Afrique Asie
Reposez en paix, Monsieur le Ministre,
et veillez sur la Syrie….
Michel Raimbaud

Walid Al Moallem, un diplomate et un
homme politique hors pair. La force
tranquille et la sérénité
qui émanaient
en toute circonstance de sa personne et
de son comportement donnait l’impression
qu’il ne serait jamais pris au dépourvu
face à toute l’adversité du monde, et
Dieu sait à quel point
la Syrie avait
besoin d’un homme intelligent, expert et
loyal comme Walid Al
Moallem.
Lundi 16 novembre 2020
Publié sur
Afrique Asie Le Dr Walid al
Moallem n’est plus. C’est une immense
perte pour la Syrie, confrontée depuis
dix ans à une agression dont on ne voit
pas la fin.
Rarement on aura vu
un ministre des affaires étrangères
mériter à tel point son nom. D’un calme
olympien, toujours maître de lui-même,
ayant le sens de la répartie brève mais
incisive, il était par excellence le
professeur, le maître, celui qui
enseigne. Courtois et ferme, c’était
également un diplomate né, et bien né.
La force tranquille
et la sérénité qui émanaient en toute
circonstance de sa personne et de son
comportement donnait l’impression qu’il
ne serait jamais pris au dépourvu face à
toute l’adversité du monde, et Dieu sait
à quel point la Syrie avait besoin d’un
homme intelligent, expert et loyal comme
Walid Al Moallem.
Il a certes eu la
chance, au milieu de tout le malheur
ambiant, d’avoir à défendre, non pas une
cause pourrie comme tant et tant de ses
homologues ou collègues, mais une cause
juste entre toutes : défendre son pays
victime d’une agression criminelle
organisée par une bonne moitié de la «
communauté internationale », et
confronté à la sauvagerie, au cynisme
des pays occidentaux, de leurs clients
et affinitaires, sans oublier certains «
pays frères ». Du jamais vu.



Walid Al Moallem
avec les ministres des Affaires
étrangères russe, chinois et iranien.
Il y aurait
beaucoup à dire et à retenir de la
longue carrière de cet homme fidèle, ce
qui n’est pas si courant par les temps
qui courent. Parmi les fioretti qu’il a
laissés en héritage, on pourra se
rappeler, à titre d’exemple, un épisode
légendaire. Nous sommes en Suisse à
Montreux, en janvier 2014, lors d’une
conférence sur le conflit syrien, et le
Secrétaire d’État d’Obama, John Kerry,
vient de déclarer sur un ton péremptoire
que « Bashar Al Assad ne prendra pas
part au gouvernement de transition en
Syrie. C’est inimaginable ». On voit
encore le placide ministre Al Moallem
pointant du doigt son collègue
américain, le doigt levé comme un maître
d’école fustigeant un cancre : «
Monsieur Kerry, personne au monde n’a le
droit de conférer ou de retirer la
légitimité à un président, à une
constitution ou à une loi, sauf les
Syriens eux-mêmes. ». Et le dit Monsieur
Kerry de se frotter le nez pour masquer
son embarras….
Le courageux
ministre n’aura pas eu la joie de voir
de son vivant le retour de la paix.
Serait venu, paraît-il, le temps « des
guerres sans fin, silencieuses et/ou
invisibles » sur lesquelles les experts
occidentaux sont capables de disserter
jusqu’à plus soif, ne voyant pas péché
dans les crimes qu’ils cautionnent. Mais
là où il est, le regretté disparu, n’en
doutons pas, veille sur le pays qu’il a
si bien servi, comme il veille sur une
diplomatie résistante, loyale et
sereine, malgré les pressions, les
intimidations, voire les tentatives de
débauchage, une diplomatie de qualité et
de grande classe, formée à la meilleure
des écoles, celle de Walid al Moallem.
Qu’il repose en
paix et que la Syrie trouve enfin le
repos dans la paix.
Michel Raimbaud
Écrivain, ancien ambassadeur de
France
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