Algérie
Recadrer le débat public
Lahouari Addi
Dimanche 1er décembre 2019
Dans un écrit posté sur sa page facebook,
le professeur en médecine Hocine
Bouraoui s'en prend violemment à moi et
m'accuse d'être contre l'armée et se
demande si j'ai fait mon service
national.. Rien que çà. Cette accusation
est ridicule car il n'y a pas d'Algérien
qui est contre l'armée. Comme
institution appelée à défendre le pays
en cas d'agression étrangère, l'armée
est respectée par toute la population.
Par contre, une majorité d'Algériens est
contre la politisation du commandement
militaire qui exerce indûment la
souveraineté populaire en lieu et place
de l'électorat. C'est pour cette raison
que le 22 février a commencé la
protestation massive qui continue à ce
jour. Quant au service national, c'est
le creuset où se renforce la conscience
nationale en ce qu'il permet de faire
tomber les préjugés ethnocentristes des
uns et des autres. Au service national,
j'ai rencontré des mozabites, des
chaouis, des kabyles, des gens d'Adrar,
de Tindouf, etc.qui sont des trésors
d'amitié. J'ai été affecté pendant deux
mois à Ain Mguel avant de rejoindre
Tamanrasset sur ordre du BO. Pendant un
an et demi, je n'ai pris qu'une seule
permission pour aller à Oran. Je me
sentais bien (à l'époque je n'étais pas
marié) dans une ambiance de caserne où
il y avait l'esprit de solidarité et de
bravoure. Bien sûr, il y a avait des
profiteurs, des fainéants, des
opportunistes mais dans la proportion
qu'impose la nature humaine. J'ai
beaucoup appris durant le service
militaire et c'est l'une des meilleures
expériences de ma vie. Mais ce n'est pas
pour cette raison que j'écris ce post.
Je voudrais rappeler une chose
essentielle dans le débat public à
l'occasion du post du professeur
Bouraoui.
On critique un individu privé en
opposant des arguments et en lui
montrant qu'il a tort, mais on ne le
condamne pas en l'excluant de la
communauté nationale sans preuves
tangibles. On le critique mais on ne lui
demande pas de rendre des comptes comme
s'il était une personne détenant ou
ayant détenu une parcelle de l'autorité
publique. Je débats avec un citoyen
privé mais je critique un détenteur de
l'autorité publique. La critique du
détenteur de l'autorité publique est
légitime pour deux raisons D'abord,
cette autorité appartient au corps de
citoyens dont je fais partie, donc elle
m'appartient, et j'ai le droit de
contrôler son usage. Ensuite, le
détenteur de l'autorité prend des
décisions qui ont un impact sur ma vie
quotidienne et sur l'avenir de mes
enfants. La moindre des choses est que
le citoyen ait son mot à dire sur le
choix du détenteur de l'autorité de
l'Etat.
En me critiquant violemment, le
professeur Bouraoui me confond avec
quelqu'un qui exerce une parcelle de
l'autorité publique, et m'interdit
d'avoir un point de vue sur l'usage de
l'autorité publique. A l'individu privé,
on devrait opposer des arguments pour
lui montrer qu'il se trompe. Au
détenteur de l'autorité publique, on lui
demande des comptes. Au lieu de
s'attaquer à un de ses concitoyens, le
professeur Bouraoui devrait demander des
comptes à Tebboune et à Benflis sur la
gestion de l'Etat quand ils avaient des
responsabilités à un haut niveau du fat
qu'ils se portent candidats pour exercer
la magistrature suprême.
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