L'art de la guerre
E-mails explosifs de la Clinton
Manlio Dinucci
Mardi 20 septembre 2016
De temps en temps, pour faire un
peu de « propreté morale » à but
politico-médiatique, l’Occident sort
quelques squelettes du placard.
Une commission du parlement britannique a critiqué David Cameron
pour l’intervention militaire en Libye
quand il était premier ministre en 2011
: elle ne l’a cependant pas critiqué
pour la guerre d’agression qui a démoli
un état souverain, mais parce que cette
guerre a été lancée sans une
« intelligence » adéquate ni un plan
pour la « reconstruction ».
C’est la même chose qu’a fait Obama quand, en avril dernier, il a déclaré
avoir commis sur la Libye la « pire
erreur », non pas pour l’avoir démolie
avec les forces Otan sous commandement
étasunien, mais pour n’avoir pas
planifié « the day after ». Au même
moment Obama a réaffirmé son appui à
Hillary Clinton, aujourd’hui candidate à
la présidence : celle-là même qui, en
habit de secrétaire d’Etat, persuada
Obama d’autoriser une opération secrète
en Libye (y compris l’envoi de forces
spéciales et l’armement de groupes
terroristes) en préparation de l’attaque
aéronavale USA/Otan.
Les mails de la Clinton, ensuite mis en lumière, prouvent quel était le
véritable objectif de la guerre :
bloquer le plan de Kadhafi d’utiliser
les fonds souverains libyens pour créer
des organismes financiers autonomes de
l’Union Africaine et une monnaie
africaine alternative au dollar et au
franc Cfa.
Immédiatement après avoir démoli l’état libyen, les USA et l’Otan, avec
les monarchies du Golfe, ont commencé
l’opération secrète pour démolir l’état
syrien, en infiltrant à l’intérieur de
celui-ci des forces spéciales et des
groupes terroristes qui ont donné
naissance à l’Isis.
Un mail de Clinton, un des nombreux que le Département d’Etat a dû
déclassifier après les clameurs
suscitées par les révélations de
Wikileaks, démontre quel est un des
objectifs fondamentaux de l’opération
encore en cours. Dans l’e-mail,
déclassifié comme « case number
F-2014-20439, Doc No. C05794498», la
secrétaire d’Etat Hillary Clinton écrit
le 31 décembre 2012 : « C’est la
relation stratégique entre l’Iran et le
régime de Bashar Assad qui permet à
l’Iran de miner la sécurité d’Israël,
non pas à travers une attaque directe
mais à travers ses alliés au Liban,
comme le Hezbollah ». Elle souligne
alors que « la meilleure façon d’aider
Israël est d’aider la rébellion en Syrie
qui dure désormais depuis plus d’un
an », c’est-à-dire depuis 2011, en
soutenant que pour faire plier Bashar al
Assad, il faut « l’usage de la force »
afin de « mettre en péril sa vie et
celle de sa famille ». Clinton conclut
: « Le renversement d’Assad
constituerait non seulement un immense
bénéfice pour la sécurité d’Israël, mais
ferait aussi diminuer la crainte
israélienne compréhensible de perdre le
monopole nucléaire». L’alors secrétaire
d’Etat admet donc ce qui est
officiellement tu : le fait qu’Israël
est l’unique pays au Moyen-Orient qui
possède des armes nucléaires.
Le soutien de l’administration Obama à Israël, au-delà de quelques
dissensions plus formelles que
substantielles, est confirmé par
l’accord, signé le 14 septembre à
Washington, par lequel les Etats-Unis
s’engagent à fournir à Israël les
armements les plus modernes pour une
valeur de 38 milliards de dollars en dix
ans, par un financement annuel de 3,3
milliards de dollars plus un demi
million pour la « défense de missiles ».
En attendant, après que l’intervention russe a bloqué le plan de démolir
la Syrie de l’intérieur avec la guerre,
les USA obtiennent une « trêve »
(immédiatement violée par eux), lançant
en même temps une nouvelle offensive en
Libye, camouflée en opération
humanitaire à laquelle l’Italie
participe avec ses « paras-médecins ».
Tandis qu’Israël, dans l’ombre, renforce son monopole nucléaire si cher à
la Clinton.
Edition de mardi 20 septembre 2016
de il manifesto
http://ilmanifesto.info/le-esplosive-mail-di-hillary-clinton/
Traduit de l’italien
par Marie-Ange Patrizio
NdT :
Le texte original
de M. Dinucci a
été modifié
par la rédaction
de il
manifesto qui a
écrit "Hillary
Clinton » au lieu de « la
Clinton » dans le titre et
à la fin de la rubrique. Après
consultation de l’auteur, la version
française
conserve les termes originaux.
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