Opinion
Les financiers de Daech
Kamel Moulfi
Lundi 15 septembre 2014
Incroyable mais vrai : la France est le
principal bailleur de fonds du groupe
terroriste Al-Qaïda au Maghreb
islamique, estime le quotidien Le
Figaro qui rapporte l’accusation
portée contre ce pays par Obama
«glissée» dans un entretien qu’il vient
d’accorder au New York Times.
«Les Français payent des rançons aux
terroristes», assure le président
américain qui ne croit pas François
Hollande quand il affirme le contraire.
Comme par hasard, cette déclaration est
tombée au moment où le chef d'état-major
de l'armée française se trouvait à
Alger. Les hôtes algériens de l'officier
supérieur français font-ils le même
reproche à leur invité dont le pays
combat le terrorisme d'une main et le
nourrit de l'autre ? Selon le Figaro,
la France a même été gratifiée par le
New York Times du titre peu
glorieux de «championne» du paiement des
rançons à Al-Qaïda. Le quotidien
américain, visiblement très bien
informé, fait le compte de ce que la
France a donné aux terroristes en
échange de la libération de ses
ressortissants qui avaient été pris en
otages : au total 67,6 millions de
dollars depuis 2008, plus que la moitié
des 125 millions de dollars que les
enlèvements auraient rapportés aux
groupes terroristes. Il y a plus que de
l’inconséquence dans ce comportement. Et
en France, la classe politique fait
comme si de rien n’était. Les députés
français vont débattre aujourd’hui à
l'Assemblée nationale d’un «projet de
loi renforçant la lutte contre le
terrorisme», qui, dit-on, fait
consensus. Y aura-t-il un député pour
proposer que ce projet tienne compte de
la résolution votée par l’ONU en février
dernier demandant aux Etats de ne pas
verser de rançon à des groupes
terroristes pour libérer des otages ?
C’est à ne rien comprendre : le projet
de loi veut «conjurer la menace
représentée par les filières de
djihadistes qui impliquent des
Français», mais ces mêmes filières sont
financées par un budget alimenté par la
France à travers le paiement de rançons.
Le problème est simple : quand un groupe
terroriste a besoin d’argent pour
engager un djihadiste français, il prend
en otage un autre français puis le
libère en échange du paiement d’une
rançon qu’il utilisera pour ce
recrutement. En paroles, la France dit
combattre Daech et, en cachette, finance
ce groupe terroriste. C’est tellement
simple qu’il faut se poser la question
s’il n’y a pas autre chose ignorée par
les observateurs crédules.
K. M.
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