargner et à
conserver leur capacité guerrière pour
les prochaines étapes du conflit
concentré sur la Syrie.
Une solution
qui pourrait éventuellement permettre à
M. Trump de se dérober à ses engagements
de tendre la main aux Russes pour
éliminer le terrorisme en Syrie, étant
donné qu’une fois président il sera plus
enclin à voir les intérêts américains
sous un autre angle qu’en tant que
candidat à la présidence.
Ceci, sans
oublier qu’Obama cherche à soigner son
héritage, celui d’un président qui a pu
combattre et éradiquer le terrorisme et
Al-Qaïda en Syrie et en Irak, non
l’inverse et notamment en Syrie. Il en
va de son propre intérêt, lequel se
trouve actuellement confondu avec celui
des États-Unis, dont les options sont
désormais étroites et limitées, d’où
l’idée ingénieuse : couper la tête
d’Al-Qaïda, mais garder son corps
vivant.
Finalement,
cette nouvelle stratégie d’Obama
signifie que la stratégie précédente a
été incapable d’atteindre ses objectifs
et confirme qu’il lui faut éviter les
interventions militaires directes vouées
à l’échec. En même temps, elle confirme
la justesse de vue des divers groupes
salafistes tels Daech, Al-Nosra et
apparentés, lesquels ont compris qu’ils
ont été exploités et que le temps est
venu de les exterminer.
Yahia Dabouk
12/11/2016
Source :
Al-Akhbar (Liban)
http://www.al-akhbar.com/node/267976
Article
traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
[*] Obama
directs Pentagon to target al-Qaeda
affiliate in Syria, one of the most
formidable forces fighting Assad
https://www.washingtonpost.com/world/national-security/obama-directs-pentagon-to-target-al-qaeda-affiliate-in-syria-one-of-the-most-formidable-forces-fighting-assad/2016/11/10/cf69839a-a51b-11e6-8042-f4d111c862d1_story.html
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
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