CRS contre Pompiers ou quand la Macronie
se réfugie derrière les forces de
l'ordre
Karine Bechet-Golovko
Jeudi 17 octobre 2019
L'opposition des
pompiers et des forces de l'ordre est un
très mauvais signal lancé par le pouvoir
: celui de son impossibilité à résoudre
les crises sociales. Et peu importe
finalement qu'il s'agisse d'une
incapacité idéologique ou d'un manque de
savoir faire politique, le résultat est
le même : la Macronie se cache, peureuse
et prétentieuse, derrière les forces de
l'ordre. Enfonçant la société française
dans la voie dangereuse de la fracture.
Des scènes
surréalistes ont eu lieu hier à Paris
lors de la grande manifestation
nationale des Pompiers en colère. Voir à
ce sujet cet intéressant article paru
dans le journal
Le Monde. Entre 7 000 et 10 000
pompiers, venus de toute la France,
défiler à Paris pour dénoncer des
conditions de travail impossibles. Des
conditions de travail qui illustrent
parfaitement la démission des politiques
depuis longtemps : utilisation des
pompiers pour des missions sociales,
surexploitation et baisse des moyens,
insultés et attaqués dans certains
quartiers ... C'est toute la misère
sociale et la déconsidération du service
public qui sautent au visage.
Les pompiers n'en
peuvent plus, ils sont là pour aider la
population, pour sauver des vies, mais
ils ne ressentent aucune considération
de la part des politiques. Si les
racines du problème, pour être honnête,
sont antérieures ce gouvernement
fantasque, l'incapacité de ces ministres
à prendre la mesure du problème laisse
perplexe.
Castaner a mieux à
faire, finalement son directeur de
cabinet va recevoir des représentants
syndicaux. Pour la forme. Le
résultat sera à la source du
mouvement de colère qui se traduira en
violence :
l’information
circule dans les rangs de la
manifestation qu’une délégation
ministérielle va recevoir les syndicats
l’après-midi même. Beaucoup attendent
alors d’en connaître l’issue mais
regrettent d’ores et déjà que Christophe
Castaner ne soit pas présent. Le
ministre de l’intérieur était, mardi, en
déplacement dans l’Aude. « Ça va
vriller », glisse alors un pompier
dans le cortège, peu rassuré quant à la
tournure prise par la marche. (...) Au
micro, l’un des représentants syndicaux
reçus dans l’après-midi par le directeur
de cabinet de Christophe Castaner dit
n’avoir « rien obtenu ».
Indignation générale dans la foule. « On
revient quand pour manifester ? »,
scande un pompier. « Ils se moquent
de nous », lance un autre. De son
côté, le ministère de l’intérieur
annonce l’organisation de deux réunions
dans le courant du mois de novembre pour
évoquer l’ensemble des revendications.
Les pancartes
portées par les pompiers montrent bien
le manque de confiance qu'ils ont en ce
pouvoir :
Poussés à bout, les
pompiers disjonctent, tentent d'occuper
le périphérique, organisent un sitting
devant l'Assemblée nationale, la
violence monte. Alors que la
manifestation avait commencé
revendicative, mais dans la bonne
humeur, l'écoeurement fait tout basculer
:
Le face à face
pompiers / forces de l'ordre met en
relief toute l'ambiguïté de la
situation. D'une part, face aux
dérapages, les forces de l'ordre,
désinhibées par les ordres de réactions
violentes lancés face aux Gilets Jaunes,
ne semblent plus savoir réagir autrement
que par les grenades de désencerclement
ou les canons à eau, comme s'ils avaient
soit une peur grandissante de ceux qui
sont en face d'eux, soit ont perdu tout
sens des proportions et de la réalité.
D'autre part, ce
rapport de forces inattendu entre des
hommes, qui ont plus l'habitude de
collaborer afin de protéger la
population que de s'affronter, a ouvert
une brèche et l'on entend plusieurs fois
des pompiers s'exclamer "mais
qu'est-ce qu'ils font?", n'en
croyant pas leurs yeux. D'autres,
dépités, leur reprochent une soumission
aveugle :
S'il est
incontestable que le recours
systématique aujourd'hui à la force du
côté policier est contestable, en
revanche il est difficile de leur
demander de ne pas intervenir. Le
jour où la police désobéit massivement,
le système politique tombe. Leur
demander de ne pas intervenir est leur
demander de prendre une décision
politique. Le problème est que cette
Macronie ne cache derrière les forces de
l'ordre, les envoie faire dans la rue,
par la force, ce qu'ils ne peuvent
réaliser eux-mêmes par la négociation.
La rupture profonde du lien social ne
peut être compensée par une réaction
policière démesurée et constante. Les
policiers ne sont pas là pour faire
taire le mécontentement public. Or, ce
régime les utilise justement en ce sens.
Quelles que soient les revendications,
elles ne sont plus acceptables. Car
toute critique est en soi inacceptable.
Comment le néolibéralisme, et la
globalisation qu'il permet, ne
pourraient-ils pas apporter le bonheur
universel ? Vous êtes tolérants
(faibles en Novlangue) et consommateurs,
alors consommez et taisez-vous. De toute
manière, ce régime est en place pour
réaliser ce programme et il le fait. Lui
demander de changer de cours est un
non-sens : pour changer de cours, il
faut changer de système idéologique.
Donc de régime qui le met en place.
Cette situation est
très particulière. Et très rare hors
contexte de conflit ou d'occupation du
territoire, lorsque les forces de
l'ordre sont alors utilisées non pas
pour protéger l'ordre public, mais
l'ordre idéologique contre la population
s'il le faut.
A moins que la
France, d'une certaine manière, ne soit
occupée ?
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