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RussEurope

La candidature de Valls

Jacques Sapir


© Jacques Sapir

Mardi 6 décembre 2016

J’ai donné hier à Russia Today une interview sur la candidature de Manuel Valls, dont je publie ici la version intégrale, avec des ajouts fait sur le texte, trop longue pour être reprise par ce média. Le texte initial de l’interview peut être consulté ici

RT France : Pensez-vous que Manuel Valls soit un bon candidat pour remporter effectivement la primaire ?

Jacques Sapir : Tout d’abord, il faut considérer que Manuel Valls est un candidat qui arrive usé à la primaire. Il eut été logique qu’il démissionne à l’été 2015 s’il avait voulu sérieusement se présenter à l’élection présidentielle de 2017. Cela lui aurait donné de la distance par rapport à François Hollande, et lui aurait permis de mieux affirmer la spécificité de son projet politique.

Il arrive donc usé, parce qu’il est au gouvernement depuis maintenant trois ans et qu’il a d’une certaine manière assumé les différentes décisions prises par François Hollande, y compris celles qui sont les plus contestées – comme la fameuse Loi Travail El Khomri – qu’il a dû faire passer avec une disposition particulière de la Constitution française, ce qu’on appelle l’article 49.3 et qui n’est autre qu’un moyen de menacer les députés d’une dissolution au cas où ils refuseraient de voter la loi telle que proposée par le gouvernement. Cette disposition avait été introduite pour permettre le vote d’une loi de finances qui soit cohérente. Il a donc ici détourné, avec l’assentiment du Président de la République bien sûr, une importante disposition constitutionnelle et par là même contribué à affaiblir la Constitution.

Il arrive ainsi usé, et avec une image détestable tant à gauche qu’à droite ; il est devenu en quelques années la caricature de ce qu’il était en 2011-2012, un clone de Nicolas Sarkozy, les colères en plus et le « bling-bling » en moins. Néanmoins, on sait que les personnes qui se déplaceront à la primaire ne constituent pas exactement l’électorat du parti – ce fut d’ailleurs la même chose pour la primaire de la droite. Il faut considérer que la droite a fait, sur la personne de Nicolas Sarkozy, 16,8 millions de voix au 2ème tour de l’élection présidentielle de 2012, et 9,7 millions au 1er tour. Or, on sait qu’il y eu 4,1 millions de gens qui se sont déplacés à la primaire, soit moins de 25% des électeurs de Nicolas Sarkozy au 2ème tour. Ce sera donc la même chose pour le Parti socialiste. Votera donc en priorité le noyau dur des militants socialistes, et sans doute de 15% à 20% d’électeur de droite qui chercheront à perturber le processus en éliminant certains candidats. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il faut être très réservé sur le caractère prétendument « démocratique » du mécanisme des primaires. Dans ces conditions, effectivement, Manuel Valls a ses chances. Il devra à la fois essayer de combiner sa loyauté supposée à François Hollande, et faire oublier les basses manœuvres dont il s’est rendu coupable ces derniers jours, parce qu’elle lui donne une forme de légitimité à l’intérieur de l’électorat socialiste, mais aussi marquer sa différence de manière crédible par rapport à la politique de François Hollande. Et cela risque de ne pas être du tout facile pour lui.

RT France : Pourquoi Manuel Valls se présente-t-il, s’il est considéré comme celui qui s’est battu pour toutes les décisions contestées de François Hollande ?

J.S. : Il y a plusieurs réponses possibles, qui peuvent tout à fait s’additionner. La première, c’est tout simplement l’ambition. On peut penser que, dans le système français, le président de la République agit comme un miroir aux alouettes : il fait perdre le sens de la réalité à toute une série des personnalités politiques. Or, on le sait et on le voit, Manuel Valls est dévoré d’une ambition débordante. Deuxième explication, plus sérieuse : si Manuel Valls veut espérer pouvoir contrôler le Parti socialiste et être dans une bonne position pour se présenter en 2022, il doit se présenter à cette élection présidentielle, même s’il n’a, en réalité, que très peu de chances d’être élu. Mais il doit se présenter et surtout tenter de faire un score au premier tour qui soit supérieur au score de Jean-Luc Mélenchon qui sera l’adversaire tout particulier d’un candidat socialiste, et ce quel qu’il soit. Parce que, aujourd’hui, Jean-Luc Mélenchon se situe plus à gauche que le Parti socialiste et qu’il est en mesure d’attirer une partie des voix des électeurs traditionnels de la gauche. On voit très bien la grande crainte des socialistes d’être non seulement exclus du deuxième tour, mais en plus de terminer quatrième ou cinquième, devancés par Jean-Luc Mélenchon ou peut-être Emmanuel Macron. C’est d’ailleurs précisément cette crainte qui a le plus probablement fait renoncer François Hollande à se représenter. Les tentatives désespérées de M. Cambadélis, le dirigeant du parti « socialiste » pour convaincre et Mélenchon et Macron de se présenter à la primaire du P « S » témoignent justement de cette crainte. Mais, tant Mélenchon que Macron ont justement analysé le mécanisme des primaires comme un mécanisme d’élimination des candidats qui ne plaisent pas à la fraction de l’électorat qui est la plus proche de l’appareil bureaucratique du parti. Ils ne tireraient aucun avantage, et n’ont aucun intérêt, à se plier à ce jeu faussé de la primaire.

RT France : Considérez-vous toujours Emmanuel Macron comme une candidature qui a des chances de se qualifier au deuxième tour ?

J.S. : Actuellement il n’a quasiment aucune chance. Mais, pour lui aussi, il s’agit moins de se qualifier au 2ème tour que de construire un rapport de force pour 2022. En effet, Emmanuel Macron peut-être à la fois contesté sur sa droite si François Bayrou se présente, et contesté sur sa gauche si Manuel Valls se présente, car on voit très bien que le possible programme de ce dernier sera assez peu différent en réalité de celui d’Emmanuel Macron. D’ailleurs, n’oublions pas que les deux hommes ont appartenu au même gouvernement, et qu’ils ont défendu la même ligne politique. Ce sont donc des frères jumeaux, et François Bayrou apparaît alors comme un cousin germain…

En réalité, si l’on veut se qualifier pour le deuxième tour, il faudra faire plus de 22-24%, puisque c’est le niveau auquel on place désormais Marine Le Pen et le Front national. On peut d’ailleurs penser que cela sous-estime probablement le score Marine le Pen. Actuellement, que ce soit Emmanuel Macron, qui est donné par les instituts de sondage entre 14 et 16%, ou que ce soit Manuel Valls, lui même donné autour de 12%, on est loin du compte. Bien entendu, nous sommes encore loin de l’élection et bien des choses peuvent changer. Mais, le vote global de gauche se situe autour de 33-35%. Comme on assiste à une percée de Jean-Luc Mélenchon, qui est assuré de faire au moins 10% et certainement plus, on voit que l’espace tend à se réduire dramatiquement pour les deux autres candidats issus du gouvernement.

En fait, et comme je l’indiquais plus haut, on voit bien que la bataille n’est pas tant pour le deuxième tour que de nombreux socialistes considèrent comme d’ores et déjà perdu pour leurs candidats, que pour savoir qui prendra l’ascendant à gauche : Manuel Valls, Emmanuel Macron ou Jean-Luc Mélenchon ? Le cas de Jean-Luc Mélenchon est, à cet égard, assez exemplaire. Il s’est toujours positionné en critique de l’action de François Hollande et de Manuel Valls. Il en tire aujourd’hui les dividendes et il capitalise sur la colère et le dégout qu’inspirent à de nombreux électeurs la politique du gouvernement. Il est en train de monter très vite dans les intentions de vote. Aujourd’hui entre 12 et 14% et pourrait monter à 18-19% suivant la personne qui sortira vainqueur de la primaire du partie « socialiste ».

RT France : Pensez-vous que Jean-Luc Mélenchon puisse être un candidat pour rassembler la gauche ?

J.S. : Tout cela dépend beaucoup du candidat que choisiront les socialistes. Si les socialistes choisissent Manuel Valls, on peut penser que cela accélèrera le processus de « Pasokisation » du Parti « Socialiste », qui pourrait le vider, plus ou moins rapidement, de sa substance et de ses électeurs. Il n’est pas du tout impossible qu’une partie des électeurs du Parti socialiste se rallient à Jean-Luc Mélenchon, qui a un programme beaucoup plus cohérent que ceux de ses adversaires à gauche, et qui n’apparaît pas lié, on pourrait même dire compromis, au gouvernement actuel. Le seul avantage comparatif de Manuel Valls réside dans son attitude très ferme sur les questions de sécurité publique. Mais, c’est un avantage dans le cadre d’une élection, et bien moins dans le cadre de la « primaire » du P « S », car l’on sait que les électeurs potentiels ont tendance à sous-estimer justement les questions de sécurité publique.

Si les socialistes choisissent Arnaud Montebourg, Jean-Luc Mélenchon pourrait avoir un véritable problème de positionnement par rapport à lui. Montebourg, avec ses thèses sur le « made in France » incarne une forme de protectionnisme dans lequel peut se reconnaître Jean-Luc Mélenchon. Mais, d’un autre côté, ce dernier a évolué, que ce soit sur l’euro (avec le fameux « plan B » dont il parle de plus en plus) mais aussi sur l’Union européenne, alors qu’Arnaud Montebourg est quant à lui resté coincé sur les positions qu’il avait au gouvernement. De ce point de vue, la cohérence est certainement du côté de Mélenchon.

Il faut cependant reconnaître que dans l’hypothèse ou Arnaud Montebourg serait désigné lors de la primaire du P « S », cela avantagerait Emmanuel Macron. Ce dernier pourrait faire le plus grand nombre de voix parce qu’on voit bien que les électeurs de centre-gauche quitteraient Arnaud Montebourg pour se rallier à lui alors qu’Arnaud Montebourg pourrait séduire des électeurs beaucoup plus ancrés dans la gauche du Parti socialiste. Cependant, Emmanuel Macron devra se dégager, lui aussi, de l’ombre porté par François Hollande et sa politique. Car même Emmanuel Macron, qui a certes, démissionné du gouvernement, a été pendant deux ans ministre dans un gouvernement Valls, et sous François Hollande. Il a avalisé nombre de réformes les plus contestables et les plus contestées de François Hollande, quand il ne les a pas inspirées.

Jean-Luc Mélenchon, quant à lui, apparaît comme l’un des grands bénéficiaires potentiel de la situation actuelle. Il peut se targuer de la plus grande cohérence de son programme. La multiplication des connexions sur la chaîne Youtube mise en place par Mélenchon est la preuve qu’un mouvement de masse est en train de naître et de se développer en faveur de ce candidat. De même, le fait que la base du PCF ait désavoué son appareil, et voté le soutien à cette candidature, est en soi un phénomène significatif. Il ne peut que profiter du discrédit qui entoure aujourd’hui le parti « socialiste » et ses chefs.

Aujourd’hui, le «non» au référendum italien est en train de changer beaucoup de choses dans la vie politique en Europe et en particulier en France. On devine que l’on s’achemine vers une nouvelle crise de la zone euro, crise qui prendrait naissance dans les difficultés des banques italiennes et qui pourrait se généraliser. On voit que, dans ce contexte, il y a deux candidats qui vont en profiter massivement : le premier, c’est bien sûr Jean-Luc Mélenchon, comme on l’a déjà dit. Et le deuxième, c’est Marine Le Pen, qui va pouvoir développer son programme de rupture sur la question de l’euro et de l’Union européenne, tout en s’appuyant sur les craintes qu’inspirent le projet économique et social de François Fillon, un projet dont on mesurera d’ici le mois d’avril tous les effets néfastes, mais aussi à quel point il ne correspond pas à la situation actuelle.

 

 

   

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Source: RussEurope
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