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Pourquoi la présence russe en Afrique
inquiète tellement l’Occident?
Mikhail Gamandiy-Egorov
CC BY 2.0
/ Bangui Shopping District
Vendredi 14 septembre 2018
Source:
Sputnik Le plein retour de
Moscou sur le continent africain
provoque une véritable hystérie dans les
cercles occidentaux. Si il y a quelques
années encore, les paroles sur un tel
retour faisaient sourire les élites
occidentales, depuis que la Russie
post-soviétique est passée à l’action,
le sourire a subitement disparu…
Agitation
diplomatique, matraquage médiatique,
pressions politiques, les élites
occidentales, notamment celles de
l'Hexagone ne reculent désormais devant
rien pour tenter à tout prix de
maintenir leur prétendu « pré-carré » en
Afrique, et empêcher une prise de
souveraineté digne de ce nom au niveau
de nombre de pays du continent. En effet
et si l'on suit les titres de nombreux
médias mainstream, francophones comme
anglophones, l'heure est nettement à
l'inquiétude. France 24, BBC, RFI, New
York Times, Jeune Afrique et d'autres —
tous « s'interrogent » sur les «
motivations » et les capacités de Moscou
en Afrique.
En réalité, cette
inquiétude est assez compréhensible. Car
ils savent que ce retour russe en terre
africaine, frappera indéniablement le
système que l'Occident a longtemps
imposé au continent l'un des plus riches
en termes de ressources naturelles et
humaines, mais si longtemps dénigré avec
des clichés promus par les mêmes médias
mainstrimois. Souvenez-vous d'ailleurs
des premiers pas de la Chine en Afrique:
moqueries occidentales d'abord sur les
capacités de Pékin, puis — lorsque la
Chine commencera à s'imposer lancement
de vastes campagnes anti-chinoises,
notamment via les instruments
médiatiques, pour enfin se rendre à
l'évidence: la Chine a bel et bien
réussi à s'imposer et malgré toutes les
critiques dont elle peut faire face, le
constat est sans appel, les Africains en
majorité préfèrent Pékin à l'Occident.
Le retour russe
fait d'autant plus peur aux Occidentaux
pour plusieurs raisons. Tout d'abord car
désormais la concurrence
sino-occidentale pourrait entrevoir
l'élargissement de cette opposition en
deux blocs antagonistes, un peu dans le
style du Conseil de sécurité de l'ONU:
russo-chinois d'un côté et occidental de
l'autre. Certes, les intérêts de la
Russie en Afrique ne sont pas forcément
ceux de la Chine, et vice-versa. Mais
globalement parlant, il est aujourd'hui
clair que Moscou et Pékin pourraient
être en Afrique beaucoup plus
partenaires que concurrents, et ce bien
évidemment au détriment des intérêts
occidentaux. Car faut-il le rappeler les
domaines de compétence de la Chine en
Afrique ne sont pas forcément ceux de la
Russie, et les domaines d'expertise
russe ne sont pas forcément ceux de la
Chine. Ce qui signifie que les deux pays
peuvent réellement se compléter, tout en
respectant chacun la souveraineté des
nations africaines. Cette
complémentarité pourra d'ailleurs se
faire aussi bien dans le cadre des
projets liés à l'alliance BRICS, que
dans le cadre des accords bilatéraux
russo-chinois.
Autre point tout
aussi important: celui de la popularité
évidente de la Russie actuelle auprès
d'une large partie de la population
africaine. En effet et cela pourrait
paraitre paradoxal: alors que la Russie
avait perdu nombre de ses positions en
Afrique à la chute de l'URSS, et que la
jeunesse africaine actuelle n'a pas
connu la période de la guerre froide, la
politique extérieure russe contemporaine
séduit justement un bien large nombre de
représentants de cette jeunesse
d'Afrique. Sans oublier évidemment la
génération plus âgée — celle justement
qui garde en mémoire l'apport décisif de
la Russie soviétique dans la libération
du continent du colonialisme, mais aussi
dans le soutien qui fut accordé pour
permettre à de nombreux Etats
nouvellement libérés d'aller de l'avant.
Et à ce niveau aussi, Moscou n'a pas de
quoi rougir. Il suffit d'observer un
pays comme l'Angola, qui malgré de
nombreuses attaques visant sa
souveraineté, notamment des régimes US
et sud-africain version apartheid, ait
non seulement pu résister grâce au
soutien décisif de Moscou et de La
Havane, mais ait pu devenir un pays
prospère, dont les citoyens n'immigrent
pas ou peu, à l'énorme différence des
pays faisant partie du cercle vicieux
nommé « Françafrique », pourtant
disposant eux aussi de fort importantes
ressources naturelles.
Et enfin, comme
résultat des deux points précédents, les
élites atlantistes comprennent
parfaitement aussi que les succès des
collaborations russo-africaines, comme
c'est d'ailleurs actuellement le cas par
exemple entre Moscou et Bangui,
deviendront au final comme une vague, si
ce n'est pas un tsunami, pour toute
présence ultérieure occidentale sur ce
continent. Et bien que les élites
politico-médiatiques de l'Occident, et
notamment françaises, s'obstinent à
refuser de reconnaitre qu'ils doivent
beaucoup à l'Afrique, le temps de rendre
des comptes s'approche à un rythme
élevé. Ajoutez à cela une autre réalité
que l'establishment occidental aura
beaucoup, mais vraiment beaucoup de mal
à accepter: celui de perdre le contrôle
sur les ressources naturelles
africaines, à un moment de l'histoire où
les notions de patriotisme et de
souveraineté ont clairement le vent en
poupe. En Afrique, le panafricanisme,
comme lors de la guerre froide, s'impose
de nouveau. Et malgré la vive opposition
occidentale, la réalité sera ce qu'elle
sera. Le monde, dont l'Afrique est
membre à part entière, ne peut être que
multipolaire.
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Tous droits réservés.
Publié le 15 septembre 2018 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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