L'art de la guerre
Missiles étasuniens en Europe, le
retour
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Mardi 27 février 2018
Le plan avait été pré-annoncé il y
a trois ans, pendant l’administration
Obama, quand des fonctionnaires du
Pentagone déclarèrent que “face à
l’agression russe, les Etats-Unis sont
en train de considérer le déploiement en
Europe de missiles avec base à terre”
(“Les missiles reviennent à Comiso”,
Il manifesto, 9 juin 2015). A
présent, avec l’administration Trump, ce
plan se trouve officiellement confirmé.
Dans l’année fiscale 2018 le Congrès des Etats-Unis a autorisé le
financement d’ ” un programme de
recherche et développement d’un missile
de croisière lancé depuis la terre par
plate-forme mobile sur route”. C’est un
missile à capacité nucléaire de portée
intermédiaire (entre 500 et 5500 km),
analogue aux 112 missiles nucléaires de
croisière (cruise) déployés par les USA
à Comiso (Province de Raguse, Sicile)
dans les années 80. Ils furent éliminés,
en même temps que les missiles
balistiques Pershing 2 déployés par les
USA en Allemagne et les SS-20
soviétiques basés en URSS, par le Traité
sur les forces nucléaires intermédiaires
(Inf), stipulé en 1987. Le Traité
interdit le déploiement de missiles avec
base à terre et portée comprise entre
500 et 5500 km.
Washington accuse maintenant Moscou de déployer des missiles de cette
catégorie et déclare que, “si la Russie
continue de violer le Traité Inf, les
Etats-Unis ne seront plus ligotés par ce
traité”, c’est-à-dire seront libres de
déployer en Europe des missiles
nucléaires à portée intermédiaire avec
base à terre.
Un fait déterminant se trouve cependant ignoré : les missiles russes (en
admet tant qu’ils soient à portée
intermédiaire) sont déployés en fonction
défensive en territoire russe, alors que
ceux des USA à portée intermédiaire
seraient déployés en fonction offensive
en Europe au bord du territoire russe.
C’est comme si la Russie déployait au
Mexique des missiles nucléaires pointés
sur les USA. Comme l’escalade USA/OTAN
continue, le déploiement de ces missiles
en Europe est de plus en plus probable.
Pendant ce temps l’Ukraine a testé
début février un missile à portée
intermédiaire avec base à terre, réalisé
certainement avec l’assistance des USA.
Les nouveaux missiles nucléaires
étasuniens -beaucoup plus précis et
rapides que les “cruise” des années 80-
seraient déployés en Italie et
probablement aussi dans des pays de
l’Est, venant s’ajouter aux bombes
nucléaires USA B61-12 qui arriveront en
Italie et dans d’autres pays à partir de
2020.
En Italie, les nouveaux missiles de croisière seraient selon toute
probabilité à nouveau positionnés en
Sicile, même si non nécessairement à
Comiso.
Il y a dans l’île deux installations USA de première importance
stratégique. La station Muos (Mobile
User Objective System) de Niscemi, une
des quatre existantes à l’échelle
mondiale (2 aux USA, 1 en Australie et 1
en Sicile) du système de communications
satellitaires qui relie à un unique
réseau de commandement toutes les forces
étasuniennes, nucléaires comprises, se
trouvant dans n’importe quelle partie du
monde. La Jtags, station de réception et
transmission satellitaire du “bouclier
anti-missile” étasunien, qui est sur le
point de devenir opérationnelle à
Sigonella. C’est une des cinq à
l’échelle mondiale (les autres se
trouvent aux Etats-Unis, en Arabie
Saoudite, Corée du Sud et Japon). La
station, qui est transportable, sert non
seulement à la défense anti-missile mais
aussi aux opérations d’attaque,
conduites depuis des bases avancées
comme celles qui sont en Italie.
“Les Etats-Unis -explique le Pentagone dans le rapport “Nuclear Posture
Review 2018”- engagent des armes
nucléaires, déployées dans des bases
avancées en Europe, pour la défense de
l’Otan. Ces forces nucléaires
constituent un lien politique et
militaire essentiel entre Europe et
Amérique du Nord”.
En nous liant à leur stratégie non seulement militairement mais
politiquement, les Etats-Unis
transforment de plus en plus notre pays
en base avancée de leurs armes
nucléaires pointées sur la Russie et,
ainsi, en cible avancée sur laquelle
sont pointées les armes nucléaires
russes.
Edition de mardi 27 février 2018
de il manifesto
https://ilmanifesto.it/torna-lincubo-dei-missili-a-comiso/
Traduit de l’italien par M-A P.
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