L'art de la guerre
Italie en armes de la Baltique à
l’Afrique
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Mardi 16 janvier 2018
Qu’arriverait-il si des avions de
chasse russes Sukhoi Su 35, basés dans
l’aéroport de Zurich à une dizaine de
minutes de vol de Milan, patrouillaient
à la frontière de l’Italie avec le motif
de protéger la Suisse de l’agression
italienne ? À Rome le parlement au grand
complet s’insurgerait, en demandant
immédiatement des contre-mesures
diplomatiques et militaires. Ce même
parlement, par contre, accepte
substantiellement et passe sous silence
la décision Otan de déployer 8 avions de
chasse italiens Eurofighter Typhoon dans
la base d’Amari en Estonie, à une
dizaine de minutes de vol de Saint
Petersbourg, pour patrouiller à la
frontière de la Russie avec le motif de
protéger les pays baltiques de
l’”agression russe”. Fake news avec
laquelle l’Otan sous commandement USA
justifie l’escalade militaire de plus en
plus dangereuse contre la Russie en
Europe.
Pour déployer
en Estonie les 8 chasseurs bombardiers,
avec un personnel de 250 hommes, on
dépense (avec de l’argent provenant des
caisses publiques italiennes) 12,5
millions d’euros de janvier à septembre,
auxquels s’ajoutent les dépenses
opérationnelles : une heure de vol d’un
Eurofighter coûte 40 mille euros,
l’équivalent d’un salaire brut annuel
d’un travailleur.
Ceci n’est
qu’une des 33 missions militaires
internationales dans lesquelles l’Italie
est engagée dans 22 pays. À celles
conduites depuis longtemps dans les
Balkans, au Liban et en Afghanistan,
s’ajoutent les nouvelles missions qui
-souligne la Délibération du
gouvernement- “se concentrent dans une
aire géographique, l’Afrique, jugée
d’intérêt stratégique prioritaire par
rapport aux exigences de sécurité et
défense nationales”.
En Libye, jetée dans
le chaos par la guerre Otan de 2011 avec
la participation de l’Italie, l’Italie
aujourd’hui “soutient les autorités dans
l’action de pacification et de
stabilisation du pays et dans le
renforcement du contrôle et de la
répression de l’immigration illégale”.
L’opération, avec la mobilisation de 400
hommes et 130 véhicules, comporte une
dépense annuelle de 50 millions d’euros,
comprenant une indemnité moyenne de
mission de 5 mille euros mensuels pour
(en plus de leur paye) chacun des
participants à la mission.
En Tunisie l’Italie
participe à la Mission Otan de soutien
aux “forces de sécurité”
gouvernementales, engagées à réprimer
les manifestations populaires contre
l’aggravation des conditions de vie.
Au Niger l’Italie
commence en 2018 la mission de soutien
aux “forces de sécurité”
gouvernementales, “dans le cadre d’un
effort conjoint européen et étasunien
pour la stabilisation de l’aire”,
comprenant aussi Mali, Burkina Faso,
Bénin, Mauritanie, Tchad, Nigeria et
République Centrafricaine (où l’Italie
participe à une mission Ue de
“soutien”). C’est une des aires les plus
riches en matières premières
stratégiques -pétrole, gaz naturel,
uranium, coltan, or, diamants,
manganèse, phosphates et autres-
exploitées par des multinationales
étasuniennes et européennes, dont
l’oligopole est cependant à présent mis
en danger par la présence économique
croissante de la Chine. D’où la
“stabilisation” militaire de l’aire, à
laquelle participe l’Italie en envoyant
au Niger 470 hommes et 130 véhicules
terrestres, pour une dépense annuelle de
50 millions d’euros.
À ces engagements
s’ajoute celui que l’Italie a pris le 10
janvier : le commandement de la
composante terrestre de l’Otan Response
Force, rapidement projetable dans
n’importe quelle partie du monde. En
2018 elle est sous les ordres du
Commandement multinational de Solbiate
Olona (Province de Varese), dont
l’Italie est “la nation guide”. Mais
-précise le Ministère de la défense- ce
commandement est “sous la dépendance du
Commandant Suprême des Forces Alliées en
Europe”, toujours nommé par le président
des Etats-Unis.
L’Italie est ainsi certes “nation
guide”, mais toujours subordonnée à la
chaîne de commandement du Pentagone.
Edition de mardi 16 janvier 2018
de il manifesto
https://ilmanifesto.it/italia-in-armi-dal-baltico-allafrica/
Traduit de l’italien par M-A P.
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