Russie politics
Russie: le tribunal médiatique
remis en
cause par les professionnels
Karine Bechet-Golovko
Jeudi 3 mai 2018
Ces derniers
temps, toutes les accusations
médiatiques portées par la presse et
servant la campagne anti-russe
atlantiste s'écroulent les unes après
les autres dès que les professionnels ne
peuvent plus détourner les yeux. Les
enquêteurs de l'Organisation pour
l'interdiction des armes chimiques
(OIAC) ne cessent de se promener à Douma
en Syrie, en vain. Ils n'ont pu non plus
établir la provenance du produit qui est
censé avoir temporairement touché
les Skripal à Londre. Sans parler du
revirement incroyable dans l'affaire du
dopage russe, dont la "preuve" n'a pas
été considérée comme établie par le
Tribunal arbitral du sport. Le tribunal
médiatique occidental qui demande haut
et fort la tête de la Russie se trouve
mis à mal depuis que les professionnels
mènent l'enquête.
La mise en
scène de Douma, Syrie
A Douma en
Syrie, les
experts de l'OIAC vont retourner une
deuxième fois chercher la moindre trace
de produit chimique. Pour l'instant, ils
reviennent les poches vides. Ce qui
confirme les accusations portées par la
Russie de mise en scène de la soi-disant
attaque chimique, afin de provoquer une
intervention armée non pas contre les
terroristes, mais contre Assad (voir
notre texte ici).
Il est vrai
que l'histoire est portée par les
Casques Blancs, une institution très
intéressante, fondée par des anciens des
services spéciaux britanniques et
co-financées par la très américaine
USAID, l'Arabie Saoudite et l'UK
Conflict Security and Stability Fund:
La disparition
des Skripal
Dans la série
des accusations scabreuses, la palme
d'or revient à l'étrange empoisonnement
de l'ancien espion russe Skripal
retourné par le MI6 et de sa fille, qui
en pleine forme après qu'une cousine
russe ait voulu les voir (voir
notre article ici), ont
mystérieusement ... disparu. Ce que
souligne S. Lavrov, lorsqu'il rappelle
que les Britanniques ne donnent aucune
information sur les Skripal, qu'aucun
contact direct n'a pu être établi. La
Russie soupçonne la Grande-Bretagne
de les avoir fait enlever.
La CIA avait
parlé de les exfiltrer ... et de leur
donner une nouvelle identité. Sont-ils
seulement en vie?
Ici aussi,
alors que les politiques accusent la
Russie d'avoir mené une attaque chimique
sur le territoire d'un Etat étranger,
que la presse occidentale reprend en
choeur sans jamais oser le bon sens, les
policiers britanniques affirment qu'il
leur faudra quelques mois d'enquête, le
laboratoire chimique de Porton Down, qui
menait - ou mène - des expérimentations
chimiques pour l'armée, a déclaré qu'il
était impossible de préciser l'origine
de la substance utilisée, et l'OIAC n'a
pu non plus aller plus loin.
Ici aussi, le
journalisme a condamné avant la justice,
pour que celle-ci soit sommaire, qu'elle
corresponde au temps politique.
Dopage, marche
arrière toute
La dernière
décision du Tribunal arbitral
sportif aura le plus marqué les
revirements concernant les accusations
diverses et variées portées contre la
Russie. Rappelons-nous que toute la
presse, à la suite de la vendetta du
"journaliste" allemand Hajo Seppelt, a
condamné la Russie pour un
dopage d'Etat sur les seuls dires de
Rodchenkov, qui était en charge du
contrôle anti-dopage en Russie, accusé
en Russie, exfiltré aux Etats-Unis avant
son jugement, où il ne cesse de donner
des interviews et de faire publier son
journal intime ... accusant la Russie.
En conséquence de quoi, la Russie a été
privée de JO, l'AMA a fait pression sur
le CIO, même les paralympiques ont été
sanctionnés. Il paraît que les
sportifs russes sur demande du ministre
des Sports prenaient un super cocktail à
base d'alcool et de dopants (ils sont
Russes, ils doivent boire) et le FSB
passait à travers les murs pour changer
leurs urines en urines propres et
garantir ainsi leurs victoires et leur
immunité. C'est en tout cas de
cette manière que très sérieusement les
accusateurs ont expliqué les victoires
russes aux JO de Sotchi et la nécessité
de retirer leurs médailles aux sportifs
russes.
Dans la
grande majorité des cas, le TAS a
réhabilité les sportifs et leur a rendu
leur médaille. Mais cette fois-ci, il
est allé encore plus loin. Peut-être un
sursaut d'orgueil. Ou l'instinct de
survie face à l'absurdité. Dans la
décision elle-même, il a expliqué que la
manière de collecter les preuves était
inacceptable devant un tribunal, que
cela reposait sur du
ouï-dire non vérifié et non établi:
The Panel has
not made a ruling on whether and to what
extent the alleged doping scheme during
the Sochi Games existed and how it
operated (...) the Panel did not
consider it possible to conclude that
the existence of a general doping and
cover-up scheme, even if established,
would inexorably lead to a conclusion
the Athlete committed the ADRVs alleged
by the IOC
Il faut dire
que Rodchenkov et McLaren furent très
mal à l'aise lors des auditions devant
les juges sportifs. C'est une chose de
faire de grandes déclarations devant les
journalistes, c'est autre chose de
frôler le parjure.
Rodchenkov n'a jamais pu affirmer
devant les juges ses accusations:
Au cours de
ses auditions, qui avaient commencé fin
janvier, ce dernier a en effet admis
n'avoir jamais distribué le cocktail
Duchesse, n'avoir jamais vu un athlète
prendre le fameux cocktail, pas plus
qu'avoir été témoin d'instructions
données aux sportifs et entraîneurs d'en
faire usage. Grigory Rodchenkov a
également admis qu'aucun test sur
l'efficacité du cocktail Duchesse
n'avait été fait, et lorsqu'il a été
interrogé sur sa composition exacte, il
a simplement déclaré qu'il avait besoin
de cinq minutes pour s'expliquer... et
s'est abstenu de le faire. (...) S'il a
répété qu'une équipe de «responsables»,
surnommée les «Magiciens», avait
développé une technique pour ouvrir les
flacons d'échantillons conçus pour être
inviolables, il a précisé n'avoir
«jamais vu un flacon être ouvert»,
ajoutant qu'il ne connaissait pas la
méthode employée.
Quant à
McLaren, sa situation n'est pas plus
enviable. Lors des auditions il a
affirmé que son but n'était pas de
démontrer si tel ou tel sportif russe
avait concrètement été dopé, mais s'ils
auraient pu théoriquement tirer un
bénéfice du système de dopage russe (qui
lui non plus n'a pas été démontré), sans
pour autant signifier qu'ils en ont
bénéficié. Sa déclaration est très
claire, son rapport ne prouve
strictement rien (pt. 322 et suivant de
la
décision):
At the outset
of his testimony, Prof. McLaren
expressly emphasised that, insofar as
wrongdoing by individual athletes was
concerned, he was not asked, nor had he
attempted, to determine whether any
individual athlete had committed an
ADRV. Instead, he was “merely asked
to identify those who may have benefited
from the systems” described in the
McLaren Reports. (...)
Prof. McLaren
went on to explain that, in this
respect, if his investigation obtained
evidence that a particular athlete may
have benefited from the scheme, then
“It didn’t mean that they did benefit.
It didn’t mean that they committed [an]
anti-doping rule violation.” Prof.
McLaren’s mandate simply required him to
identify athletes who may have benefited
from the scheme. He was not, however, a
result management authority with respect
to particular athletes.
La réponse de
McLaren concernant l'exclusivité de la
source d'information, Rodchenkov, est
dans la droite ligne des diverses
accusations: il y a eu aussi des
témoins, mais secrets et je ne peux pas
vous dire de qui il s'agit:
During
examination-in-chief by the IOC’s
counsel, Prof. McLaren was asked for his
response to the suggestion that the
McLaren Reports were based only on the
testimony of Dr. Rodchenkov. Prof.
McLaren responded that this was not an
accurate characterisation. In particular,
he explained that he had sought to
corroborate everything that Dr.
Rodchenkov said to him. To this end,
Prof. McLaren had consulted
confidential witnesses, numerous
documents and an array of forensic
scientific testing. With respect to the
confidential witnesses, Prof. McLaren
explained that during the course of his
investigation he had spoken to four
individuals who provided information on
condition that their identities would
remain confidential, in view of the
serious risks they would face if their
cooperation with Prof. McLaren became
known
Chose
également surprenante, McLaren refusait
de suivre une procédure écrite avec les
sportifs russes. Pourquoi? Pour ne pas
laisser de traces? De même, il ne se
souvient plus de qui a authentifié la
base de données compromettante:
Prof. McLaren
had received the data as an image of the
data in Russian language from a laptop.
The authenticity of the data was
examined from that image by an expert
whose name he could not remember.
Sur la
crédibilité de Rodchenkov, McLaren a
déclaré qu'au début, il avait des
doutes. Mais à partir du moment où il
est entré sous protection du FBI, "il ne
pouvait plus dire que la vérité, il
avait trop peur d'être expulsé des
Etats-Unis". Soit, mais le meilleur est
à venir: aucune vérification sérieuse,
tel n'était pas le but. Voici ses
déclarations:
Prof. McLaren
was cross-examined by the Sochi
Appellants’ counsel. During the course
of that cross-examination, Prof. McLaren
stated, among other things, that: · He
had not specifically checked whether or
not each of the athletes listed on the
Duchess List had, in fact, gone on to
compete at the Sochi Games. · He did not
know whether any of the individual
athletes named on the Duchess List had,
in fact, competed after consuming the
Duchess Cocktail. · He had not
instructed any experts to analyse the
likely composition, dosage and effects
of the Duchess Cocktail. · He confirmed
that Dr. Rodchenkov’s testimony was that
“most” of the “protected athletes” were
on doping programmes. Prof. McLaren
considered it “reasonable to assume”,
therefore, that Dr. Rodchenkov’s
testimony was that not all “protected
athletes” were on doping programmes.
Prof. McLaren was unable to identify
which of the athletes were, and which
were not, on doping programmes. · He had
not attempted to contact any of the
Russian individuals, such as Mr.
Kudryavtsev or Mr. Yuri Chizhov, who
were named in the McLaren Reports as
having been integral participants in the
doping and cover-up scheme described in
the reports. CAS 2017/A/5379 Alexander
Legkov v. International Olympic
Committee (IOC) – Page 70 · In view of
his mandate, he had not investigated
whether any of the individual Sochi
Appellants had failed to comply with
doping control procedures. Nor had he
spoken to any of the Sochi Appellants
with a view to obtaining information
about potential ADRVs.
L'on pourrait
continuer longtemps. Evidemment, ces
déclarations n'ont pas convaincu les
juges sportifs, plus exigeants que les
journalistes et manifestement plus
concernés par leur réputation.
Donc si l'on
résume. En Syrie, aucune attaque
chimique soutenue par Assad à Douma
n'est prouvée, mais des preuves de sa
mise en scène ont été apportées. Les
Skripal ont disparu après être sortis de
l'hôpital en pleine forme et personne ne
sait ce qui leur est arrivé. Le TAS
remet en cause toute "l'enquête" menée
par McLaren suite aux déclarations du
journaliste Zeppelt, qui a manifestement
rempli sa commande.
Je suis
curieuse de savoir si un jour des
excuses seront présentées à la Russie
(question rhétorique).
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