Conférence de
presse
Syrie : d’Astana 7 à Sotchi 1 avant
Genève 8…
en attendant Damas 1 ?
Bachar al-Jaafari
Jeudi 2 novembre 2017
La 7ème session d’Astana s’est tenue les
30 et 31 octobre 2017. Participaient aux
négociations les délégations des trois
États garants des zones de désescalade
en Syrie [Russie-Iran-Turquie], la
délégation du gouvernement syrien
présidée par le Dr Bachar al-Jaafari, la
délégation de l’« opposition armée
modérée » théoriquement distincte des
terroristes de Daech, Al-Nosra et autres
groupes apparentés, une délégation de
l'ONU, ainsi que les représentants des
deux pays observateurs, la Jordanie et
les États-Unis.
À peine terminée,
l’hystérie des médias saoudiens
atteignait des sommets, car alors que le
Dr Bachar al-Jaafari était encore en
pleine conférence de presse, le
ministère russe des Affaires étrangères
invitait, non plus des personnalités de
l’opposition, mais 33 organisations et
partis politiques syriens, y compris les
Kurdes, à participer à un « congrès de
dialogue national » à Sotchi. Ceci,
avant la tenue de la prochaine réunion à
Genève, annoncée pour le 28 novembre par
le facilitateur onusien, M. Staffan de
Mistura.
Autrement dit, la
diplomatie russe a tiré le tapis sous
les pieds des traitres du groupe de
Riyad et de ladite Coalition nationale
syrienne [CNS], maîtres du jeu à Genève,
puisque reconnus, depuis 2012, par le
Conseil de Coopération du Golfe, les
gouvernements français successifs et
autres prétendus gouvernements amis de
la Syrie, comme les uniques
représentants du peuple syrien.
La « proie syrienne
», comme dirait l’ex-ministre qatari
surnommé HBJ, est sans doute blessée et
souffre mille morts, mais elle n’est pas
prête à mettre genou à terre ni à vendre
son âme… Vivement « Bye bye Genève,
bonjour Damas 1 ! » en souvenir de l’ami
jordanien, M. Nahed Hattar [*], lequel a
payé de sa vie sa foi en la Syrie… [NdT].
Déclaration à la
presse
Au cours de cette
session d’Astana 7, qui vient juste de
s’achever, nous avons rencontré les deux
garants, russe et iranien. La vérité est
que ces rencontres furent, comme elles
l’ont toujours été, constructives et
fructueuses. Nous avons parlé d’Astana
6, de ce qui en a été exécuté et de ce
qui ne l’a pas été.
Comme vous le
savez, à Astana 6 nous avions convenu
d’ajouter Idlib aux zones de
désescalade, sur la base :
· du retrait de 3
Kilomètres de tous les groupes armés
présents à l'est de la route d’Abou al-Dahour
vers l'ouest de cette route ;
· de la coopération
de « tous » au combat et à l’élimination
du Front al-Nosra internationalement
qualifié d’organisation terroriste ;
· la Russie et
l’Iran devant se charger de l’envoi
d’observateurs pour superviser le
cessez-le-feu.
Mais ce qui s'est
passé, depuis la tenue d’Astana 6
jusqu'ici, est que les forces armées
turques, en coopération et coordination
avec le Front al-Nosra, sont entrées
avec leurs véhicules blindés en
territoire syrien, contrairement à
l’engagement pris dans le cadre de
l’accord de désescalade conclu entre les
trois « États garants ».
Au cours de cette
session, nous avons soulevé cette
question auprès des garants russe et
iranien, lesquels nous ont assuré de la
nécessité du respect des engagements
pris par « tous » les garants.
La république arabe
syrienne considère la présence de toutes
forces militaires sur son territoire,
sans le consentement du gouvernement
syrien, comme une agression et une
occupation, lesquelles seront traitées
en conséquence.
Je vous remercie
[NB : déclaration
faite en arabe, puis en anglais, avec
quelques variations minimes dont nous
avons tenu compte].
Réponses à la
presse
1. Ces deux
derniers jours nous avons entendu parler
du Congrès « des peuples » syriens
[termes qui auraient été prononcés par
le Président Poutine soulevant un tollé
en Syrie, où il est inacceptable de
considérer le citoyen sous l’angle de sa
religion ou de son origine ethnique ;
NdT], puis d’un « congrès de dialogue
national » qui se tiendrait dans la base
russe de Hmeimim en Syrie sans pour
autant exclure un autre lieu, y compris
le territoire russe… ?
Dr Bachar
al-Jaafari : Vous savez que le
gouvernement syrien est ouvert à toute
initiative qui stopperait l’effusion du
sang et mettrait fin à cette guerre
injuste contre le peuple syrien. Ici,
j’aimerais vous rappeler que la Syrie a
été la première à inviter à une
conférence de dialogue national dès le
début de la crise en 2011. Depuis, nous
n’avons cessé d’assurer que nous y
étions toujours favorables, même lorsque
nous avions la conviction que certaines
initiatives ne mèneraient pas à des
résultats concrets. Auquel cas et en
dépit de cette conviction, nous n’avons
ménagé aucun effort afin de faire
avancer les mécanismes du dialogue, pour
que l’on ne puisse pas prétendre que
nous étions contre ou que nous ne
voulions pas que le processus politique
réussisse.
Quant à votre
question à propos du « congrès de
dialogue national », évoqué il y a
quelques minutes par le ministre des
Affaires étrangères du Kazakhstan, il
est le résultat de nos discussions et de
la coordination ininterrompue entre nous
et les amis russes. En effet, partant de
la situation sur le terrain et du recul
des terroristes en Syrie, nous avons
jugé que le moment était plus opportun
pour un tel congrès et, bien sûr, nous
sommes prêts à y participer.
Vous avez raison de
vous interroger sur le lieu du congrès.
Sachez qu’il avait été proposé qu’il se
tienne en Syrie et à son invitation.
Évidemment, nous n’avons pas renoncé, ni
ne renoncerons à notre rôle en tant
qu’État. Mais notre approche réaliste de
la situation fait que nous savons qu'une
grande partie des groupes armés
dépendant politiquement et
financièrement de l’étranger -et donc
d’États désormais connus de tous- ne
sera pas autorisée à rejoindre un
congrès parrainé par l’État syrien.
C’est pourquoi,
après des discussions approfondies avec
la partie russe, nous avons considéré
qu’il valait mieux que le congrès se
tienne en Russie ; premièrement, parce
que la Russie est un État garant ;
deuxièmement, parce que nous avons
confiance en la Russie, un État ami qui
a défendu et continue à défendre la
souveraineté, l’indépendance et
l’intégrité territoriale de la Syrie.
2. Ces derniers
temps, nous avons aussi entendu dire que
les Nations Unies joueraient un rôle au
niveau de ce congrès, ainsi que des
élections et de la solution politique en
Syrie. Quel est le point de vue du
gouvernement syrien sur ces trois points
?
Dr Bachar
al-Jaafari : Nous sommes un État Membre
et fondateur de l’ONU. Par conséquent,
nous respectons la charte de cette
organisation internationale à laquelle
nous avons contribué. Et, nous croyons
que son rôle est fondamental à partir du
moment où elle jouit de la neutralité
souhaitée.
Abstraction faite
des tensions politiques et comme nous
l’avons tous constaté, l’équilibre se
réinstalle au sein de cette organisation
depuis que des grandes puissances amies
sont revenues reprendre leur rôle
fondamental au niveau de ses instances.
Par conséquent, le point de vue syrien
est favorable à n’importe lequel de ces
rôles dans la mesure où ils visent la
solution sur une base de neutralité
garantie par la Charte des Nations
Unies. Une neutralité qui se réfère
toujours à la souveraineté et à la
Constitution des États Membres ; en
l’occurrence, la Constitution syrienne
approuvée par le peuple syrien et par
personne d’autre.
Question 4 : Quelle
est la position du gouvernement syrien
en ce qui concerne lesdits « prisonniers
» vu que les groupes armés vous ont
accusés, ainsi que l’Iran, de bloquer un
accord sur ce point ?
Dr Bachar
al-Jaafari : Notre délégation avait
présenté aux garants russe et iranien un
document traitant de ce sujet précis et
de la position officielle de la
République arabe syrienne. C’est un
point très important pour nous en tant
qu’État et en tant que gouvernement. Il
avait été convenu qu’ils reviendraient
vers nous avec leurs remarques sur notre
document. Mais cela n’a pas été fait
jusqu’à présent. La balle est donc dans
leur camp et pas dans celui du
gouvernement syrien.
Question 5 : Vous
avez parlé d’une occupation turque en
Syrie, mais il y a aussi une présence
américaine considérée comme une
occupation, même par la partie russe.
Avez-vous abordé ce problème lors de vos
réunions ou en coulisses, d’autant plus
que les Américains participent à Astana
7 en qualité d’observateurs ?
Dr Bachar
al-Jaafari : Oui la présence militaire
turque à Idlib est une occupation ;
terme figurant, comme vous le savez,
dans un document officiel émanant du
ministère syrien des Affaires
étrangères. Dans toutes nos réunions
bilatérales, y compris avec le pays
hôte, nous avons dit et répété que cette
présence militaire turque est une
occupation et une agression, et que si
les deux autres garants ne traitaient
pas ce problème conformément aux accords
d'Astana 6, lequel a établi la zone de
désescalade avec l’engagement clair du
garant turc à respecter l’accord
tripartite, la République arabe syrienne
aura le droit de se défendre elle-même
et de défendre sa souveraineté par des
moyens légaux. Ces propos ont été
clairement tenus.
Tous doivent savoir
que l’accord d’Astana 6, résultant d’un
accord entre les trois garants,
consistait uniquement à ce que des
forces d’observation, forces de police
et
non forces de
l’armée, se déploient sur des zones à
définir précisément le long de ladite «
ligne de sécurité » ; les deux autres
garants devant agir de même.
Nous avons tous été
surpris que la partie turque ne soit pas
entrée avec des forces de police et des
armes légères, mais avec des forces de
l’armée régulière turque et des armes
lourdes. Telle est la première violation
de l’accord d’Astana 6 par la Turquie.
La deuxième
violation est que la Turquie a coopéré
avec le Front al-Nosra à Idlib, au lieu
de le combattre et de combattre tous les
autres groupes apparentés, comme le
prévoit l’accord.
D’où deux
violations graves commises par la
Turquie. En tout cas, ce ne sont là que
des remarques secondaires. Pour nous,
l’essentiel est que la présence
militaire turque dans le gouvernorat
d’Idlib est une occupation et une
agression.
Et soit dit en
passant, le ministère syrien des
Affaires étrangères a aussi publié une
déclaration officielle déposée auprès du
Conseil de sécurité des Nations Unies à
New York, laquelle dit clairement que
nous considérons la présence de
militaires US sur notre territoire et
les actes hostiles de ladite « Coalition
internationale », menée par les USA,
comme des agressions contre notre
souveraineté.
Agression et
occupation sont les termes indiscutables
depuis que les forces américaines ont
commencé à bombarder nos
infrastructures, à porter atteinte à
notre souveraineté, et qu’elles se sont
mises, comme la Turquie, à collaborer
avec Daech dans plusieurs régions de
notre pays. Rappelez-vous de leur raid
aérien sur des positions de l’Armée
syrienne au Mont al-Tharda afin de
permettre à Daech de l’occuper, mettant
en danger la vie de 300 000 civils à
Deir ez-Zor… Des faits connus de tous !
Merci.
Dr Bachar
al-Jaafari
Délégué permanent
de la Syrie auprès des Nations Unies et
chef de la délégation du gouvernement
syrien à Astana
31/10/2017
Transcription et
traduction par Mouna Alno-Nakhal
Source : Al-FadaiyaTV
(Syrie)
https://www.youtube.com/watch?v=RrgIcMEw-II
[*] Bye bye Genève,
bonjour Damas 1 !
http://www.palestine-solidarite.org/analyses.nahed_hattar.240114.htm
Le sommaire de Mouna Alno Nakhal
Le
dossier Syrie
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