L'art de la guerre
Italie-Israël : la “diplomatie des
chasseurs”
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Mardi 12 décembre 2017
Les gouvernants européens -de la
représentante Affaires étrangères de l’Ue
Mogherini au premier ministre (italien)
Gentiloni, du président Macron à la
chancelière Merkel- ont formellement
pris leurs distances des USA et d’Israël
sur le statut de Jérusalem. Une fracture
est-elle en train de se créer entre les
alliés ?
Les faits montrent le contraire. Peu avant la décision de Trump sur
Jérusalem capitale d’Israël, quand déjà
elle était pré-annoncée, s’est déroulé
le Blue Flag 2017, le plus grand
exercice international de guerre
aérienne de l’histoire d’Israël, auquel
ont participé Etats-Unis, Italie, Grèce
et Pologne et, pour la première fois à
la troisième édition, France, Allemagne
et Inde.
Pendant deux semaines des pilotes des huit pays, dont six membres de
l’Otan, se sont exercés avec 70 avions
dans la base aérienne d’Ovda dans le
désert du Néguev, assistés par 1000
militaires du personnel technique et
logistique. L’Italie a participé avec
quatre chasseurs Tornado du 6°
Stormo de Ghedi, deux d’attaque et
deux de guerre électronique. Les
Etats-Unis, avec sept F-16 du 31st
Fighter Wing d’Aviano. Ces avions
étant préposés au transport des bombes
nucléaires étasuniennes B-61, les
pilotes italiens et étasuniens se sont
certainement aussi exercés, avec les
autres, à des missions d’attaque
nucléaire. Selon les informations
officielles, plus de 800 missions de vol
ont été effectuées, simulant “des
scénarios extrêmes de combat, avec vols
à très basse altitude et contre-mesures
électro-magnétiques pour neutraliser les
défenses anti-aériennes”. En d’autres
termes, les pilotes se sont exercés à
pénétrer en territoire ennemi pour
atteindre les objectifs avec des bombes
et missiles non-nucléaires ou
nucléaires.
Le Blue Flag 2017 a amélioré “la coopération et rapidité opérationnelle
des forces aériennes participantes” et,
en même temps, a “renforcé le statut
international d’Israël”. Le journal
israélien Haaretz dans un article sur la
“diplomatie des chasseurs” décrit comme
emblématique la vision d’un Eurofighter
allemand avec la croix de la Lutwaffe et
d’un F-15 israélien avec l’Etoile de
David décoller pour la première fois
côte à côte pour la même mission, ou de
chasseurs français qui reviennent en
Israël où ils furent secrètement
déployés en 1956 pour la campagne de
Suez contre l’Egypte de Nasser.
“Le Blue Flag -conclut Haaretz- est la démonstration que de plus en
plus de pays sont disponibles pour
s’engager ouvertement comme alliés
stratégiques d’Israël, et pour mettre de
côté des considérations politiques comme
la question palestinienne. Tandis que
s’estompe l’influence de la diplomatie
traditionnelle, le rôle des commandants
militaires est en train de se développer
dans les relations internationales”.
C’est ce que confirme la rencontre entre le général Frigerio, commandant
des Forces de combat italiennes, et le
général Norkin, commandant de la Force
aérienne israélienne. Elle entre dans le
cadre de la Loi n° 94 du 17 mai 2005,
qui institutionnalise la coopération de
plus en plus étroite des forces armées
et des industries militaires italiennes
avec leurs homologues israéliennes.
Israël est de fait intégré dans l’Otan, dans le quartier général de
laquelle il a une mission officielle
permanente, sur la base du “Programme de
coopération individuelle” ratifié en
décembre 2008 (peu de temps avant
l’opération israélienne “Plomb durci” à
Gaza). Ce programme établit notamment la
connexion des forces israéliennes, y
compris nucléaires, au système
électronique Otan. Immédiatement après
le Blue Flag 2017, les pilotes
israéliens (qui s’entraînent avec les
chasseurs italiens M-346), ont
recommencé à bombarder les Palestiniens
de Gaza, pendant que le premier ministre
Gentiloni déclarait que “l’avenir de
Jérusalem, ville sainte unique au monde,
doit être défini dans le cadre du
processus de paix”.
Edition de mardi 12 décembre 2017
de il manifesto
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