Accueil Actualité IRIB Dossiers Auteurs Communiqués Agenda Invitation à lire Liens Ressources
Dernières mises à jour Les rapports du CPI Le Hamas Les vidéos BDS Ziad Medoukh Centre de la Paix Gaza Université al-Aqsa Gaza Qui? Pourquoi?

Google
sur le web sur Palestine Solidarité


 
Centre Palestinien
d'Information



 
Invitation à lire





Réseau Voltaire



BDS



Solidarité





Produits palestiniens





En direct d'Iran





Voix de la Russie



Agence syrienne



Palestine Solidarité
sur Facebook



 




Qu'est-ce que philosopher ?

Le combat de la raison
II - Le sacré semi-animal

Manuel de Diéguez


Manuel de Diéguez

Vendredi 16 janvier 2015

1 - L'éphémère couronnement du sens commun
2 - L'agonie de nos évidences
3 - La logique de l'aréopagite
4 - Le ahanement d'un " déconstructeur "
5 - Abélard

1 - L'éphémère couronnement du sens commun

La pesée des composantes semi zoologiques du divin - donc celle de l'animalité spécifique et de plus en plus cérébralisée du sacré au sein de notre espèce - bouleversera nos définitions anciennes et magiques de la pensée simiohumaine, parce que la réfutation de la signification que nos philosophes donnaient à l'histoire de leur embryon de raison changera les coordonnées anciennes de la notion même d'objectivité dont les sciences humaines faisaient usage depuis la découverte platonicienne du concept, donc de l'abstraction.

Primo, nos successeurs mettront en évidence que les premiers pas d'une intelligence en gésine de notre transanimalité nous conduisaient déjà à démantibuler les bâtisses de nos savoirs langagiers - simplement, nos démolitions provisoires, partielles et au rabais de notre vocabulaire nous armaient d'instruments aussi instables et branlants que les précédents - les nouveaux vices de fabrication nous conduisaient seulement à édifier des temples fragiles à la gloire de nos illusions les plus massives, celles dans lesquelles nous ne manquions pas de choir de siècle en siècle.

Secundo, nous découvrirons que Platon déconstruisait un savoir collectif et éphémère dont l'assise unanime s'appelait la doxa - l'opinion publique; mais il y employait un outil de la pensée inédit en son temps, qu'il appelait l'idée et que nous avons réduite au concept. Seule l'idée pure, pensait Platon, nous permettait de réfuter les songes universels attachés à notre intelligence encore superficielle et toute pratique - celle des civilisations en bas âge et qui ignorent nécessairement les sortilèges nouveaux qu'enfante le déchaînement des abstractions.

Puis le prudent Aristote a cru faire périr de conserve le Graal du langage concentré avec les tables calcinées et réduites en cendres. Nous étions naïfs, certes, de loger en toute hâte nos idées pures dans notre langage plus ramassé, puis dans les morceaux dispersés d'une matière muette et inanimée; mais ce premier divorce d'un monde disparate et hétéroclite d'avec nos mots pseudo unificateurs n'en était pas moins un grand pas en direction d'une radiographie de nos corps d'un côté et du contenu tout verbal de nos encéphales de l'autre.

Puis nous avons vu un certain Descartes jeter résolument au feu le fatras des billevesées et des balivernes théologiques de notre première philosophie du langage, que nous avions sacralisée à l'école de nos bavardages sacrés. Mais ce grand homme substituera candidement au verbiage saugrenu de nos gosiers d'enfants le règne solitaire - et qu'il croira irréfutable - d'une grammaire du cosmos aussi fallacieuse que nos grognements antérieurs et construite sur le triomphe de notre sens commun le plus sottement partagé. C'était légitimer à nouveaux frais le sentiment d'évidence que les bêtes consomment à nos côtés.

Comment la physique d'Aristote et la géométrie d'Euclide engendraient-elles les mêmes évidences immédiates dans nos têtes que dans celles de tous les "autres animaux", comme disait Salluste? Et pourtant, il s'agissait bel et bien d'une enjambée décisive hors de nos premiers pâturages. Certes, l'étude de la cervelle du simianthrope pseudo cogitant demeurait tâtonnante et titubante entre nos pattes. Mais le singulier avait débarqué dans notre champ de vision. Nous étions tous devenus des particuliers.

2 - L'agonie de nos évidences

La pesée de la course folle des premiers fuyards de la zoologie en direction de leurs terres promises - leurs oasis évidentielles - exige une métazoologie encore rudimentaire; puis cette discipline plongera ses antennes dans une anthropologie dotée d'un regard de l'extérieur sur notre sens commun le plus élémentaire. Mais une simianthropologie qui installerait ensuite son télescope hors de l'enceinte semi-animale de nos évidences sera nécessairement un cratère ouvert sur l'abîme.

Il est revenu à David Hume de descendre en premier de cordée dans le gouffre d'une psychobiologie du concept de causalité expliquante. Ce mot magique trônait depuis des millénaires au cœur de notre espèce de raison naturelle - celle que nous avions bâtie à l'école du pif que tous les animaux olfactifs se partagent, mais dont le génial Anglais a dessiné avec exactitude les contours. Le simianthrope, dit ce patrouilleur, jette, un filin ténu et invisible, qu'il appelle le lien de causalité, dans la gueule insondable qui s'ouvre entre deux évènements accolés l'un à l'autre dans la glu du temps. Il voit seulement des évènements se succéder régulièrement et à un rythme constant au sein du gouffre de la durée. Ces observations lui suffisent, croit-il, pour fonder l'intelligibilité du monde sur la prévisibilité, donc pour brancher le compréhensible sur l'exploitable. Sitôt que la bête et l'homme sont tombés ensemble dans le piège de cette confusion mentale, les deux espèces commencent de se débattre et de s'empêtrer chacune de son côté dans des embarras cérébraux qu'ils se partageront longtemps.

Dans ce duo, la bête humaine sera la plus emprisonnée: elle s'imaginera que le prophétisable serait parlant en soi - et cela, du seul fait, se dira-t-elle, que le continuel incarcère nécessairement le profitable dans son enceinte. Mais quelle est la psychophysiologie commune à tous les animaux et qui les condamne tous à s'imaginer que la nature les aurait préconstruits de telle sorte qu'ils mêleront d'instinct la ponctualité de l'univers à une parole censée habiter les atomes et qui doterait la matière d'une intention bienveillante à l'égard de leurs viscères. Les hommes et les animaux s'imaginent coude à coude que la machinerie du cosmos serait tellement charitable qu'elle leur fournirait sans relâche leur picotin cérébral!

3 - La logique de l'aréopagite

Cette fois-ci, l'observatoire de la psychophysiologie qui commande en amont les neurones collectifs des primates loquaces permet aux astronomes de la zoologie d'apercevoir du dehors l'encéphale de tous les mammifères rendus pseudo réflexifs à l'école de leurs taupinières parlantes; et le regard que leurs télescopes ont commencé de porter sur leur carcasse débarque sans tarder dans la première définition unanime qu'ils se risquent à donner de leur espèce de philosophie, celle dont les animaux se réclament sitôt qu'ils ont toisé leurs "frères inférieurs" - comme ils disent maintenant - pour se jeter les uns aux autres des regards surpris et condescendants. Car voici que le simianthrope sommital commence de disséquer l'intelligence issue du répétitif qui abreuvait l'encéphale des primitifs.

Kant examinera de plus près les rouages et les ressorts infatigables de la logique mécanique d'Aristote qui pilotait l'encéphale des habitants de Königsberg et qui fonctionne encore de nos jours dans le monde entier. De plus, ce fils de cordonnier a mis de l'ordre dans nos premières échoppes cérébrales : il a étiqueté les catégories a priori, donc les axes mentaux que nous qualifions de consubstantiels à notre sens commun. Nous nous trouvons donc emprisonnés de naissance dans nos jugements appréciatifs des rencontres pseudo rationnelles de la matière avec ses propres ritournelles. Mais nous commençons de peser la geôle de la psychobiologie dans laquelle nous nous trouvons incarcérés par nos neurones. Quelle est, nous demandons-nous maintenant, la nature de notre incarcération dans la cage cérébralisée par nos lumières naturelles, qu'en est-il du cosmos qui nous soumet à la meule de ses redites?

Montaigne avait observé le premier que nous partageons nos raisonnements et nos fourrages avec ceux du renard. Voyez comme ce flatteur du corbeau de Jean de la Fontaine tâte la glace d'une patte répétitive et prudente. Ce disciple d'Aristote s'avance sur un étang gelé qu'après avoir vérifié sa solidité. Mais l'intelligibilité du monde se laisse-t-elle garantir par nos pattes de flatteurs des us et coutumes de la nature? Comment jugerons-nous l'abruti qui nous a encadenassés de cette façon?

4 - Le ahanement d'un " déconstructeur "

Un exemple instructif de la métazoologie manquée dans laquelle s'égarent nos épistémologues de la matière inanimée nous a été fourni tout récemment par la pseudo "déconstruction" de Jacques Derrida, dont l'échec se rendra précieux à l'anthropologie critique de demain, parce que les apories dans lesquelles ce philosophe du durcissement cérébral des animaux est tombé nous éclairent sur les causes abyssales, donc anthropologiques, du naufrage des renards de la philosophie, tellement toute la candeur d'une humanité privée d'une généalogie de ses échiquiers mentaux se dévoile au seul spectacle d'une erreur de perspective globale des animaux d'Aristote. Car ces bêtes sont devenues des séductrices adroites des masques derrière lesquels elles se cachent; et elles affublent le cosmos des auréoles du répétitif qu'elles ont forgé dans leurs ateliers.

Derrida a négligé de se demander ce qui attend, au juste, les déconstructeurs manqués de leur langage. Quel est l'inconscient semi animal qui pilote les couturiers des redites du cosmos ? Qu'en est-il des conglomérats épistémologiques qui pilotent les animaux et quels pièges de la zoologie faut-il apprendre à éviter pour cesser de tourner en rond dans la cage de la logique d'Aristote? Car dès lors qu'il ne recourt nullement à une connaissance métazoologique de la zoologie, le regard animal ne porte jamais sur l'évolution des cerveaux successifs que nous nous sommes construits. Du coup, nous ne disposons en rien d'un instrument d'observation fiable de la cervelle piégée des insectes simiohumains. Il nous faut donc observer, la loupe à l'œil, comment la bestiole est trompée par la réussite même de ses expériences.

Une espèce en évolution, donc inachevée par définition, se trouvera nécessairement hiérarchisée non seulement par l'inégalité des capacités cérébrales dont disposeront ses divers spécimens, mais par une différence de nature entre ses conques osseuses aux multiples dimensions. L'assise même d'une connaissance de plus en plus métazoologique de l'histoire de notre encéphale en devenir exige donc que nous portions un regard prospectif sur l'évolution heureuse ou manquée de notre embryon d'encéphale d'avant-garde. S'il s'agissait seulement de faire ouvrir un large bec à la nature et de faire tomber son fromage dans la gueule du renard, Maître Goupil serait déjà devenu un connaisseur estimable des mâchoires grandes ouvertes du cosmos.

Derrida manquait non seulement d'une connaissance généalogique des rouages et des ressorts d'une philosophie enracinée dans la zoologie, mais également d'une connaissance raisonnée de la logique anthropologique qui a commandé la généalogie de cette discipline et qui la régit depuis Platon. Seul un regard qui porterait sur la nature même de l'espèce de déraison semi-animale que sécrète la bête à la patte raisonneuse a permis de découvrir que le concept utilitaire de causalité n'est qu'un flatus vocus du renard et nullement l'instrument d'une connaissance métazoologique de la généalogie du concept de causalité - donc encore moins de la détection de l'intelligibilité en soi de l'objet que le fil d'Ariane du causalisme est censé dérouler.

5 - Abélard

Puisque c'était à Hume qu'il aurait fallu remonter pour apprendre que le vocabulaire simiohumain est pseudo heuristique par nature, le XIe siècle se rappelle à l'attention des pontonniers de l'histoire de la philosophie. Car Abélard avait commencé d'effeuiller l'idée pure de Platon: plus le savoir animal s'étend, plus il s'appauvrit, plus il embrasse, moins il étreint, plus Socrate se dilue dans le concept d'homme, plus un fantôme le remplace - et ce fantôme verbal appellera l'humanité à s'agenouiller devant une idole vocalisée, la Liberté. La postérité d'Abélard - le malheureux était en avance d'un millénaire sur son temps - nous instruit en outre de la signification anthropologique de l'histoire planétaire de l'encéphale de la bête que la nature a placée sur l'échiquier d'une métazoologie.

Derrida se vaporisera à l'école de son langage, car il s'appuie sur les béquilles du concept abstrait de trace et de l'adjectif insaisissable de spectral, qui sont seulement des esquisses d'un "sujet de conscience" absentifié par son propre discours. De quelle pensée s'agit-il et sur quel territoire les instances lexicales d'une raison congédiée creusent-elles leur sillon? L'Essai sur l'entendement humain du grand Anglais exercera une autorité de plus en plus focale dans l'histoire psychogénétique du vocabulaire de la philosophie de Platon à nos jours, parce que, le premier, Abélard a démythifié la parole, mais pour retrouver l'individualisme.

Une exploration métazoologique de la signification qu'il faudra donner au terme d'évolutionnisme cérébral - puis à tout le continent de l'inconscient proprement intellectuel de l'humanité - s'inscriront tellement dans la fécondation de la postérité de Hume et de Kant que la prétendue déconstruction derridienne n'illustrera jamais qu'une erreur de parcours - mais significative - d'un individualisme demeuré dans les vapeurs d'une philologie déracinée et décérébrée. Et pourtant, cet itinéraire sans pilote ni géographie, mais localisable dans l'errance d'une logique interne privée d'échiquier anthropologique, nous aidera à dévoiler et à circonscrire la nature de la pensée philosophique de demain et de son destin de spéléologie du "connais-toi" transanimal.

Le 16 janvier 2015

 

 

   

Le sommaire de Manuel de Diéguez
Les dernières mises à jour



Source : Manuel de Diéguez
http://www.dieguez-philosophe.com/

Abonnement newsletter: Quotidienne - Hebdomadaire
Les avis reproduits dans les textes contenus sur le site n'engagent que leurs auteurs. 
Si un passage hors la loi à échappé à la vigilance du webmaster merci de le lui signaler.
webmaster@palestine-solidarite.org

Parrainage :

Rentabilisez efficacement votre site

 


Ziad Medoukh

Analyses et poèmes
 
Silvia Cattori

Analyses

René Naba

Analyses

Manuel de Diéguez

Analyses

Fadwa Nassar

Analyses et traductions

Alexandre Latsa

Un autre regard sur la Russie

Chems Eddine Chitour

Analyses

Mikhaïl
Gamandiy-Egorov

Afrique-Russie
 
Luc Michel

Analyses

Robert Bibeau

Analyses
 
Salim Lamrani

Analyses
 
Allain Jules

Infos au Kärcher
 
Mohsen Abdelmoumen

Analyses