Décodage
anthropologique de l'histoire
contemporaine
L'histoire entre grandeur et
petitesse
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Vendredi 16 décembre 2016
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1 -
Entrons dans l'arène
2 - Les conséquences
de l'ex-parenthèse
Alain Juppé
3 - La décomposition
de l'Europe
4 - Le despotisme
cajoleur
5 - L'homme à la
recherche d'un
protecteur
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1 -
Entrons dans l'arène
Il
aura fallu quelques heures seulement à
Moscou et à Pékin pour apporter la seule
réponse logique à la violente incartade
verbale du Président Donald Trump, qui
s'est ouvertement attaqué à l'unité
nationale et territoriale de la Chine.
Je
rappelle que la pathologie dont souffre
Mme Hillary Clinton et qui ressortit à
la maladie de Parkinson, l'avait
conduite, elle aussi, à la croyance
qu'il suffirait de montrer les dents à
Moscou et à Pékin pour conduire ces
Etats chancelants sur les chemins des
repentances et des pénitences de bon
aloi.
Au
premier abord, je me suis donc demandé
si l'incartade de M. Trump était une
extension à la géopolitique de
l'hypothèse de Gabriel Tarde
(1843-1904), auteur des Lois de
l'imitation. Je reviendrai sur cette
question au mois de janvier quand les
brumes actuelles se seront dissipées.
Revenons, pour l'instant, à une
géopolitique de la grandeur et de la
petitesse de l'histoire mieux enracinées
dans la pesée des forces en présence et
qui a aussitôt conduit Moscou et Pékin à
consolider leur alliance sur la scène
internationale. D'un côté, nous voyons
une jeune nation qui a débarqué sur la
planisphère depuis moins de trois
siècles, de l'autre, nous voyons un
peuple d'un milliard trois cent millions
d'âmes enracinées sur leur terre depuis
cinq millénaires et auxquels nous devons
les deux guides qui ont conduit le genre
humain à la lucidité spirituelle et
politique, le Bouddha et Confucius.
De
siècle en siècle, l'Eveillé rappelle à
une humanité demeurée embryonnaire, que
l'homme n'a pas d'autre interlocuteur
que lui-même dans le vide et le silence
de l'immensité, tandis que Confucius
nous répète de siècle en siècle qu'une
politique privée d'une morale conduit au
naufrage du genre humain. Je constate
que ces deux pédagogues ont posé les
fondements d'une conscience demeurée
d'avant-garde encore de nos jours.
Depuis
mon analyse d'il y a quinze jours sur ce
site, l'élimination du champ de
l'histoire en marche des Etats fictifs,
qui ne sont jamais que les porte-parole
de leur maître, s'est accélérée. De
plus, le réapprentissage du réel au sein
des nations écartées de l'arène, a
également pris une allure plus rapide.
Une Chine longtemps absente du théâtre
de la géopolitique a découvert qu'il lui
faut retrouver la rapidité des réflexes
de boxeur sur le ring. Ce changement de
cadence du temps donne un sens nouveau
au titre de l'ouvrage déjà ancien
d'Alain Peyrefitte: "Quand la
Chine s'éveillera…" Une nation
ne sort du sommeil qu'à l'épreuve des
coups qui lui sont portés.
Nous
entrons dans une ère nouvelle de la
géopolitique, celle du passage de
l'éclairage aux bougies à la découverte
de l'électricité. Nous verrons bien si
le recul intellectuel auquel
l'anthropologie critique s'exerce depuis
quinze ans se montrera à la hauteur de
ce changement de voltage de la planète.
Dans
ce contexte, je commencerai par rappeler
le rôle asservissant, mais prétendument
gaulliste, qu'a joué en son temps Alain
Juppé.
2 - Les
conséquences de l'ex-parenthèse Alain
Juppé
Dans
les décombres d'une civilisation,
comment une poignée d'historiens
incorruptibles tenteront-ils de
comprendre les hommes politiques qui se
seront fait de leur petitesse les
béquilles d'une carrière?
Observons, la loupe à l'œil, la
trajectoire étriquée d'un ex-candidat à
la présidence de la République, qui a
bénéficié pendant plus de trente ans
d'un calibrage exagéré au regard des
véritables intérêts de la France, M.
Alain Juppé.
Voilà
un falsificateur de l'histoire qui n'a
pas craint de proclamer "gaulliste" la
prosternation d'un Général de Gaulle
imaginaire et construit de toutes
pièces, devant le sceptre et le joug du
Pentagone. Dès les années 1990, Alain
Juppé, Ministre des affaires étrangères
et Young Leader au service de la
politique américaine, participe à
l'anéantissement de la Serbie et au
projet d'Albanisation de la région qui
se concrétisera par la création de
l'Etat maffieux du Kosovo, qui sera
couronné par la construction de la plus
grande base militaire américaine en
Europe, Camp Bondsteel.
Souvenons-nous d'un Alain Juppé qui
déplorait que l'Europe ne parvenait pas
résoudre un conflit local entre
communautés dans la région, à la suite
de la mort du Maréchal Tito et qui
implorait quasiment les Etats-Unis de
venir bombarder une Serbie diabolisée.
En 2014, lors d'une émission télévisée,
il déclarait en toute modestie: "Je
ne vais pas paraître très modeste, mais
tout le monde s'accorde à reconnaître
que je n'ai pas été un mauvais ministre
des Affaires Étrangères entre 93 et 95?".
Il a,
en effet, été un excellent ministre des
affaires étrangères au service des
intérêts d'un Pentagone souverain.
Alain
Juppé fait aujourd'hui son mea culpa
face au chaos qui règne actuellement en
Lybie; mais en 2011, en compagnie du
va-t-en guerre tous azimuts, Bernard
Henri Lévy, de Nicolas Sarkozy et de
François Hollande, il s'est révélé l'un
des plus farouches défenseurs de
l'intervention militaire dans ce pays.
Ne clamait-il pas, à la tribune de
l'ONU: "Il n'y a pas d'avenir pour
Kadhafi en Libye". Les compagnies
pétrolières américaines qui s'y
installent en dépit de la guerre civile
qui ravage les restes de ce pays, l'en
remercient.
En
Syrie, ce fervent adepte de la
géopolitique de son collègue Bernard
Kouchner, celle de l'obligation des
politiciens occidentaux au grand cœur de
"protéger les populations",
théorie également appelée "intervention
humanitaire", Alain Juppé a
entonné l'antienne, reprise à pleine
gorge par un autre grand humaniste,
Laurent Fabius, "Assad must go",
Assad doit partir. Ce pelé, ce
galeux tue son peuple et soutient les
terroristes tout en feignant de lutter
contre eux. Les Etats-Unis, suivis de la
cohorte des vassaux européens,
accompagnés des célèbres
droits-de-l'hommistes de l'Arabie
Saoudite, du Qatar et de la Turquie, se
sont attelés à la tâche de détruire une
Syrie laïque et d'en chasser ou de tuer
son président, une Syrie dans laquelle
toutes les communautés religieuses
cohabitaient et héroïquement défendue
par une armée de conscrits
majoritairement sunnites. Et aujourd'hui
Alain juppé avoue tranquillement que "la
diplomatie française est la dernière, ou
presque, à s'en tenir à la ligne du
refus de toute discussion avec Bachar
qui était celle de N. Sarkozy et la
mienne."
Quelques jours avant les élections à la
primaire de la droite notre Young
Leader américanisé est allé se "ressourcer"
à Colombey les deux Eglises! Pendant les
sept minutes qu'a duré le récital de ses
démissions à la télévision, M. Juppé
s'est exclamé: "Et puis, ils nous
ont délivrés". Cette
auto-domestication sur la potence d'une
gratitude éternelle, cela ne vous
rappelle-t-il rien?
Voilà
un tricheur qui n'a pas craint de
peindre en pied un Général de Gaulle de
pacotille qui aurait joué à colin
maillard, à qui perd gagne, ou au yoyo
avec la dignité de la France, voilà un
pseudo Général de Gaulle qui se serait
prosterné le front dans la poussière à
la suite d'une amende de neuf milliards
infligés à sa nation pour avoir tenté
d'écrire la véritable histoire de la
seconde guerre mondiale, voilà un
falsificateur du passé de son pays qui
se serait félicité que les navires de
guerre fabriqués à Saint Nazaire et
destinés à la Russie aient été bradés,
voilà un minuscule louangeur d'un homme
du 18 juin en carton pâte, dont la
logique interne qui lui dicte sa propre
petitesse aurait vendu à l'Egypte
l'honneur et la dignité de la France, en
échange d'une commande dérisoire
d'hélicoptères par la Pologne, annulée
depuis.
Il
était important de résumer la place qu'a
occupée dans l'histoire de la France un
logicien de sa propre petitesse dont la
trajectoire nous remettra sans cesse en
mémoire que l'histoire des nations
s'inscrit sur le cadran de la grandeur
et de la petitesse.
Par
bonheur, le bon sens du peuple français
a triomphé de ce saltimbanque et de ce
funambule de sa patrie: le verdict
populaire l'a terrassé par un score
implacable de soixante-dix à quatorze -
je dis quatorze parce qu'une fraction de
seize pour cent de la gauche
américanisée et corrompue à l'école de
Washington et de Tel Aviv, lui a offert
in extremis un appoint artificiel
et seulement passager.
3 - La
décomposition de l'Europe
Mais
de quel souffle, de quelle pesée de la
petitesse et de la grandeur d'esprit
nous servirons-nous pour comprendre la
future diplomatie du Nouveau Monde avec
la Russie et avec la Chine. Comment le
nouveau Président des Etats-Unis
négociera-t-il avec le Kremlin et avec
une Europe vassalisée sous le sceptre
américain de l'OTAN?
Il
sera impossible à la Russie de légitimer
la présence perpétuelle, donc de
génération en génération, de cinq cents
bases militaires américaines de Ramstein
à Sigonella et de Bruxelles aux
frontières de la Pologne, il sera
impossible à la Maison Blanche de demain
de valider l'abandon perpétuel de la
souveraineté de l'Europe sur son propre
territoire, il sera impossible de
proclamer démocratique et conforme au
droit international, l'abandon par les
classes dirigeantes du statut d'Etats
souverains de leurs nations.
Sur
quelle balance de la grandeur et de la
petitesse de l'histoire la Maison
Blanche de demain pèserait-elle la
grandeur et la petitesse d'une Europe
vassalisée si le Président Trump n'avait
pas en mains les cartes qui lui
permettront de convaincre le peuple
américain qu'il ne le conduira pas au
naufrage géopolitique d'un empire
militaire armé jusqu'aux dents en
adoptant une attitude respectueuse à
l'égard de l'identité des autres Etats.
Comment une Europe endormie dans le
sommeil hypnotique de sa réduction à la
minusculité ne ferait-elle pas passer
devant une haute cour de justice sa
classe dirigeante vassalisée qui aura
tenté de valider pour les siècles à
venir une auto domestication inscrite
dans sa constitution même.
Comment une classe dirigeante de
l'Europe, coupable d'une telle trahison,
jouirait-elle de l'impunité à la barre
du tribunal de l'histoire ? Si elle
n'avait pas de comptes à rendre, sa
fausse innocence serait une tache
indélébile dans l'histoire d'un Vieux
Monde en décomposition?
4 - Le despotisme
cajoleur
La
tâche immense de construire la balance
de la grandeur et de la petitesse de
l'histoire ne serait plus à la portée de
M. Donald Trump si l'empire américain se
trouvait cloué au pilori et mis sur la
défensive par le monde entier qui se
serait précipité aux obsèques de Fidel
Castro. Mais comment expliquer aux
Américains qu'ils doivent métamorphoser
de fond en comble leur comportement
exaspérant à l'égard de tous les autres
peuples de la terre?
Sans
doute n'existe-t-il pas encore de
service du protocole à la Maison
Blanche, puisque personne n'avait
informé Mme Obama de ce que la reine
d'Angleterre n'est pas une vieille dame
sur le dos de laquelle il serait permis
de poser une main subrepticement
protectrice et frauduleusement présentée
comme un adoubement cajoleur. Raul
Castro, lui aussi, avait dû écarter
violemment de ses épaules une main
familière et arrogante de M. Obama qui
se voulait flatteuse, mais qui se
montrait subrepticement despotique.
Sur
quelle balance de la grandeur et de la
petitesse de l'histoire, le Président
Trump enseignera-t-il au peuple
américain à traiter ses interlocuteurs
en égaux si, partout dans le monde,
l'Amérique est un main dominatrice et
faussement amicale qui se pose
doucereusement sur votre cou, avant de
le serrer violemment et qui vous
rappelle que la bienveillance apparente
est la forme raffinée de la tyrannie.
5 - L'homme à la
recherche d'un protecteur
Mais
ce n'est pas tout: sur quelle balance la
grandeur et de la petitesse de
l'histoire, M. Vladimir Poutine
pèse-t-il, lui, ses relations avec la
planète d'aujourd'hui et de demain? Cet
homme d'Etat a compris que notre
astéroïde manque d'un souverain
transcendantal dont la sagesse et la
grandeur échapperaient quasiment à la
petitesse de la condition humaine.
Quand
trois chasseurs bombardiers helvétiques
accompagnent un avion civil russe, il
sourit et son amusement démontre qu'il
ne tombe pas dans le piège du temporel :
il n'élèvera pas cette galéjade
militaire au rang d'un incident
diplomatique, il ne rabrouera pas une
nation microscopique dont la pseudo
neutralité croit défier la Russie - non,
dit-il, une plaisanterie militaire des
Helvètes ne vaut pas un esclandre
diplomatique, mais seulement un peu
d'ironie.
Décidément la balance à peser la
grandeur et la petitesse du genre humain
est la clé de l'histoire du monde de
demain. Car la corruption née de la
minusculité règne au cœur de la science
historique pseudo rationnelle et pseudo
scientifique d'hier, d'aujourd'hui et de
demain. Mais il y aura nécessairement
une poignée d'incorruptibles de Clio,
qui feront la loi sur le long terme et
qui seuls serviront de référence à
l'histoire véritable et en profondeur du
genre humain.
Or,
cette histoire véritable est celle de la
panique d'entrailles d'une humanité
encore plongée dans l'enfance et qui
dépose son identité effarée sur les
épaules de ses dieux dans le vide et le
silence de l'immensité. Voyez combien
trois dieux uniques assument la
véritable condition de la créature qui,
à l'égal de ses dieux, n'a pas de
spectateur lointain, désinvolte et
condescendant, qui poserait une main
protectrice sur son encolure. Les dieux
sont seuls dans le néant dont ils
assument la charge, ils sont les
effigies de l'humanité véritable.
Mais
qu'une humanité encore dans l'enfance
colloque des géants invisibles dans
l'espace se comprend, mais que des
savants spécialisés dans diverses
sciences exactes délèguent des
personnages solitaires, invisibles et
fantastiques dans un cosmos désert,
voilà qui démontre la petitesse d'une
humanité qui charge des personnages
imaginaires d'assumer sa propre panique
d'entrailles et d'exorciser sa solitude.
Décidément, l'avenir de la conscience de
soi de la créature se révèle la vraie
balance de la grandeur et de la
petitesse de l'histoire. .
Le 16
décembre 2016
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