Russie politics -
Billet du jou
Cachez-moi ces billets coronavirussés
que je ne saurais voir !
Karine Bechet-Golovko
Mardi 24 mars 2020
La disparition de
l'argent liquide, dans nos sociétés
dites développées, est programmée. La
question restant de savoir par qui ... On
vous l'a affirmé. On vous le
répète. D'ailleurs, il aurait déjà
disparu, comme il le lui a été intimé au
nom du culte numérique, s'il n'était pas
si mal élevé et ne cessait de s'inviter
à une table qui n'est pas dressée pour
lui. Sans oublier qu'en période
d'incertitude, les gens reviennent
presque instinctivement vers les
fondamentaux. Et l'argent liquide, c'est
physique, ça se touche. Sans pour autant
aller jusqu'à une obsession à la Picsou,
le liquide rassure beaucoup plus que les
transactions virtuelles. Autant utiliser
notre très cher coronavirus pour
implanter les dogmes globalistes, il est
prêt, là, il attend, il a le temps. Un
virus contre le monde réel, humain,
physique, c'est une occasion à ne pas
rater. Surtout que le culte du virtuel
bugue et que l'on voit se renforcer
l'opposition de nos deux mondes : le
monde du réel, de la vie, des hommes et
celui post-humain, post-moderne et
globaliste. En Russie aussi. D'une manière
générale, le tout virtuel a du mal à
s'implanter dans nos sociétés, trop
humaines pour certains. La Suède revient
au liquide après une phase de fanatisme
numérique, Amazone aux Etats-Unis innove
... et réintroduit le liquide comme mode
de paiement. L'on n'arrête plus le
progrès.
Plus
particulièrement, suite à l'instabilité
économique causée par la crise du
coronavirus, un phénomène de résistance
au tout numérique se cristallise en
Russie, au niveau des petits commerces,
malgré une propagande "progressiste"
tout-numérique, grandissant
proportionnellement aux difficultés
objectives d'une transformation souple
de la société.
Ainsi, à
Moscou, certains petits commerces, Ô
crime, Ô fatalité, refusent les modes de
paiement virtuels, par smartphone ou CB.
Deux explications rationnelles : cela
occasionne des coûts supplémentaires
d'équipement, et avec l'expérience de
crash financiers et bancaires, rien de
tel que le bon vieux liquide.
Comment ces
individus osent-ils remettre en cause le
bien-fondé du tout numérique, alors que
l'Etat et ses services doivent
impérativement être entièrement
virtualisés, alors que l'économie doit
être numérisée (même si personne ne sait
très bien à quoi cela correspond), alors
que l'homme lui-même ... Non, je
m'emballe, il doit bien rester réel -
sinon il meurt. Quoique, même les
cadavres sont encore de la matière, bien
trop réels, on ne s'en sort pas avec les
humains. Mais difficile de s'en passer
...
C'est ici que le
Deus ex Machina, j'appelle le
Coronavirus, magnifiquement drapé dans
sa toge toute neuve, fait ici aussi, sur
commande, son apparition pour sauver
l'intrigue de cette tragicomédie. Et la
Banque centrale russe de le placer
au centre de la scène, d'invoquer
l'ombre de ses miasmes et bacilles, de
tracer le chemin qu'il emprunte pour
vous visiter. Pour vous faire trembler
de son ombre indélébile dont billets et
pièces sont infectés, et dont vos
smartphones et CB sont religieusement
épargnés grâce au culte dûment rendu.
Difficile d'interdire purement et
simplement le liquide sans causer des
discriminations. Ce n'est pas (encore)
acceptable. Donc, l'insinuation est
suffisante, l'incitation des banques à
limiter la mise à disposition des
billets dans les distributeurs. Non pas
pour des raisons idéologiques, mais
enfin, pour qui nous prenez-vous?
Non, pour votre bien. Chers amis. Pour
vous sauver malgré vous ... de votre
humanité. Bien trop encombrante,
pesante, physique.
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