L'art de la guerre
L’establishment USA derrière le
Sommet de Helsinki
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Mardi 17 juillet 2018
“Nous avons à discuter sur tout,
du commerce au militaire, aux missiles,
au nucléaire, à la Chine” : ainsi a
commencé le président Trump au Sommet
d’Helsinki. “L’heure est venue de parler
de façon détaillée de nos rapports
bilatéraux et des points névralgiques
internationaux”, a souligné Poutine.
Mais ce ne sont pas
seulement les deux présidents
qui vont décider des rapports entre
États-Unis et Russie dans l’avenir.
Ce n’est pas un hasard si,
juste au moment où le président des
États-Unis était sur le point de
rencontrer celui de la Russie, le
procureur spécial Robert Mueller III
inculpait 12 Russes sous l’accusation
d’avoir manipulé aux USA les élections
présidentielles, en pénétrant dans les
réseaux informatiques du Parti démocrate
pour nuire à la candidate Hillary
Clinton. Les douze, accusés d’être des
agents du service secret Gru, se
trouvent officiellement définis comme
“les Conspirateurs” et incriminés pour
“conspiration aux dépens des
États-Unis”. Simultanément Daniel Coats,
directeur de l’Intelligence nationale et
principal conseiller du président en la
matière, accusait la Russie de vouloir
“miner nos valeurs de base et notre
démocratie”. Il lançait ensuite l’alarme
sur la “menace des cyberattaques arrivée
à un point critique” analogue à celui
qui précéda le 11 septembre, de la part
non seulement de la Russie, “l’agent
étranger le plus agressif”, mais aussi
de la Chine et de l’Iran.
En même temps, à Londres,
les “investigateurs” britanniques
communiquaient que le service secret
russe Gru, qui aux États-Unis a saboté
les élections présidentielles, est le
même qui en Angleterre a empoisonné un
ex agent russe, Sergueï Skripal, et sa
fille, qui ont inexplicablement survécu
à un gaz extrêmement létal.
L’objectif politique de ces “enquêtes” est clair : soutenir qu’à la tête
des “Conspirateurs” se trouve le
président russe Poutine, avec lequel le
président Trump s’est assis à la table
des négociations malgré la vaste
opposition bi-partisane aux USA. Après
l’inculpation des “Conspirateurs”, les
Démocrates avaient demandé à Trump
d’annuler la rencontre avec Poutine.
Même s’ils n’y sont pas arrivés, leur
pression sur les tractations reste
forte.
Ce que Poutine essaie
d’obtenir de Trump est à la fois simple
et complexe : relâcher la tension entre
les deux pays. Pour cela il a proposé à
Trump, qui a accepté, une enquête
conjointe sur la “conspiration”. On ne
sait pas comment se déroulera la
tractation sur les questions nodales :
statut de la Crimée, condition de la
Syrie, armes nucléaires et autres. Et on
ne sait pas ce que demandera Trump. Il
est cependant certain que toute
concession pourra être utilisée pour
l’accuser de connivence avec l’ennemi.
S’opposent à un relâchement de la
tension avec la Russie non seulement les
Démocrates (qui, avec un renversement
des rôles formels, jouent le rôle des
“faucons”), mais aussi de nombreux
Républicains parmi lesquels d’importants
représentants de l’administration Trump
elle-même. C’est l’establishment non
seulement étasunien, mais aussi
européen, dont les pouvoirs et profits
sont liés aux tensions et aux guerres.
Ce seront non pas les mots
mais les faits qui démontreront si le
climat de détente du Sommet d’Helsinki
deviendra réalité. Avant tout avec une
désescalade Otan en Europe, c’est-à-dire
avec le retrait des forces y compris
nucléaires USA/Otan déployées contre la
Russie et avec le blocage de l’expansion
de l’Otan à l’Est.
Même si sur ces questions
était atteint un accord entre Poutine et
Trump, ce dernier sera-t-il en capacité
de le mettre en acte ? Ou ceux qui
décideront en réalité seront-ils les
puissants cercles du complexe
militaro-industriel ?
Une chose est sûre : nous ne pouvons pas, en Italie et Europe,
rester de simples spectateurs des
tractations dont dépend notre avenir.
Edition de mardi 17 juillet 2018
de il manifesto
https://ilmanifesto.it/lestablishment-usa-dietro-il-summit-di-helsinki/
Traduit de l’italien par M-A P.
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